Ferdinando Scianna (1943) photographe italien, né à Bagheria en Sicile, issu d'une famille modeste, il s'intéresse très tôt à la photographie, à l'age de seize ans, recevant de la part de son père, un appareil photo.
Au début des années 1960, après le lycée, tout en suivant des cours de lettres, de philosophie et d’histoire de l’art à l’université de Palerme, il commence la photographie, en effectuant de manière systématique de nombreux images de sa Sicile, de son peuple et des fêtes.
En 1963, au club culturel de Bagheria, il réalise sa première exposition de photographies, consacrée aux fêtes populaires, il y rencontre l'écrivain sicilien Leonardo Sciascia, d'ou naît une amitié qui est fondamentale pour la carrière des deux artistes.
En 1965, en collaboration avec Leonardo, il publie son premier ouvrage, intitulé, « Feste religioso in Scicilia », qui documente, dans une esthétique proche du néoréalisme italien, la ferveur des manifestations religieuses en Sicile, un an plus tard, en 1966, son livre est distingué par une mention au Prix Nadar.
En 1966, il s’installe à Milan et travaille en tant que reporter pour « l’Europo », il en devient correspondant à Paris pendant dix ans. Il rédige en parallèle des articles sur la politique pour le « Monde Diplomatique » ainsi que sur la littérature et la photographie pour la « Quinzaine littéraire ».
En 1977, dans la même année, il publie deux nouveaux ouvrages, les « Siciliens » en France et « La Villa dei Mostri » en Italie, consacré à la légendaire Villa Palagonia de sa ville natale.
En 1982, il fait la connaissance d’Henri Cartier-Bresson, et intègre Magnum Photos, en étant le premier photographe italien à entrer au sein de l'agence.
En 1987, il est sollicité par la maison Dolce et Gabanna, encore inconnu, il s’essaye à la photographie de mode en réalisant ses clichés dans les rues de Sicile, en compagnie de son tout premier modèle, la mannequin hollandaise Marpessa, qu’il continue par la suite de photographier au quatre coins du monde. De cette rencontre naît le livre, « Marpessa », témoin de la passion qui l’anime dans l’exercice de la mise en scène, tout autant que dans le reportage.
A la fin des années 1980, il alterne les reportages à la photographie de mode, en 1989, devient membre à part entière chez Magnum Photos.
En 1995, il s’intéresse de nouveau aux rituels religieux avec « Viaggio » et « Lourdes ».
En 1997, il publie un ouvrage sur le thème des dormeurs, avec un titre inspiré du monologue de Hamlet « Dormire, forse sognare ».
En 1999, il publie deux ouvrages, un recueil de portraits de Jorge Luis Borges et un livre de photographies sur les enfants à travers le monde, « Niños del Mundo ».
En 2002, il consacre un album sur sa ville natale, « Bagheria : Quelli di Bagheria », en reconstituant le décor et l'atmosphère de sa jeunesse à travers une enquête sur la mémoire individuelle et collective.
En 2009, la Maison Européenne de la photographie de Paris, lui consacre une exposition d ‘anthologie.
De 2018 à 2022, en Italie une exposition lui rend hommage, intitulé, « Ferdinando Scianna : viaggio, racconto, memoria », présentée à Forli, Palerme, Venise et Milan.
Ancien étudiant en lettres et philosophie, féru de littérature, il attache un intérêt particulier au livre, support naturel et privilégié de ses photographies, qu’il aime accompagner d’un texte de l’un de ses amis écrivains. Lui-même évite toujours pudiquement d’expliquer ses images, préférant paraphraser ceux qui, avec leurs mots, l’ accompagne dans son cheminement. La photographie est, pour lui, une façon d’être dans la vie. Il inaugure un chemin de photoreportage inédit, entre la photo de mode et la photo néoréaliste, ses clichés sont magnétiques, racontent avec la même rigueur la Sicile d'avant et celle d'aujourd'hui, le monde rural andin et la banlieue new-yorkaise.
« La photographie est une profession, une façon de vivre, le filtre à travers lequel nous entrons en relation le monde et moi même, c’est essayer de se comprendre mutuellement. » Ferdinando Scianna
Il est un ethnologue, le gardien d'un instant présent et positionne l'humain au cœur de son travail, dans un un monde tel qu'il le voit, sans artifices ni filtres, c'est une émotion forte et pleine d'authenticité. Il porte un regard tendre et très incisif sur ce qui l'entoure, il observe longuement un geste, qui est, soit unique et fugitif, soit répétitif qui devient pour lui intéressant à mémoriser.
Son travail, révèle une tendresse et un amour réel pour le sexe féminin, et ce sentiment ne transparait nulle part mieux que dans ses photographies de mode. Jamais figés, ses modèles sont placés dans des situations vraisemblables, en étant toujours sensuels et désirables.
« Vous pouvez mentir avec des photos, vous pouvez même dire la vérité. L'image veut que la photographie soit un miroir du monde mais je pense que le monde est le miroir du photographe. » Ferdinando Scianna
Ses images sont à la fois lumineuses et sombres, reflétant l’ambivalence qui caractérise son rapport au territoire où il est né, mélange d’attachement vibrant et de détachement lucide.
Avec ses noirs et blancs qui marquent des contrastes forts, accentués par des jeux d’ombre et de lumière, il arrête le temps, tout est suspendus devant un mouvement, un sourire, il parvient avec ces effets à créer une sorte de nostalgie et de mélancolie, comme si ces rites viennent à disparaître.
Dans chacune de ses images, il organise la cadrage dans une géométrie instinctive, il soigne et orchestre tout les éléments, jusqu'à l’arrière plan.
« Une photographie n'est pas créée par un photographe. Il ouvre simplement une petite fenêtre et la capture. Le monde s'écrit alors sur la pellicule. L'acte du photographe est plus proche de la lecture que de l'écriture. Il est le lecteur du monde. » Ferdinando Scianna