Que le vrai Assange se lève

Julian Assange, le fondateur de WikiLeaks, plaide sur toutes les tribunes pour une démocratie ouverte et transparente. Comme sans doute bien d’autres journalistes, j’admire son idéalisme radical. Nous sommes d’avis, quelques collègues et moi, que WikiLeaks arrive à point, alors que les médias font de plus en plus dans la nouvelle instantanée et consacrent moins de ressources aux enquêtes. En offrant une plateforme confidentielle aux informateurs, WikiLeaks fait un beau cadeau aux organes de presse: des documents secrets à l’état brut. Car contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, ce sont ses journaux partenaires qui les épluchent et qui décident de ce qui est digne d’être publié.

Mais revenons à Julian Assange. Ses activités ne sont peut-être pas aussi désintéressées qu’il n’y paraît. J’assistais dernièrement à une conférence sur la divulgation des câbles diplomatiques. Un des panélistes, le journaliste Nicholas Jones, a fait observer que Julian Assange garde en sa possession des documents compromettants en guise d’”assurance”.

Assange a affirmé au New Statesman: “Si quelque chose m’arrivait à moi ou à WikiLeaks, ces documents seront divulgués.” Interrogé sur leur contenu, il a déclaré qu’il y avait 504 télégrammes diplomatiques sur une seule entreprise médiatique et d’autres sur Ruport Murdoch et News Corporation.

Qu’est-ce que cela veut dire? Que News Corporation, propriétaire des canaux et studios Fox, de l’index Dow Jones et j’en passe, est diablement proche du pouvoir.

Mais cela veut aussi dire qu’Assange ne peut plus prétendre à l’angélisme. Pourquoi ne publie-t-il pas ces documents immédiatement, dans l’intérêt public? Sa peau est-elle devenue plus chère à ses yeux que le “monde libre” qu’il prêche?

Un ancien banquier suisse vient de lui remettre 2000 fichiers sur des fraudeurs milliardaires. Espérons qu’il les publiera tels quels, sans avoir pigé au préalable des informations pour monnayer sa liberté.