1919 : Agenda de Ludovic Bedu

1919 : Agenda de Ludovic Bedu

2 Janvier : Billets de tombola pour les orphelins de guerre : 2 fr.

3 Janvier : Mes enfants m’écrivent pour la nouvelle année.

5 Janvier : M. Bouvet le chef de gare de Neuvy est venu me voir : la douleur, au niveau du foie le fait toujours souffrir, je ne crois pas à une maladie du cœur ou à une lésion du foie ou même de son appendice contre l’avis des confrères !

9 Janvier : La Loire est arrivée à son maximum 3 m 30 ; La pluie continue ce qui la fera encore croitre.

10 Janvier : Louis me dit que son colonel est revenu, qu’il a un aide et peut se reposer et que sa famille est en bonne santé. Il ne pense pas venir avant le 15 mars.

11 Janvier : J’ai répondu à ma fille Emilie que Sylvain Héliard ramènera la malle de Rosalie à son prochain voyage.

12 janvier : Cet escroc de Bonnejoy m’envoie 100 fr en attendant, dit il, que sa société soit constituée. C’est les 3éme fois depuis 18 mois qu’il me barbe de la formule !

16 Janvier : J’ai fendu un peu de gros bois que Rosalie rapporte de l’île Gaudron ; Mais ma jambe malade et mes pauvres reins sont très douloureux.

17 Janvier : M. Héliard et ses fils sont venus me voir : Sylvain n’a pu recevoir ma lettre à temps et il demandera à son ami Rosnat qui sera démobilisé fin du mois, de revenir et rapporter la malle de Rosalie qui est à Lyon chez ma fille.

19 Janvier : Comme tous les jours ou presque, Rosalie est allée sur l’île Gaudron pour faire et rapporter quelques fagots un peu vaseux, avec peine en enfonçant dans la boue amenée par la crue.

20 Janvier : Rosalie qui a été touché nos 2 allocations militaires soit 90 fr.

Elle a payé nos arriérés soit : Beauchef réparation d’ustensiles : 8 fr 75 – Docks provisions : 8 fr 25 – Merlot charbon : 10 fr –Millet épicerie : 19 fr 50 Chollet réparation chaussures : 7 fr 60 – Poisson 1 kg : 4 fr. Assurance de la maison pour 1918 : 17 fr 20.

21 Janvier : J’ai réglé à Pierre Rondeau le passage de Rosalie et de ses fagots, chargement et déchargement : 1 fr 50.

26 Janvier : M. Bouvet souffre moins et la douleur qui change de place est très supportable ; elle va de droite à gauche en passant par l’estomac. Quel est le diagnostic des majors ???

1 Février : Emilie m’a écrit et envoyé un tube d’aspirine plus un petit paquet de tabac ; Louis m’envoie des bons de pain et s’excuse de n’avoir pas pu trouver de tabac.

8 Février : Louis et Roger m’envoient de bonnes nouvelles ; ils espèrent être démobilisés tous deux en Avril. Je ne peux envoyer à Roger les papiers demandés en lettre recommandée car la poste n’est ouverte que le matin.

9 Février : Rosalie est partie faire du bois comme toujours mais elle est revenue avec une belle salade de pissenlit.

10 Février : Roger Poisson le fils de Rosalie m’envoie des tickets de pain et demande les talonnettes comme il avait envoyé le modèle à sa mère. Rosalie voit cela à l’usine avec son patron.

19 Février : Après de nombreux courriers au préfet et sous préfet pour M. Beauvois d’Annay, afin d’avoir l’allocation Militaire, il était enfin accepté. Mais il fallait réclamer !!!!

2 Mars : M. Bouvet est venu me voir, il va de mieux en mieux, mais continue son régime de thé léger et vin fortement mouillé.

10 Mars : Louis m’écrit qu’il sera démobilisé avec la classe 1904 le 21 mars, et faisant partie de la réserve, la solde est supprimée pour les officiers dans son cas, à compter du jour de la démobilisation. C’est du Joli !!!

15 Mars : M. Margot m’a apporté un bulletin à remplir pour loyers impayés etc. C’est encombré de détails inutiles et vraiment administratifs ! Il y a crise du papier, paraît-il, mais pas dans nos ministères. A quand le feu là-dedans ?

16 Mars : Louis me dit qu’il part de Périgueux le 20 à minuit et qu’il sera à Cosne le même jour et à Neuvy à 3h 20.

17 Mars : Rosalie est allée faire des fagots sur l’île, elle est partie à 11 h et est revenue avec une forte charge à 6 h.

20 Mars : Rosalie est partie à 8 h pour Cosne ; elle espère en revenant trouver Louis et les siens. Ils se sont retrouvés à Cosne et revenus ensemble à Neuvy. Ce soir il pleut à verse.

21 Mars : Après une bonne nuit de repos, mes enfants se sont trouvés frais et dispos. Le petit Dovie est mignon et sage.

22 Mars : Auguste Desenne est venu nous voir et s’en est retourné à son bataillon stationné à Digoin en attendant sa démobilisation qui aura lieu le 20 avril. Clément Gauthier est venu aussi nous dire que ses deux fils sont revenus : l’ainé Henri reprend son poste d’instituteur dans la Haute Marne et Fernand va à Paris conduire des automobiles.

23 Mars : Pierre Boucher et sa femme Marguerite sont venus nous rendre visite ; Pierre va bien et se trouve heureux d’être libéré et de pouvoir être avec ses enfants.

24 Mars : Pierre Charpin est venu avec sa femme et son petit garçons de 18 mois nous voir ; il pense être libéré fin avril.

25 Avril : Roger écrit un mot et espère être parmi nous le 5 ou 6 avril. Il reste à Paris pour le moment car il espère être démobilisé le 2 Avril.

27 Avril : Après le travail, Rosalie a été à Gardefort ; elle n’y a rien trouvé ni œufs ni lait.

28 avril : M. Perret est venu ce soir nous offrir gracieusement une bouteille de 1906 pour fêter le retour de Louis.

29 Avril : M. Baron est venu me voir ; il a 80 ans et se porte assez bien ; il demeure maintenant au bourg avec sa fille veuve de Cyprien Morlet.

30 Mars : Ce matin la terre est couverte d’une couche de neige de 6 cm et il neige encore. La Loire est sur le quai.

Depuis le 20 mars, arrivée de mes enfants, il a plu presque continuellement et le petit Dovic (Ludovic) n’a pu être un peu promené qu’une fois. Il est très bel enfant, nerveux et fort pour ses 9 mois ½. Sa petite Maman le soigne minutieusement et le nourrit avec abondance de lait maternel qui ne tarit pas. Elle a maigri un peu mais l’état général est bon. L’enfant est très mignon malgré l’évolution dentaire et quelques petites crises mais il crie que rarement.

1 Avril : M. Dumont est venu me remercier pour mes démarches afin que sa mère soit réintégrée dans la totalité de son allocation, avec rappel. Ce mois-ci elle aura 15 fr qui lui ont été indument supprimés en mars.

7 Avril : Roger est arrivé à 2 h 18 et Louis était au devant de son frère à la gare avec sa famille. Sa santé est bonne.

9 Avril : Roger est parti à la pèche pour essayer de prendre des barbeaux à la ligne plombée ; mais la crue d’Allier a refroidi et troublé l’eau : d’où pas de réussite.

12 Avril : Roger et Louis sont partis en Berry essayer de trouver du laitage ; ils ont péché dans les Canche de Houdeau et malgré le mauvais temps, ils ont pris quelques poissons dont une perche de 430 gr.

14 Avril : Roger et Louis sont partis à 8 h 28 pour Paris afin de s’occuper de leurs affaires et trouver si possible une situation convenable.

15 Avril : Demande à Mme Guillot le prix des poulets quand on en trouve : lorsqu’ils pèsent 5 kg la paire est vendu 30 fr.

16 Avril : Les garçons ont fait un bon voyage avec un arrêt de 1 h 30 à Montargis où ils ont déjeuné avec leurs provisions.

17 Avril : Louis ne peut rien trouver pour l’instant comme travail pour lui à Paris. Emilie écrit de Lyon qu’une place de comptable est vacante à l’usine Hotschiss et donné à son frère tous les renseignements. Il faut savoir l’anglais…

18 Avril : Louis pourrait avoir une place au Continental vers le 15 mai comme chef comptable 300 fr logé et nourri. Marie Louise a pu promener son petit Dovic au soleil de l’après midi.

20 Avril : Louis Cornu est venu pour écrire au 11e Régiment du Génie pour son livret et ses carnets de pécule.

22 Avril : Louis reviendra dès qu’il aura reçu des nouvelles de Lyon et qu’il aura les renseignements précis du crédit foncier.

23 Avril : Notre fidèle Rosalie va faire des fagots sur l’île de Gaudron pour nous approvisionner en bois.

27 Avril : Rosalie est partie à Cosne pour l’enterrement de son père nourricier : le père Serveau.

3 Mai : Louis est allé à Cosne où il a été démobilisé et déclaré inapte à tout service militaire.

4 Mai : Malgré ses douleurs mon pauvre blessé est parti aider Rosalie pour couper du bois sur l’île. Ils ont rapporté de belles perches et beaucoup de fagots ; ils ont laissé sur l’île 12 bourrées que Rondeau ramènera demain. Payé pour les traversées le passage de Rosalie, comme toutes les fois, 1 fr 50.

5 Mai : Mme Félicie Billiard m’écrit de Rouen qu’elle reviendra de chez ses enfants lundi 6 si le temps le permet, conduite par Joseph Lefèvre dit Béjot en auto.

6 Mai : Félicie est revenue de Rouen en auto avec le Docteur Louis Boucher qui ramènera sa femme à une date ultérieure ; tous les enfants se portent bien mais la santé d’André Billiard laisse à désirer suite de guerre et surmenage.

10 Mai : Eugène Gaudron m’a dit que Rosalie pouvait couper du bois sur l’île même après le 15 mai, parce qu’il n’y a point d’herbe à l’endroit où elle coupe et fait ses fagots.

11 Mai : Rosalie a payé à M. Buron une note de fourniture d’avoine et grains datant de 1916 : 20 fr.

12 Mai : Mes enfants et Rosalie ont profité du beau temps pour aller sur l’île. Louis et Rosalie ont coupé de belles perches et fait quelques bourrées que le passeur amènera ultérieurement.

13 Mai : Mon petit Dovic a été vacciné ce matin ; la sage-femme est venue à 10 h et lui a fait 2 piqures à chaque bras. L’instrument est une aiguille creuse plus pratique que la plume et même la lancette, souvent maniée par des mains inhabiles.

15 Mai : Avant d’aller couper du bois sur l’île, Louis a acheté une alose de 2 kg 200 et du beurre qui valait 5 fr la livre au marché ; après il a rapporté 53 perches grosses plus 27 bourrées.

20 Mai : Le vaccin a produit un bouton sur le bras gauche de Dovic ; l’enfant souffrira moins.

25 Mai : Louis et Rosalie sont allés sur l’île pour terminer le carré entrepris et ils ramèneront cette fois tous les fagots.

28 Mai : J’ai réglé à Pierre Rondeau le solde de tous les voyages fait pour ramener le bois fait sur l’île Gaudron.

29 Mai : Rosalie et les enfants sont allés en Berry pour trouver un peu de laitage ; ils n’ont pu trouver qu’un litre de lait et deux fromages.

2 Juin : Rosalie a été à Gardefort pour chercher des œufs pour mettre sous sa poule : elle en trouve que 16. Avant elle avait commencé aujourd’hui une journée de 8 h à l’usine de caoutchouc Fougerat.

4 Juin : Louis est parti ce matin à bicyclette pour Treigny (56,5 km aller et retour) ; il est revenu vers 6 h bien fatigué de sa longue course. Le notaire Simon lui a donné quelques renseignements sur les affaires de succession Vivien (son grand-père) ; certains sont inexacts. Le notaire pense qu’après liquidation complète (Quand ?) il restera quelques mille francs à mes enfants.

5 Juin : Louis et les siens sont allés au Coudray ; ils en ont rapporté 2 litres de lait et un setier de crème.

6 Juin : Les enfants sont partis à Gardefort et ils ont rapporté 2 litres de bon lait

7 Juin : Mon neveu Pierre Boucher m’a fait porter par son jardinier M. Buisson une belle botte d’asperges pour le repas.

15 Juin : Acheté 2 bottes de radis à Mme Margé et Louis est allé pécher en Berry : il rapporte des perches et brèmes.

19 Juin : M. Beauvois père est venu déménager son fils Fernand pour mener son mobilier à la Celle où le jeune homme est cantonnier à 9 fr par jour. Il a mis ses 2 petits ânes dans mon écurie et m’a fait espérer le don d’un beau lièvre sous quelques jours. Le pauvre homme ne sait que faire en reconnaissance de ce que j’ai écrit pour obtenir l’allocation militaire à laquelle il avait droit absolu.

20 Juin : M. Ovide Dethou a acheté la maison d’Antoine Duchampt (les parents de mon gendre Félix) avec jouissance le 1er octobre prochain. Les vendeurs iront à Lyon et débarrasseront Neuvy.

22 Juin : Louis est allé pécher en Berry ; il est revenu avec 4 perches et quelques poissons. Le vent « solaire » disent nos mariniers n’était pas favorable à la ligne volante.

23 Juin : Louis est parti pour Bourges où les majors examineront ses blessures et compléteront son dossier pour sa pension et sa réforme définitive.

24 Juin : PAIX : Les Boches ont signé ! Chiffons de Papier !!!

25 Juin : Je réponds à la lettre sur sa réforme (mars et juin 1918) classe 1915. Au fils de Rosalie Poisson.

26 Juin : Louis est arrivé à 5 h venant de Briare où l’avait débarqué l’express de Cosne qu’il avait pris sur fausse indication d’une employée ! Il sera forcé de retourner à Bourges le 4 et 9 juillet !!! « S’il ne nous vient pas un Robespierre qui fasse couper la tête à tous ces brigands dont la pauvre France est rongée, nous sommes bien définitivement perdus ! »

27 Juin : Roger m’a écrit que son traitement lui fait du bien et que le spécialiste compte, d’ici peu, maitriser le mal. Le notaire Simon de Treigny est venu donner des comptes à Louis. Tout cela est très embrouillé et me confirme dans cette idée que tous ces gens sont des voleurs.

28 Juin : Etienne Chollet est venu me voir ; il a 78 ans et se porte bien. Il est maintenant à Nogent sur Vernissons où il surveille des travaux.

29 Juin : Le fils d’Auguste Léger a acheté la maison de Louis Lafille (maison Laborde) et il y viendra fin septembre.

30 Juin : François Bellu fils a pris la maison de Faverolle comme serrurier : c’est le fils de Bellu Jules qui a travaillé depuis longtemps à Paris.

4 Juillet : Louis est parti à bicyclette à Cosne pour toucher sa prime de démobilisation et de là pour Bourges et revenir le soir par le même moyen et évitant ainsi le coucher et le diner à Bourges.

9 Juillet : Louis est parti ce matin à 5 h 30 et prendre l’express à Cosne à 6 h 25 à cause du changement d’horaire des trains depuis hier. C’est enfin la dernière fois où il part pour Bourges. Les estropiés de la guerre étaient des Héros tant que les Repus ont eu peur pour leurs capitaux et leur sale peau. Aujourd’hui on leur marchande parcimonieusement la moitié d’une bouchée de pain et on leur fait dépenser en voyages idiots, le peu qui leur reste. Joli règne, belle République à rebours !

11 Juillet : Mon petit neveu Jean Louis Billiard fils d’André et petit fils de Félicie a été reçu le 8 à son examen de baccalauréat lettres.

13 Juillet : Ce soir retraite aux flambeaux, suivie par nombre de femmes et d’enfants. On ne pense guère à nos jeunes hommes fauchés avant l’heure par l’horrible tuerie ! Beaucoup ont pavoisé et illuminé pour fêter la soi-disant victoire.

14 Juillet : Retraite aux flambeaux et feu d’artifice réussi.

17 Juillet : La journée a été belle, mes enfants sont allés chez leur tante Félicie cueillir quelques groseilles.

20 Juillet : Le Docteur Boucher, sa femme Anna, Pierre et Marguerite sont venus nous voir à 4 h. Louis et Anna pensent rester à peu près 3 mois ici avant de rentrer à Rouen.

21 Juillet : Rosalie a touché le montant de nos deux allocations ; la mienne réduite de 15 fr parce que Roger est démobilisé depuis le 8 avril ; pour Rosalie elle est complète jusqu’à démobilisation de la classe 1915 dont son fils fait partie. Elle m’a remis le tout : 75 fr.

22 Juillet : J’ai envoyé à Xavier Bouchier la somme de 16 fr 50 pour solder le pain qu’il m’avait fourni avant la guerre.

25 Juillet : Camille Gaudron fille de mon ami Eugène, femme de J. Dumont est venu nous rendre visite avant son départ pour Paris demain matin.

27 Juillet : Louis et Rosalie sont partis dans les bois du Jarrier pour cueillir des champignons ils ont rapporté des cèpes et des girolles.

28 Juillet : Envoi à Roger Poisson, fils de Rosalie, d’un colis contenant 12 talonnettes qu’il avait demandé à sa mère.

La moisson s’avance : peu de rendement; les cultivateurs ramassent jalousement les épis et il ne reste rien ou presque pour les glaneurs.

1 Aout : Pour son dimanche Rosalie est allée dès le jour glaner dans les champs de la Chaise ; elle est revenue vers 6 h le soir, rapportant sur sa brouette une forte gerbe et un petit sac d’épis cassés par la moissonneuse.

5 Aout : En revenant de l’usine Rosalie a fait un détour par les fermes et elle a rapporté lait, crème et fromage.

7 Aout : Louis a reçu d’Egypte une lettre l’informant que la saison ne paraissant pas devoir être lucrative, les directeurs se passeront de son service !!! Ils ont trouvé sur place des comptables et à meilleur marché.

8 Aout : Louis Boucher est parti en automobile avec son frère Pierre, voir Notre Dame de la Salette en Isère et ils reviendront par l’Italie.

14 Aout : Mon ami M. Bouvet est venu me voir, il m’a gracieusement offert 2 paquets de cigarettes de tabac turc. Nous avons bu une bouteille de bière de Bonny : elle avait la qualité d’être fraiche seulement.

17 Aout : Louis a fait mener à la gare tous ses bagages et il part demain matin avec Marie Louise et l’enfant Dovic. Il avait expédié précédemment plusieurs colis pour Autun. Il emporte ma grande malle qu’il a réparée et dont, parait-il, je n’ai plus besoin. Si je deviens infirme, mes 3 enfants me mettront à l’hôpital, en payant chacun une petite redevance à l’établissement : ce sera justice.

18 Aout : Louis et les siens sont partis pour Autun ce matin. Quand les reverrais- je ?

19 Aout : Roger Poisson est arrivé à 9 h, un peu maigri ; il entre chez Bientanos grande librairie américaine avenue de l’opéra (publicité- souscriptions). Sa mère Rosalie est ravie.

20 Aout : Le jeune Poisson a pris une jolie friture de goujons ce matin. Sa mère a touché son allocation militaire de 45 fr et la mienne est diminuée de 30 fr.

23 Aout : Roger Poisson est parti ce matin au train de 10h 23. Pendant son séjour passé ici, il a pris de belles fritures de goujons dont nous nous sommes régalés. En arrivant il m’a apporté 3 paquets de tabac à titre gracieux.

25 Aout : Mes enfants m’ont souhaité ma fête et M. A Chevaleau m’a offert un beau melon et une bouteille de Pouilly.

26 Aout : La famille de Pierre Boucher est venue me rendre visite avec ma gentille petite cousine Suzanne Vivien 20 ans.

27 Aout : Cotisation pour la fête du Port. J’ai donné à Louis Cornu 10 fr se souscription pour le 7 septembre. Le soir, Rosalie est allée à la Fleur de Lys et a rapporté 5 litres de lait et une charge d’oseille pour cuire et en faire quelques pots de conserves comme ceux qu’elle avait bien réussi il y à 2 ans ; cela est très précieux l’hiver.

29 Aout : M. Milet est venu essayer de réparer le pédalier du vélo.

30 Aout : Rosalie a payé sur les 50 fr reçu de son fils et les 39 fr 50 de son salaire et heures supplémentaires à l’usine Fougerat, une somme de 47 fr 70 pour diverses dépenses de la maison.

1 Septembre : Ma nièce la femme d’André Billiard est arrivée ce soir accompagnée de ses enfants. J’ai vu seulement le nouveau bachelier Jean Louis.

2 Septembre : M. Merlot m’a apporté une belle poche de charbon de bois : 1 fr 10. J’ai rempli les feuilles pour l’établissement de la pension de Louis Dumont et retourné le tout au médecin chef du centre de Réformes de Bourges.

3 Septembre : Reçu ce matin une lettre de Louis de donnant des nouvelles. Tous vont bien particulièrement Dovic, sevré complètements et qui court partout conne un jeune lapereau.

7 Septembre : Fête du Port : Journée belle et chaude : Le bal est installé sur le quai, en face de mes fenêtres malheureusement ; le feu d’artifice n’est pas arrivé et nos commissaires de fête sont navrés. Les autre divertissements se déroulent gentiment et le bal ne désemplit pas. J’ai vu Ms Bouvet, Lapertot, Lafille…

8 Septembre : Le feu d’artifice n’est toujours pas arrivé. Peut être les commissaires pourront l’avoir pour dimanche prochain ???

9 Septembre : Louis a trouvé un poste par le cousin Maurice de Fos dans une société commerciale à Angers: ils seront trois employés dont Louis sera le comptable : Ms Charton, Bedier et Louis Bedu.

13 Septembre : Louis est demandé le plus rapidement possible à Angers. Il me demande de lui vendre les meubles de la grande chambre : J’ai répondu NON. Pour lui éviter la dépense inutile d’un transport dispendieux et peu sur. Puis il ne restera pas toujours à Angers. Il vaudra mieux pour lui en acheter de plus léger ad-hoc.

14 Septembre : Les commissaires de la fête du Port ont enfin reçu les pièces d’artifice et le ballon qu’ils ont fait partir ce soir. C’était réussi.

18 Septembre : Louis m’écrit de Cosne à son passage ; il va à Paris et de là à Angers. Il me dit que son petit Dovic a été pris de violentes diarrhées et demande comment faire. Les consultations à distance et par courrier ne sont pas sérieuses. Il faut mieux que Marie Louise appelle vite un docteur.

21 Septembre : Théâtre du Docteur Charpentier : Il y avait beaucoup d’assistance et les acteurs ont bien rempli leurs rôles, sauf une jeune actrice improvisée qui a eu le trac et est restée un moment en panne.

22 Septembre : Marie Louise m’a écrit pour me tranquilliser sur la santé de mon petit Dovic. Louis est à Angers et M. Bedier lui plait beaucoup. Il espère être là bas dans 15 jours et être installé dans son petit logement et revenir chercher sa petite famille.

25 Septembre : Rosalie a vendu les 4 plus gros coqs pesant ensemble 9 kg moyennant 66 fr qu’elle m’a remis.

26 Septembre : Louis est installé provisoirement. Il n’a pas l’air enchanté ; ce M. Chaton lui a fait voir tout en beau avec sa verve méridionale…

3 Octobre : Le petit Fougère que j’ai pansé hier d’une petite plaie m’a apporté 25 jolies écrevisses.

4 Octobre : Don aux petites Sœurs des Pauvres.1 fr.

5 Octobre : On a commencé les vendanges ; le salaire des femmes est de 7 fr par jour plus 1 litre de vin.

6 Octobre : Félicie Billiard est revenue de Digoin en laissant nos parents Vivien en bonne santé sauf cousine Forest.

10 Octobre : L’abbé Cortin est venu me voir quelques minutes hier au soir : il est gras et frais ; nous avons parlé de choses diverses et enfin de ma future conversion. Il ne peut s’empêcher de rire quand du tac au tac, je mets à néant tous ses arguments et syllogismes qui trainent dans tous les mauvais traités de théologie. Au fond il n’en croit pas un mot et se laisse vivre.

11 Octobre : Roger m’a enfin écrit un mot : il y a un mois passé qu’il n’avait donné signe de vie. Il va bien.

12 octobre : Rosalie m’a remis 10 fr sur sa semaine d’usine de 37 fr.

15 Octobre : M. Hamot et sa femme sont venus accompagnés de leur Maitre d’hôtel Louis Jacq.

16 octobre : Le jeune Emile Morlet n’a plus besoin de béquilles ; il se promène avec une canne.

18 Octobre : Rosalie a été toucher nos allocations : la sienne est de 45 fr et la mienne réduite à 15 fr pour la dernière fois.

20 Octobre : Rosalie a été grappiller 10 kg de raisin et avec sa brouettée des beaux raisins avec les quels j’estime qu’on ferait 30 litres de vin au pressoir. Nous en ferons un bon râpé qui durera longtemps.

22 Octobre : J’ai roulé et scié quelques morceaux de moulées ; mais bien que ma santé générale soit bonne, je sens que mes forces diminuent rapidement et je ne pourrais plus faire ce que je faisais même il y a 2 ans.

23 Octobre : Augustin Vivien m’envoie 2 petits paquets de tabac, je lui envoie 5 fr pour son envoi.

25 Octobre : Léonce Billiard mon neveu est arrivé d’Orléans, il m’a apporté 1 paquet de 100 gr de tabac Cantine.

27 Octobre : En revenant du travail Rosalie a grappillé une brouettée de raisin.

31 Octobre : Réunion ce soir de la Société Unifié : M. Laurent n’a pu que dire quelques mots : les électeurs l’ont prié de s’en aller plus loin : « Va t’en Laurent, il n’est pas trop tôt, va t’en »

2 Novembre : Mme Boucher m’a envoyé 50 kg de pommes de terre par Eugène Laroche.

8 Novembre : J’ai verni l’abat-jour de la lampe de la cuisine ; les rayons lumineux se perdaient à travers la porcelaine et avec le mauvais pétrole, l’éclairage était insuffisant.

9 Novembre : Les Poilus restants ont fêté leur retour par un banquet et bal.

10 Novembre : Rosalie m’a remis 10 fr en caisse sur son salaire de semaine tant à l’usine qu’au service de Mme Fougerat.

13 Novembre : Louis m’écrit qu’il est allé à Autun et qu’il en a ramené sa femme et son fils. Son installation est à peu près complète et il est heureux d’entre enfin CHEZ – SOI, d’y manger, d’y coucher et d’avoir le babil et le sourire du gentil Dovic.

14 Novembre : La jeune poule blanche a pondu pour la 1er fois.

16 Novembre : Élections Législatives pour 5 sièges : Il y a au moins 3 listes et certains se présentent seuls !!! Qui sortira t il de cette confusion ? Rien de bon pour la pauvre France.

17 Novembre : Neige en abondance ce matin.

20 Novembre : Lettre de félicitations à Edmond Desenne pour le mariage de son fils Robert.

22 Novembre : Louis Boucher m’a envoyé par un jeune voiturier de la Pierre Aigue d’Annay, une demi-corde de charbonnette et autant pour ma sœur Félicie Billiard. Il pense regagner Rouen mardi 25.

25 Novembre : Foire de Ste Catherine : Pluie et froid : Peu de monde sauf dans les débits où tous se réfugient.

28 Novembre : Reçu les listes en présence formant 24 noms sur les quels il faut en élire 12. Sauf 2 ou 3, le reste est au dessous de tout.

29 Novembre : En rentrant hier soir, mon pied droit s’est pris dans une ornière de la cour d’où entorse… Léonce est venu me faire un massage après un bain de pieds avec Saltrates-Rodell. Cela m’a fait du bien.

1 Décembre ; Élections Municipales : 11 candidats sur 12 ont été proclamés élus : 10 de la liste Républicaine et Louis Beauchef seul sur la liste d’Union. Ballottage dimanche prochain pour 1 siège.

3 Décembre : Léonce m’a fait encore un massage : je peux marcher à l’aide d’une chaise que je tiens devant moi et me transporter d’une pièce à l’autre.

5 Décembre : Je suis allé dans la cour avec mes béquilles qui sont trop courtes pour ma taille. Ceux auquels je les ai prêtées autrefois, les ayant fait adapter à la leur. Je ne souffre pas en marchant et l’appréhension de buter contre un petit obstacle me fait peur.

7 Novembre : Ballottage : M. René Fougerat est passé 12e ce soir au scrutin pour un siège contre Auguste Langer.

9 Décembre : Le garde m’a apporté ma carte de tabac allant jusqu’à fin 1920. Et donnant droit à un paquet par semaine. S’il y en a !!!

Je n’en ai jamais tant touché depuis la guerre.

10 Décembre : Roger part pour Lyon en qualité de caissier à la compagnie des Wagons-lits.

12 Décembre : Conseil Général : J’ai reçu les bulletins ; tous les candidats se qualifient de Républicains-Socialistes !!!

17 Décembre : J’ai eu 71 ans à midi. Comme c’est beau ! Mme Billiard et Léonce m’ont exprimé leurs vœux de me voir encore ainsi longtemps trainer ma misère. J’en ai marre ! Comme disaient nos chers poilus.

19 Décembre : Les Cornu ont péché dans un étang à Sancoins ; ils ont de beaux poissons et veulent vendre les carpes à raison de 5 fr le kg.

24 Décembre : Roger est installé caissier au buffet de la gare de Perrache et il me donne des nouvelles de sa sœur et des siens.

31 Décembre : Rosalie m’a donné 30 fr sur les 100 fr qu’elle a touchés pour 86 h de travail à l’usine Fougerat.