Le Jardin du Marais

Paul BRUNET

Un jardin de convictions

Yves Gillen nous accueille dans son jardin de plus d’un hectare créé à partir de 1975.

Muni de son téléphone portable en bois (un faux bien sûr), qu’il exhibe fièrement, l’ « affranchi jardinier » tient à nous expliquer sa philosophie et son parcours avant de commencer la visite.

Il nous dresse le portrait de la société de surconsommation qu’il refuse, souligne l’absurdité et l’irresponsabilité de technologies comme le nucléaire, nous invite à aller faire du poney plutôt que de prendre l’avion pour monter sur un dromadaire. Il appelle à vivre simplement, à connaitre, apprécier et respecter ce qui nous entoure : « plus on a de prothèse (portables, tablettes…), plus on s’éloigne de nos instincts ».

C’est en accord avec cette philosophie du vivre au jour le jour, de l’éloge de la lenteur, que lui et sa compagne Annick, alors âgés d’une vingtaine d’année en 1970, sillonnent la France à roulotte, avant de se sédentariser quelques années plus tard sur les lieux du jardin.

Un terrain, une maison à 17 000 francs, une éolienne puis dix ans plus tard, un système de panneaux solaires, une douche écologique (grossièrement, un sceau troué), ils vivent alors sobrement de la taille des roseaux et de la production de leur potager. Annick s’occupe du jardin, et lui du potager.

Leur aventure a été racontée par Annick (décédée depuis), dans son livre « Les affranchis jardiniers » (Editions Ulmer).

Les méthodes d’Yves Gillen

Yves Gillen base son travail sur la méthode des hortillonnages d’Amiens, les conseils de la revue Le jardin des 4 saisons, et le livre de Claude Aubert, Le Potager biologique.

Le jardinier est le « chef d’orchestre de la nature », ici pas de moteur, pas de chimie. Un sol nu serait comme un individu dépourvu de peau qu’on laisserait au soleil. Paillage, compostage (1/3 d’azote, 2/3 de carbone), binage, grelinette, purins et décoction sont la base d’un jardin vivant et en bonne santé, où 10% est partagé avec les « ravageurs ».

Un potager peut et doit aussi être beau. Les amarantes (famille du Quinoa) plantées ici et là le long du potager sont du plus bel effet.

Un terrain entretenu et vivant sera beaucoup moins vulnérable aux pestes végétales. Yves Gillen fait l’apologie de la tondeuse à main hélicoïdale. A condition bien sûr de ne pas chercher à avoir des hectares de gazons à l’anglaise.

Les déchets de tonte seront un apport bienvenu dans le paillage, répondant au besoin d’azote que provoque un paillage simple. Faute de déchets de gazon, on peut ajouter du purin d’ortie. On jardinera bien sûr avec la lune « si la lune peut provoquer les marées, il n’y a pas de raison de se refuser à croire qu’elle a une influence sur les végétaux ». On pratiquera la rotation des cultures, sur des parcelles d’une largeur d’un mètre vingt environs.

Le hache paille permet produire un excellent paillage

Avis aux amateurs, 20 m² de potager par personne pourraient assurer 75% d’un régime végétarien.

Un jardin plein de surprises

Le jardin d’ornement, tout au naturel, nous réserve bien des surprises.

De très jolis sujets, nombreux et variés, placé avec goût par la nature ou son « chef d’orchestre ». Allée des roses, allée des Églantiers, des Camélias, des Azalées ; Île aux nains, Île aux fées, jardin d’ombre, Nouveau jardin, Jardin sauvage, passerelles, tunnels, étang…

Myrica gale (Myrte des marais, piment royal)

Un jardin à voir et revoir.

Après la visite Pique Nique convivial au bord de l’étang du jardin de Kermoureau.

Un très bon moment pour les amateurs de gâteaux que beaucoup ont préparé et partagé.