Le Camellia, histoire d'une passion nantaise

Conférence de Stéphane LEHUEDE, professeur des Sciences et Techniques Horticoles au lycée horticole du Grand Blottereau à Nantes, membre de l'International Camellia Society (ICS) et de la Société Bretonne du Camellia (SBC).

Le Camellia a des origines asiatiques :

Il est déjà connu des Chinois depuis le IVème siècle. Il était appelé Cha en Chine et Tsubaki signifiant "arbre aux feuilles luissantes" au Japon.

Il a été décrit par Engelbert Kaempfer en 1712. Ce n'est qu'en 1737 que von Karl Linné donne le nom de Camellia pour rendre hommage à l'oeuvre botanique du père jésuite Joseph Kamel (Pater Camellus).

Son introduction en Europe débute probablement à partir de 1550 au Portugal et en Espagne. Puis en Angleterre en 1739, Italie en 1760, Hollande 1777, France en 1783 (Nantes en 1806), Autriche en 1793 et en Belgique en 1799.

Son arrivée à Nantes : 1789, Abraham Ferdinand Favre arrive à Nantes. Il est maire de 1832 à 1851. Il importe ses premiers camélias. En 1806 il achète des graines en Angleterre et fait ses semis. Son intuition est d'acclimater les camellias en extérieur. Il aura jusqu'à 7000 pieds de Camellias dans sa propriété située près des Sorinnières.

Il est bientôt imité par de nombreux pépiniéristes nantais. En 1851, la Société Nantaise d’Horticulture recense 250 000 camélias cultivés et une production annuelle de 60 000 plants. Le camellia est produit pour la fleur à couper, notamment les "boutonnières" envoyées à Paris.

A cette époque les obtentions nantaises sont nombreuses en particulier dans la pépinières de Henri Guichard. On en compte plus de 57 depuis 1833. Sans parler des camélias disparus sans aucune description qu'il est impossible de retrouver.

Il faut ajouter les obtentions et introductions récentes des pépinières Thoby, soit plus de 50 variétés nommées. (camellias hybridés dans sa pépinière ou graines achetés en lots et sélectionnés par lui)

Enfin, plus récemment les obtentions d'Alfred Lemaître : Casimir (2004) ; Souvenir de Ferdinand Favre (2004) ; Sylvia Sass (7 juin 2011) ; Kizuna (11 mars 2012) ; Sèvria (19 mars 2012) pour n'en cités que quelques unes.

Ce sont les résultats d'hybridation contrôlée (parents identifiés), d'hybridation naturelle (seule la mère est connue, ce qui est la cas pour des graines récoltées sur un pied identifié) ou les semis de la chance (parents inconnus).

Depuis : Les «héritiers» d’ Henri Guichard

En 1864 : Henri Guichard ouvre sa pépinière. En 1911, ses filles, les Soeurs Guichard reprennent ses activités

En 1955 : Claude Thoby rachète la pépinière et c'est son fils, Jean Thoby, qui lui succèdera jusqu'en 1998.

En 2007 : rachat de la pépinière par le Groupe Comte (Jardiland) et en 2009 c'est la fermeture définitive. L’aventure Thoby se poursuit à Mazamet et Gaujacq.

Qu'en est-il alors de l'héritage nantais ?

La collection municipale est menacée : 600 variétés sont recensées … mais sur 5 sites, avec 5 listes différentes sans recoupement.

Une "commission Cammellia" est mise en place composée de différents acteurs parmi lesquels : Jacques Soignon, directeur du SEVE de Nantes ; Alfred Lemaître, membre SNH, SBC et ICS ; Romaric Perrochaud, directeur du Jardin des Plantes de Nantes ; Philippe Férard, botaniste au Jardin des Plantes ; Stéphane Lehuédé, membre SNH, SBC et ICS* ainsi que W. Bordet, B. Bouet, M. Bouyer, M. Chassé, D. Denmate, F. Le Cam, D. Surget et L. Teffo, tous membres ou retraités du SEVE de Nantes.

Ses objectifs

1-constituer une seule liste inventaire de la collection

2-faire des achats avant la fermeture des Pépinières Thoby

3-prélever des boutures chez A. Lemaître

4-se faire reconnaître «Collection Nationale de Référence» par le CCVS (Conservatoire des Collections Végétales Spécialisées)

5-accueillir le Congrès International du Camellia de l’ICS

La collection nantaise aujourd’hui :

Les objectifs sont atteints :

➢1200 variétés réparties sur 5 sites

➢Un Congrès International pour 2018

➢Une «Collection Agréée» par le CCVS

➢La création de la «Camelleraie», véritable carré de pieds-mères à la pépinière municipale du Grand-Blottereau

➢Inventaire permanent de la collection

➢Programme d’hybridation contrôlée depuis 3 ans, au Lycée Horticole du Grand-Blottereau (Nantes)

➢De nombreux échanges avec des collectionneurs étrangers (Etats-Unis, Belgique …)

Conclusion :

Le genre Camellia c'est plus de 250 espèces:

chrysantha, fraterna, granthamiana, grijsii, japonica, japonica rusticana, oleifera, reticulata, sasanqua, sinensis, transarisanensis, transnokoensis, tsaï ..

... et des milliers de cultivars ...

La collection nantaise aujourd’hui comprend :

➢75% de Camellia japonica

➢7% de Camelliahybrides

➢5,7% de Camellia x williamsii

➢5% de Camellia sasanqua

➢2,5% de Camelliabotaniques

➢1,6% de Camellia reticulata

➢1,2% de Camellia rusticana

➢1,1% de Camellia japonica de Higo

➢1% de Camellia x hiemalis

➢0,5% de Camellia wabisuke

Pour terminer quelques photos pour présenter quelques espèces et mettre en évidence la grande diversité de formes des fleurs et des feuilles des Camellia japonica....

Les premiers Camellia japonica arrivés en Angleterre sont liés à l'histoire du thé. Les Anglais, voulant cultiver le thé pour des raisons économiques, demandèrent aux Chinois des graines de Camellia sinensis (théier). Ce sont des graines de Camellia japonica qui furent livrées, plante sans utilité économique car sans théine, mais d'un réel intérêt horticole. Cett arbrisseau à fleurs simples, rouges, aux étamines saillantes est facile à hybrider. Ce camellia, ainsi que ceux auxquels il donna naissance, seront les seuls connus en Europe durant plusieurs dizaines d'années. Ils sont cultivés en serres chaudes.