L'occupation dans une ferme

de Fontaine le Bourg

durant la dernière guerre mondiale

Les chevaux ont été réquisitionnés, alors les bœufs feront le travail.

Parmi les souvenirs que M. Van Walleghem a bien voulu me confier, ceux de la guerre m’ont paru particulièrement intéressants.

L’exode l’a marqué. Il se souvient de toutes ces familles qui, en mai-juin 1940, se retrouvaient au « Poteau de Claville », sur le plateau au-dessus de chez lui, à la recherche d’un abri pour la nuit ou de nourriture. Le jeune homme qu’il était a gardé de toute cette misère physique et morale un souvenir ému. En 1940, une vingtaine d'Allemands ont habité la ferme pendant 4 mois : ils dormaient dans le grenier de l’écurie avec les chevaux au-dessous. Un officier habitait la ferme de Talvanne, chez la famille Bouvaert. Par la suite, les Allemands ne venaient qu'occasionnellement à la ferme des Haies, pour vérifier leur matériel de communication se trouvant dans le grenier de l’habitation située sur une hauteur.

La mairie organisait régulièrement des réquisitions de foin et d'avoine pour les chevaux auprès des cultivateurs. Par contre, les Allemands achetaient aux fermiers des œufs, volailles etc… Mais les rapports avec la famille Van Walleghem ont toujours été très distants.

Pendant l’occupation allemande, les fermes des haies et de Talvanne ont approvisionné en légumes (surtout en pommes de terre) les habitants du bourg. Ces cultures nécessitaient un personnel nombreux, au point qu'une équipe de foot, essentiellement constituée de jeunes travaillant sur les deux fermes avait été surnommée "l'équipe Patates".

Pendant toute la durée de la guerre, les chevaux de M. Van Walleghem ont été réquisitionnés par les occupants et il a utilisé les bœufs pour les travaux des champs. Réquisitionnées aussi les charrettes des fermiers pour toutes sortes de transports de matériel ! Au début de juillet 1944, M. Van Walleghem a emmené des Allemands arrivant de Monte Cassino (Italie) pour le front de Normandie. Il a passé avec 16 autres charrettes, le bac à La Bouille, à minuit, craignant fort les bombardements alliés. Finalement, sa mission s'est arrêtée à Bourgtheroulde, où d'autres fermiers de l'Eure ont pris la relève.

Du 15 au 31 août 1944, après le débarquement de Normandie, il a été réquisitionné une dernière fois avec une douzaine d'autres fermiers des environs et leurs charrettes, pour emmener les Allemands vers des zones encore sous contrôle allemand. Ils se sont arrêtés à L'Aventure (entre Aumale et Neufchâtel en Bray) car la région était libérée fin août.


Françoise Hénaut.

D’après le témoignage recueilli en 2001 d’Omer Van Walleghem (1924-2019)