1755 - Gaucher curé de Neuvy

Recherches historiques sur Neuvy-sur Loire

par Gaucher curé de Neuvy. (1755)

Époque romaine

Par quelques auteurs et sur quelques itinéraires Neuvy est désigné comme le Noviodunum des commentaires de César. Cet honneur lui est contesté puisqu’on prétend que Nevers s’appela d’abord Noviodunum et ensuite Nivernum

Sans entrer ici dans aucune discussion on peut dire toutefois que Neuvy a eu une grande importance sous les Romains; Les vestiges de constructions romaines qui s’y trouvent en plusieurs endroits et surtout les nombreuses sépultures de l’époque romaine qu’on y découvre à chaque instant prouvent bien évidemment que ces tombeaux en pierre qui n’ont pu appartenir qu’a des personnages distingués, se trouvent réunis en trop grand nombre pour ne pas faire supposer une population considérable à l’époque romaine aux environs des lieux ou ils se trouvent.

Époque du moyen âge et de la Renaissance

Neuvy, au moyen âge, s’appelait et s’écrivait Neufvy-sur-Loyre.

La Seigneurie de Neuvy d’après les renseignements parvenus jusqu'à nous, a eu aussi une part de célébrité; il ne reste rien à proprement parler de l’ancien château seigneurial, car ce qui reste est tellement défiguré qu’il est impossible d’en tirer l’idée de ce que se fut cette construction féodale.

Des recherches faites sur les registres de la Paroisse ont permis de rétablir autant que possible depuis 1578 jusqu’en 1793, la filiation des Seigneurs de Neuvy et donné aussi quelques renseignements sur les Seigneurs des environs.

Les plus anciennes maisons de Neuvy paraissent dater du règne de François I, de Henri II mais sous des prétextes de restaurations ou d’assimilation, elles ont tellement été mutilées ou défigurées qu’il n’y en a aucune de remarquable.

L’église paroissiale et seigneuriale de Neuvy a aussi quelque intérêt, quoique le marteau du vandalisme l’ait endommagée, on peut encore en donner une description.

Église de Neuvy -Sur-Loire

L’église de Neuvy placée sous l’invocation de Saint Laurent, est un monument fort simple accompagnée de deux chapelles attenantes irrégulièrement placées. Au sommet du pignon occidental, il existe une croix en pierre sous laquelle se trouvait le millésime de 1604 qui aujourd’hui est effacé par le temps.

A l’extérieur, cette église n’offre rien de remarquable que la double ……… funèbre des familles seigneuriales qui y ont leurs sépultures et dont les armes effacées par le temps et les révolutions sont à peine visibles aujourd’hui, mais dont on voit encore l’emplacement. Elle est aussi ornée de deux portails, dont l’un latéral a été muré.

Cette église était autrefois surmontée d’une flèche carrée qui fut abattue à l’époque de la Révolution et dont la base seule est restée et sert aujourd’hui de clocher.

Il existe dans les archives de la Mairie une pièce curieuse de l’époque de la Révolution concernant le clocher: « Citoyens, y est-il dit, vous savez que d’après un décret de la Convention, tout édifice en forme de montagne doit disparaître, que le jour où ces édifices tomberont soit donc un jour d’allégresse pour votre cité……. Etc.»

Ainsi tomba la flèche de Saint Laurent de Neuvy. Ce clocher, avant la Révolution renfermait un carillon de 4 cloches; deux ont été enlevées à cette époque et deux par conséquent sont restées, ce sont celles qui existent aujourd’hui.

Il paraît, d’après les documents que les habitants de Neuvy, et même les autorités de l’époque dernière font à leur carillon, car il était sévèrement prescrit de ne conserver qu’une seule cloche et on y conserva deux. La seconde passa pour être le timbre de l’horloge. C’est du reste la plus belle et la plus grosse cloche d’alors et d’aujourd’hui.

On trouve cette lettre dans les archives de la mairie :

« Citoyens c’est alors pour la septième fois que je vous écris d’envoyer vos cloches à Nevers et je vous préviens que c’est la dernière. »

Il paraît d’ailleurs que ces réticences étaient assez communes, puisque la même lettre dit qu’il y a seulement, jusque là, deux municipalités, dont elle fait éloge, qui se soient empressées d’envoyer leurs cloches à Nevers.

Les plus anciennes de ces cloches dataient de 1602 ainsi que le prouve l’acte ci-dessous : « Le mercredi, 27 ième jour de mars, mil six cent deux, ont été baptisées et bénites en l’église paroissiale de Neuvy-sur-Loire, par moi, messire Etienne Huré, prêtre, curé du dit lieu, deux petites cloches, l’une desquelles a été nommée Marcelle, lequel nom lui a été donné et imposé par haute et puissante dame Edmée de Chesnay, épouse du haut et puissant seigneur messire Gaspard de Courtenay, chevalier de l’ordre du Roy, seigneur de Bléneau, Vilars et du dit Neuvy et noble homme Claude de Boutervillain, escuyer, seigneur de la Boulesvrerie et demoiselles ses parrains et marraine » .

Signé « Du Chesnay »

Et l’autre, a été imposée et nommée : « Adrienne par dame Jehanne du Chesnay, femme de messire François Danges, chevalier de l’ordre du Roy, Gentilhomme servant ordinaire de sa Majesté, escuyer et seigneur de Bucagne, Touville, Beaumont en Saintonge et Langeron, les Barres et……….à cause de la ……… de ladite du Chesnay et Edme de Courtenay, escuyer seigneur de…… et autres lieux appartenant à damoiselle Guilleberte de Cergilleray (Guilleberte de Cergillerai en 1602 et Guilleberte de Cergillerai en 1613 doit être la même personne) ses parrains et marraines d’icelle, baptisée par moi curé de Neuvy. »

Signé « Edme de Courtenay » du « Chesnay »

L’une de ces cloches a été envoyée à Nevers, l’autre est restée à Neuvy. La seconde cloche envoyée à Nevers était celle qui fut baptisée en 1613 et dont l’acte de bénédiction…..

Le dimanche 22ième jour du mois de septembre à l’issue des Vêpres paroissiales, a été bénite solennellement la grosse cloche de ce lieu de Neuvy après avoir été de nouvel refondue.

« les parrains et les marraines ont été : honorable homme Pierre Boucher seigneur de Chauffourt, notaire du dit Neuvy et Damoiselle Guilleberte de Cergilleray épouse de Monsieur de la Boulesvrerie et Jehanne Lesourt………..et par moi, curé soussigné assisté de mon Vicaire. »

Signé « Chabert »

La grosse cloche actuelle date de 1666. On lit sur cette cloche : j’ai été bénite par Edme Robineau curé de Neuvy-sur-Loire, j’ai été nommée Georges Geneviève par Haut et puissant Seigneur Georges de Guiscard comte de la Bourlie etc.etc. mon Parrain et par Geneviève de Longueval, son épouse ma Marraine. 1666.

Quand on entre dans l’église de Neuvy par le portail occidental on est tout d’abord frappé de la disproportion qui existe entre la longueur et la largeur de l’édifice.

Cette disposition est réelle mais elle se comprend par l’allongement successif de l’église d’abord bâtie de trois travées et qui aujourd’hui en comprend six .

Les trois premières travées d’une architecture très simple datent selon les archéologues du XIIIième siècle, suit une travée plus récente voûtée et avec cordons en pierre t à moulures sur les arêtes.

Les deux autres travées aujourd’hui voûtées en imitation de la quatrième qui les précède étaient avant 1859 recouvertes par une voûte en berceau ; je n’hésite pas à croire que ces deux travées n’ont été bâties qu’en 1604 date qui était sur le portail occidental de l’église.

Cette Eglise avait donc été allongée deux fois et comme sa largeur est restée la même on s’explique sa disproportion.

La chapelle de la Sainte Vierge placée à droite de l’église n’a guère été bâtie que vers la fin du 16 ième siècle ou au commencement du XVII ième avant 1604. Elle fut bâtie au moyen des dons des seigneurs et des notables de Neuvy, ainsi que l’attestent plusieurs actes de décès des fondateurs, et notamment la fin de l’acte de décès de Julien Clémendra du 18 novembre 1656, le dit Julien y est-il dit : Décédé dans la communion de notre Sainte Mère l’Eglise et inhumé dans la chapelle du Rosaire ayant droit d’inhumation comme fondateur.

La chapelle seigneuriale dédiée a St. Hubert placée à gauche de l’église, est de 1598 suivant une date qui se trouve près du bénitier de l’ancienne partie seigneuriale aujourd’hui murée.

Le retable du maître autel de l’église est en pierre, il occupe toute la surface inférieure du pignon oriental, il se compose au milieu d’un encadrement sculpté accompagné de chaque côté par deux colonnes accouplées, chaque couple de colonnes est suivi d’une porte de très bon goût joignant les murs du midi et du nord. Les colonnes supportent une frise sculptée……également entre-elles et contiennent de beaux détails au-dessus de l’autel. Ce retable est couronné par la statue de St.Laurent patron de l’église près duquel se trouvaient autrefois deux anges en prières ; de chaque côté sont des faisceaux de fruits formant de gracieux enroulements. Malheureusement, le tableau qui forme le centre du Retable n’est plus le tableau primitif, il a été recouvert ou remplacé par une œuvre d’une détestable médiocrité. Il est fâcheux que ce retable dont les proportions sont majestueuses et le tout parfaitement harmonieux ait été couvert à une époque encore récente par une ignoble peinture qui le défigure complètement

Sur les deux portes qui accompagnent le Retable se trouve le millésime, sur celle de gauche est le chiffre 16, sur celle de droite le chiffre 77, ce qui veut dire très probablement le chiffre 1677. Ce Retable est une œuvre de libéralité de M. de Guiscard Comte de la Bourlie sous gouvernement du Roy Louis XIV et seigneur de Neuvy. Avant la révolution ses armes se voyaient sur la frise de chaque côté du Retable, il n’en reste que les branches de laurier.

On dit que Monseigneur Dufêtre évêque de Nevers 1860 désire la destruction de ce Retable souillé par cet affreux enluminage. Sans doute qu’au point de vue archéologique, ce Retable est et sera toujours une véritable hérésie ; mais tel qu’il est et tel qu’il est placé, c’est encore une œuvre remarquable et dans une église comme celle de Neuvy ou rien ne se suit, rien n’est conforme à l’art de tels scrupules seraient vraiment exagérés ; ce vraiment un malheur déplorable que cette destruction qui priverait l’église et le pays d’un de ses plus beaux souvenirs.

L’église de Neuvy est surtout intéressante par les tombeaux qu’elle abrite ; jusqu’en 1771 on y enterra toutes les personnes distinguées par leur mérite, leur nom ou leur fortune.

A la révolution de 1793, le caveau de la chapelle seigneuriale a été violé. Ce caveau contenait dit-on 3 tombeaux ; les cercueils de plomb furent fondus et les cadavres jetés sur le sol. Un monument surmontait ce caveau, il a été mis en pièces, il n’en reste aucune partie.

Monseigneur le prince d’Harcourt fut inhumé dans ce caveau le 30 août 1626.

Les épitaphes qui se trouvent aujourd’hui sur le caveau n’y ont été placées que dans ces derniers temps ce sont celles de Geneviève de Longueval épouse de M le comte de la Bourlie seigneur de Neuvy et celle de ce dernier.

L’épitaphe de M. de Guiscard de la ……qui contient aussi celle de sa femme morte en 1681, était placée sous une arcade basse donnant sur le sanctuaire de Neuvy. Cette arcade était fermée par une grille fixe en fer ; cette grille depuis la révolution a été remplacée par une grille ouvrante en bois. Au devant de l’ancienne grille au milieu de l’arcade et du côté du chœur était une lampe ardente objet d’une fondation faite par Madame de Guiscard et relatée sur une épitaphe placée aujourd’hui sur le caveau et qui en raison de sa forme ovale, a du être autrefois le centre d’un médaillon sculpté . Après la révolution, cette épitaphe est restée peut-être pendant 40 ans passés enforme de table dans le jardin du curé de Neuvy. Elle n’a aucune raison d’être placée sur le caveau, de même que celle de M Guiscard qui a été déplacée bien à tort, dans ces derniers temps.

Dans la chapelle de la Ste Vierge on voit l’épitaphe de la douairière de Neuvy, Mme Claude de Rochechouart( du Chesnay ) qui repose en ce lieu et près d’elle, le cœur d’Edmée du Chesnay Dame de Courtenay sa fille

Dans la nef, on voit une épitaphe en marbre noir de Pierre de Chauffourt

D’autres épitaphes, placées dans la nef, ont disparues à l’époque de la révolution.

Au XVIII ième siècle les différends des partisans de Jansénius avec la cour de Rome ne passèrent pas inaperçus à Neuvy : le curé de Neuvy tenait pour la cour de Rome, l’Evêque d’Auxerre de Caylus était janséniste. Or voici ce qui arriva et tel qu’il est rapporté par le curé lui-même à la date du mois d’octobre 1735 :

« Que la postérité, dit-il ne soit pas surprise si le sieur CURY paraît en ma place pendant six semaines que j’ai été absent et détenu pendant le dit temps au grand séminaire d’Auxerre, séminaire sans directeurs et sans sujets à l’exception d’un seul prêtre et de deux frères de la Compagnie de la Mission pour conserver leur droit, ce n’a été uniquement que pour obéir à Monseigneur Charles de Crylus évêque, à cause de mon attachement inviolable à la constitution.

A la fin des six semaines, sa Majesté m’a fait l’honneur de me gratifier d’une somme de Cinq cents livres, et une partie de mes paroissiens les uns à cheval, les autres à pied, armés et avec tambour en tête, vinrent au-devant de moi, jusqu dans la ville de Bonny et le soir environ les dix heures firent un feu de joie dans le champ Fontarabie. »

Signé : « Gaucher, prêtre, curé de Neuvy »

Jusqu’au 23 septembre 1738, M Gaucher est encore à Neuvy et signe les actes, mais à cette date il disparaît de nouveau pour ne reparaître qu’en octobre 1755.

Or, voici ce qui se passa et ce qui a été raconté par un neveu de M Gaucher : de 1755 1738, Monseigneur de Caylus vint à Neuvy. Le curé fait fermer les portes de l’église et se renferme en sa maison ; l’évêque fait ouvrir les portes de l’église, célèbre la messe et quitte Neuvy. Alors M Gaucher va à l’église, fait sonner les cloches, appelle ses paroissiens pour les faire assister à une cérémonie expiatoire.

L’évêque, déjà bien irrité sans doute, apprit le fait et fit de nouveau renfermer M Gaucher qui ne revint à Neuvy qu’après la mort de l’évêque en décembre 1755.

M. Gaucher s’exprime ainsi : « Que la postérité sache que j’ai été absent environ 20 ans de ma paroisse pendant l’épiscopat de M Charles de Caylus ce n’a été que parce que j’ai fait paraître mon adhésion aux constitutions des Souverains Pontifes qui condamnent les erreurs de Bayus, Jansènius et Quesnel ; en conséquence de ce que je n’avais aucune communication avec ces réfractaires en ce qui regarde la religion, ce que j’atteste être sincère et véritable ce premier jour de décembre 1755. »

Signé : « Gaucher Curé de Neuvy diocèse d’Auxerre »