202301   -   les BONNES OEUVRES  &  la BIENFAISANCE  d'HIER   -   Racines du 93

En cette fin d'année, l'appel aux dons est devenu fréquent de la part des organisations caritatives. Mais le geste de donner ne se justifie pas seulement avant Noël. Les difficultés à se nourrir, se vêtir ou simplement dormir sous un toit ne datent pas d'hier. Très tôt, des manifestations de solidarité ont vu le jour dans notre ville. Au travers d'organismes de charité (comme on les appelait à l'époque), les Lilasiens sont venus en aide aux plus nécessiteux.

2   des DAMES PATRONNESSES au BUREAU d'AIDE SOCIALE

Un bureau de bienfaisance existe dès les débuts de la commune, en 1867. Madame Rozière préside alors le comité des Dames Patronnesses. Les fonds recueillis proviennent des cotisations de bienfaiteurs, de dons ou du produit des loteries organisées lors des fêtes communales. La municipalité décide de compléments de subvention. En prévision de leur disparition, les citoyens fortunés peuvent également inscrire dans leur testament une donation en faveur du Bureau de Bienfaisance. C'est ainsi que le comte d'Anglemont lègue 20.000 francs-or en 1898, pour la construction de l'hospice intercommunal de la Seigneurie.  Esther Cuvier laisse un montant équivalent, suivant les volontés de son défunt mari. Les rues des Lilas qui portent encore leur nom aujourd'hui datent de cette époque. 

3 En 1885, le bureau de bienfaisance distribue des sabots bridés aux enfants. Il fournit également des vêtements, des médicaments, de l'argent et même des appareils orthopédiques gratuits. Les indigents lilasiens sont 300 en 1898 (60 familles). Ils reçoivent 3 kilos de pain une semaine, 1,5 litres de légumes secs la suivante. En hiver, s'y rajoutent 12 litres de charbon. Les ressources étant limitées, les secours ne sont pourtant accordés qu'en cas de complet dénuement; ce qui laisse de côté l'immense majorité de ceux qui travaillent pour gagner tout juste de quoi vivre. Avant la guerre de 14, les écoliers bénéficiaires vont prendre livraison des godasses qui leurs sont attribuées, chez le marchand de chaussures Meulé, rue de Paris. Les gamins repartent ensuite vers la classe, les galoches au cou, accrochées par les lacets, toujours en rangs serrés.

4 En 1899, est choisie la 1ère Rosière de l'année, parmi une dizaine de présélectionnées. Elles doivent toutes venir de famille nombreuses, où l'on constate "tristesse, misère et désolation". Cela est rendu possible par les legs Didillon en 1896 et Clergeot-Broutise en 1931 (20.000 et 40.000 Francs) qui sont immédiatement placés par la commune. La rente permet  de récompenser la jeune fille "pauvre mais honnête" et "digne d'intérêt" qui est couronnée le 8 mai. De 1932 jusqu'à la guerre, elles seront même deux à pouvoir être fêtées et à défiler chaque année, aux côtés du Maire. L'institution ne renaitra pas après-guerre. 

5   GUERRES, CHÔMAGE et CATASTROPHES

 Les crises économiques des années 1890, puis des années 1920-1930 ont généré un accroissement de la pauvreté. Déjà, après les dégâts de la guerre de 1870-71 contre les Prussiens, nombre de cultivateurs avaient vécu la ruine de  leurs champs et de leurs exploitations. Les Quakers (société anglaise des Amis) étaient intervenus pour offrir aux 43 les moins aisés des semences de pois, de radis et de pommes de terre. En 1888, une quête est organisée pour soutenir les verriers en grève. En 1902, une souscription de 200 francs est votée en faveur des victimes de la montagne Pelée.  En 1904, les familles des mineurs  disparus dans la catastrophe de Courrières bénéficient d'une quête et d'un gala organisés pour elles. Jusqu'à la seconde guerre mondiale, un bal de bienfaisance est encore organisé chaque année au bénéfice des chômeurs-ses des Lilas. Ils sont 500 en 1933. Pendant l'occupation du Fort en 1940-44, les prisonniers internés reçoivent des colis de leurs famille, par l'intermédiaire de la Croix-Rouge. Les Quakers distribuent de leur côté des colis de biscuits et de légumes déshydratés. 

6   CHARITÉ et RELIGION

Le clergé se préoccupe aussi de combattre la misère. Au début du 20ème siècle, le curé Barboni crée un vestiaire, confié à la Conférence de Saint-Vincent-de-Paul, et rêve d'un enseignement gratuit dans sa petite école paroissiale.  L'Armée du Salut inaugure ses conférences en 1893, dans un local au 175 rue de Paris. Les salutistes devancent de plusieurs années l'œuvre de Sainte-Suzanne de Floréal, dans la Cité-Jardins. Un patronage informel s'y monte, place des Roses. 

Une quinzaine d'années plus tard, sur la Zone, l'Armée du Salut dispense la bonne parole, chaque dimanche après-midi. Cela se passe avec chœur et orchestre dans une baraque en bois, au coin de l'avenue de la Porte et de l'avenue des Bouleaux. 

8   Toujours pour faire face à la misère de la Zone, en 1905, le pasteur S.H. Anderson, de la Mission Populaire Evangélique de France (fondée par le  pasteur Mac All), décide de construire une roulotte avec ses propres deniers. Il veut apporter l'enseignement biblique aux enfants qui habitent dans cette  Zone non aedificandi, zone d'extrême pauvreté entre Paris et sa proche Banlieue.

9   Il est bientôt rejoint par les époux Ponsonaille, dont la cour du 22 rue Ledru-Rollin, va servir de lieu de stockage et de réparation des roulottes. En 1911, ils y construisent une chapelle de bois blanc qui devient école du  dimanche pour les enfants. 

10   En 1922, le curé Maupin, l'apôtre des chiffonniers et le zélateur des jardins ouvriers, prend son ministère aux Lilas. Il ne craint pas d'apporter la contradiction dans les réunions politiques, ni de trinquer sur le zinc avec ses paroissiens et les autres, buveurs non repentis. Vers 1925, l'œuvre du Bon Samaritain accueille les familles nombreuses nécessiteuses au 74 avenue Pasteur. 

11  PLUS QUE JAMAIS

De nos jours, la pauvreté n'a toujours pas disparu. La solidarité s'est organisée dans des structures dont l'efficacité et le dévouement sont reconnus par tous. Aux dames patronnesses d'autrefois ont succédé de nombreux bénévoles, au sein d'associations dont les mieux implantées sur le territoire des Lilas sont les Restos du Cœur, le Secours Populaire ou l'Armée du Salut. Leurs missions demeurent hélas toujours d'actualité. 

12 PÉRIODE CONTEMPORAINE

2de partie de cette enquête: les rganisations caritatives contemporaines aux Lilas >> racinesdu93