Au mois de septembre, une habitante de la région de Salon de Provence a pris contact avec la mairie de Clères, disant qu’elle avait trouvé dans un vieux meuble une médaille qui semblait provenir du village de Clères.
Les inscriptions nous donnent déjà des renseignements intéressants : la devise « liberté, égalité, fraternité ou la mort », dans sa forme la plus radicale ("ou la mort"), est typique de la période de la Terreur (1793-1794) pendant la Révolution Française.
La localisation Géographique est bien précise :
"Département de la Seine inférieure," "DISTRICT DE ROUEN," "Canton de Monville." Cette adresse administrative permet de situer précisément la Société Populaire dans la géographie révolutionnaire :
Clères est la commune où la Société était établie.
La Seine-Inférieure est, jusqu’en 1955, l'ancien nom du département actuel de la Seine-Maritime (76).
Rouen était le chef-lieu du District (division administrative de l'époque).
Monville (avec orthographe d’époque) était le chef-lieu du Canton auquel Clères a été rattaché de 1790 à 1800.
Cette médaille était probablement portée par un membre de la Société Populaire de Clères comme signe de son adhésion et de son engagement patriotique.
Rôle de la Société Populaire : à l'instar de milliers d'autres clubs en France, la Société de Clères était sans doute un foyer d'activisme révolutionnaire, assurant l'application des lois, dénonçant les contre-révolutionnaires, et promouvant les valeurs de la République.
Période : la mention de la devise "ou la mort" suggère qu'elle date très probablement de l'an II de la République (1793-1794), le moment où ces Sociétés étaient à leur apogée.
Pour en savoir plus sur ces sociétés populaires, nous avons consulté Wikipédia et autres ouvrages historiques. Voilà ce que nous avons trouvé :
Pendant la Révolution française, on appelait "clubs" des sociétés de personnes qui se réunissaient pour discuter des affaires publiques, politiques ou philosophiques.
Le premier club est le Club breton, fondé le 30 avril 1789 pour que les députés du Tiers Etats de Bretagne puissent coordonner leurs actions au sein des Etats généraux. Rassemblant bientôt des députés d'autres provinces, il devient à l'automne 1789 la Société de la Révolution, puis la Société des Amis de la Constitution (qui va devenir le Club des Jacobins) avec pour objectif de travailler à l'affermissement de la Constitution.
En 1790, les Sociétés des Amis de la Constitution, à l'origine composées de notables aisés réformistes, se multiplient en France et deviennent des acteurs importants de la politique locale.
La plupart des clubs de province sont parrainés par le Club des Jacobins. Au nombre de 3 à 6 000, ils ont une action de formation politique et d'information des citoyens. Par exemple (société populaire de Montivilliers), un sociétaire propose de nommer un lecteur qui, les jours de marché, sera chargé de faire lecture aux cultivateurs assemblés des parties les plus intéressantes de « la feuille du cultivateur ».
Les affiliations et les parrainages constituent un réseau de sociétés populaires qui deviennent les relais politiques des clubs parisiens.
A partir de juin 1793, les sociétés populaires sont épurées de leurs membres les plus modérés. Protégées par la Convention, elles deviennent des forces politiques à part entière et discutent de tous les sujets. Pendant la Terreur, dans chaque ville, une société populaire veille, en liaison avec les municipalités et les comités de surveillance, à la bonne application des lois et dénonce les contre-révolutionnaires.
Après le coup d'État de Thermidor, le club des Jacobins est définitivement fermé le 21 brumaire an III (11 novembre 1794). Les activités des Sociétés populaires sont progressivement limitées jusqu'à leur fermeture imposée le 6 fructidor de l'an III (23 août 1795).
Et la société populaire de Clères ? Aucune trace dans les archives de la mairie. Mais nous avons trouvé des renseignements sur la société populaire de St Germain sous Cailly, commune voisine, que vous trouverez en cliquant sur le lien ci-dessous.
Dans cette histoire, il reste un mystère : comment cette médaille a-t-elle pu se retrouver si loin de Clères, conservée pendant plus de deux siècles ? La personne qui nous a envoyé la médaille n’a, semble-t-il, aucun lien avec notre région. Sa famille a toujours vécu dans le sud de la France et aussi en Espagne. Elle a trouvé cette médaille dans une boîte contenant de vieilles pièces de monnaie qui aurait été achetée par sa famille chez un brocanteur. Notre chance a été que cette personne comprenne l’intérêt de cette médaille pour notre histoire locale et prenne la peine de nous la faire parvenir.
Un grand merci à elle !