Eglise de Saint Laurent

Histoire de Neuvy par Mr Jules-Marcel FRAPAT

Dans son livre intitulé : Histoire de Neuvy-sur-Loire en 1917, Mr J-M Frapat nous donne beaucoup d’informations sur les origines connues concernant notre commune.

Dans la partie suivante, nous aurons : L’église de Saint Laurent et certains sites religieux. La paroisse, les curés de l'histoire, les registres.

Eglise de Saint Laurent

L’Eglise, dédiée à Saint Laurent, est le seul édifice sur lequel on possède des renseignements un peu précis. A l’origine, elle ne se composait que de trois travées datant, selon les archéologues du XIII siècle. (M. Jaunet, Recherche historique sur Neuvy-sur-Loire, en 1860). Plus tard, on allongea l’édifice d’une quatrième travée. Enfin on bâtit les deux dernières travées en 1510, sous Edme du CHESNAY. Le portail latéral, qui existait dans la cinquième travée, a été muré en 1838.

L’Eglise renferme une grande quantité de tombeaux. On y enterrait surtout les personnes fortunées. De nombreuses épitaphes existaient autrefois tant sur les murs que sue les dalles qui recouvrait le sol. Des Vandales catholiques ont complété l’œuvre à peine ébauchée de certain Vandales révolutionnaires, en détruisant tout ce que ces derniers avaient cru devoir respecter. Les dalles ont été enlevées et détruites puis remplacées en 1890, par un pavage en mosaïque. Les épitaphes de la douairière de Neuvy, Claude de ROCHECHOUART (décédé en mai 1604), et de sa fille ont été déplacées et reléguées, par le curé Roy, dans un coin de la sacristie.

Il ne reste plus que celle de Pierre BOUCHET, Seigneur de CHAUFFOURT (commune de Saint Loup), et celle, en grande partie mutilée pendant la Révolution, de François BREZE, procureur fiscal de la fabrique de Neuvy-sur-Loyre. (Décédé le lundi 12 juillet 1592)

Entre 1700 et 1720, les inhumations dans l’église ont été nombreuses ; après ces dates elles ont été moins fréquentes et sont devenues rares vers 1760. La dernière, celle d’un nommé Dereaux, est du 11 mai 1771. Les autres inhumations se faisaient dans le cimetière qui entourait l’église et parait avoir été divisé en deux parties, dans le courant du XVIème siècle, par la construction de la chapelle de Saint-Hubert : un petit cimetière au nord et un grand cimetière au sud. La dernière inhumation dans le petit cimetière parait remonter à 1704, et dans le grand en 1880.

La chapelle seigneuriale de Saint-Hubert, placée au nord de l’église, aurait été bâtie en 1530, sous Edme du Chesnay, dit le Répertoire Archéologique de la Nièvre, nonobstant le millésime qui se trouvait jadis près de l’ancienne porte seigneuriale aujourd’hui murée. Le caveau de cette chapelle a contenu, jusqu’en 1793, les sépultures du Comte Georges de Guiscard de la Bourlie, de Geneviève de Longeval, sa femme, et de l’abbé de Firamont, Prince d’Harcourt.

L’église de Neuvy était autrefois surmontée d’un clocher carré que le Conseil Général de la commune, après en avoir été requis par le District, fit abattre le 13 brumaire an II (3 novembre 1793), par le sieur Pierre Laquignon, couvreur. La base restée à peu près intacte, fut réparée en 1815 et utilisée jusqu’en 1901, époque à laquelle un nouveau clocher fut accolé à l’église prés de la porte occidentale et garni d’une grosse cloche, dite « bourdon, baptisée le 7 juillet 1902.

L’ancien clocher contenait quatre cloches, deux petite et deux grosses ; les petites, Marcelle et Gabrielle, furent baptisées le 27 mars 1602. Une des grosses, refondues, fut bénite le 22 septembre 1613 ; l’autre, d’après une inscription datant de 1666, s’appelait Georges Geneviève.

Un décret de la Convention Nationale du 12 août 1793 ayant ordonné de descendre toutes les cloches pour les fondre et les transformer en canons et en sols, afin de contribuer ainsi à la défense de la Patrie en danger, deux municipalités seulement répondirent à cet appel. Sur la demande du Représentant du peuple en mission dans la Nièvre, l’administration départementale écrivit, pour la septième fois, le 17 septembre, aux Conseils Généraux des communes de faire descendre, dans la huitaine, les cloches de leur paroisse, excepté une. Le 27 septembre, le District de Cosne requit les officiers municipaux de se soumettre immédiatement à ces prescriptions sous peine d’être mis en état d’arrestation. La municipalité de Neuvy, après avoir fait observer que la grosse cloche servait aux usages ordinaires et que la petite servait de timbre à l’horloge, fit descendre les deux autres cloches.

A qui l’église fut-elle vendue ? je l’ignore encore, l’agent national du District de Cosne (Mr Laurent) écrivit, le 15 germinal an III (4 avril 1795) aux administrateurs de Neuvy, qu’il avait été instruit que les adjudicataires de l’église destinaient ce local à l’exercice d’un culte particulier, que l’article 7 de la loi du 3 ventose dernier ( 21 février) prescrivait qu’il ne pouvait être fait aucune proclamation ni convocation publique pour inviter les citoyens à l’exercice de ce culte, ils devaient, sous leur responsabilité personnelle, à ce qu’on ne sonne pas les cloches et qu’il ne soit planté aucune croix. Ce ne fut qu’en 1803, que le culte catholique reprit son existence à Neuvy.

    • Nota : C'est le décret du 27 novembre 1790 donnant obligation aux ecclésiastiques de prêter serment de fidélité à la Nation, à la loi, au Roi et donc à la Constitution civile du clergé qui précipitera la fracture entre l'Eglise et la Nation.

    • Serment des prêtres jureurs : 27 novembre1791: "Je jure de maintenir de tout mon pouvoir la Constitution". Les prêtres qui prêtèrent ce serment furent appelés jureurs, les autres seront les réfractaires.

    • La déchristianisation est une politique qui, pendant la Révolution française, a pour but de supprimer le christianisme de la vie quotidienne en France : prêtres déportés ou assassinés, religieux contraints à abjurer leurs vœux, croix et images pieuses détruites, fêtes religieuses interdites, agendas supprimés, et interdiction du culte public et privé. Le mot n'est pas très employé en 1793.

    • Le culte de la Raison des Hébertistes athées (automne 1793 - printemps 1794) puis le culte de l'Être Suprême des Montagnards déistes (printemps - été 1794) sont, en France, un ensemble d'événements et de fêtes civiques et religieuses. Le théophilanthropisme, une émanation du culte de l'Être Suprême, apparu en 1796 (26 nivôse an V), est interdit en 1803.

Croix

En 1756 eut lieu une cérémonie religieuse pour l’érection d’une croix sur laquelle était posé un Christ en relief. Une note du curé Gaucher dit : « que cette croix fut portée processionnellement par 22 hommes au milieu de la montagne du côté de Bonny, accompagnés de 3 tambours battant des marches lugubres, 2 compagnies avec épées et fusils, et 32 vierges en blanc. Les rues de Saint-Laurent et la grande rue étaient tendues et bien balayées ». Il ne reste aucune trace de l’endroit où fut érigée cette croix et qui fut, paraît-il, désigné sous le nom « Le Calvaire ».

Deux ans plus tard, une mission, prêchée par trois Père Jésuites, attira une foule de gens à Neuvy. On y vint de dix lieues (environs 40 km) à la ronde et il y eut près de 1500 communiants. Le 18 janvier 1758 à la fin de cette mission, on planta à cent pas du bourg, côté méridional sur la droite en allant à Cosne, une grande croix sur laquelle on cloua un Christ en relief de hauteur d’homme. Chaque assistant portait à la main une croix de 18 pouces de longueur. L’abbé Gaucher a relaté dans ses notes que les gens visitaient « tant le Christ du Calvaire que celui qu’ils ont fait attacher. A quel qu’instant du jour que l’on passe devant ces Christ on y voit des adorateurs prosternez ».

Ne serait-ce pas là l’origine du nom « champs des cris » (christ) ?

    • Nota : Le comte de Couëssin propriétaire vend (1885) le champ à la famille du Docteur Louis Boucher pour y construire une maison et leur communique l’explication suivante : Les prisonniers allant à pieds aux bagnes s’y arrêtaient pour passer la nuit et ils appelaient par leur cris la population pour avoir un peu de réconfort et surtout de la nourriture d’où les cris.

La Paroisse – Les prêtres.

On n’est pas fixé sur l’origine de la paroisse de Neuvy. On sait seulement qu’elle dépendait du diocèse d’Auxerre et de l’archiprêtré de Puisaye. D’après un procès-verbal dressé le 16 mars 1788, elle avait à l’Est et au Sud les limites actuelles. Au Nord elle comprenait la Seigneurie de Villeneuve-les-Bonny, à l’Ouest toutes les îles de la Loire et une bande de terre s’étendant jusqu’à l’Ouest du Crot des Butteaux.

Neuvy est cité dans les statuts de saint-Aunaire, évêque d’Auxerre (596), mais on ne sait à qui le pays appartenait alors.

En 887 l’évêque Hérifrid obtint du Roi Charles-le-Gros la restitution de Neuvy et de Narcy qui avaient été enlevée à son église.

Le premier curé connu de Neuvy est Mr Boutard, cité encore en 1581. Un siècle après en 1667 les habitant de Neuvy se plaignirent à l’évêque d’Auxerre de leur curé Edme Robineau « parce que de tout temps l’église a esté desservie part deux prêtres, un curé et un vicaire, et que plusieurs habitants sont morts sans consolation spirituelle et sans sacrement, entre autre Cocu des Cocus »

    • Nota : Curé de Neuvy : Boutard … 1581 ; Pierre Estève 1581 – 1591 ; François Audigé 1591 – 1595 ; Etienne Huré 1595 – 1613 ; Pierre Chabert 1613 – 1629 ; Pierre Bechereau 1629 – 1655 ; Edme Robineau 1655 – 1703 ; Pierre Robin 1703 – 1731 ; Etienne Gaucher (petit-neveu de Pierre Bechereau) 1731 – 1777 ; Thomas Barbot 1773 – 1813 ; vacance de 18 mois ; Le Maignien 1815 – 1826 ; Vilain 1826 – 1852 ; Chauvin 1852 – 1862 ; Roy –1862 -1899.

Vicaires : Cury 1738 – 1740 ; Bardin 1740 – 1744 ; Annot 1744 – 1746 ; Godineau 1746 – 1752 ; Reilhes 1752 –1755.

Le Curé Gaucher

En 1733, l’évêque d’Auxerre, Charles de Caylus, qui avait adhéré à la doctrine de Jansénius, était venu visiter Neuvy, le curé Gaucher du parti adverse ne se montra pas et après le départ de l’évêque, fit sonner les cloches pour appeler les habitants à assister à la purification de l’église. Le curé paya plus tard cette incorrection en restant enfermé, en 1736, pendant six semaines au grand séminaire d’Auxerre. A son retour une partie de ses paroissiens, les uns à cheval, les autres à pied, en armes et avec le tambour, allèrent au devant de lui jusqu’à Bonny, et le soir, vers dix heures, ils firent un feu de joie dans le fond Tarabi.

Mr Gaucher qui à différentes reprises s’était déclaré très fervent adhérents à la constitution Unigenitus et se disait prêt à donner son sang et sa vie à la cause du Pape, fut interdit le 26 janvier 1739 « des fonctions des saints ordres dans tous les diocèse d’Auxerre » .

Il dut se défaire de sa cure dans les six mois suivant. Il fut remplacé provisoirement par des vicaires. Mr le curé Gaucher est revenu d’exil en décembre 1755 et reprit ses fonctions jusqu’en 1777.

    • Nota : La Constitution apostolique Unigenitus (nommée ainsi par ses premiers mots en latin Unigenitus Dei filius, c'est-à-dire « le fils unique engendré par Dieu), est une bulle pontificale célèbre promulguée par le Pape Clément XI, édictée en septembre 1713.

    • Cornelius Jansen, plus souvent connu sous la forme latine de son nom, Jansenius. Il est à l'origine du mouvement politico-religieux, le jansénisme, qui fut condamné par l'Église catholique romaine en 1653.

    • Tarabi : Ancien lit de la Vrille, profond de cinq à six mètres, à droite en venant de Bonny, en face du Château. On lit aussi « les champs de Fontarabie » qui indique le même endroit.

Le Curé Barbot.

En 1788, Mr Barbot, curé, écrit : « décide l’exposition du Saint-Sacrement pour ramener la ferveur des fidèles au service divin… les tentatives déjà faites dans ce but ont toujours excités des troubles entre Mrs les curés et les habitants sous le règne de M. Robin ». (1703 – 1731).

Le citoyen Barbot était devenu procureur et officier public de la commune de Neuvy et fut incarcéré le 4 novembre 1793. Un mois après, le 15 frimaire an II (5 décembre 1793), une pétition fut adressée aux autorités : « ce jourd’huy, quinze frimaire l’an deux de la République Française une et indivisible, c’est au nom de nos concitoyens de la cité de Neuvy que nous venons réclamer le citoyen Thomas Barbot, …, incarcéré du quatre novembre,… nous somme surpris de voir qu’il soit inculpé parés avoir tenu une conduite aussy régulière ; depuis dix-huit ans qu’il est dans cette commune, il n’a cessé de faire le bien, soit aux pauvres, soit aux citoyens, et généralement pour tout ce qui concerne le bien public ; nous l’avons vu souvent se donner la peine d’aller chercher les aliments nécessaires aux indigents, envoyer le bouillon de sa soupe aux malades, pain, vin, argent et médicaments. Nous l’avons vu généralement se montrer bon républicain et toujours très exact à faire exécuter la Loy. »

Après la Révolution et le rétablissement du culte catholique, il s’empresse de reprendre ses anciennes fonctions. Le 20 pluviôse an XI (1er février 1803), le Préfet prévint le Maire qu’après avoir prêté le serment prescrit par la loi, il allait se rendre à Neuvy et qu’il fallait mettre l’église à la disposition des représentants du culte catholique avoués par lui. Quelques jours après, M. Barbot demanda qu’on lui rendît le presbytère. Or dés le mois de janvier 1794, le Conseil général de la commune de Neuvy, avait prit « provisoirement » possession de ce bâtiment pour servir de maison d’arrêt, de grenier d’abondance, de justice de paix et de mairie, et décida de planter dans la cour, un arbre de la Fraternité.

A la demande de restitution, une note indique la réponse suivante « Attendu que le presbytère de cette commune, qui ne doit sa conservation qu’aux différentes démarches que nous avons faites pour empêcher sa vente sous le règne de l’anarchie, que cette maison qui a été construite aux frais des habitants de Neuvy, contient un très grand jardin, six chambres à feu, un grenier et un corridor séparatif et qui empêche toute communication ; que sans faire de tord à celui qui l’occupe, on pourrait en distraire la chambre des délibérations donnant sur la route de Paris à Lyon ». Il est probable que peu à peu le curé reprit possession du presbytère qui avait été béni le 31 octobre 1784 et qui fut démoli en 1907.

Les Registres

Des temps immémoriaux, les curés inscrivaient les baptêmes, les mariages et les décès qui survenaient dans les paroisses ; mais cette formalité était loin d’être remplie régulièrement. Ce ne fût que sous le règne de François 1er que cette coutume fut réglementée et une ordonnance d’août 1539 enjoignit aux curés d’inscrire régulièrement ces actes sur des registres qui devaient être déposés aux greffes les plus voisines et tenaient lieu d’état civil.

L’abbé Boutard fut le premier curé de Neuvy qui se soit conformé à l’Ordonnance Royale, ou du moins, dont les registres soient resté jusqu’à nous et encore, au début, n’inscrivait-on que les naissances. Ce premier actes est du 2 mai 1578 : « le Vendredy D 2 may a ayté baptisé Jacquette, fille de François Foucher et de Marcelle Brézé ses per et mer, son parrin François Brézé, sa mareine Marie Fillon. Fais par moy soubz signez F. Boutard 1578 ».

Remarquons en passant que la plupart des actes de baptême portent cette mention : « … lui a imposé le nom de … ». Ainsi, par exemple, le nom de Jehanne Suplico fut imposé à Marthe Gallopin.

On trouve très fréquemment, pendant la période de 1581 à 1600, sur les actes de baptêmes, les noms ou signatures de seigneurs, nobles dames ou notables figurants comme parrains ou marraines :

    • Claude de Rochechouart, douairière de Neuvy, fut marraine d’un certain nombre d’enfants de Neuvy.

    • Françoise de la Rue, dame de la Fleur-de-Lys (signature : F DELARVE)

    • Loyse de Pluvinault, fiancée, puis épouse de Esme de Montgilbert.

    • Gilberte de Corguilleray, dame de la Boulesvrie.

    • Jehanne de Labertauche, épouse de François Fillon.

    • Philibert Bauldry ; Verain Brosquin ; Pierre Boucher ; Jehanne Danjon ; Esmée de l’Estang ; François Fillon.

    • De Fourcade, lieutenant de Saint-Verain et la Villeneuve.

    • Jehan Guillemin et son épouse Claude de la Buissière.

    • De Focquamberge.

    • Laurent Granereau, demeurant à Neuvy.

    • Louis d’Orléans, seigneur de Foizeau et de la Couldre.

    • Simon Le Comte, seigneur de la Borde.

    • De Lagrange, seigneur d’Arquian.

    • Etc. On ne trouve aucune signature des Du Verne-Marency, seigneur d’Annay.

Le document le plus ancien concernant Neuvy est un acte de donation en faveur de l’église : « 20 mars 1485 : Jehan Villain, lépreux, ne demeurant à Neuvy que du consentement des habitants, par rapport à sa maladie ; en conséquence, il a donné à la fabrique cinq sols de rente hypothéqués sur la maison avec jardin y attenant, size rue d’Annet et rue du Chasteau à l’Eglise ».

    • Nota : La localisation de la maison a été inscrite sur la pièce environs 2 siècles après.

    • Jean (Jehan) Villain soufrait de la maladie de la lèpre depuis environs une année, il semble, d’après le document, qu'il a toujours résidé à Neuvy durant se jeunesse..

Source principale : Histoire de Neuvy par Mr Jules-Marcel FRAPAT