Éva Besnyő (1910-2003) photographe néerlandaise d'origine hongroise née à Budapest. Elle arrive à Berlin, tout juste âgée de vingt ans, avec en poche un certificat attestant sa formation dans le studio de Jozsef Pesci à Budapest, elle prend deux décisions majeures pour sa vie, la première, faire de la photographie son métier, et la seconde, de quitter définitivement la Hongrie fasciste. Elle découvre à Berlin une métropole démocratique dans son mode de vie et très ouverte sur les expériences artistiques. Elle trouve du travail auprès du photographe de presse Peter Weller, et sillonne la ville jour après jour munie de son appareil photo, photographiant les chantiers de construction, près du lac Wannsee, le zoo et les stades.
Son sens politique très développé la pousse à quitter Berlin à l’automne 1932 pour gagner Amsterdam. Soutenue par le cercle qui gravite autour de la peintre Charley Toorop, du cinéaste Joris Ivens et du designer Gerrit Rietveld, Eva épouse entre-temps le caméraman John Fernhout, et se fait bientôt connaître du grand public. En 1933, une exposition personnelle organisée par la galerie Van Liert, la fait connaitre, sa renommée aux Pays-Bas est alors immédiate. Quelques années plus tard, elle consolide sa réputation avec ses photographies d’architecture, qui traduisent en une « Nouvelle Vision » l’idée du « Nouveau Bâtiment » fonctionnaliste.
Dans la seconde moitié des années 1930, Eva s’engage très activement dans la politique par le biais de ses activités culturelles, en participant notamment, en 1936, à l’exposition antiolympiades « D-O-O-D » (De Olympiade onder Diktatur). L’année suivante, elle est commissaire de l’exposition internationale « Foto ’37 » qui se tient au Stedelijk Museum à Amsterdam. L’invasion des troupes allemandes, en mai 1940, l’oblige, en tant que juive, à vivre dans la clandestinité. Après la guerre, elle est séduite par une vision nouvelle, celle du monde façonnée par l’humanisme, ses photographies sont alors stylistiquement décisives dans le développement du néoréalisme, trouvent leur place dans l’exposition « Family of Man » de 1955, organisée au MoMA de New York par Edward Steichen.
Mère de deux enfants, elle vit de façon profonde et très personnelle le conflit classique pour les femmes, du choix entre l’éducation de ses enfants et la pratique de sa profession, dans les années 1970, elle s’engage dans le mouvement féministe « Dolle Mina », réclamant l’égalité des droits, elle couvre alors en images, des manifestations de rue.
Photographe moins connue que ses compatriotes Robert Capa et André Kertész, elle est une grande dame de la photographie néerlandaise, Eva Besnyö est de ces femmes qui trouvent dans la photographie non seulement un métier mais aussi une forme d’émancipation, elle fait partie de ces artistes d’avant-garde, émigrés, qui choisirent l’Europe comme terrain de jeu et de travail.
Sa photographie oscille entre documentation sociale et expérimentation esthétique. Elle va à la rencontre des gens, immortalise le portrait de ceux qui sont retranchés dans la pauvreté et la misère de tous les jours, elle effectue une dénonciation sociale par l’image. La Nouvelle objectivité, courant dans lequel elle s'associe dès le début de sa carrière qui l’entraîne à envisager une photographie d’un point de vue social. Elle parcourt les villes d’Europe et fige sur le papier glacé des scènes de la vie, son travail n’est jamais éloigné de ses convictions politiques.