Vannier Roland

Vannier Roland

J'étais à l'école de Thou (45 - Loiret) au mois de Mai 1940 et l'on pouvait voir sur ses murs, ainsi que sur ceux du village, de grande affiches sur lesquelles il était écrit : « Nous vaincrons cas nous sommes les plus fort » Pour les enfants de 10,12 ans, c'était la fête, une joie de ce que nous étions les meilleurs, donc nous étions sans crainte.

Un jour, début juin, la maîtresse Mme Pinsard nous dit : « A partir de demain il n’y aura plus d’école » Nous devons partir, il faut évacuer le village.

Les gens du pays étaient en effervescence, ma mère était veuve, mes deux frères aînés, âgés de 20 et 18 ans travaillaient dans une ferme, et comme le fermier Mr Leplatre partait aussi en évacuation, ma mère lui a demandé de bien vouloir nous emmener avec lui. Il a accepté et nous sommes partis dans deux grandes voitures, c’est à dire des charrettes tirées, chacune par un seul cheval, on appelait ça un tombereau et aussi : Patache. La Patache c’était une voiture attelé à un cheval, servant pour aller au marché par exemple.

Nous sommes partis de Thou (Loiret) passés par Faverelles, Arquian, La Charité.

Nous étions au total 22, dont 11 de notre côté. Je suivais avec un vélo, ainsi que le fils Leplatre. Une voisine, Mme Honorine Boleau, est venue car nous ne voulions pas qu’elle reste seule. Par précaution, nous avons aussi emmené une grande cage grillagée avec dedans des poules et des lapins.

Un jour de grande soif, nous sommes descendus dans la cave d’une maison, mais nous n’avons rien trouvé, d’autres étaient passés avant nous, tout était vidé.

Avant d’arriver à La Charité, nous nous sommes arrêtés, car il y avait un bombardement en cours. Nous nous sommes abrités comme nous pouvions. A la fin du bombardement, Mr. Leplatre nous a dit : « J’ai eu de la chance, j’ai entendu les balles siffler dont deux ont traversé les groseilliers juste à côté de moi »

Au moment de reprendre la route, un motocycliste habillé en soldat, nous a dit de ne pas aller plus loin, que la guerre était terminée, et que nous devrions rentrer chez nous. Mr Leplatre a toujours pensé que ce soldat habillé en soldat français n’était pas français mais allemand, que faudrait-il en penser ?

Nous reprenons la nationale 7, il y avait de superbes platanes le long de la route, avec au pied de gros tas de pierres peints en blanc, ce qui nous a beaucoup intrigués. Les routes étaient plus lisibles, et pouvaient être prises en enfilade par l’aviation Allemande où Italienne.

Je me rappelle très bien du pont de la Charité qui venait d’être bombardé; une pile avait été touchée par les bombes avec des voitures à cheval dessus, beaucoup sont morts avec ce bombardement.

Nous avons continué un peu plus loin. Nous nous sommes arrêtés dans un petit village. Nous y sommes restés 4 à 5 jours environ. Je me rappelle très bien de mon frère Joseph âgé de 20 ans, ouvrier boulanger. Il a fait du pain pour tout le village.

Ensuite nous sommes passés de l’autre côté de la Loire et nous sommes revenus par l’autre rive, jusqu’a Briare pour passer sur un pont bateau qui avait été construit par les allemands. Nous sommes rentrés chez nous fin Juin 1940.

Arrivés à la ferme de Mr Leplatre, ferme des Clous à Thou, nous trouvons les Allemands installés dans les bâtiments. Il n’y avait plus rien, ils avaient même mangé toutes les bêtes.

Ensuite je suis allé garder des vaches à la ferme du Château de Thou qui était aussi occupé par des soldats Allemands. Le propriétaire Mr. Deblanpret et sa famille logeaient dans les communs.

Et un jour les soldats Allemands sont allés dans les prés, sur les 40 vaches, ils ne nous en ont laissé que 8. Ils ont ensuite exigé que nous les amenions nous-mêmes à l’abattoir.