Madeleine RIFFAUD - résistante DOC
Née le 23 août 1924 - Arvillers, 80031, Somme, Picardie
Résistante Poète Journaliste Correspondante de guerre Écrivain
école 4 allée du Dr Calmette, aux Lilas : sur la carte
famille: arbre Rd93
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1 - La bataille du Tunnel des Buttes Chaumont (sam 19/02/22) facebook.com/groups/racinesdu93/posts/5568001183212019
23 août 1944, Paris est en plein soulèvement. Il y a des combats dans toutes les rues. Presque tous les hommes sont sur les barricades. Madeleine est de garde au poste de commandement. Elle reçoit par téléphone la mission d'emmener son groupe (la compagnie Saint Just) au pont des Buttes Chaumont. "Un train de soldats allemands vient de Belleville par la Petite Ceinture. Ils ont fait des morts, il ont tué des copains. Dépêchez vous d'aller les stopper. Ils sont dans le tunnel et ils vont vous attaquer". En se comptant elle-même, ils ne sont que quatre à pouvoir y aller. Ils chargent aussitôt des caisses d'explosifs et de grenades à manche dans la voiture, et direction les Buttes, vers la passerelle d'où ils pourront agir. La locomotive apparait. Depuis les marche pieds, les allemands arrosent à la mitrailleuse les ponts au dessus d'eux. Tirs à l'aveuglette, ripostes. L'un des membres du groupe de Madeleine est blessé. Les trois autres balancent leur chargement depuis le pont. Parmi les caisses, il y a une boite de feux d'artifice qui attendait à la Mairie un hypothétique 14 juillet.
Le convoi s'enflamme dans un énorme brasier. Les allemands font reculer le train dans le tunnel. Un siège de trois heures commence, durant lesquelles nos résistants tiennent en respect le convoi. Finalement, on va chercher un conducteur de train à la retraite qui vit dans le quartier. Il se faufile prudemment sous le train, détache la loco, la fait rouler sur 500 mètres et rentre tranquillement chez lui. Les allemands sont faits comme des rats, alors ils se rendent, les mains en l'air. Que font les résistants? Madeleine raconte: "nous, on respecte les accords de Genève, ce sont des prisonniers de guerre, alors on ne tire pas dessus". Monique a 20 ans ce jour-là. >> sur la carte
2 - La fille d'instit' en Picardie (dim 20/02/22) facebook.com/groups/racinesdu93/posts/5571261192886018/
Madeleine RIFFAUD est fille d'instituteurs. Elle nait le 23 août 1924 à Arvillers, un village de la Somme, non loin d’Amiens (30km). Originaires tous deux de la Haute Vienne, ses parents s'étaient rencontrés à l'Ecole Normale de Limoges. Pour leurs premières affectations, l'Education nationale les avait séparés dans diverses localités du Limousin. Ils demandèrent donc à être mutés dans n'importe quelle ville, mais pourvu que ce soit ensemble. Et ce fut la Picardie avec Arvillers, dans l'académie d'Amiens, puis Folies en 1931-36, toujours dans la Somme. Ils y feront leur carrière , y passant le reste de leur vie. Jean Emile, le père de Madeleine, est socialiste. Sa mère, Gabrielle est catholique pratiquante.
Mais ce qui marque le plus leur fille unique c'est le souvenir omniprésent de la "Grande guerre". Son père en est revenu diminué, gardant des séquelles de ses blessures à la jambe. Certains camarades de la jeune fille se sont même fait exploser en voulant récupérer le métal de bombes, trouvées encore intactes dans les champs. Car ils vivent dans la zone rouge, celle des anciens champs de bataille, celle des cimetières militaires qui ponctuent le paysage. Avec des dispositions pour la poésie, elle témoigne de ses sentiments envers les morts des tranchées par un poème écrit à quinze ans.
La débâcle du printemps 1940 la pousse sur les routes de l'exode avec ses grands-parents, direction le Limousin.. Quand elle revint en Picardie, ses premiers contacts avec des soldats allemands sont en gare d’Amiens. Leurs comportements humiliants la convainquent que, dès qu'elle en trouverait l'occasion, elle s’engagerait dans la Résistance.
3 - Contre l'occupant nazi : une résistante de 20 ans (lun 21/02/22)
facebook.com/groups/racinesdu93/posts/5574169095928561/
Pour résister à l'envahisseur nazi, le chemin de Madeleine allait la mener à Paris. Victime d’une infection tuberculeuse en 1941, elle est soignée en sanatorium dans l’Isère. Elle y rencontre un étudiant en médecine parisien, adhérent aux jeunesses communistes. Ils montent ensemble à Paris. Dans son sillage, elle commence une formation de sage femme. Elle s'engage au Front national des étudiants -une émanation du PCF- y prenant le pseudonyme de Rainer (du nom de l’écrivain autrichien Rainer Maria Rilke). Ses actions commencent fin 1942 par de simples appels tracés à la craie sur les murs du quartier latin. Elle est bientôt à la direction du Front national des étudiants. Après l’arrestation du groupe Manouchian, elle adhère au parti communiste, début 1944. Elle rejoint la lutte armée au sein des FTP et apprend à poser des explosifs sur les véhicules allemands. Traumatisée par la nouvelle du massacre d’Oradour-sur-Glane, le 10 juin dans la région d’origine de ses parents, elle entend le mot d’ordre FTP "à chacun son Boche ".
Le dimanche 23 juillet 1944, son groupe reçoit l’ordre d’abattre un haut gradé nazi. C’est elle qui tiendra le pistolet. Pont de Solférino, en plein jour, elle exécute de deux balles dans la tête un membre de l'armée d'occupation. Prenant la fuite en vélo, elle est rattrapée et renversée par la voiture d'un milicien de la police. Il l'emmène au poste, avant de la livrer à la Gestapo. Rue des Saussaies, elle est torturée par les Allemands, avant de l'être par les brigades spéciales de la Préfecture de police. Devant son silence, elle est condamnée à la peine de mort. Internée à Fresnes, puis Compiègne, elle échappe in extremis au peloton d’exécution le 19 août, grâce à l'échange de prisonniers de la Croix Rouge, négocié par le consul de Suède Nordling.
Elle peut rejoindre son groupe au moment précis du début de l'insurrection parisienne. Vient l'attaque du convoi aux Buttes Chaumont (voir notre #1 = post du samedi 19).
Pendant les journées qui suivent, Madeleine Riffaud participe aux derniers combats, toujours à la tête de sa compagnie. Le 25, elle prend d'assaut le tout dernier bastion allemand de Paris, la caserne de la place de la République. La garnison refusait d’accepter la reddition signée par von Choltitz mais, à la fin de la journée, le drapeau blanc finit par être hissé.
Malheureusement un ami résistant qui portait secours à un blessé est lâchement tué sous ses yeux par un soldat nazi. Ce héros de 22 ans, sera l'une des dernières victimes de l'occupation de Paris. Une rue de la Butte Bergeyre porte son nom. Madeleine, elle, reçoit une citation à l’ordre de l’armée: "Toujours à la tête de ses hommes, a donné pendant toute la lutte l’exemple d’un courage physique et d’une résistance morale remarquables".
4 - la Grande Reporter anticolonialiste, en Algérie (mar 22/02/22) facebook.com/groups/racinesdu93/posts/5577569912255146/
Après la Libération, Rainer veut intégrer l’armée régulière, comme ses camarades de combat, qui périront presque tous. "J’ai voulu y aller, mais j’ai été virée parce que j’étais une femme et -circonstance aggravante- je n’avais pas l’âge légal de 21 ans". Commence alors une période difficile, marquée par la dépression. Pas mal de résistants se sont suicidés après la guerre. Madeleine ne suivra pas ce chemin. Ses rencontres avec Paul Eluard, André Vercors, Picasso ou Aragon l'aident à ne pas en finir. Au contraire, ils la poussent à trouver sa nouvelle voie : le journalisme. Une façon pour elle de poursuivre sa lutte pour la liberté. Elle ne veut pas se considérer comme un ancien combattant. Elle poursuivra donc ses combats en tant que journaliste.
Elle commence à écrire dans Ce Soir et Vie ouvrière. Anticolonialiste convaincue, elle devient Grand reporter. Elle se rend à plusieurs reprises en Algérie, d’où elle écrit de 1954 à 1962 plusieurs séries d’articles. Elle est sur place lors du séisme d’Orléansville en septembre 1954. Deux mois avant le début de la guerre d'indépendance, elle publie dans La Vie ouvrière un texte prémonitoire des "événements" qui se préparaient. En 1956, elle est blessée par un attentat de l’OAS qui n’entamera en rien son engagement.
En 1958, après un nouveau séjour prolongé en sanatorium, elle est recrutée à l’Humanité. Elle se rend la même année à Constantine, subissant une attaque de son train, lors du retour à Alger. À la veille de l’indépendance, fin juin 1962, elle est victime d’un attentat de l'OAS sur une route à la sortie d’Oran : un camion lancé sur son automobile qui lui vaut plusieurs mois d’hôpital et de graves séquelles aux yeux et au bras droit. Cela ne l’empêche pas d’y retourner dès l’année suivante, après un court intermède en Iran, dans le sillage de De Gaulle reçu par le Chah, et au Congo Brazzaville, menacé d’un coup d’État après sa récente indépendance. À Alger, elle rencontre Roger Alleg, puis le Che Guevara, invité du président Ben Bella. De cette époque on lui doit "Si j'en crois le jasmin", en 1958, "Ce que j'ai vu à Bizerte", en 1961 et les premiers poèmes du recueil "la folie du jasmin" écrit de 1947 à 1970.
5 - Sous les bombes, dans les maquis du Vietcong (mer 23/02/22) facebook.com/groups/racinesdu93/posts/5580832858595518
Au cours de l’été 1946, elle couvre la conférence de Fontainebleau où se rencontrent des représentants du gouvernement français et du Vietminh. On lui présente Hô Chi Minh qui se prend d’affection pour elle. En 1952, elle couvre le congrès des Peuples pour la Paix à Vienne, pour la Vie ouvrière (hebdo de la CGT) et, en 1954 , la conférence de Genève sur l’Indochine. A Alger, elle interview la délégation des rebelles sud-vietnamiens. L’Humanité publie en une son reportage "La deuxième guerre du Vietnam a commencé". Rentrée au Sud Vietnam par le Cambodge, avec un autre journaliste australien rencontré en Corée, elle y est correspondante de guerre pendant huit semaines.
En décembre 1964 et janvier 1965 elle parcourt les régions qui échappent au contrôle des Américains, partageant la vie des combattants du Vietcong, dont 15 jours d’entraînement de ces soldats irréguliers. Ils sont témoins de la bataille de Binh Gia. De retour en France, ils montent leur film "Dans les maquis du Sud Vietnam" qui passe en 1965 dans "Cinq colonnes à la une". Le livre qu'elle en tire la même année "Dans les maquis Vietcong" connaît un large succès. Fin 1966, elle parcourt 2000 km de routes bombardées par les avions US. Elle en revient avec son livre "Au Nord Vietnam, écrit sous les bombes", paru en 1967. Elle retourne encore régulièrement au Vietnam, et elle est à Haiphong pendant le terrible bombardement de 1972. Soutenue par le général Giap, elle est la seule journaliste étrangère sur place.
Ses reportages lui procurent une forte notoriété et une légitimité y compris au sein du PCF. A partir de 1968 , elle y anime le "Comité national d’action pour le soutien et la victoire du peuple vietnamien", une initiative soutenue par le secrétaire général Waldeck Rochet. Elle est ensuite correspondante étrangère accréditée sur place par plusieurs autres médias européens, suédois, italiens, allemands. Invitée partout dans les rédactions et télévisions, elle collabore avec une chaine de télé ouest-allemande et même avec CBS News aux USA. Ce qui commence à la rendre suspecte au yeux du PCF de l'ère Marchais dont elle se détache progressivement, tout en gardant de solides amitiés personnelles.
6 - l'amour d'une vie, Nguyen Dinh Thi (jeu 24/02/22) facebook.com/groups/racinesdu93/posts/5582768635068607/
En 1951, alors qu’elle se trouve à Berlin-Est pour le troisième Festival mondial de la Jeunesse, une amie journaliste la met en relation avec le poète vietnamien Nguyen Dinh Thi. Tous deux travaillent alors à des traductions destinées à prouver au public français l’existence d’une littérature qui atteste de la profonde culture du peuple vietnamien. Entre ces deux poètes, nés la même année, des liens indéfectibles se nouent. La rencontre de ces deux talentueux jeunes gens était aussi inévitable que la dialectique d'un héros avec un bateau (expression vietnamienne). Madeleine retrouve Thi quelques années plus tard à Hanoï, en 1954, alors qu’il occupe une place importante dans le Parti communiste vietnamien et dans la politique culturelle du pays. Ils vivent ensemble et elle s’attache profondément à sa famille.
Un peu plus d’un an plus tard, après des changements politiques au Nord-Vietnam sous influence chinoise, leur union est considérée comme répréhensible et elle est incitée à rentrer en France. Elle a beau plaider leur cause auprès d’Hô Chi Minh, celui-ci lui présente cette séparation comme un devoir politique : "On ne fait pas la révolution dans le pays des autres". Jusqu’à la mort de Nguyen Dinh Thi en 2003, les textes des deux poètes témoignent de la pérennité de cet "amour de papier". Car ils se sont échangé des milliers de lettres, photos ou collages pendant plus d'un demi-siècle. Et dans l'appartement de Madeleine, il y a eu longtemps une pièce dédiée à Dinh Thi, avec un portrait de lui grandeur nature, ainsi que les reliques éparpillées de tant de souvenirs partagés.
remerciements Maitron, VNexpress
7 - Infiltrée à l'hôpital, dans les linges de la nuit (ven 25/02/22) facebook.com/groups/racinesdu93/posts/5587247544620716/
Après l’intensité de ses expériences de correspondante de guerre, la signature des accords de Paris qui préludaient à la paix ramena Madeleine Riffaud durablement en France. Ce changement de vie risquait de se révéler difficile, mais elle sut se relancer en se rendant sur un front inattendu.
Elle se coule incognito, durant plusieurs mois, dans la peau d’une aide-soignante, pour connaître de l’intérieur le travail, les luttes, les espoirs et parfois les désespoirs du personnel hospitalier. Au terme de cette expérience naîtra un livre choc, lu encore aujourd’hui, sur la vie quotidienne de ces autres héroïnes,
C'est son ami le professeur Jean Roujeau, l’ancien interne « Paul » du temps de la Résistance, qui lui recommande de s'’infiltrer dans le monde en blanc, en se faisant embaucher comme fille de salle avec les aides-soignantes (agent de service, sur la fiche de paye). Elle travaille plusieurs mois à l’hôpital Broussais de l’Assistance publique de Paris, ou dans l’établissement privé Saint-Joseph, en réanimation chirurgicale et en chirurgie cardio-vasculaire. De cette expérience, elle tire une série d’articles, ses derniers pour l’Humanité, puis le livre "Les Linges de la nuit" sorti en 1974. Celle qui se fait appeler "Marthe" y relate sa vie quotidienne sous la forme d’un journal. Ce témoignage, alors rare, émanant d’un milieu en pleine mutation, joue un rôle important dans la connaissance par le grand public du monde de l’hôpital. L'écriture bénéficie de son expérience de correspondante de guerre. Le livre aura un retentissement considérable et sera réédité plusieurs fois (la dernière en 2021) . J’ai eu plus de succès pour avoir vidé les bassines et fermé les yeux des mourants que pour avoir été sous les bombardements des B52". Mais elle ne le regrette pas, elle pense avoir écrit là son meilleur livre.
remerciements : maitron, l'humanité
8 - Témoigner (pour que les copains ne soient pas morts pour rien) (sam26/02/22) facebook.com/groups/racinesdu93/posts/5588495761162561/
Raconter "sa guerre" et témoigner de son rôle dans la Libération de Paris, Madeleine Riffaud n'en a même pas idée pendant de nombreuses années. Ce n'est pas elle, le sujet. Jusqu’à ce que son ami, le grand résistant Raymond Aubrac, la secoue, un 1/2 siècle après. "C’était un très grand monsieur. Il est venu me voir et m’a dit : est-ce que tu vas continuer à fermer ta gueule ? Je lui ai dit : et comment ! Il m’a dit : bon, ça signifie que tes petits camarades, là, qui ont été fusillés à 17 ans, ça t’est égal que personne n’en parle… Je lui ai dit : là tu m’as eue. Bien sûr ça ne m’est pas égal. Eh bien alors, vas-y ! Alors j’y suis allée, et depuis je ne fais que ça." La mémoire sauve, aussi.
Les épreuves subies en 1944 et son contact répété avec la mort l’ont pourtant profondément marquée. Après-guerre, elle suit plusieurs traitements pour passer au dessus de ses douleurs physiques et morales. Elle entreprend également une psychanalyse. Ses actions militantes, ses démarches psychologiques et sa foi catholique la poussent naturellement à des actions de soutien aux malades et d’accompagnement des mourants, et ce jusqu’à l'orée du 21ème siècle.
Pour suivre l'exemple de ses amis Lucie et Raymond Aubrac (eux aussi intimes de Hô Chi Minh), elle témoigne pour des publics de tous âges,. Elle devient une habituée des tournées en milieu scolaire. Elle répond également aux sollicitations pour des entretiens radio et télé ou pour des films documentaires. Ses handicaps physiques ne l’empêchent pas de participer à des cérémonies, par exemple en 2007 à la mairie du 19ème, pour le 60ème anniversaire de la prise du train des Buttes-Chaumont. Encore la même année, elle prend la parole aux obsèques de Lucie Aubrac. Elle répond aux invitations de l’ambassade du Vietnam, ce pays pour lequel elle est restée une personnalité mythique. En 2014, elle est à une cérémonie au Panthéon et à une émission télé pour le 70ème anniversaire de la Libération de Paris. Elle continue jusqu’à ce que, conséquence de ses blessures en Algérie, sa vue s’évanouisse. Jusqu'à ce qu'en 2021, elle devienne scénariste de la bande dessinée qui raconte son histoire.
maitron
9 - Une BD pour témoigner : la rose dégoupillée (dim 27/02/22) facebook.com/groups/racinesdu93/posts/5592989794046491/
Madeleine Riffaud, meilleure scénariste -avec Jean-David Morvan- pour l'album "Madeleine résistante", sur des dessins de Dominique Bertail qui font passer le grand souffle de l'histoire. C'est au Festival d'Angoulême 2022 qu'elle reçoit le prix René-Gosciny. On la récompense là où on ne l'attendait pas, pour un nouveau témoignage sur son engagement en 1940-44. "Je suis contente, écrit-elle sur Facebook, parce que ça va emmerder un peu plus les fachos qui s’amusent à écrire des slogans nazis sur les murs de mon exposition aux Buttes-Chaumont. Et une pensée à Lucie et Raymond Aubrac, qui m'ont poussée à témoigner à une époque où je croyais que je n'en avais plus rien à foutre. Cette BD, c'est la continuité du travail qu'ils m'ont demandé d'accomplir et qui me tient en vie."
Et pourtant, faire une BD de son histoire, ce n'était pas gagné d'avance. Quand le scénariste Morvan la contacte pour la rencontrer et lui parler de son projet, elle commence tout net par refuser. Elle l'envoie sur les roses, certaine que les bandes dessinées c'est juste bon pour les mômes. Mis au courant, son ami cinéaste Jorge Armat la persuade du contraire. Il lui fait comprendre que c'est plutôt un moyen de faire passer son message à de nouvelles générations, en droite ligne des conseils reçus de Lucien Aubrac. Sortir cette BD c'est continuer de témoigner sur cette sombre période, mais simplement sous une autre forme et vers un nouveau public. Car tout dans cette BD est authentique.
Deux ans et des centaines d'heures d'entretiens plus tard, le résultat est là. Paraissent d'abord trois cahiers, suivis en août 2021 d'un recueil les réunissant. C'est le premier d'une série de trois volumes. Il couvre la période de son enfance dans la Somme, à son engagement dans le Comité de libération de l'assistance publique.
En préface de l'ouvrage, Madeleine confie: "J'ai perdu des plumes. Mais si c'était à refaire, je recommencerais. Ce que j'ai fait, des centaines d'autres, des milliers d'autres l'ont fait. Et vous pouvez aussi. Je ne suis pas un symbole. La seule chose extraordinaire dans cette histoire, c'est que je sois encore en vie pour la raconter.
10 - l'Ecole maternelle Madeleine RIFFAUD des Lilas, inaugurée jeudi 31 mars 2022 facebook.com/groups/racinesdu93/posts/5593082997370504/
Madeleine RIFFAUD : une grande dame, à la vie incroyablement remplie, toujours à vouloir faire entendre la voix des opprimés, à prendre les armes de la douleur.
A 97 ans, elle n'a rien perdu de ses convictions, ni de sa personnalité. En 1942, elle devient résistante face aux Nazis. Torturée, elle ne leur parle pas et échappe à la condamnation à mort, avant de participer à la Libération de Paris en 1944.
Elle est grand reporter pendant 30 ans, d'abord pour le journal l'Humanité. Elle couvre la guerre d'Algérie, la guerre d'Indochine suivie de celle du Vietnam.
Elle se fait engager dans un hôpital pour en dénoncer le scandale des conditions de travail des aides-soignantes.
Ses livres sur ses guerres font date, ses poèmes émeuvent Paul Eluard. Son ami Picasso, fait son portrait.
Et aujourd'hui encore, elle fait parler d'elle. En 2021, parce qu'elle est l'auteur d'une BD sur son parcours et ses engagements (prix Goscinny à Angoulême). Et en mars 2022, parce qu'on donne son nom à l'École maternelle de l'allée du Dr Calmette, au coeur du quartier des Sentes, aux Lilas.
Ce qu'elle conseille pour inspirer les enfants, dans leurs combats à venir : "Nous ne sommes pas des martyrs, nous sommes des combattants. Nous ne sommes pas des victimes, nous sommes des résistants! "