Tout regard porté sur un jardin ne doit pas se limiter pour l’homme à une simple modification de son environnement, il doit provoquer en lui la césure qui chante son paysage intérieur et contribue à l’enlacement de sa conscience, qui s’ensource ainsi dans de nouveaux rapports avec le monde. La création du jardin représente ce suprême état du loisir, la transposition de la conception humaine la plus haute du bonheur dont l’image référentielle est le paradis, «jardin de la félicité éternelle», récompense des croyants monothéiste.
Demeures de l’enchantement, les forêts, les rivières, les lacs et les sources furent également considérés comme lieux de magie et de trouble surnaturels.
La mythologie déroule, irascible, les travaux d’Hercule, fils de Zeus qui dut à la suite de fabuleux exploits dérober les «pommes d’or» des Hespérides (filles du couchant). Ces pommes offertes en présent de noces par Gaïa à Hera, poussaient dans un jardin situé aux confins du monde, gardées par les Hespérides (filles d’Atlas).
Ainsi le «jardin des Hespérides», le plus ancien et le plus célèbre dans la littérature classique de la civilisation occidentale se situerait au Maroc.
La coutume de l’enterrement dans un jardin reposant sur une réciprocité supposée entre ciel et terre, est une pratique assez courante au Maroc. Dans ce pays la nature est adorée, vénérée et chantée pour ses bienfaits, crainte, haïe et bannie pour ses dangers, la tradition orale est féconde en contes magiques et surnaturels ayant comme espace la proximité des sources, des forêts, etc.
Un enjeu culturel et social
La nature (forêt, lac, rivière, etc.) dans beaucoup de pays est plus un enjeu culturel et social qu’économique. La forêt par exemple, au Maroc, est domaniale: domaine privé de l’Etat mais grevée de droit d’usages reconnus aux populations riveraines.
Le ministère chargé des eaux et forêts gère neuf millions d’hectares d’espaces naturels, soit 12 % du territoire national. Ces espaces représentent une grande partie de nos richesses naturelles et de notre bio-diversité.
Mais comment faire comprendre aux usagers, sur qui pèsent les difficultés du quotidien, qu’ils doivent s’intéresser à la reproduction de l’humanité alors qu’ils n’en ont ni la vision ni les moyens.
La prise en charge des difficultés des différents groupements humains liés à la forêt ne peut se faire que dans le cadre d’une solidarité nationale et internationale concertée. Dans les pays économiquement en devenir la relation entre la nature et l’homme reste intimement liée à l’existence même des peuples.
Sa Majesté Mohammed VI conscient de ce lien a dit: «En sauvegardant l’arbre, on sauvegarde l’espace, en préservant l’espace on préserve l’homme, en préservant l’homme, on préserve tout le pays. L’arbre qui souffre, c’est le pays qui souffre, l’arbre qui vit c’est la nation qui assure sa pérennité».
Confrontés aux problèmes de l’emploi, de déséquilibres financiers ou à d’autres problèmes socio-économiques les décideurs, même sensibilisés à la conservation des ressources naturelles, sont tentés pour des raisons conjoncturelles ou politiques d’ignorer ou d’assouplir les normes de protection.
Mohammed Alaoui Belrhiti
Consul
Consulat général du Royaume du Maroc
7 rue Erckmann Chatrian
F-67000 Strasbourg
Source: Naturopa no 102 / 2004 Page 14