1908 : Agenda de Ludovic Bedu

1908 : Agenda de Ludovic Bedu

1 Janvier : Déjeuner chez Mme Duchampt mère de Félix mon gendre avec mes enfants, M. Mme. A. Duchampt, c’est Rosalie qui avait fait la cuisine et c’est elle qui a servi à table.

2 Janvier : Le temps parait vouloir s’abaisser ce matin moins 8; je suis allé en nombreuse compagnie manger des huitres chez Chevrier, mais… c’était des portugaises dont je ne suis pas friand.

7 Janvier : Lettre de Roger datée du 1 Janvier. Il pense toujours à revenir en France ; c’est une idée fixe. Le pauvre garçon ne s’imagine pas qu’il sera beaucoup plus mal sous tous les rapports. Je lui réponds pour lui dire de prendre patience.

14 janvier : Les syndics de St Vincent sont venus ce soir me demander ma cotisation pour la fête des vignerons le 22 janvier, j’ai donné 2 fr.

15 Janvier : M. Beauchef m’a fait amener une lessiveuse qu’il a réparée et un petit fourneau de cuisine de 4 fr.

22 Janvier : St Vincent : Je suis allé chez Eugène Gaudron, nous avons mange quelques douzaines d’huitres avec M. Ducloux patron de son fils ; de là nous nous sommes rendus chez Chevrier où j’ai offert le vin blanc en mangeant un morceau de pain bénit ( ? ).

28 Janvier : L’humidité pénètre partout et les murs de nos maisons suintent l’eau qui s’écoule lentement et descend sur les parquets. Froid très vif, neige et grésil.

1 Février : Louis m’a écrit un mot, il est toujours satisfait et très heureux de toucher aujourd’hui les 75 fr de son mois.

3 Février : Dépêche à Modeste Fié pour qu’il m’envoie du bois ; je me trouve pris au dépourvu : Pour chasser l’humidité de la crue d’octobre j’ai brulé plus de combustible que je pensais.

4 Février : Roger : J’ai reçu un mot ce matin, il est toujours à Koléa et son bataillon vient de terminer les épreuves de marche ; il espère obtenir une permission au mois de juin.

6 Février : Alouettes : On m’en a offert à 2 fr 50 la douzaine ; je n’en ai point voulu : mais nos braves gens de Neuvy qui se plaignent toujours ne s’en sont pas privés : Bien entendu, je ne parle pas des gens riches. J’ai acheté à Annette Frottier une douzaine de tarins bien gras ; cela remplacera les alouettes ; j’ai payé 1 fr pour ces petits oiseaux.

9 Février : H. Sadier m’a envoyé une corde de bois de chêne fendu (un régal) ; j’aurai préféré qu’il ne le fasse pas fendre si menu; mais cela chauffe. Réunion du conseil session de février : Notre séance s’est presque entièrement passée à examiner les innombrables demandes pour l’assistance aux vieillards.

12 Février : Le tirage de la tombola pour le brochet de 6 livres ½ pris en Loire à la ligne par François Gaspard a eu lieu ce soir chez Rondeau. C’est le N° 116 appartenant à cet idiot de Tripier (dit triple pied) qui a gagné.

14 Février : Les pécheurs de saumon ne prennent rien ; la rivière est basse. Du reste les barrages d’ici Nantes sont placés à 5 km les uns des autres et seul ceux de la basse Loire ont chances de réussir.

16 Février : Hubert Desenne m’a envoyé une postale ; il a passé le conseil de Révision à Paris et a été reconnu bon pour le service. Plus de tirage au sort.

18 Février : Réunion des Contrôleurs Répartiteurs (Voitures, chiens chevaux, réclamations) Nous avons terminé à 11 h 15. J’ai fait dégrever la côte mobilière d’Eudoxie Boileau, elle ne paiera plus que la côte personnelle de 1 fr 50.

20 Février : Félix Vivien est venu me dire que nous serions obligés de réunir à nouveau le conseil de famille parce que, la première fois on n’avait oublié d’accepter la succession de feu Madame Vivien , grand-mère du mineur , décédée avant son mari.

22 Février : Sapeurs pompiers Cotisation annuelle payé au facteur : 5 fr.

23 Février : Pautrat F. ancien fermier au Petit Fouilloy est venu me trouver. Le fisc lui réclame le coût de ses prestations pour l’an 1907. Il a quitté le domaine le 1 octobre 1906 et fait sa déclaration à la mairie en novembre 1906, c'est-à-dire en temps utile… O ! Belle administration !!! Je ferai tout mon possible pour éviter ce déni de justice.

26 Février : La Loire croit toujours. On annonce dans le Loiret 3 m à l’étiage de Bonny. Dans notre département administré par des incapables ou des Tutti-fumistes, nous n’avons aucun renseignement. A QUAND LA BELLE que je commence à être bien las d’attendre !!!

27 Février : Déjeuner à l’Hôtel de la Gare avec M. Jules Lafille qui m’avait gracieusement invité ; nous avions : hors d’œuvres variés, tète de veau, rouget au vin blanc, rumsteck sauce madère aux champignons, pommes de terre en purée, salade, desserts variés. Le tout était très bien préparé, hormis la sauce de la tète de veau ; mais comme j’ai l’habitude de faire ma sauce dans mon assiette, je n’y ai pas trouvé mauvais.

28 Février : Mme Laure Boucher, ma sœur, souffre beaucoup d’un rhumatisme du genou : il y a rougeur avec tuméfaction. Son fils Louis (docteur à Rouen) doit venir demain. Sauf les 10-11-12 & 13 ce mois a été abominablement pluvieux, neigeux et très froid.

1 Mars : La Loire croit toujours et la Vrille est refoulée dans les près. Froid très vif.

3 Mars : La journée a été superbe ; ce soir le temps se couvre, le temps s’élève et les nuages s’amoncèlent. Nous sommes partis Bedu, Félix Deschampt, mes deux neveux Boucher Louis et Pierre et moi au train de 9 h. Léone avait envoyé un pouvoir et Rivaillon l’a remplacé. E. Desforges n’est pas venu, M. le Juge de Paix a bien voulu le faire remplacer par M. Perret avoué : De cette façon nous n’avons pas fait un voyage inutile et le conseil de famille a pu fonctionner. Après nous sommes allés déjeuner, Félix, Bedu et moi, au nouvel hôtel de la rue de Paris où nous avons été passablement servis, mais toujours trop de petits plats avec sauces défectueuses et vin plutôt mauvais. Cout pour 3 déjeuners et pourboire au serveur : 8 fr. Achat chez Dreyfus un complet de chasse pour moi : 50 fr et un chapeau feutre chez Paillard : 10 fr.

5 Mars : Mme Barre des Pelus : je lui ai payé la fourniture de lait pour une année : 9 fr 60. M. Charles Gauthier (d’Annay) m’a amené un faix de paille, des choux raves et les manches de mailloches que je lui avais demandés. Il a déjeuné à la maison avec son jeune fils Fernand.

6 Mars : Pluie torrentielle et vent en tempête tout le jour et une partie de la nuit. Les affaires du Maroc vont de mal en pis et avec la permission du Kaiser Allemand nous envoyons 4 000 hommes de renfort. On fait tuer nos enfants pour protéger les comptoirs des juifs allemands. Ah ! Qu’on est fier d’être Français !!!

7 Mars : Le chien de Desenne Tock, qui avait reçu un coup de pied de cheval sur la tète et restait paralysé a été jeté à l’eau ce soir. Je suis allé voir ma pauvre fille Marie qui va de mal en pis malgré tous les soins de sa bonne tante Laure Boucher. J’ai essayé de l’égayer un peu ; ces visites et cette gaité forcée me sont extrêmement pénibles.

8 Mars : Les jeunes hommes de 40 ans ont fêté l’anniversaire de leur tirage au sort. C’étaient Jules Gourdet, Louis Beauchef, Serge Héliard, Choiseau et plusieurs autres que je n’ai pas reconnus.

9 Mars : Roger m’a envoyé une dépêche ; il est parti de Koléa pour Alger afin de remplacer les sections envoyées à la frontière Sud-Oranaise menacée, parait–il.

Je lui ai adressé à Alger un télégraphique de 15 fr.

10 Mars : Tom mon chien qui était complètement aveugle depuis plusieurs mois a été jeté à la Loire ce soir.

15 Mars : Marie que j’ai été voir ce soir ; la respiration est très difficile, les lèvres se cyanosent. Hélas, ma pauvre petite chérie ! Je crains un dénouement plus rapide que je n’avais prévu. Ce soir ma chère mignonne a été prise d’une hémoptysie considérable.

16 Mars : Roger m’a écrit qu’il avait été désigné pour aller au Maroc et me demande des fonds. Il était 4 h quand j’ai reçu sa lettre et trop tard pour envoyer un télégraphique. Marie va toujours mal ; Rosalie passera la nuit prés d’elle à son chevet. Marie n’a que 29 ans…

17 Mars : Ce matin, Rosalie est venue me dire que ma chère et douce enfant a rendu le dernier soupir à 11 h du soir presque sans souffrance! Quelle triste chose que la vie pour certaine et quelle accumulation de terribles douleurs !

18 Mars : Louis est arrivé au train de 7 h ; il s’est arrêté chez sa tante où il a pris quelques nourritures avant de venir à la maison. Le pauvre enfant était désolé de n’avoir pu embrasser sa sœur ; il ne pouvait comprendre que l’on ne l’ait pas averti plus tôt. Hélas nous avons tous été surpris par la rapidité du funeste dénouement.

19 Mars : Tous nos parents et amis sont venus à 10 h accompagner le convoi de ma chère petite fille si douce et si aimée de tous. Roger, je lui ai écrit pour lui apprendre la terrible nouvelle, je lui avais envoyé hier un mot pour le préparer.

20 Mars : Eugène Gauthier d’Annay, ce bon gros et fort garçon est mort cette nuit d’une congestion cérébrale ! Il est probable que son entourage n’a pris aucune précaution ; c’est désastreux l’apathie des gens de la campagne.

21 Mars : Obsèques d’Eugène Gauthier : Rosalie est partie vers 9 h avec Hélène Boileau parente du défunt. Il y avait de nombreux parents et amis à la cérémonie qui a été terminé qu’après midi.

23 Mars : J’ai reçu quelques lettres et cartes des personnes aux quelles j’avais envoyé des lettres de faire-part. Louis est reparti ce soir avec Mme Deschampt mère.

27 Mars : Élagage du marronnier : Le jeune Joseph Lefèvre est venu élaguer mon marronnier ; j’aurai ainsi moins d’ombre pour mes arbres fruitiers.

29 Mars : Alexandre Pautrat qui est décédé hier à midi d’une broncho-pneumonie, asthme et urémie, a été inhumé aujourd’hui à 5 h.

30 Mars : Auguste Langer a été dénoncé pour l’eau de vie qu’il a eu tort de ne pas déclarer et les commis sont venus lui dresser procès-verbal ; je crains, pour lui, qu’il ne puisse s’en tirer à moins de 400 fr, peut être plus encore.

31 Mars : Roy fils : Je lui ai donné 5 fr de gratification pour m’avoir fait cadeau de la petite chienne « coquette » et de me l’avoir amenée. J’irai demander au bourrelier E. Bedu un collier pour ma chienne.

8 Avril : La Loire a cru et nos pécheurs ont été forcés d’enlever leurs filets : Ces pauvres gens n’ont presque rien pris cette année et il faut tout de même payer les trimestres de fermage.

18 Avril : Mes neveux Boucher et Billiard sont venus avec moi à Cosne pour le conseil de famille : M. Etienne Bedu a été nommé subrogé –tuteur pour mon petit Louis qui n’est pas encore majeur. Nous avons pu revenir au train de 10 h.

19 Avril : Je suis allé avec Auguste Langer voir M. Goujat et le prier d’appuyer sa requête auprès du directeur pour l’amende encourue soit réduite le plus possible.

30 Avril : Si le mois de mai se passe ainsi avec quelques pluies, nous récolterons pain et vin en abondance.

1 Mai : Élections : les 2 listes de concurrents ont déjà commencé à se dire des choses amères (Oh ! Combien !) Pauvre suffrage universel !!!

2 Mai : On n’a pas jugé à propos de faire imprimer mon manifeste : Celui qui a été affiché nuira à notre liste et ce sera bien fait.

3 Mai : Élections municipales : Deux listes en présence. Une de Concentration Républicaine (Atonistes, Gougistes …) une Opportuno-cléricale (Atonistes-cléricaux…). De la 1er liste, 5 sont élus : Bedu, Chaillou, Clot, Mougne, Draps. De la 2 eme liste, 2 sont élus : Carré, Hézard.

5 Mai : Il y a des nuages chargés d’électricité dans toutes les directions. Réunion à la mairie ce soir à 8 h : Nous sommes convenus de porter au scrutin de ballottage les noms des 5 candidats Républicains ( ?? ) qui ont réuni au 1er tour le plus grand nombre de voix.

6 Mai : L’orage d’hier a rafraichi la température et ce soir il fait presque froid.

7 Mai : J’écris ce jour au fils Lafille qui est à Constantine pour lui donner des nouvelles du pays.

10 Mai : Scrutin de ballottage : Pour 5 conseillers de notre liste, 1 seul Gaudry obtient la majorité et 4 de la liste de Carré sont élus. Le conseil se trouve ainsi composé : (moi) Bedu, Clot, Carré, Mougne, Gaudry, Chailloux, Draps Léon, Draps Victor, Beauchef, Thouvenot, Hézard, Guillot. Assemblage bizarre : manteau d’arlequin. Je ne m’imagine pas qui sera assez hardi d’accepter d’être maire et pensera pouvoir administrer la commune avec un conseil aussi disparate. Pauvres électeurs !!!

12 Mai : Pluie toute la journée, temps excellent pour les biens de la terre, une partie des prairies ont été couverte d’eau.

13 Mai : Le fils de Despaty ferblantier à Cosne est mort à 31 ans d’une congestion pulmonaire ; il laisse une femme et deux jeunes enfants.

17 Mai : Election du maire et de l’adjoint- installation du conseil : Ces imbéciles ont nommé Carré maire et Mougne adjoint.

18 Mai : Gauthier Clément m’a payé pour un lot de vernes vendus au sabotier d’Annay : 20 fr.

19 Mai : Lettre de M. le médecin principal A. Lafille qui est à Constantine avec le grade de Général de brigade ; il me promet de s’occuper de Roger.

24 Mai : Rosalie est partie ce matin avec M. Berger notaire et Félix Duchampt mon gendre, terminer à Ratilly le partage et l’emballage des objets revenant à mes enfants dans la succession de leur grand père Vivien. Ils pensent revenir demain soir.

25 Mai : Rosalie est revenue ce soir à 7 h avec M. Berger et Félix Duchampt. Tout a été partagé et vendu à Ratilly ; Héliard a ramené les malles et caisses dans les quelles le linge était emballé. Enfin cette écœurante corvée est finie. Triste chose que la vie.

26 Mai : A 2 h enterrement de Guillot de Gardefort mort de la tuberculose à 31 ans laissant une jeune femme et un enfant en bas-âge.

27 Mai : Félix et Emilie aidés de Rosalie, ont fait trois parts des objets contenus dans les malles venues de Ratilly. Rosalie a apporté à la maison ce qui revenait à Roger et à Louis.

28 Mai : J’ai reçu une lettre de mon zouave qui se porte bien et espère pouvoir venir bientôt.

31 Mai : Session de mai : Nous n’avons rien changé au budget sauf 100 fr d’augmentation au secrétaire de mairie et 50 fr. au garde champêtre.

2 Juin : Eugène Gaudron : je lui ai payé 6 fr pour affichage des professions de foi aux élections de mai. J’avais déjà payé 1 fr 45 à Charles Semences soit en tout 7 fr 45 représentant ma quote-part dans les frais.

3 Juin : M. Pasquet marchand de charbon à Cosne : je lui ai pris une poche qu’il vend 6 fr ; comme nous n’avions de monnaie ni l’un ni l’autre, je lui ai payé 5 fr et je solderai le surplus à son prochain voyage. Joseph Lefèvre est venu attacher mes treilles.

4 Juin : Les légumes frais se vendent moins cher au marché : les petits pois 5 centimes le litre.

10 Juin : Les cultivateurs et les jardiniers se plaignent fort de la sécheresse ; seuls les foins et la vigne ne souffrent pas de ce temps là.

15 Juin : J’ai écrit à Louis à propos de son projet de voyage en Angleterre.

18 Juin : Roger m’a écrit en m’envoyant sa photographie et celle en prime avec enjolivements donnée par la maison. Les épreuves sont bonnes et mon zouave est bien campé. Il en a envoyé aussi à ses tantes.

6 Juillet : M. Héliard avait invité les ouvriers qui avaient travaillé à sa nouvelle salle plus quelques uns de ses clients ; j’étais du nombre. Nous avons déjeuné en joyeuse compagnie et rentré pour diner chez nous.

14 Juillet : La fête a été très calme particulièrement dans notre quartier du port.

19 Juillet : Louis est arrivé à 3 h 7 ; j’étais en devance de lui à la gare. Les familles Boucher-Fougerat l’attendaient à la sortie avec accompagnement d’automobile et de voiture. Hélas !

20 Juillet : Mariage de Mlle Marguerite Fougerat et de mon neveu Pierre Boucher. Louis est allé le soir au diner et demain mariage à l’Eglise.

21 Juillet : Mariage à l’Eglise de mon neveu Pierre Boucher avec Mlle Marguerite Fougerat. Les cloches ont carillonné de 4 h du matin à 5 h. Toute la famille Fougerat était en grande tenue : les femmes avaient des toilettes magnifiques. Quel luxe! Bon Dieu ! Mais tout ça c’est de la poudre aux yeux.

22 Juillet : Roger m’a envoyé une dépêche d’Alger, il arrive demain jeudi au train de 3 h 7. Les noceurs sont venus se promener par groupes séparés ; plusieurs ont passé la Loire et sont allés se promener en Berry.

23 Juillet : Roger, mon zouave est arrivé à 3 h ; il a un peu maigri mais sa santé est bonne. Son congé n’est que de 25 jours ; j’espère pouvoir le lui faire prolonger d’autant.

24 Juillet : Roger, Louis et moi sommes allé rendre visite à la famille Laure Boucher puis Roger est allé à la gendarmerie faire viser sa permission.

28 Juillet : Réception des travaux de la passerelle : L’agent Monnot, le maire Carré, Mougne, Guillot, le chef cantonnier et moi, sommes allés voir les travaux qui ont été faits sur la passerelle et nous avons signé les procès-verbaux.

29 Juillet : Pluie, brumes épaisses, brouillard fin une partie de la journée. Par ces pluies sur la terre surchauffée le black-rot s’est rapidement développé ; les raisins noircissent et tombent et dans les champs la récolte est compromise ; les blés et avoines qui n’ont pu être mis en moyettes auront peine à sécher

2 Aout : Session d’aout, puis distribution des prix aux enfants des écoles. Monsieur l’Inspecteur primaire avait été désigné pour présider : il a fait parait-il un discours conforme aux principes laïques et Républicains. Mais hélas ! Sunt verba et voces…

3 Aout : Le vent frais mais il fait beau avec soleil superbe : les récoltes seront rentrées dans de bonnes conditions si ce temps continue qq jours.

4 Aout : Félix, Roger accompagnés de Rosalie sont passés en Berry ; ils ont rapporté de beau cresson et une guignette (petit oiseau) tuée par Félix.

9 Aout : Souscription pour la fête du port : j’ai payé 5 fr à Félix Boileau.

11 Aout : Roger et moi sommes partis pour Cosne. Nous avons vu le jeune major Toinot qui a demandé pour Roger une convalescence de 20 jours en plus de son congé.

16 Aout : Fête dite de St Laurent (patronale de Neuvy) : Beaucoup de monde de Cosne et de Bonny. Le cinématographe a attiré beaucoup de curieux et à dû gagner quelque argent au détriment des autres forains qui ne viennent que ce jour-là.

17 Aout : Plusieurs commerçants se plaignent que la fête ait été placée sur le champ de foire vers l’église ; mais la place dite du presbytère n’étant pas encore aménagée et la grande voirie s’opposant à ce que les forains s’installent sur la route à cause du passage de nombreuses voitures automobiles, il était impossible de faire autrement.

20 Aout : Clément Gauthier et son fils Fernand sont venus déjeuner avec nous ; Clément est toujours gêné pour marcher : la fracture des côtes est à peu près consolidée mais l’effort est encore pénible : c’est une affaire de temps.

21 Aout : La foudre est tombée ce matin sur une écurie des Ruisses appartenant au père Rancœur tuant un veau et 4 vaches ; le pauvre bonhomme est assuré, mais pour une somme inférieure à la valeur de l’immeuble et du cheptel.

22 Aout : Le maire, l’adjoint et plusieurs conseillers devront aller demain au cimetière pour réglementer les places des concessions perpétuelles.

23 Aout : Nous sommes allés au cimetière et avons décidé de donner aux allées une largeur uniforme de 3 m 50. Des bornes et des piquets seront placés à chaque bout et le gazon coupé suivant une ligne droite. L’emplacement des concessions à perpétuité fera le tour du cimetière d’abord puis le tour des carrés réservés aux fosses communes.

31 Aout : Roger et moi accompagné de Rosalie sommes allés à Cosne. Nous avons vu le Major Tellier qui a bien voulu recommander Roger, de même que mon ami Laurent ; Après de nombreuses et ennuyeuses stations à l’hôpital, Roger a enfin pu rencontrer le major Martin qui a gardé sa permission et lui a formulé la sempiternelle pommade à l’acide chrysophanique ; il est probable qu’on accordera quelques jours de convalescence à mon zouave qui, sans cela, devrait partir le 5 septembre pour rejoindre son régiment à Alger. Nous avons déjeuné à l’auberge du Point du jour, gargote….

1 Septembre : Déjeuner chez tante Laure Boucher avec ses deux fils Louis et Pierre et leurs femmes.

3 Septembre : Foire dite aux lapins de Neuvy : peu de bestiaux et commerce à peu près nul.

5 Septembre : Accouchement de ma fille Emilie ce soir à 5 h 25 : Emilie est accouchée heureusement d’une grosse fillette ; j’étais là avec le Docteur Morlat et la sage-femme Mme Semence. Tout c’est bien passé et le père Félix Duchampt est très heureux, le prénom du bébé est : Geneviève.

6 Septembre : Fête du Port : Nos organisateurs se sont surpassés : les jeux, la décoration, tout était parfait.

7 Septembre : Déjeuner à midi avec les membres de la commission de la fête : Nous avons été parfaitement servis chez Mme Annette Frottier et le déjeuner s’est gaiement terminé par des chansons.

9 Septembre : Emilie et sa fillette sont en bonne santé, sauf que la jeune mère commence à souffrir de gerçures au mamelon. Je lui fais prendre pour badigeonner les mamelons une pommade à base de chlorhydrate de cocaïne.

24 Septembre : Mme Gabriel Chavanne née Jeanne Pautrat est accouchée à 7 h 25 d’un gros garçon de 9 livres ; elle a beaucoup souffert, le Docteur Morlat prétend qu’il faut laisser faire le travail et ne pas stimuler les contractions utérines si elles s’arrêtent : je ne suis pas de son avis.

25 Septembre : Charles Renault est venu m’apporter l’échelle de chenet avec roulons d’acacia pour qu’elle soit plus légère.

26 Septembre : Roger est parti ce matin à 9 h où il prendra l’express qui le conduira directement à Marseille.

28 Septembre : Roger m’envoie une dépêche m’annonçant qu’il est libéré du service militaire.

30 Septembre : Roger est revenu à 3 h 15 de Lyon où il a passé quelques heures avec son frère qui pense venir nous voir prochainement.

4 Octobre : Louis est arrivé au train de 3 h 10 avec tous ses bagages il a quitté les wagons-lits.

7 Octobre : Mes deux fils sont allés aux écrevisses avec Mollette et son fils Auguste ; ils sont revenus à 11 h du soir.

12 Octobre : Roger et Louis sont partis à bicyclette pour Treigny : la vente de toute la propriété de Ratilly aura lieu à midi et heures suivantes. Il parait que les bois n’ont pas trouvé acquéreur ; les fermes, le château et ses dépendances ont été vendus un prix dérisoire par entente du youpin Bernheim et de son moins juif Marchand. Nous les repincerons au demi-cercle !!!

16 Octobre : Louis est reparti ce matin pour Paris ; j’ai envoyé une dépêche à son cousin de Fos pour le prévenir de son arrivée.

22 Octobre : Louis est parti ce matin pour son voyage en Angleterre. Il est parti pour Dieppe où il prendra le bateau pour Newhaven et sera à Londres vers 7 h du matin.

25 Octobre : Louis m’a écrit de Londres : Les places sont difficiles à trouver quand on ne sait pas la langue.

31 Octobre : Louis a quitté Londres et s’est placé à Bournemouth dans une famille aisée.

1 Novembre : Cinématographe : je suis allé ce soir avec Roger et Rosalie voir fonctionner cet appareil. Il y a de bons tableaux mais une trépidation qui fatigue la vue.

10 novembre : Baptême de ma petite fille Geneviève Duchampt à 2 h de l’après midi. Mme Duchampt mère était la marraine et Roger le parrain et c’est Rosalie qui portait la jeune enfant.

18 Novembre : Louis m’a écrit, il souffre moins de ses gerçures pour l’instant. D’ici peu il espère pouvoir prendre quelques leçon d’anglais : le prix est un peu élevé mais il apprendrait plus vite.

22 Novembre : Roger est allé au banquet de Ste Cécile chez Chavanne ; il en est revenu ce matin (lundi 23) vers 6 h.

1 Décembre : Cotisation pour la St Eloi : Les secrétaires Thibault et Choiseau ont reçût mon obole de 2 fr, les jeunes gens m’ont apporté un petit gâteau de pain bénit.

5 Décembre : Roger est parti pour Annay à la noce d’Abel Paris ; il ne reviendra probablement que demain soir. A Neuvy : Ste Barbe : Nos sauveteurs ont fait ce soir, leur banquet annuel : Les pompiers ont eu un temps superbe.

16 Décembre : M. Charles Lechien est venir me dire que les 2 langoustes qu’il m’avait fait venir à l’occasion de la petite fête de demain étaient arrivées et qu’il trouvait le prix exagéré. Nous avons envoyé une dépêche à son envoyeur qui nous a répondu que vu la rareté des arrivages et la parfaite qualité des crustacés, il nous avait compté au plus juste prix. J’ai remboursé à M. Lechien ce qu’il avait payé à la gare : 22 fr 90.

17 Décembre : Nous avons fêté l’anniversaire de ma naissance et ma 60 eme année avec ceux de mes conscrits de Neuvy qui ont bien voulu venir : Buisson, Boileau, Rondeau, moi les conscrits de Neuvy, plus Semence des Cocus, Moïse Fièvre d’Annay et François Fontaine. Notre petite fête s’est fort bien passée et nous nous sommes donnés rendez vous dans 10 ans ??? Hélas qui de nous sera là !!!

18 Décembre : Nous avons mangé les reliefs de notre déjeuner d’hier avec Félicie Billiard.

19 Décembre : J’ai reçu de Meyrignac (22 Fbg St Honoré Paris) un bandage double que j’ai payé contre remboursement pour le père Boileau qui me fera payer par la Société de secours dont il fait partie.

24 Décembre : J’ai remis 10 fr à Roger pour le réveillon chez Chavanne où il s’est rendu avec ses camarades.

28 Décembre : Louis m’écrit qu’il quitte sa maison de Bournemouth pour prendre un emploi plus lucratif (30 shill par mois) à l’Hôtel Royal avec beaucoup moins de travail.

30 Décembre : Malgré la neige qui est tombée violemment, il a été pris aux lacets qq douzaines d’alouettes, mais surtout des petits oiseaux, tarins et pinsons des Ardennes.

31 Décembre : Roger est allé avec Gourdet pour voir comment se pratique la pose des lacets ou collets. Il a aidé Gourdet qui lui a donné 18 tarins. Rosalie a vendu au marché des alouettes 2 fr la douzaine et les oiseaux 60 centimes.