Article sur la Stèle paru dans « Loire et Terroir »

Une sirène a Neuvy-sur-Loire

La stèle réalisée à la mémoire des mariniers disparus en Loire par le Sculpteur Hervé Mhun, originaire de Saint-Satur-Saint-Thibault (Cher), mérite l’attention.

Placé sur le quai de façon à être très visible de la Loire, elle figure une sirène dont on peut rapprocher la signification des enseignements tirés aux travers des voyages d’Ulysse dans l’Odysée. Ainsi sa présence rappelle les voyages et les dangers de la navigation sur le fleuve. Elle signale symboliquement le bon passage et les écueils à éviter, que ce soit dans la réalité ou sur un plan plus initiatique. Elle invite aussi les navigants à faire attention et à prier afin qu’ils rentrent sains et saufs, tout comme Ulysse pour rentrer à Ithaque.

L’élévation de cette stèle a été faite à l’initiative de Paul Fougerat, grand passionné de la Loire. Celle-ci avait fait l’objet d’une souscription patronnée par Maurice Genenvoix en personne. Une fois en place, la stèle a donné lieu, le 11 septembre 1965, à une manifestation associant personnalités civiles et religieuse avec bénédiction de la sirène par l’abbé Thévenet, et lecture d’un texte sur le Loire par un ancien enfant du pays, M. Berneau, maire et pêcheur alors installé à Sandillon dans le loiret. Avait aussi participé à l’évenement Paul Godon de Saint-Thibault, avec son bateau le « Rémi des Rauches », à bord duquel se trouvaient « la Sabotée sancerroise » et la « confrérie de Saint Roch ».

Une manifestation qui montre que les initiatives en faveur d’un renouveau de la marine de Loire et des fêtes de batellerie ne date pas d’hier et que l’on ne sait bien souvent, sans le savoir, que reprendre en les complétant le cas échéant des initiatives passées. M. Berneau, dans la lecture du texte qu’il avait rédigé pour la circonstance faisait état du plaisir qu’il avait, ainsi que ses rares collègues qui exerçaient encore sur la Loire, d’avoir à évoquer les souvenirs de ceux qui l’avaient précédé dans le profession et sa profonde satisfaction à l’idée de voir élever dans un lieu aussi bien choisi une stèle venant rappeler à tous, que la marine de Loire et ceux qui l’on servie :

« Les mariniers ont bien existé, et cela pendant des siècles. Tout l’historique de cette marine a été fait et retracé par des voix plus autorisées que la mienne, je parlerais cependant du comportement de ces mariniers, au demeurant fort épris de liberté, ne ménageant pas leurs peines car ce métier n’était pas toujours favorisé par la nature. Périodes d’eaux basses qui nécessitaient l’établissement d’un « rion » pour évacuer les sables par des équipes de chevalleurs, grand froids provoquant les embâcles de glace et ensuite ces débâcles dont souffraient de nombreuse embarcation, et aussi les grandes colères du fleuve, les périodes d’inondations. Dans ces circonstances, et souvent au péril de leur vie, tous répondaient présent pour sauver leurs semblables menacés par les eaux. Tout cela sans forfanterie ni gloriole, mais avec seulement le sentiment d’avoir fait le devoir d’hommes. »

Une intervention pleine de sens dont les paroles ont été avec le temps oubliées ainsi que ce qui avait prévalu au choix de faire figurer une sirène. Autant de choses qui méritaient d’être rappelées. Elle n’a a priori rien à voir avec la petite sirène de Copenhague, puis qui nous a été susurrée, puisqu’elle n’a pas une queue de poison mais des jambes pour regagner la terre ferme, et cela en conformité avec le conte tel qu’Andersen a pu l’imaginer.

Source : Article paru dans "Loire et Terroir" N° 80-2012