Le dernier Caïffa

En 1889, Michel Cahen rachète au Havre, une cargaison de café en partie détruite et la vend, avec succès, en porte à porte. Il étend son commerce aux produits coloniaux et développe un réseau dans les campagnes grâce à une armée de vendeurs en uniforme et de carrioles souvent tirées par des chiens ou des ânes.

François Autun (1877-1949), habitant de Clères,  est l’un de ces colporteurs qu’on attendait …

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L’histoire raconte qu’au Havre, en 1889, à la suite d’un « coup de vent », un bateau arrive au port avec sa cargaison de café en partie noyée, donc invendable. Un certain Michel Cahen, épicier parisien, rachète cette cargaison, la fait sécher et griller, et vend la marchandise en porte à porte. L’idée semble bonne : il devient importateur de café et en organise le colportage. 

En 1890, la société « Au planteur de Caïffa », fondée par M. et Mme Cahen étend son commerce à d’autres produits coloniaux, thé et cacao. L’entreprise organise autour de la maison mère située à Paris tout un réseau de succursales à travers la France. La marchandise transite essentiellement par chemin de fer, est souvent livrée en vrac, le destinataire étant chargé de peser et ensacher les produits dans des pochons imprimés au nom de l’entreprise. 

Des petites voitures à trois roues tirées parfois par un âne, un cheval, une chèvre ou même un chien sillonnent les campagnes. Avec son équipement immédiatement reconnaissable (uniforme vert-bouteille, casquette portant le nom de la maison,  caisson d'environ 1/2 mètre cube, aux roues cerclées de fer qui tintent sur les cailloux ou les pavés, peintes aux couleurs de la société), le « Caïffa » devient aussi populaire que le facteur.

L’entreprise connaît une forte expansion et étend sa gamme de produits : café, thé, cacao, farine,  pâtes, sardines, biscuits secs, huile, vinaigre, sucre, sel… mais aussi savon, lessive, mercerie. Des produits essentiels pour les habitants isolés de nos campagnes. 

Les achats donnent lieu à l’attribution de timbres de fidélité qui permettent de gagner par exemple de la vaisselle (une ou deux assiettes à la fois : on a envie de posséder le service complet et on est fidèle au marchand ambulant !).

Après la guerre, la société est en déclin. En 1962, la société « Au planteur de Caïffa » achète une partie de « la Maison du café » et recentre son activité sur le café. L’époque des colporteurs de nos campagnes était définitivement terminée !

L’activité de colportage de M. Autin semble s’être arrêtée avec la guerre. Dans le recensement de 1946, il est mentionné comme jardinier, tandis que sa femme est “gérante le Caïffa”. Les Anciens du village se souviennent très bien du café-épicerie qui se tenait encore là après la guerre, au début des années 50.

Au fil du temps, le mot de Caïffa est devenu synonyme de café. Il désignait aussi l’homme : « on attend le caïffa ».

Françoise Hénaut