Tourisme de recueillement, les aârches berbères sèment la joie.

Titre original : Une marée humaine au rituel d’Azrou N’Thour

Vendredi dernier, tous les chemins menaient vers Azrou N’Thour, ce «pic sacré» situé à 1883 m d’altitude, sur les hauteurs des majestueux monts du Djurdjura, dans la daïra d’Iferhounène, et à environ 70 km au sud-est de Tizi Ouzou. C’est là où est organisé, cycliquement et à chaque saison estivale, Assensu. Cette activité est assurée, à tour de rôle, par les  villages Zoubga,  Aït Adella  et Takhlidjth-Aït Atsou. L’événement consiste en une fête grandiose qui draine des milliers de personnes venues des quatre coins de la Kabylie et même d’autres régions du pays ainsi que plusieurs émigrés. Les habitants de ces bourgades n’ont pas dérogé à la tradition.

Ce rituel a permis aux visiteurs de passer des moments agréables dans ces lieux féeriques, au paysage fabuleux et à la beauté naturelle sauvage. Le rituel d’Azrou N’Thour est organisé chaque été, durant trois week-ends successifs, et à tour de rôle par les habitants des villages Zoubga, Aït Adella et Takhlidjt-Aït Atsou, de la daïra d’Iferhounène. 

L’événement de vendredi dernier a été célébré d’une manière festive. Les lieux étaient, donc, devenus, la journée tout comme la nuit, un véritable lieu de pèlerinage. L’ambiance était aussi conviviale dans la mesure où cette festivité a permis aux convives de ressusciter l’esprit de fraternité dans ces lieux féeriques, au paysage fabuleux et à la beauté naturelle sauvage. Les organisateurs, quant à eux, ont dû faire preuve de solidarité pour contenir cette masse humaine qui a déferlé vers cet endroit. Depuis jeudi soir, des grappes humaines commençaient à affluer vers Azrou N’Thour qui est devenu, en un laps de temps, un espace grouillant de monde. Des moutons ont été sacrifiés sur l’autel de la solidarité. Tous les habitants du village étaient mobilisés comme un seul homme pour l’aménagement du site.

Aux cimes du Djurdjura

Les femmes étaient chargées de préparer le couscous qui a été servi aux présents le lendemain dans une ambiance conviviale. C’est une sorte de veillée d’armes pour la préparation de la cérémonie de vendredi. Les villageois ont veillé au grain pour assurer la quiétude et le bien-être de leurs hôtes. Les visiteurs font, pour la pluspart, un bivouac nocturne sur cette crête rocheuse du Djurdjura. «Chaque année, Assensu est célébré trois fois et par trois villages», nous a expliqué un citoyen de Takhldjt-Aït Atsou, dont c’était le tour d’organiser les festivités du week-end dernier. «Azrou N’thour n’est pas le nom d’un saint, mais les habitants de la région lui attribuent un caractère de sainteté. Les visiteurs venaient généralement en famille.»

Des femmes, des enfants et des jeunes filles prennent place dans des coins ombragés des cèdres et des chênes-lièges pour faire un petit pique-nique avant de partir vers le sommet du rocher en empruntant un sentier sinueux jusqu’au pic. Là, le visiteur est fasciné beaucoup plus par la pureté de l’air et la vue panoramique qu’offre cet endroit qui surplombe les wilayas de Tizi Ouzou, Béjaïa et Bouira. «Je viens presque chaque année pour visiter ce site paradisiaque afin d’accomplir le rituel qui est devenu pour moi comme une obligation.

Ce genre de rencontres permet de maintenir la cohésion sociale en Kabylie», nous dit un émigré rencontré lors de notre virée sur les lieux. Une vieille, voûtée et ridée, à peine capable de marcher, n’a pas été en reste des visiteurs qui montent vers le sanctuaire, quelque 400 mètres  plus haut. Elle a fait l’effort pour atteindre le sommet. Une fois sur la cime, elle nous raconte : «Avant, les vieilles venaient ici pour implorer Dieu afin de satisfaire leurs vœux, celui de voir leurs époux, fils, exilés à l’étranger, revenir au bercail. C’était la tradition de nos anciens. Des malades ont été aussi guéris par la bénédiction de ce lieu.» Là, tout le monde se rencontre sans aucun clivage idéologique, étant donné que le lieu accueille des personnes de tout âge et de modes de vie différents. Les visiteurs se baladent en toute quiétude. «Ici, le citoyen est libre de circuler comme il veut. Il est en toute sécurité. Il faut savoir qu’Azrou N’Thour accueille des émigrés, des étrangers et des personnes de différentes cultures.  Donc, on doit les mettre à l’aise et les respecter. C’est notre rôle d’ailleurs»,  ajoute un membre du comité d’organisation. Beaucoup d’animations ont eu lieu ce jour-là dans une atmosphère «de grand-messe». Les organisateurs ont même  assuré le transport à bord des bus qui faisaient la navette à partir de la ville d’Iferhounène.

AUBAINE MERCANTILE

Le rush des pèlerins a donné aussi des idées aux riverains qui ont ouvert des échoppes pour vendre toutes sortes de boissons rafraîchissantes et des sandwiches. Des files de véhicules longeaient la route desservant les lieux. Il s’agit d’une piste poussiéreuse et difficilement carrossable. «L’état de la route qui relie le col de Tirourda à Azrou N’Thour est le seul point noir de cet événement. Elle est très poussiéreuse. Sinon, autre chose, c’est vraiment une virée à ne pas rater. Le paysage est splendide», relève un père de famille venu de Béjaïa. Il était vraiment fasciné par la beauté des lieux. Un autre visiteur, un jeune, la trentaine à peine bouclée, une bouteille d’eau à la main, ne cessait d’immortaliser ces moments avec son appareil photo. «On m’a dit qu’avec la bénédiction de ce site, beaucoup de filles qui y viennent à cette occasion réussissent à dénicher un prétendant pour le mariage», murmure-t-il à l’adresse de son ami qui lui a répliqué avec un regard en coin : «Oui, tu as vraiment raison.

L’année dernière, c’est mon ex-copine qui est venue ici pour la première fois, et quelques jours plus tard, il y a quelqu’un qui est venu demander sa main pour cet été», lui a-t-il ajouté. Deux collégiens, Nordine et Cherif, venus d’Akbil, une commune de la daïra de Aïn El Hammam, attirent notre attention. «On est venus avec la famille pour passer une journée agréable ici et savourer, à l’occasion, l’air pur de cette cime», nous ont-ils dit avec un sourire timide. Fatiha, une artiste peintre, rencontrée alors qu’elle était sur le point de quitter le sanctuaire en compagnie de ses deux sœurs et son frère, nous fait remarquer que «le lieu procure beaucoup d’inspiration pour des œuvres artistiques».

Azrou N’Thour fait l’objet d’une activité d’animation florissante trois week-ends durant à chaque saison estivale. Il attire le visiteur, notamment, par son panorama éblouissant du haut de sa splendeur touristique. Sa réputation comme endroit paradisiaque semble atteindre son apogée de nos jours. Azrou N’Tour est à visiter et à revisiter. Le rendez-vous est donc, d’ores et déjà, pris pour l’année prochaine.

 Par Hafid Azzouzi