Le jeu de galet tel qu'il a été reconstitué par la famille Chauvet vers 1980
Le jeu de galets, ancré dans la culture locale, se jouait sur un plateau en bois spécialement conçu et mettait en vedette des palets en laiton appelés "galets".
Le jeu de galets se distinguait par son plateau de jeu unique. Fabriqué en planches de bois épaisses, lisses et sèches, le plateau mesurait généralement 5 mètres de long et 52 cm de large. Un rebord de 10 cm de haut entourait le plateau pour empêcher les galets de tomber, tandis que des extrémités plus profondes de 5 cm permettaient de récupérer les galets lancés. L'une des extrémités du plateau présentait une petite avancée en demi-rond, d'un rayon de 6,5 cm, qui jouait un rôle crucial dans le système de points. Le plateau était symétrique, permettant aux joueurs de jouer des deux côtés.
Les "galets" eux-mêmes étaient des palets en laiton, mesurant 5 cm de diamètre et 1,5 cm d'épaisseur. Leur poids et leur composition permettaient un glissement contrôlé sur le plateau, ajoutant une dimension stratégique au jeu.
Le but du jeu de galets était simple: faire glisser son galet le plus près possible du bord du plateau avant qu'il ne tombe. Cependant, la simplicité du but était contrebalancée par les subtilités du jeu, exigeant précision et stratégie de la part des joueurs.
Le jeu de galets se jouait entre deux équipes, chaque équipe ayant 8 galets à sa disposition. Le nombre de joueurs par équipe était flexible, mais les configurations les plus courantes étaient de 1, 2 ou 4 joueurs. Le jeu commençait par un tirage au sort pour déterminer l'équipe qui lancerait le premier galet. Ensuite, les équipes lançaient leurs galets à tour de rôle, dans un style similaire à la pétanque. L'équipe qui plaçait son galet le plus près du bord marquait des points pour ce galet et tous les suivants jusqu'à ce qu'un galet de l'équipe adverse s'intercale.
L'extrémité du plateau était marquée de six lignes délimitant six bandes, chacune numérotée de 1 à 6 points. L'avancée en demi-rond à l'extrémité du plateau marquait 8 points, ajoutant un défi supplémentaire et un élément de risque-récompense au jeu. Les galets qui tombaient du plateau étaient éliminés, tandis que ceux à cheval sur une ligne rapportaient les points correspondant à la plus grande surface du galet placée sur une bande. L'équipe gagnante d'une manche commençait la manche suivante, ce qui ajoutait une dimension stratégique, car il était considéré comme plus difficile de bien placer un galet que de contrer un galet adverse.
Les parties se jouaient généralement en 50 ou 100 points, selon un accord préalable entre les équipes.
Le jeu de galets ne se limitait pas à simplement lancer un palet. Les joueurs expérimentés utilisaient diverses techniques pour influencer la trajectoire de leur galet et maximiser leurs chances de marquer des points.
Faire une bande: Cette technique impliquait de faire ricocher le galet sur le bord du plateau, comme au billard, pour atteindre des positions difficiles ou éviter les galets adverses.
Donner de l'effet: En faisant tourner le galet sur lui-même lors du lancer, les joueurs pouvaient influencer sa trajectoire et son comportement sur le plateau.
Eliminer les galets adverses: Les joueurs pouvaient viser les galets de l'équipe adverse pour les faire sortir du plateau, modifiant ainsi le cours du jeu en leur faveur.
Avant le début du jeu, une fine couche de sable était saupoudrée sur le plateau pour assurer un glissement optimal des galets. Cette préparation minutieuse soulignait l'importance de la surface de jeu et de l'interaction entre le galet et le plateau.
Des variations du jeu de galets existaient dans différentes régions de la Seine-Maritime. Par exemple, à Bosc-le-Hard, les joueurs avaient 6 galets chacun et la petite avancée de bois marquait 10 points, tandis que les cases précédentes marquaient de 5 à 1 point. De plus, dans cette variation, si un galet n'atteignait pas le milieu du plateau, le joueur avait la possibilité de le relancer. Ces variations témoignent de la flexibilité du jeu et de sa capacité à s'adapter aux préférences locales.
Le jeu de galets était particulièrement populaire dans la vallée du Cailly et ses environs au début du XXe siècle. Des témoignages et des cartes postales anciennes révèlent sa présence dans de nombreux cafés de la région, où il servait de lieu de rassemblement et de divertissement pour les habitants.
Malgré sa popularité, le jeu de galets a connu un déclin progressif au milieu du XXe siècle. Des facteurs tels que l'évolution des modes de vie et l'émergence de nouvelles formes de divertissement ont probablement contribué à son abandon.
Pour aller plus loin :
Le jeu de galets du Grand Tendos à Fontaine-le-Bourg (Ahphc - fonds Bizet)
Les jeux traditionnels en Seine-Maritime - Le pucheux n° 111 (septembre 2017)