Paulette Charlon

Charlon Paulette

Née le 29 Avril 1920

Fille de Paul Charpin et de Fernande Morin, de Beaulieu

Epouse de Maurice Charlon né le 1 novembre 1913

Lors de l’arrivée des Allemands (Août 1940), nous habitions à Annay à la ferme du Jourdet. Une jeune réfugiée est venue vers moi me dire qu’un camion de soldats Allemands venait d’arriver. Je vais les voir et je m’aperçois en effet, à l’uniforme, que c’était des allemands. Mon père arrive lui aussi et me dit : « File à la maison, ce sont des boches »

Le soir même, arrive un homme, peut-être un soldat, curieusement habillé, barbu, il me demande de lui donner un rasoir, celui que j’avais acheté pour mon mari, qui venait d’être fait prisonnier. Je lui donne le rasoir mécanique. Il s’est rasé à la maison et a fait sa toilette tranquillement. Après il m’a demandé de lui servir une soupe qu’il m’avait vu préparer. Il en a mangé deux bols, elle lui semblait très bonne.

Mon mari a été mobilisé à Cosne sur Loire, il avait 27 ans. Il est parti du côté de Verdun et il a été fait prisonnier en Mai 1940 à Maubrun (02-Aisne) dans un champ de luzerne. Avec un de ses camarades, qui avait 20 ans, ils se sont rendu avec un morceau de chemise blanche pendu au bout d’un bâton. Mon mari a dit à son camarade : « Ne bouge pas, ne recule pas, surtout ne bouge pas, sinon tu risques d’être abattu » Il n’a pas écouté mon mari, il a bougé et les soldats allemands l’ont abattu sur place.

Les prisonniers français ont marché 21 jours, avec très peu de nourriture. Il avait tellement faim qu’il a fait cuire des racines de pissenlit dans une boîte en fer blanc.

Ils traversent la Belgique, arrivés en Allemagne, ils ont été placés à quatre dans un couvent, pas loin de la frontière autrichienne. Le couvent était tenu par des sœurs qui s’occupaient de la formation des jeunes hitlériennes. Le couvent avait une ferme avec des vaches, des chevaux, des cochons, de la volaille, tout ce qu’il fallait. Mon époux, avec ses camarades, soignaient les bêtes, faisaient les travaux des champs, enfin tout ce qu’il fallait faire dans l’exploitation, et tous les dimanches, ils avaient droit à un poulet. Il y est resté deux ans.

Au bout de ces deux années passées au couvent il est parti travailler dans une usine de produits chimiques à……… Les dernières années de guerre passées là-bas furent terribles, en particulier à cause des bombardements, qui avaient lieu jours et nuits. Ils allaient se cacher dans les bois environnants, quelque soit le temps, en hiver ils s’allongeaient dans la neige, c’était effrayant.

Pour améliorer l’ordinaire, comme il n’était pas très grand, il passait par un soupirail d’une cave et volait des pommes de terre pour pouvoir mieux manger avec les autres car ils avaient faim. Vers la fin de la guerre, il est envoyé dans une ferme, mais là aussi il n’y avait pas grand-chose à manger.

Et c’est là que les Américains arrivent. Ils lui donnent deux boites de ration à manger en lui disant de se mettre à l’abri car les combats ne sont pas encore terminés et «Tu peux encore courir des risques. »

La ferme du Jourdet à Annay

La ferme du Jourdet appartenait au Comte de Couëssin et était cultivée par mes parents. Je vivais chez eux avec mes deux enfants, Ginette (5 Juillet 1938) et Suzanne (20 Février 1940). Comme dans toutes les fermes nous avons élevé toutes sortes d’animaux et cultivé tout ce qui était nécessaire pour vivre et nous nourrir, aussi avons-nous toujours eu ce qu’il fallait pour vivre

Quant à moi, mon travail était en autres de garder aussi des oies. Nous avions toujours un troupeau de 20 à 30 têtes. Elles m’en ont fait voir de toutes les couleurs J’ai gardé le souvenir de bien des courses pour les surveiller. Un jour elles ont pris la rivière de la Vrille et j’ai mis des heures à les rattraper. En revenant le soir avec elles, mes parents se demandaient ou j’étais passée, il faisait presque nuit.

Les oies étaient dans la rivière, j’ai du attendre qu’elles sortent et seulement quand elles le décideraient.

Un grand Jour.

Le 5 Juin 1945, mes deux filles m’appelèrent, « Viens voir Maman, un monsieur vient d’arriver». Un homme s’approche, habillé avec de vieux habits, un calot sur la tête, c’était mon ami : Suppliciau Marcel

Le jour de sa mort nous avons très bien entendu de nombreux tirs venant de la direction de la ferme du Châtelet.

Le lendemain j’ai rencontré le Père Suppliciau…..qui m’a seulement dit : «C’est fini, tu ne reverras plus ton copain»

Voir témoignage de Micheline Martinet - Morel : https://sites.google.com/site/lequaideneuvysurloire/le-quai-a-ses-differente-epoque/les-allemands-arrivent/temoignage-des-habitants/micheline-martinet---morel

Les vaches

Nous avions deux génisses dans un pré entre Annay et Arquian. Mon père allait les voir régulièrement. Un jour il n’a trouvé que la peau de l’une des deux; la peau était jetée dans les broussailles, seuls les bons morceaux avaient été enlevés. 15 jours après, mon frère Roger, 20 ans, va à son tour voir comment se porte celle qui reste et alors il voit des soldats allemands dépouiller cette deuxième pauvre bête. Mon frère a rebroussé chemin sans se faire voir. Mon Père a porté plainte contre X et il a été remboursé par la Perception.

Les Poules

Un jour, un officier allemand est venu nous demander si des soldats allemands ne nous avaient pas fait des ennuis ou quelque chose comme ça. Comme il parlait très bien le français, ma Mère lui dit qu’effectivement des soldats allemands étaient venus et leur avaient volé deux poules. Ils avaient agi avec une rare cruauté, ils les avaient tuées en leur arrachant le cou à mains nues, ça avait été affreux à voir et du sang de ces malheureuses avait coulé par terre.

Un des deux soldats était tellement saoul qu’il en était tombé la tête en avant sur leur moissonneuse lieuse, qu’il s’était blessé à la tête et aussi fait une belle blessure qui avait beaucoup saigné elle aussi.

L’officier allemand lui tendit, pour la dédommager, deux billets, qui étaient des Deutsche Mark.