Delacroix au Louvre

Eugène Delacroix

Eugène Delacroix est un peintre français né le 26 avril 1798 à Charenton-Saint-Maurice et mort le 13 août 1863 à Paris. Dans la peinture française du XIXᵉ siècle, il est considéré comme le principal représentant du romantisme, dont la vigueur correspond à l'étendue de sa carrière.

Eugène Delacroix est né le 26 avril 1798, tout près de Paris, à Charenton-Saint-Maurice. Sa maison natale est aujourd’hui la médiathèque de la Ville de Saint-Maurice dans l’actuel Val-de-Marne.

Quand il naît, son père, Charles Delacroix, occupe des fonctions importantes comme ministre des Affaires étrangères, puis comme ambassadeur en Hollande. Il est ainsi ensuite nommé préfet à Marseille, puis à Bordeaux, où il meurt alors que le jeune Eugène est âgé de six ans. Sa mère, Victoire Delacroix, est la fille d’un des plus grands ébénistes de son temps, Jean-François Oeben, au service du roi Louis XV.Eugène est le petit dernier d’une famille de quatre enfants ; quand il naît ses frères Charles et Henri, sa sœur Henriette, dont le peintre David a fait le portrait, sont déjà grands. La famille Delacroix a servi la Révolution, puis l’Empire. L’enfance de Delacroix est choyée mais fragile. Le petit garçon a des ennuis de santé récurrents. A la mort de son père, sa mère et lui s’installent à Paris, rue de l’Université. Le jeune Eugène fréquente le lycée Impérial, l’actuel lycée Louis-le-Grand. Il y noue des amitiés fidèles, qui l’ont accompagné toute sa vie. Il a le goût de l’étude, et déjà celui du dessin et de la lecture. La mort de sa mère, en 1814, le laisse désemparé et seul, malgré la présence de ses aînés, Charles et Henriette. Grâce à l’appui de son oncle, le peintre Henri-François Riesener, Eugène Delacroix entre en 1815 dans l’atelier du peintre Pierre-Narcisse Guérin. C’est alors un des plus grands ateliers de Paris, fréquenté par de nombreux artistes. Peintre d’histoire, très sensible à l’art théâtral de son temps, Guérin est très apprécié. Malgré son attention à ses élèves, il ne reconnaît pas le talent du jeune Delacroix. La protection de Théodore Géricault, déjà célèbre pour les tableaux montrés au Salon de 1812 puis à celui de 1814, est précieuse pour le jeune homme. Delacroix pose même pour le grand tableau de son aîné, Le Radeau de la Méduse (1819, musée du Louvre). Au Salon de 1822, il n’a alors que vingt-quatre ans, Delacroix présente au Salon une première grande toile, inspirée de l’histoire littéraire, Dante et Virgile aux Enfers (musée du Louvre). Cette œuvre le fait immédiatement remarquer de la critique. Il incarne, très vite, une nouvelle génération d’artistes, que l’on désigne comme romantique, terme inspiré de la littérature. Delacroix est contemporain de Victor Hugo, d’Alexandre Dumas, d’Hector Berlioz, d’Alfred de Musset. Comme eux, il a le désir de suivre sa manière propre, de renouveler la conception artistique. Comme eux, il est aussi un grand connaisseur de l’art des maîtres anciens. Au Louvre, qui a ouvert en 1793, Delacroix découvre et admire les œuvres de Raphaël, de Michel-Ange, de Titien, de Rubens, de Poussin.Il présente au Salon de 1824 un grand tableau, inspiré des événements de la guerre d’Indépendance de la Grèce, Scène des Massacres de Scio (musée du Louvre). En 1827, Delacroix expose, avec plusieurs autres toiles, une magistrale Mort de Sardanapale (musée du Louvre). Liée à une pièce du poète anglais Lord Byron, l’œuvre montre le souverain oriental assis en haut d’un bûcher, entouré de ses chevaux, de ses richesses, de ses femmes, dont il a souhaité qu’ils disparaissent avec lui, condamné pour trahison. Le tableau séduit Victor Hugo et Dumas autant qu’il agace la critique académique par sa composition tournoyante, le primat de la couleur, la violence des tons. Delacroix apparaît, définitivement, comme un peintre remarquable, mais dont la manière bouleverse les habitudes et les règles académiques. Les journées des 27, 28 et 29 juillet 1830 voient le soulèvement du peuple parisien, révolté par les nouvelles lois sur la liberté de la presse et par la dureté du régime de la Restauration. Le 29 juillet marque la fin du retour des Bourbons sur le trône de France. Louis-Philippe, duc d’Orléans, devient roi des Français. Eugène Delacroix peint un tableau d’histoire inspiré par les événements de 1830 ; il présente au Salon de 1831 sa Liberté guidant le peuple, œuvre magistrale liant allégorie antique et représentation contemporaine. L’œuvre est acquise par l’Etat et exposée au musée du Luxembourg, le musée des artistes vivants où les toiles des créateurs contemporains sont montrées. L’année suivante, les massacres, par la police, des manifestants de la rue Transnonain à Paris, rendent difficile l’exposition du tableau au public, celui des Barricades, comme le disait Delacroix. Il est même rendu à l’artiste, qui réussit, cependant, à le montrer lors de son exposition personnelle au sein de l’Exposition universelle de 1855. Exposée au Louvre à partir de 1874, avec les autres œuvres de Delacroix acquises par l’Etat, La Liberté guidant le peuple (musée du Louvre) devient, sous la Troisième République, un tableau iconique. En janvier 1832, Delacroix accompagne l’émissaire du roi Louis-Philippe, le comte de Mornay, au Maroc. La conquête de l’Algérie par la France, l’année précédente, a, en effet, inquiété le sultan marocain. Une ambassade est nécessaire. Pour le peintre qui n’est pas un grand voyageur, il n’a alors quitté la France que quelques mois, à l’été 1825, pour aller en Angleterre, le périple marocain, de Tanger à Meknès, est un éblouissement. Les paysages, les sons, les couleurs, le séduisent, comme la beauté des habitants et de leurs costumes. Il lui semble trouver là l’Orient dont il a rêvé, mais aussi une Antiquité intacte, préservée. Le souvenir du Maroc a, ensuite, accompagné Delacroix toute sa vie. Les notes qu’il y a prises, les aquarelles réalisées, les objets rapportés, rassemblés dans son atelier, lui offrent de composer, jusqu’en 1863, plus de soixante-deux toiles liées au Maroc. Une part importante de la création d’Eugène Delacroix est dédiée à la conception de grands décors au sein d’édifices civils et religieux parisiens. En 1826, il avait, déjà, reçu la commande du Christ au Jardin des Oliviers pour l’église Saint-Paul Saint-Louis, dans le Marais. En 1834, grâce à l’appui d’Adolphe Thiers, Delacroix est commissionné pour la réalisation des décors du Salon du Roi au Palais Bourbon, la Chambre des Députés. En 1837, il reçoit la commande du plafond de la bibliothèque de cette même Chambre des Députés, consacré aux arts et aux sciences. Au milieu des années 1840, il peint également le décor de la bibliothèque du Palais du Luxembourg, l’actuel Sénat. Au début des années 1850, Delacroix est honoré de la commande du décor central de la Galerie d’Apollon, conçu au XVIIe siècle par le peintre Charles Le Brun, et resté inachevé. Il représente le dieu Apollon, vainqueur du serpent Python. C’est la victoire de la lumière sur l’obscurité, une victoire de la couleur. La Ville de Paris lui commande les peintures décoratives du Salon de la Paix de l’Hôtel de Ville, malheureusement détruites par l’incendie de 1871. Ses œuvres sont également présentes dans les églises de Paris ; après Saint-Paul Saint-Louis, Delacroix peint une très émouvante Pietà dans l’église Saint-Denis-du-Saint-Sacrement, dans l’actuelle rue Turenne. En 1849, il reçoit la commande pour les décors d’une chapelle de la très vaste église Saint-Sulpice, la chapelle des Saints-Anges. Cette œuvre magistrale l’occupe jusqu’en 1861. Il réalise deux grandes peintures murales qui se font face, La Lutte de Jacob avec l’Ange et Héliodore chassé du temple, ainsi que le plafond, Saint Michel terrassant le démon. L’organisation de la première Exposition universelle à Paris, en 1855, souhaitée par l’empereur Napoléon III, est l’occasion d’une reconnaissance offerte à Eugène Delacroix. Il est, aux côtés des peintres Jean-Auguste Dominique Ingres et Horace Vernet, honoré au cœur du Palais des beaux-arts, installé avenue Montaigne. Une exposition particulière, réunissant plus de trente de ses œuvres, qu’il a lui-même choisi de réunir, lui est dédiée. Delacroix est ainsi désigné comme un des plus grands peintres français de son temps. Delacroix s’installe en 1857 rue de Furstemberg, afin de finir les peintures de Saint-Sulpice. Son appartement est également à deux pas de l’Institut ; en janvier 1857, à la septième tentative, le peintre a, enfin, été accepté au sein de l’Académie des beaux-arts. Le jardin dont il a seule jouissance et qu’il peut aménager à sa guise emporte sa décision. Le lieu, entre cour et jardin, est un ermitage au cœur de Paris, un lieu propice à la création picturale comme à l’écriture. Le peintre se rend aussi fréquemment dans sa maison de Champrosay, à deux pas de la forêt de Sénart, aujourd’hui sur la commune de Draveil (Essonne). Ce solitaire, ce rêveur, ce mélancolique aime la nature, les promenades, l’observation de la forêt. La fidèle Jenny Le Guillou, sa gouvernante entrée à son service en 1835, est la seule à vivre à ses côtés, lui épargnant les tracas de la vie quotidienne. Eugène Delacroix meurt, le 13 août 1863, dans son appartement de la rue de Furstemberg. Jenny Le Guillou recueille son dernier souffle, aux premières heures de la matinée.

Paris Musée du Louvre

Autoportrait au gilet vert

Légué par Delacroix à sa gouvernante Jenny Le Guillou et par celle-ci à Mme Duriez de Verninac pour être remis au musée du Louvre après la chute de l’Empire, l’Autoportrait dit au gilet vert est entré au Louvre en 1872 par l’intermédiaire du peintre Pierre Andrieu. Sans doute exécuté vers 1837, ce portrait, qui compte parmi les œuvres maîtresses de Delacroix conservées au Louvre, est celui d’un artiste soucieux de laisser à la postérité de lui une image conforme à l’idéal qu’il s’était forgé au prix d’une longue discipline masquant, derrière une impassibilité que certains ont pris pour l ’expression d’un orgueil maladif, une sensibilité exacerbée.

Sa vie durant, en effet, Delacroix fut attentif à son image. On sait qu’il a volontiers donné son avis aux artistes qui gravèrent son portrait et que, s’il accepta de poser devant l’objectif de Nadar, de Carjat ou de Pierre Petit, ce ne fut pas sans réticences, craignant la perte de son identité. Pour cette raison, le peintre stipula dans son testament que ses traits ne sauraient être reproduits après sa mort « soit par moulage, soit par dessin ou photographie ». A en juger par le nombre de portraits parvenus jusqu’à nous, et dont le musée expose une sélection, force est de constater que ses dernières volontés ne furent guère, sur ce point, respectées.

La Liberté guidant le peuple

La Liberté guidant le peuple est une huile sur toile d'Eugène Delacroix réalisée en 1830, inspirée de la révolution des Trois Glorieuses. Présenté au public au Salon de Paris de 1831 sous le titre Scènes de barricades, le tableau est ensuite exposé au musée du Luxembourg à partir de 1863 puis transféré au musée du Louvre en 1874 où il fut l'un des plus fréquentés. En 2013, il est la pièce majeure de l'exposition La Galerie du temps au Louvre-Lens.

Par son aspect allégorique et sa portée politique, l'œuvre a été fréquemment choisie comme symbole de la République française ou de la démocratie.

L'œuvre assez imposante fut réalisée entre les mois d'octobre et de décembre 1830. La scène se passe à Paris, comme l'indiquent au lointain les tours de la cathédrale Notre-Dame que laissent apparaître les fumées à l'arrière plan. Une foule d'émeutiers franchissent une barricade. Au premier plan, associés aux matériaux, pavés et poutres, qui forment cette barricade, les corps de soldats morts apparaissent tordus et désarticulés. L'un gît nu. Un ouvrier ou un paysan blessé, foulard noué sur la tête, émerge des décombres, le corps et le regard tendus vers une femme du peuple, coiffée d'un bonnet phrygien dont s'échappent des boucles. Celle-ci, représentée en pied, occupe de fait la place principale. Elle brandit du bras droit par la hampe un drapeau tricolore qui occupe l'axe médian de la toile, et tient dans sa main gauche un fusil à baïonnette. Sa poitrine est en partie découverte. On distingue quatre autres personnages aux abords de la barricade : deux enfants des rues – l'un, à droite, coiffé d'un béret brandissant des pistolets de cavalerie, la bouche ouverte sur un cri, l'autre, à l'extrême gauche, coiffé d'un bonnet de police s'agrippant au pavé – un homme, coiffé d'un haut-de-forme, laissant penser que c'est un bourgeois, mais portant le pantalon et la ceinture des ouvriers, les genoux sur la barricade ; et un ouvrier portant un béret, un sabre briquet à la main et sa banderole sur l'épaule. Derrière, on peut voir un élève de l'École polytechnique portant le traditionnel bicorne. Les principaux protagonistes s'inscrivent dans un triangle dont le sommet est le drapeau. Les couleurs dominantes, le bleu, le blanc et le rouge, émergent des teintes grises et brunes. La lumière semble provenir du côté gauche. Les couleurs chaudes dominent le corps des émeutiers.

La scène a probablement inspiré à Victor Hugo sa barricade dans Les Misérables et plus particulièrement son personnage de Gavroche.

La Liberté guidant le peuple figure parmi les œuvres du XIXe siècle les plus mobilisées au XXe siècle que ce soit pour un usage officiel, publicitaire ou scolaire. En France, elle prend valeur d'emblème. Son ancrage patriotique lui vaut de devenir un symbole républicain, voire une icône de la République. L'œuvre illustre les billets de banque de cent francs de 1978 à 1995. La Liberté se meut en Marianne pour la série de timbres d'usage courant gravé par Pierre Gandon, « Liberté » de 1982 à 1990.

Scène des Massacres de Scio

Scènes des massacres de Scio (titre complet Scènes des massacres de Scio : familles grecques attendant la mort ou l'esclavage) est un tableau représentatif du courant pictural romantique, peint par Eugène Delacroix en 1824.

Ce tableau représente les massacres perpétrés à Chios en avril 1822 par les Ottomans lors de la guerre d'indépendance grecque.

Sur ce tableau, l'élément perturbateur principal lors de son observation consiste en l'inversion des rôles figuratifs vainqueurs-vaincus. En effet, les Grecs jouissaient pendant le siècle des Lumières de l'aura de leur savoir démocratique antique, redécouvert depuis peu : ils étaient ainsi considérés communément comme civilisés, proches des Européens. Or, ici, ils suscitent la pitié : pas de héros grecs se défendant vaillamment contre les troupes ottomanes, seulement quelques rares habitants désarmés qui ne sont pas en état de résister à l'envahisseur. De la même manière, le cavalier ottoman à la droite du tableau surplombe toute la scène et adopte une posture héroïque.

Mais il est possible de comprendre que Delacroix cherche non pas à célébrer la résistance et l'héroïsme de quelques résistants, mais plutôt la bravoure de ce peuple victime tout entier.

Ayant achevé sa toile, certains historiens de l'art considèrent que Delacroix a retouché le fond de sa toile après avoir vu trois tableaux du peintre anglais John Constable exposés chez un marchand d'art à Paris, La Charrette de foin, Canal en Angleterre et Vue de Hampstead. A l'occasion de la restauration du tableau, menée d'octobre 2019 à janvier 2020, quasiment « aucun repeint ultérieur ne la recouvre, ce qui remet en cause la croyance selon laquelle l'artiste aurait retouché son tableau en 1847 »

Noce juive au Maroc

Le 21 février 1832, Delacroix put assister à une noce juive à Tanger. D’une manière caractéristique de son attitude durant le séjour, l’artiste croqua sur le vif, observa en particulier la réclusion de la mariée, effectivement absente du tableau et enregistra minutieusement les détails de la fête et de ses prémices. Des années plus tard, il situera la scène dans la cour intérieure d’une maison tangéroise, celle-là même où s’étaient déroulées les noces dont il avait précisément relevé l’architecture, notant dans un admirable dessin aquarellé (conservé au Louvre) le coloris de chaque élément. Le présent tableau procède donc largement d’un processus de recréation nourri par les souvenirs du peintre et étayé par une série de dessins exécutés durant le séjour et utilisés à la manière d’un collage. Delacroix restitue néanmoins de façon saisissante cette fête judéo-mauresque à laquelle il confère une grandeur intemporelle qui dépasse de beaucoup un exotisme poussivement anecdotique, ce qui déplut peut-être au comte Maison, lequel lui avait commandé un tableau dont, finalement, il ne voulut pas. Ne cédant à aucune facilité, en particulier chromatique, où nul « chatoiement oriental » dans cette scène de demi-pénombre (où un admirable mur blanc reçoit l’essentiel de la lumière), l’artiste compose impeccablement son tableau en faisant contraster la variété des attitudes et des costumes avec la rigueur architectonique d’un espace scandé d’obliques, d’horizontales et de verticales vertes.

Esprit libre, mû par une curiosité qui se vérifie notamment à propos des juifs du Maroc dont l’interprète de la délégation française, Abraham Benchimol, lui ouvrit les portes, Delacroix décrivit assez longuement cette noce juive en janvier 1842 dans la revue Le Magasin pittoresque. S’il ne sut pas toujours s’élever au-dessus des préjugés de son temps ; la musique entendue durant le mariage lui sembla n’être qu’une éprouvante cacophonie, et il souligna que les « contorsions » des danseuses seraient regardées « chez nous comme de très mauvais goût » ; il n’en fut pas moins sensible à l’intensité des sentiments et à la solennité riche de formes et de couleurs qui accompagnaient chez ses hôtes les grandes cérémonies et contrastaient avec la froideur compassée des Européens. Surtout, l’expérience de cette noce tangéroise et le travail que réclama sa transcription picturale aidèrent Delacroix à mûrir une approche proprement coloriste de la peinture dont les grands maîtres vénitiens et flamands des XVIe et XVIIe siècles avaient posé les jalons. Au Salon de 1841, le tableau reçut un assez bon accueil de la critique, qui fut néanmoins déroutée par une facture qui semblait juxtaposer des coups de pinceau « donnés comme au hasard » selon Delécluze. Rien de hasardeux pourtant dans les petites touches de couleur pure placées dans les ombres par un peintre que son séjour marocain avait conforté dans l’intuition de la solidarité de la lumière et de la couleur indissolublement mêlées dans un jeu infini de reflets.

Jeune orpheline au cimetière

Jeune orpheline au cimetière est un tableau réalisé par Eugène Delacroix vers 1824, durant ses travaux préparatoires pour son tableau Scène des massacres de Scio. L’œuvre est exposée par Delacroix au Salon de 1824, la même année que la Scène des Massacres de Scio. L'œuvre est aujourd'hui conservée au musée du Louvre.

D’abord, c’est son regard tourné vers la droite, une sorte d’urgence dramatique qui attire. L’œil est inquiet, le regard levé vers le ciel, et l’on sent tout le visage tétanisé, l’espace d’un instant vers une scène ou un personnage qui capte l’attention de la jeune fille.

Les couleurs sont pastel : courtes plages de ciel bleu, joues rosées, carnation délicate de la peau; manche et robe dans les tons ocre-vert bouteille aux dégradés multiples rendant la couleur mouvante. Le corsage fait une belle teinte de lumière, un flash, même. Et l’épaule gauche dénudée continue de guider mon regard vers la droite, comme si Delacroix nous incitait avec insistance à regarder vers la droite, dans la même direction de son regard.

La bouche légèrement ouverte confirme l’étonnement, la stupéfaction qui tétanise. Il y a cette énigme redoublée du drame par le contraste avec la main de la jeune femme délicatement posée sur la robe comme un oiseau dormeur. Au passage, notons ce regard détourné par deux croix, et un porche grand ouvert donne sur un groupe de peupliers formant une vague ambiance toscane. Ajoutons ces signes d’une campagne calme, ces petites croix anonymes de morts depuis bien longtemps ou croix de travers (glissement de terrain ? plantées à la va-vite ?) En fait, tous ces signes sont là pour nous tromper.

Rien dans l’environnement ou dans la mise de la jeune fille ne nous laisse présager le drame à venir.

Car ce qui se passe sous ses yeux commence à l’émouvoir et va achever de la bouleverser. Seules les quelques mèches un peu désordonnées sur la nuque et qui ne rentrent pas dans le rang du chignon ou encore l’épaule dénudée qui livre le creux ombrageux de l’omoplate alertent du désordre.

L’intérêt du tableau réside avant tout dans ce qu’il nous cache. Pourquoi cette peur naissante qui bientôt va se muer en effroi ? Quelle révélation va changer dans quelques instants le cours de la vie de cette « jeune orpheline au cimetière » ? En fait, une scène poignante lui rappelle en un éclair son malheur. Là-haut, sur la colline, cheminent des bohémiens derrière une carriole et cette petite fille échevelée en haillons lui rappelle pathétiquement qui elle est : une sans terre, sans attache, sans histoire. Une jeune fille en errance, en quête d’amour et de reconnaissance. Elle avait pourtant revêtu cet habit de lumière pour fêter le printemps venu. Mais la force de la scène qui l’hypnotise efface tous ses efforts pour se hisser dans la vie. Elle est là, avec elle, la petite sauvageonne ; elle se demande un instant s’il ne lui faut pas rejoindre la cohorte pour vivre à l’unisson cette vie d’errance. Bizarrement, cet arrêt sur image semble être le signe de l’hésitation d’un instant avant les grandes décisions. Belle et sauvage, seule parmi les morts, elle est prêt à s’abandonner à la solitude des gens du voyage, comme aspirée par eux. Là-bas, se joindre à la foule anonyme des migrants.

Ce qui m’émeut dans ce tableau, c’est la perspective d’un avenir sombre que le personnage choisira ou non d’accepter. Combien de temps nous est-il arrivé d’oublier qui nous sommes ?

Les petites croix anarchiques et les stèles de travers confirment cette impression pathétique de déréliction.

Dante et Virgile aux Enfers

La Barque de Dante ou Dante et Virgile aux enfers est un des premiers tableaux d'Eugène Delacroix. Daté et signé 1822, il l'expose au Salon de la même année qui marquera son entrée officielle parmi les peintres. Bien que cette toile soit sujette à critique, l'État l'acquiert aussitôt. C'est dès cette période qu'Adolphe Thiers, jeune avocat et critique d'art, va devenir un fervent défenseur de l'œuvre de Delacroix. Il dira de lui après avoir vu cette toile : « M. Delacroix a reçu le génie. » Il contribuera à la révélation du peintre Delacroix.

Extrait de la Divine Comédie, la scène représente la visite aux Enfers de Dante Alighieri accompagné de Virgile, leur passage sur le Styx dans la barque menée par Phlégias, roi des Lapithes. Il s'agit précisément du cinquième cercle de l'Enfer, celui des coléreux condamnés à demeurer dans les eaux boueuses du Styx.

Représentés sur la barque les menant aux enfers, les deux protagonistes : Dante est reconnaissable à sa coiffe médiévale rouge et Virgile à sa couronne de lauriers, occupent le milieu de la composition ; Phlégias, vu de dos, à droite, est enveloppé d'une étoffe bleue, maniant le gouvernail. Delacroix semble s'être inspiré du Torse du Belvédère qu'il avait copié à partir d'un moulage en plâtre, pour peindre le dos de Phlégias.

Les eaux tumultueuses, les corps des damnés accrochés à la barque, le ciel sombre, la ville en feu sur la gauche, entourent les deux poètes bien éclairés au centre.

Cette toile annonce sans nul doute l'éclatante impétuosité de cet art tourmenté et lumineux que sera celui de Delacroix tout au long de sa vie. Si l'on perçoit dans le traitement des corps et le choix du sujet l'attachement à l'école classique, que Delacroix lui-même revendiquait, l'on y voit aussi toute la modernité que recèle cette œuvre (format, couleurs). Elle est un subtil mélange des deux servant de passerelle entre l'art classique et l'art nouveau qu'allait devenir le romantisme.

S'il est un thème prépondérant dans l'œuvre de Delacroix, c'est bien celui du combat. Pour Delacroix, peindre n'est que combat, un combat contre lui-même qu'il met en scène sans relâche. Cette première toile, du moins reconnue, en témoigne. Une barque prise d'assaut par les damnés, lesquels se rejettent les uns les autres pour y accéder. On remarquera le contraste entre, au fond, la lumière rouge de l'enfer et, au premier plan, la clarté blafarde des corps. Les personnages nus, alignés, ont les yeux écarquillés de peur et le visage déformé par la douleur. Dans cette tempête, debout sur la barque, Dante (avec son bonnet rouge) et Virgile observent la scène.

Autre thème qui va compter dans la vie du jeune peintre, le thème du frêle esquif pris dans la tempête. Il reprendra ce thème plus tard dans Le Naufrage de Don Juan et dans ses études de Le Christ sur le lac de Génésareth où le « lac », ressemblant plus à une mer déchaînée, prendra entièrement le pas sur un ciel réduit à une mince bande en haut du tableau.

La mort de Sardanapale

Le poète anglais Lord Byron, l'un des écrivains phare du romantisme, avait publié en 1821 un drame "Sardanapalus" traduit en français dès 1822. L'œuvre raconte la fin tragique de ce roi légendaire d’Assyrie, qui, voyant le pouvoir lui échapper à la suite d’une conspiration, choisit, lorsqu'il se rendit compte que sa défaite était inéluctable, de se jeter en compagnie de sa favorite, Myrrha, une esclave ionienne, dans les flammes d’un gigantesque bûcher. Si Delacroix a bien repris la trame générale du drame de Byron — on reconnaît Myrrha dans la femme à demi allongée sur le lit aux pieds du monarque —, l’idée de l'holocauste des femmes, des chevaux et du trésor semble avoir pour source un autre auteur, antique celui-là, Diodore de Sicile. Dans sa Bibliothèque historique (2, 27, 2), ce dernier rapporte en effet, d'après son prédécesseur Ctésias, que, « pour ne pas tomber aux mains de ses ennemis, Sardanapale fit élever dans son palais un gigantesque bûcher sur lequel il entassa la totalité de son or et de son argent, ainsi que tous ses vêtements royaux, puis, après avoir enfermé ses concubines et ses eunuques dans un espace aménagé au milieu du bûcher, il se fit brûler avec eux tous et son palais ».

Delacroix, passionné de littérature, s'inspire de ce drame romantique de Lord Byron et choisit pour sujet l’épisode dramatique de la mort du souverain, dont la capitale est assiégée sans aucun espoir de délivrance, et qui décide de se suicider en compagnie de ses esclaves et de ses favorites, après avoir brûlé sa ville pour empêcher l'ennemi de profiter de ses richesses. Delacroix éprouva le besoin de fournir quelques explications lorsque la toile fut exposée la première fois ; il le fit en ces termes :

« Les révoltés l’assiégèrent dans son palais… Couché sur un lit superbe, au sommet d’un immense bûcher, Sardanapale donne l’ordre à ses esclaves et aux officiers du palais d’égorger ses femmes, ses pages, jusqu’à ses chevaux et ses chiens favoris ; aucun des objets qui avaient servi à ses plaisirs ne devait lui survivre. »

Jeune tigre jouant avec sa mère

Jeune Tigre jouant avec sa mère (ou Étude avec deux tigres) est un tableau d'Eugène Delacroix peint entre 1830 et 1831. La peinture à l'huile sur toile a été réalisée au début de sa carrière.

Mesurant 130,5 × 195 cm, elle est exposée au Musée du Louvre. Le tableau a été exposé au Salon de Paris en 1831. Il a appartenu à Maurice Cottier après le commanditaire Auguste Thuret et est maintenant exposé au musée du Louvre depuis 1884.

Portrait de Frédéric Chopin

Le Portrait de Frédéric Chopin et George Sand était une huile sur toile inachevée de 1838 de l'artiste français Eugène Delacroix. À l'origine un double portrait, il a ensuite été coupé en deux et vendu séparément.

Femmes d'Alger dans leur appartement

Femmes d'Alger dans leur appartement est un tableau d'Eugène Delacroix, peint à Paris en 1833. Le tableau est présenté au Salon de 1834 et acquis la même année par Le Louvre. Synthèse d'orientalisme et de romantisme, ce tableau exprime une profonde « mélancolie » pour le poète et critique d'art Baudelaire.

La toile représente trois jeunes femmes en costumes d'intérieur vaporeux et richement brodés éclairées par la lumière douce d'une fenêtre située à gauche. Allongées ou assises sur un tapis autour d'un narguilé et d'un kanoun, elles se prélassent sur des coussins posés à même le sol. Une femme noire, probablement une servante, porte une veste courte bleue. Elle s'apprête à sortir. Derrière elle, accrochée au mur la formule « Mohamed rassoul Allah » est inscrite sur un panneau en faïence bleu et blanc, ce qui semble indiquer un intérieur musulman. Le décor somptueux du harem ou du gynécée est constitué de tentures et de tapis, de verrerie de Murano au-dessus du placard rouge entrouvert, et de murs recouverts de faïence ornés d'un motif floral mordoré baigné dans un clair-obscur.

Le visage des femmes exprime la voluptueuse langueur des odalisques orientales. Elles sont vêtues, à la mode algéroise, de chemises en étoffe fine, blanche, unie, fleurie ou jouant sur des textures mates et brillantes. Portées ouvertes sur le devant jusqu'aux genoux, elles cachent le haut des serouels d’intérieur en satin et brocart, de type court, amples et serrés à mi-mollet par une jambière. Celle de gauche, la ceinture lâche et éloignée du corps, a une ghlila, veste sans manches, cintrée et évasée sur les hanches en velours grenat, décorée de galons, de boutons de passementerie et sous les seins, d’appliques triangulaires brodées en mejboud, de fils d’or, de paillettes et de canetilles. Les autres portent une frimla, petit corsage dérivé de la première, qui pallie la transparence, soutient la poitrine et retient les manches. Par-dessus ces chemises est nouée au niveau des hanches la fouta, pagne soyeux orné de bandes rayées. Les trois femmes ont la tête couverte par une meherma, carré de soie sombre, frangé et tissé de fil d’or, signe distinctif des femmes mariées. Sur le sol gisent trois babouches.

L'embellissement des décors, des intérieurs, des vêtements, des parures et des bijoux portés (bracelets de bras et khelkhels, boucles d’oreilles, montre en breloque, bagues à tous les doigts) indique que Delacroix représente une scène de fête ou de réception.

Mademoiselle Rose

Mademoiselle Rose était un modèle de l'atelier de Guérin.

Entrée des Croisés à Constantinople

Le tableau de Delacroix représente le dénouement d’une expédition militaire qui avait commencé plusieurs années auparavant. Lancée par le pape Innocent III en 1198, la quatrième croisade a été conduite par Boniface de Montferrat et Baudouin de Flandre. Les croisés devaient attaquer l’Égypte, et ils avaient reçu une importante aide financière de la République de Venise. Mais, plutôt que de gagner l’Égypte, les croisés et les Vénitiens se dirigent vers Constantinople, où le pouvoir byzantin est en proie à de graves dissensions.

En 1195, l’empereur Isaac II Ange a été chassé du trône et emprisonné par son frère, qui a pris le nom d’Alexis III. En 1202, le fils d’Isaac II Ange propose aux croisés de leur verser 200 000 marcs en échange de leur aide pour rétablir son père sur le trône. Les chefs des croisés acceptent la proposition. Ils lancent leurs troupes à l’assaut de Constantinople le 17 juillet 1203 et font fuir l’empereur Alexis III. Isaac II Ange retrouve son trône, le pouvoir étant partagé avec son fils, Alexis IV Ange. Mais la population de Constantinople, excédée par l’alliance de l’empereur avec les croisés, se révolte. Renversés au début de l’année 1204, Isaac II Ange et son fils sont remplacés par un nouvel empereur, Alexis V Murzuphle, qui manifeste son hostilité envers les Latins. Le 9 avril 1204, les croisés attaquent Constantinople et le 12 avril, ils s’emparent de la ville, qu’ils mettent à sac. Le 16 mai 1204, Baudouin de Flandre est élu empereur et partage l’Empire entre les Francs et les Vénitiens.

Ces événements ont été brièvement résumés dans le livret du Salon de 1841 : « Baudouin, comte de Flandre, commandait les Français qui avaient donné l’assaut du côté de la terre, et le vieux doge Dandolo, à la tête des Vénitiens, et sur ses vaisseaux, avait attaqué le port ; les principaux chefs parcourent les divers quartiers de la ville, et les familles éplorées viennent sur leur passage invoquer leur clémence. »

La scène se déroule à la fin de la bataille, sur les hauteurs de Constantinople. À l’arrière-plan, la ville s’étend le long de la Corne d’Or. La ligne d’horizon placée très haut, l’imposante architecture avec ses colonnes à l’antique, la fumée des incendies qui obscurcit un ciel orageux, le premier plan occupé par des cavaliers hostiles, les visages des croisés plongés dans une pénombre inquiétante, tout suggère la violence des « Français ». Baudouin de Flandre, monté sur un cheval encore excité par la bataille et foulant au pied casques et enseignes, domine un vieillard qui implore sa clémence : revêtu d’une pourpre dérisoire, soutenu par une jeune femme, il est placé en pleine lumière, dans un contraste saisissant avec les vainqueurs.

Parmi les croisés, on aperçoit derrière Baudouin le Vénitien Enrico Dandolo, la tête couverte d’un casque entouré d’une fourrure d’hermine. Portant les étendards des croisés, aux couleurs rouge et noir sinistres, les chefs latins accompagnent le comte de Flandre. De part et d’autre de cette troupe, les signes de la défaite des Grecs s’étalent partout : soldats agenouillés, femmes abattues de douleur, scènes de pillage à l’arrière-plan. Les couleurs assombries sont à peine éclairées par le dos courbé d’une jeune captive qui tient dans ses bras une femme évanouie. Une autre femme s’est affaissée aux pieds d’un vieillard retenu par un croisé : il s’agit peut-être du patriarche de Constantinople, qui refuse de se soumettre au pape et de rétablir « l’unité » des deux Églises rompue par le schisme de 1054.

Hamlet et Horatio au cimetière

On peut voir,au premier plan, Hamlet à droite habillé de noir. Il est assit sur une pierre tombale blanche qui elle est posée à même la terre qui semble avoir été retournée. Dans la main gauche d'Hamlet on peut voir un crâne, sûrement un crâne humain, celui de son père ? A côté de lui ce trouve Horatio habillé de façon moyenâgeuse; on peut le constater avec sa tunique longue et son pantalon court accompagné de collants et de chaussures noires simples. Au début du XII ème siècle les vêtements étaient portés très larges et longs. Les tuniques traînaient par terre. Le style vestimentaire d'Horatio fait donc référence à cette époque. Pour voir plus dans l'aspect d'Horatio on peut donc voir qu'il se tient debout en contrastant avec Hamlet qui est assis; cependant on a l'impression qu'Hamlet se trouve plus en avant sur le tableau qu'Horatio. Si l'on examine un peu plus on peut voir qu'Horatio déborde sur le ciel, comme si une partie de lui même était "divine". Les couleurs au premier plan sont très sombres tout comme les habits portés par Horatio et Hamlet. Tout fait référence à la noirceur.

Il y a cependant un contraste au deuxième plan où l'on trouve un horizon plus dégagé. Il se trouve une colline sur la droite, du côté d'Hamlet, très éclairée et épurée. Quand au côté d'Horatio l'horizon est plus noir. En regardant le second plan on comprend que les deux jeunes hommes sont dans un cimetière car plusieures pierres tombales se trouvent dans le paysage. Puis au troisième plan, se trouve le ciel, très clair qui s'oppose en tout points au premier plan qui lui est très sombre. Le ciel est dégagé, épuré et sans nuage.

On ressent le dialogue dans le tableau de Delacroix Hamlet et Horatio au cimetière tiré du livre Hamlet de Shakespeare :

Mais l’âge est v’nu, à pas d’loup, Il m’a pris par la peau du cou, Me v’là embarqué pour l’aut’monde, Et déjà j’ne suis plus dans l’coup. Il ramasse et jette un crâne.

Ce crâne avait une langue, et pouvait chanter jadis. Et voici que ce coquin le jette contre la terre, comme s’il était la mâchoire d’âne de Caïn, celle qui servit au premier meurtre. C’est peut-être la caboche d’un politicien qu’il envoie promener cet âne. D’un qui se croyait plus fin que Dieu, ne se peut-il pas ?

Il se pourrait, monseigneur.

Ou encore d’un courtisan, un qui savait dire : « Ah, mon cher seigneur, bonjour, ah, mon bon seigneur, comment allez-vous ? » Qui sait si ce n’est pas monseigneur Untel, qui disait tant de bien du cheval de monseigneur Untel, avec l’idée qu’il se le ferait offrir ? Oui, pourquoi pas ?

Oui, pourquoi pas, monseigneur.

Eh bien, c’est donc lui, et ce crâne-là sans mâchoire, abîmé au couvercle par la bêche d’un fossoyeur, c’est Noble Dame du Ver. Un beau retour des choses, pour qui sait voir ! La croissance de ces os n’a-t-elle coputé si cher que pour qu’ils servent au jeu de quilles ? Les miens me font mal, rien que d’y penser.

Une pioche et deux coups d’bêche, Un drap pour le met’dedans, Avec un trou dans la glaise, Pour c’copain c’est suffisant... han ! Il envoie rouler un second crâne.

En voici un autre. Et pourquoi ne serait-ce pas celui d’un homme de loi ? Où sont-ils, maintenant, ses distinguos et ses arguties, ses procès et ses baux, ses finasseries ? Comment peut-il supporter que ce rustre grossier lui tape sur l’occiput avec sa pelle fangeuse ? Pourquoi ne le menace-t-il pas d’une action en justice, pour voies de fait ? Hum ! Ce gaillard-là a peut-être été en son temps un grand acquéreur de terres, et tout affairé d’hypothèques, de reçus, de levées, de doubles garanties, de recours. Mais n’est-ce pas la fin de ses garanties, la levée de tous ses recours, que d’avoir sa fine caboche toute pleine de fine ordure ? Et tous ses garants simples ou doubles ne lui garantiront-ils rien de plus, de tous ses achats, que la longueur et la largeur d’une couple de contrats ? À peine si ses titres d’achats eussent pu tenir dans cette boîte... Faut-il donc que leur possesseur n’ait pas plus de place, dis-moi ?

Nature morte aux homards

Elle est dite également "aux trophées de chasse et de pêche".

En 1827, Delacroix peint son Dante et Virgile, les Massacres de Scio et la Mort de Sardanapale. Trois peintures d’histoire. La même année il peint la Nature morte au homard. Nous sommes devant une nature morte réalisée par un peintre d’histoire. Pas de figure humaine, pas d’action, un sujet sans beaucoup d’intérêt : sommes-nous devant une nature morte ou devant un paysage? L’œuvre serait incompréhensible si l’on ne se souvenait qu’en 1824, Delacroix fut ébloui par le paysagiste anglais Constable pour qui il y a des merveilles dans toutes les parties de la nature, dans le moindre des animaux.

La mise au premier plan du homard étonne par sa position centrale, et il est traité avec habileté : composition, rendu des matières, accord coloré. Le paysage lui, s’étend à l’infini sans la composition traditionnelle par écrans; c’est par la dégradation atmosphérique des tons vers les lointains que le regard est entraîné. L’alternance des clairs et des sombres permet de construire le raccord entre la terre et le ciel sans bloquer le parcours de la vision et sans se détourner par trop d’architecture du motif central.

On a dit que ce tableau réunissait trois genres - la nature morte, le paysage et la scène de chasse. Cette synthèse est très sensible car si la nature morte dans un paysage de plein air existe chez Jean Fyt, il est rare que l’on mélange homards et gibiers dans la peinture flamande.

Ce tableau entra en 1906 au musée du Louvre grâce à Étienne Moreau-Nélaton (1859-1927), peintre et historien, qui donna un ensemble de tableaux et de dessins d’artistes du XIXe siècle, allant de Géricault à Monet et de Delacroix à Manet. Il écrivit en 1916 un livre de référence sur Eugène Delacroix, Delacroix raconté par lui-même.

Musiciens juifs de Mogador

Cette oeuvre présente deux musiciens assis les jambes croisées sur le sol, jouant du luth et du tambourin, avec une femme les écoutant, allongée sur une table basse.

La fiancée d'Abidos

Le tableau La Fiancée d'Abydos se nomme aussi Selim et Zuleika, du nom des personnages du poème de Lord Byron, The Bride of Abydos. Ce poème a été écrit après que l'auteur eut traversé le détroit des Dardanelles à la nage entre Abydos et Sestos pour imiter le personnage de la mythologie grecque, Léandre, qui traversait le détroit la nuit pour aller retrouver sa bien-aimée Héro prêtresse d'Aphrodite à Sestos.

Une version antérieure à 1849, sensiblement différente, est conservée quant à elle au musée des Beaux-Arts de Lyon.

Lion dévorant un sanglier

Le lion dévorant sa proie émeut comme les plus beaux récits de Jules Gérard. C'est de la peinture dramatique, puissante d'effet moral, mais on peut avoir le défaut de ne pas savoir s'habituer aux moyens d'exécution du peintre. Une admiration pour son génie ne peut nous faire mentir sur notre impression à laquelle on n'attache d'autre valeur que celle d'être sincère vis à vis d'elle-même.

Lion et Caïman

Une violence qui, comme la douleur, était la sienne, il l'a au quotidien utilisée comme énergie et exprimée par des combats d’animaux, une obsession de son imagination. La bête et sa proie, à l’instant culminant de la férocité, c'est ainsi que l'on retrouve le cheval et le lion, le lion et le lapin, ce lion et le caïman, le lion et le sanglier. On connaît aussi un Cheval terrassé par une panthère, on admire également Un cheval sauvage terrassé par un tigre.

Étude de femme nue couchée sur un divan

Il y a une sensualité manifeste chez cette femme rêveuse au corps offert au regard du spectateur, et l'on sait par le Journal que les relations de Delacroix avec ses modèles dépassaient souvent le cadre pictural ; mais il y a aussi des traces de l'influence de Bonington dans la présentation, et peut-être du désir de Delacroix d'imiter les nus d'Ingres.

Tigre attaquant un cheval

On admire ici un cheval sauvage se faisant terrassé par un tigre. Le rapport de forces entre les bêtes est une opposition entre leurs formes et un rapport de couleurs : imaginez, à partir de cette oeuvre, le cheval brun que surmonte le formidable tigre aux yeux jaunes, au pelage rendu encore plus flamboyant par l’extrême tension musculaire.

Les timbres de Pierre Gandon

La série Liberté

Commençons par ces deux vignettes de Juillet 2013 qui ont une histoire humoristique ...

"merci et bravo nous sommes entrés en résistance", a twitté Christine Boutin. Il y a tout juste une semaine auparavant, elle démissionnait de la présidence du parti démocrate chrétien pour entrer en résistance. Son premier acte de résistance fut de partir au combat contre le timbre-poste. Sus au timbre tarif réduit, haro sur le timbre prioritaire, Marianne ne passera pas par madame Boutin !

La souveraineté de la France est outragée, c'est à la dignité de la femme que l'on veut atteindre...

Vous ne le voyez donc pas ? Vous n'êtes donc pas très perspicaces. Les deux artistes se sont inspirés d'une femen pour réaliser le timbre de la Poste l'outrage. Les femen, vous savez, ces femmes qui revendiquent la liberté les seins nus. Apparemment prude et presque virginal, le portait nous apparaît alors dans toute sa dimension, entre outrage et indignité, et si peu souveraine. Dans toute sa dimension ? Le timbre poste eût été plus grand, imaginez le scandaleux spectacle auquel nous aurions pu assister. Non !!! N'imaginez pas !

Ouh là là, je songe à tous ces petits enfants qui tendront leurs chastes petites mains vers le facteur pour recevoir ces lettres entachées de l'infamie...Alors, en hommage à Christine Boutin, pour relever l'image ternie de la France outragée, je vous propose des alternatives peut-être plus dignes de notre nation : Delacroix. C'est évident. Dès qu'on parle de Marianne, c'est vers notre patrimoine et notre histoire qu'il nous faut nous tourner. Delacroix, c'est la liberté qui guide le peuple. C'est la France qui se dresse et qui se jette sur les barricades pour partir à la conquête de la liberté.

Un doute m'assaille quand même : sa robe. Elle est déchirée, ou bien ? Marianne ne m'a pas l'air spécialement affectée d'afficher une poitrine aussi victorieuse en public. Et dans un musée, tant qu'à faire ! En revisitant notre histoire, je me demande si, tous comptes faits, notre Marianne n'aurait pas servi un tantinet de modèle pour les femen ? La liberté guidant le peuple, la première femen ?

Pour cet intermède d'humour philatélique découvrez cette page : http://www.saintpierre-express.fr/2013/page/3/

Sur cette ligne nous découvrons les timbres de roulettes en valeurs pour service rapide et service lent

La série Liberté de

Saint Pierre et Miquelon