Si tu ne parles pas, tu meurs. Si tu parles, tu meurs. Parles et meurs !
Rejoignant les partis de la gauche algérienne, ceux d'ailleurs qui ont acquis une grande expérience de l'opposition clandestine, l'Association Nedjma, ne signe pas le communiqué pour la marche du 12 février.
A la lecture de son communiqué nous relevons ce passage : "La révolte de la jeunesse est intervenue dans un contexte de montée de luttes sociales et ouvrières." qui soulève le désarroi social dans le besoin démocratique. Cette association estudiantine a déjà fourni, voir ci-bas, son analyse de la situation algérienne.
« Pourquoi nous n’allons pas participer à la marche du 12 février »
Nous avons, comme prévu, pris part à la rencontre de cette coordination, à laquelle on nous a conviés et qui a eu lieu à la maison des Syndicats. Durant cette rencontre, nous avons exposé notre appréciation de la situation, nos positions politiques et notre objectif à travers notre participation à cette réunion. La démarche adoptée par nos noyaux consiste à prendre part à cette rencontre pour utiliser la tribune qui nous a été offerte afin de nous adresser à la base de cette coordination, sans aucune prétention de prendre part à la constitution du «front» ni à sa direction.Par nos interventions, nous, militants jeunes, avons expliqué, que notre combat se situe à la fois sur le terrain démocratique et social. Pour nous, les émeutes de janvier 2011 sont l’expression d’un marasme social généralisé. La révolte de la jeunesse est intervenue dans un contexte de montée de luttes sociales et ouvrières. La stagnation des salaires pendant plus d’une décennie, la montée galopante du chômage, l’érosion du pouvoir d’achat avec la dévaluation du dinar et la flambée vertigineuse des prix des produits de première nécessité, la fermeture du champ politique, la répression, la remise en cause des acquis sociaux, des libertés d’organisation, syndicales et démocratique… sont les causes de cette explosion sociale.La réponse du régime, qui, en guise d’apaisement, a réduit le prix du sucre et de l’huile, en accordant un nouveau cadeau aux patrons producteurs et importateurs, ne peut nous faire taire autant que ceux qui tentent, parmi les relais de la bourgeoisie de le faire en intimidant nos luttes ouvrières et les protestations des chômeurs et des opprimés et en les réduisant à «des tubes digestifs», pour nous demander, enfin, de sacrifier nos intérêts de classe au détriment d’un consensus «démocratique», qui cache mal les intérêts de la bourgeoisie.
Nous avons expliqué que notre rejet du régime ne se conjugue pas avec celui des patrons et des importateurs. Nous le rejetons pour sa politique de paupérisation, antisociale, antidémocratique, capitaliste aux ordres des grandes puissances impérialistes et de la bourgeoisie locale. Si les mesures de la loi de finances 2009 ne nous ont pas satisfaits, parce qu’elles tendent en réalité à gérer la crise et rencarder l’économie capitaliste, en vue d’assurer sa pérennité, mais en aucun cas à satisfaire les besoins de la population. Si nous contestons les timides mesures du gouvernement qui a essayé d’imposer des impôts aux patrons et aux importateurs, parce que nous
jugeons qu’il est grand temps de finir avec l’évasion fiscale et la bazardisation du commerce extérieur par l’imposition de plus d’impôts, par l’expropriation des entreprises réfractaires et par le monopole de l’Etat sur le commerce extérieur sous le contrôle des travailleurs
et de la population. Nous avons exprimé notre attachement aux questions démocratiques et à la liberté, mais celles qui servent la véritable majorité de la population. Contre la liberté et la démocratie qui permettent à Rebrab d’exploiter les travailleurs, de ne pas payer d’impôts et d’interdire la constitution d’un syndicat au sein de son entreprise, et en licenciant des travailleurs, nous avons opposé la démocratie qui donne le droit aux travailleurs de Rebrab de se constituer en syndicat pour défendre leurs intérêts et le droit de contrôle sur leur production. Pour nous, même la Constitution la plus démocratique ne donnera pas le droit à la parole au petit travailleur recruté en CDD et à qui on interdit le droit de s’autodéfendre, de contrôler sa production.Nous avons dénoncé ceux qui comptent sur l’ingérence des impérialismes français, américain et allemand pour «instaurer la démocratie en Algérie». Nous nous sommes appuyés sur l’exemple tunisien et irakien, pour expliquer que l’impérialisme n’a d’autres intérêts que la spoliation de nos richesses, l’exploitation de nos travailleurs et l’ouverture de notre marché à leur surproduction. Sur ce plan, nous avons réaffirmé notre combat anti-impérialiste, contre les puissances mondiales qui sont à l’origine de notre misère et de la crise de l’humanité entière. Nous avons également mis l’accent sur l’auto-organisation des masses et des travailleurs. Qu’il ne s’agit pas de créer des cadres bureaucratiques, détachés des masses comme substitut et nous autoproclamer «direction des luttes» pour «chasser le régime». Pour nous, l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes. Car même les revendications les plus révolutionnaires n’ont aucun sens sans une auto-organisation des travailleurs, des chômeurs, des paysans et des masses opprimées en tant que bloc social.» «Vous ne trouverez pas cette déclaration dans notre très démocratique presse locale qui a refusé de le publier. Vous ne la trouverez pas non plus dans aucun média dominant parce que la patrie n’a d’autre refuge que sa propre terre et la poitrine ouverte de ses révoltés.»
Association Nedjma
UNIVERSITÉ DE BOUZARÉAH
Partout à travers les quatre coins du pays, des jeunes se sont révoltés d’une manière spontanée pour exprimer leur détresse sociale. Le taux élevé du chômage qui touche cette frange, le manque de logement social ainsi que la cherté de la vie et le manque de libertés sont à l’origine de cette explosion sociale qui n’arrive pas encore à se structurer et à s’organiser.
Cette révolte qui s’est déclenchée juste après la révolte des jeunes de SIDI BOUZID en Tunisie intervient dans un contexte international marqué par une crise économique mondiale. Dans plusieurs pays, les bourgeoisies ont fait payer les conséquences de la crise aux travailleurs et aux masses populaires. Des mesures antisociales ont été prises, des plans d’austérité budgétaires ont été adoptés. Par conséquent, les acquis sociaux arrachés par les luttes des travailleurs et des jeunes, tels que ; la retraite et la sécurité sociale, la journée de huit heures, la gratuité des soins et de l’enseignement, le droit de grève, le droit de manifester et de s’organiser ont été remis en cause. Le capitalisme au niveau mondial a accentué les inégalités de classes, a produit la pauvreté, le chômage et provoque les guerres et les famines.
Face à cette situation de crise, les travailleurs et les jeunes ont mené des mouvements de grève et de protestation. Les différentes grèves observées par les dockers, les cheminots, les enseignants, les révoltes des jeunes des quartiers populaires dans toutes les villes et villages nous renseignent sur un malaise social profond qui n’a pas encore construit ses instruments de lutte.
Les jeunes des quartiers populaires ont manifesté leur mécontentement et leur désarroi sans se doter ni de cadre ni d’organisation. Cette situation peut se répercuter négativement sur le devenir de leur contestation et accélère l’essoufflement de leur révolte. La nécessité de canaliser et de doter ce mouvement d’un cadre et d’une organisation politique qui pourraient porter leurs revendications et traduire politiquement leurs aspirations légitimes s’imposent comme un besoin pressant et urgent.
Les questions soulevées par les jeunes révoltés, leurs aspirations et leurs revendications concordent avec les revendications actuelles posées par les étudiants et les travailleurs. L’effondrement du pouvoir d’achat, la cherté de la vie, le chômage et la précarité de l’emploi, la flambée des prix de l’immobilier sont autant de problèmes auxquels, le prolétariat se confronte au quotidien.
Cela pourrait produire une jonction entre les luttes des travailleurs, le mouvement estudiantin, et les révoltes des masses populaires.
Que nous sachons se joindre et s’unir pour construire le parti des opprimés.
NEDJMA , LE 11-01-2011