László Moholy-Nagy (1895-1946) photographe Hongrois, né László Weisz à Bácsborsód, dans l'Empire austro-hongrois, issu d'une famille juive hongroise, très jeune en 1905, il déménage à Mohol, puis à Szeged. Suite à l’abandon de la famille par son père, en 1910 il est adopté avec ses frères par son grand-père maternel, Gusztáv Nagy qui leurs donne son propre patronyme. Après avoir obtenu son baccalauréat, il étudie le droit à l'Université de Budapest et fait ses premières armes dans le journal local, le « Szegedi Napló ».
En 1914, il est mobilisé dans l'armée austro-hongroise. Blessé en 1917, durant sa convalescence à l’hôpital d’Odessa, il dessine, de retour à Budapest, László décide de se consacrer à la peinture.
En 1919, il part pour Vienne ou il rencontre le groupe d'avant-garde révolutionnaire « MA » (Aujourd'hui) dirigé par le peintre et écrivain Lajos Kassák. Il profite après avoir quitté sa Hongrie natale, de compléter son patronyme par le nom du village de son grand-père, Mohol.
En 1920, il se rend à Berlin et fait la connaissance des Dadaïstes, Raoul Hausmann, Hannah Höch et Kurt Schwitters, en étant le correspondant de la revue MA, il découvre le constructivisme, le suprématisme incarné par les œuvres de Kasimir Malevitch et rencontre la photographe Lucia Schültz, qui devient son épouse. László réalise l'un de ses premiers tableaux « Composition 19 ».
En 1922, László effectue sa première exposition personnelle à la galerie berlinoise « Der Sturm ». Il rencontre l’architecte et designer allemand, Walter Gropius, fondateur du « Bauhaus ». A Düsseldorf, lors du premier « Congrès des artistes progressistes », il fait la connaissance des peintres, El Lissitzky et Theo van Doesburg suite à leur publication dans le « De Stilj » d’un article théorique sur les photogrammes, intitulé « Production reproduction ». C’est à partir de cet instant qu’il se plonge dans les réalisations de photogrammes.
Il reproche au cinéma abstrait de « privilégier les développements formels au détriment de la représentation du mouvement » et explique sa conception qui « vise à utiliser la lumière comme facteur formel primaire, qui crée l'espace et le mouvement, et élimine la perspective centrale de la photographie ».
Pour la revue américaine, « Broom » reproduit quatre photogrammes de Moholy-Nagy ainsi que quatre autres réalisés par Man Ray. Les photomontages des dadaïstes lui inspirent une nouvelle variante qu'il appelle « Fotoplastik ».
En 1923, sur l’invitation de Walter Gropius, directeur du Bauhaus, il dirige les cours préliminaires et l’atelier du métal. Les toiles de cette période se présentent comme des organisations d’éléments géométriques, dans un espace tridimensionnel. La Galerie « Der Sturm » de nouveau, organise sa seconde exposition personnelle où Moholy-Nagy présente ses « Telephonbilder » (Tableaux téléphonés), œuvres sur porcelaine émaillée dont les couleurs observent de subtiles variations en fonction de l'agrandissement ou de la réduction de la composition.
En 1925, il publie un ouvrage intitulé « Malerei. Fotografie. Film » (Peinture. Photographie. Film), dans lequel il nomme photogramme, « photos sans appareil ». Il approfondie ses réflexions sur la typographie, la photographie et la peinture, réalise des vues plongeantes et ascendantes au Leica.
En 1928, il quitte le Bauhaus, fonde un atelier de graphisme et se consacre à la réalisation des décors de l’Opéra National de Berlin, au théâtre de Picastor.
En 1933, l’arrivée des nazis au pouvoir, le contraint à l'exil, il rejoint les Pays Bas, puis Londres ou il réalise le design d’affiches et de vitrines jusqu’en 1937, date à laquelle il s’embarque pour les Etats Unis ou Walter Gropius lui propose la direction du New Bauhaus de Chicago, qui ferme pour cause financière très rapidement en 1938. Moholy-Nagy fonde la « School of Design » qui devient en 1944 « Institute of Design », c’est cette même année, deux ans avant sa mort, qu’il obtient la nationalité américaine.
Ce Hongrois, militant radical de la modernité et enseignant au Bauhaus, croit dur comme fer que l'art pouvait construire un monde nouveau, où l'homme et la machine seraient réconciliés. Porté par cet optimisme, il se laisse laissé porter par l'effervescence du dadaïsme, par la rigueur géométrique du constructivisme, par le suprématisme. Il touche à toutes les techniques, photographie, photogramme, photomontage, peinture, design, film.
Passionné par les nouvelles techniques et toujours à la recherche de l’innovation, il devient l’un des plus grands photographes de son époque, réalisant de nombreux photogrammes et photomontages. Il est considéré comme le premier artiste de production multimédia, toujours en phase avec l'idée de modernité.
Son dynamisme, son inventivité et la diversité de ses intérêts personnels, suggère chez lui une infatigable vitalité, un besoin d’aller toujours plus loin, aux frontières de l’irréelle, il module la lumière comme son contemporain Man Ray, plaçant des objets du quotidien sur du papier photosensible, mais utilise aussi son appareil pour produire des photos de rue, dynamisant la composition par d’astucieux cadrage inattendus.
Pour László la photographie n’est pas un medium spécifique, mais un moyen très général de l’expression artistique réformé. Il n’a guère de connaissances techniques de la photographie, il se définît avant tout comme peintre. Son credo artistique fait entrer la photographie dans un cadre strict de son objectif pédagogique, celui de la « Nouvelle Vision ».
Aquarelliste et dessinateur autodidacte sous l'influence du suprématisme, il n'aborde initialement la photographie que sous l'angle de la collection d'images. Acquis au modernisme, proche de Dada, il pratique le photomontage et pense à une Nouvelle Vision comme pédagogie du voir dans un monde subordonné à la technologie. Avec ses premiers photogrammes, il partage la même vision et les procédés que Christian Schad et sa schadographie ainsi que Man Ray et ses rayogrammes, il les théorise comme enregistrements schématiques du mouvement de la lumière. Le vocabulaire formel suprématiste et constructiviste continue de s'exprimer dans ces images qui sont produites sans aucun appareil. Le mouvement électrique et la lumière artificielle son au cœur de son travail.
Il crée avec la lumière. « Je suis convaincu qu'un nouvel art de la lumière est en train de naître. » Moholy-Nagy
Les photos noir et blanc aux cadrages vertigineux de Moholy-Nagy n'ont jamais cessé de glorifier la photographie, de repousser les limites de la représentation du monde, « le clair-obscur se substituant au pigment ». Pour Moholy-Nagy, les contre-plongées, les constructions obliques, les jeux sur le négatif créent des visions inaccessibles à l'œil humain. Les scènes les plus simples frôlent soudain l'abstraction, un jardin déblayé par la neige est métamorphosé en un puzzle de formes géométriques. Avec les photogrammes, il trouve le moyen d’utiliser la lumière de manière autonome, comme la couleur en peinture ou le son en musique, il pose des objets trouvés, leurres, tubes, ressorts sur une plaque sensible pour faire naitre des formes mystérieuses, pures inventions formelles faites de transparences et d'opacités.
Dans toute son œuvre, il fait de la lumière le pivot central. Il créé une machine, le modulateur, pour produire des formes lumineuses projetées sur un mur. Ses photomontages, qu'il nomme « photoplastiques », de petits personnages sont parfois en équilibre sur des lignes qui ressemblent à des rayons de soleil.
L'Amérique est pour lui une nouvelle terre d'accueil et il prend les rênes d'un nouveau Bauhaus implanté à Chicago. Mué en Institute of Design, son enseignement rayonne sur des photographes tels qu'Aaron Siskind et Harry Callahan.
« Les conventions, les règles définies du comment faire sont l’ennemi de la photographie. » László Moholy-Nagy
Barque Négatif, 1925