Si tu ne parles pas, tu meurs. Si tu parles, tu meurs. Parles et meurs !
19 ans d’état d’urgence et départ du système, une confusion des genres.
Les coups de pieds sous la table, faits par les démocrates et les personnalités d’Algérie, aux godasses des militaires pour mette fin au règne de Bouteflika ne cessent d’être émis. Les émeutes algériennes du début de janvier ont été jugulées par le déficit flagrant de la classe politique, qui ne légitime pas les actes des révoltés, mais souhaite les encadrer. Ces derniers ont été pénétrés par les casseurs et les chapardeurs intéressés par les prises de biens des commerces saccagés.
Dans une interview du général Benyellès, connu pour avoir été un anti-islamiste conséquent, parue sur le quotidien El-Watan du 28 janvier, cet influent officier a déclaré :« D’une part, des partis politiques crédibles capables de mobiliser une population et de l’encadrer et, d’autre part, des manifestations populaires massives et durables et non des feux de paille, comme cela a été le cas jusqu’à présent. » Qui dit mieux ?
Puisque la riposte à une hausse des prix de l’huile et du sucre n’a pas avancé la donne politique latente, celle de se démener avec la corruption et le népotisme
du pouvoir de Bouteflika.
Contrairement à la « rumeurologie » (science de la rumeur), certains militaires, sûrement rares, restent d’honnêtes pères de familles et certainement faiseurs des meilleurs audits concernant la situation algérienne. Ils avaient perçu, avec les communistes algériens malgré la minorité de ces derniers, que les islamistes de l’ex FIS, lors des élections de 1990/91, allaient mettre à feu et à sang l’ensemble bassin méditerranéen, en commençant par massacrer les récalcitrants à leur projet. Sur ce dernier point des liquidations physiques, ils n’ont pas été de main morte.
Initialement fixée pour le 9 février qui est un mercredi, finalement elle a été poussée au samedi alors que le vendredi s’avérait tentant pour les organisateurs. Sachant que c’est une journée de repos, permettant la participation des travailleurs et des étudiants. Pour le vendredi, les mosquées comme relais et lieux de rencontre lors de la prière hebdomadaire des musulmans, offrait une perspective de noyautage par les islamistes. Le cas de l’Egypte en a suscité un tel parangon. Un observateur occidental a osé commenter : « Chaque vendredi nous aurons droit à une révolte chez les musulmans » .
Initiée par la coordination nationale pour le changement et la démocratie, regroupant des organisations de la société civile et des partis d’opposition, cette marche a fait largement l’unanimité. Les meneurs assument depuis quelques jours la poursuite du mouvement social qui commence à se clarifier, et surtout trouver des idées, dont la principale position est une rupture fédérative avec le système. Entendre un système et une constitution truquée !
Ce dernier est totalement piégé dans le pressentiment de l’éminence de sa chute. Et comme il a prêté par le passé à des fins brutales, le pouvoir qui se cramponne depuis l’indépendance et même pendant la guerre libératrice à une hégémonie coupable d’exclusion des meilleurs enfants du pays, est acculé à semer le chaos avant de céder. Une pratique connue des dirigeants algériens, ceux des appareils politiques du parti FLN et du RND en ont fait la démonstration.
Les émeutes de janvier, détournées sur une vision alimentaire, se sont soldées par la mort de 8 personnes et quelques un millier de blessés. Après qu’elles aient été endiguées, les procès qui s’en aient suivi ont été expéditifs, tablant à sanctionner les jeunes accusés de : violences contre les représentants de l’autorité publique, vols, pillages et dégradations de biens publics. Elles ont laissé un climat tendu, surtout qu’ailleurs comme en Tunisie et Egypte
les populations ont montré une grande mobilisation imprégnée de revendications aussi politiques que citoyennes.
La marche du RCD (Rassemblement pour la Culture et la Démocratie) qui a été avortée, a montré que seule une large coalition est en mesure de mener des actions crédibles. Le travail unitaire est devenu une exigence, et peut produire une meilleure organisation. Cette certitude ne suffit pas, il est question de respecter aussi, par ces organisateurs, la valeur des vrais émeutiers qui sont devant les tribunaux. L’immolé de Bouazizi de Sidi-Bouzid est un symbole pour son indifférent, romantique et militant.