Le Conseil des ministres s’est réuni hier : Les grandes lignes du plan 2010-2014

Après un retard inexpliqué de plusieurs mois, le Conseil des ministres, qui s’est tenu hier, a enfin adopté le programme des investissements publics pour la période allant de 2010 à 2014 annoncé à grand renfort médiatique à la veille de l’entame du troisième mandat du Président. Il s’agit là, en effet, d’un plan originellement quinquennal qui se voit amputé de près d’un exercice pour mériter tout simplement ainsi la dénomination d’un quadriennal. Bref, l’Etat a décidé d’injecter pas moins de 286 milliards de dollars durant la période précitée pour le développement des infrastructures. Force est de relever que près de la moitié de ce montant astronomique sera consacrée à la finalisation d’anciens projets. 

Une enveloppe de 130 milliards de dollars est destinée au « parachèvement des grands projets déjà entamés, notamment dans les secteurs du rail, des routes et de l’eau ». Le reste prend en charge l’engagements de nouveaux projets. Il faut souligner à ce sujet que beaucoup de projets lancés au début du deuxième mandat de Bouteflika ont connu des retards énormes. Des surcoûts aussi. Faut-il rappeler au passage que ni bilan ni même évaluation ne sont portés à la connaissance de l’opinion publique sur le niveau et le rythme d’exécution ou de finalisation des nombreux chantiers.

Le projet dit du siècle, l’autoroute Est-Ouest en est la parfaite illustration. Idem pour le métro d’Alger dont la livraison est perpétuellement reportée. Une particularité bien algérienne qui semble caractériser tout projet national. Les nouveaux projets que compte lancer l’Etat, pour lesquels une enveloppe de 156 milliards de dollars est consacrée, connaîtront fatalement le même rythme. Tout retard comporte un coût. Mais, au-delà de ces sommes faramineuses et des promesses de projets, il est légitime de s’interroger sur les résultats des deux précédents plans.

L’Exécutif a péché par absence d’un bilan sur les réalisations. Sur les surcoûts réels aussi. La corruption notamment. Le devoir de rendre des comptes – un fondement de la bonne gouvernance – ne semble n’être ni dans les priorités actuelles ni à venir du pouvoir actuel, si l’on en juge par l’opacité la plus totale qui règne en maîtresse... de l’ouvrage. Les Algériens ne disposent d’aucune possibilité de contrôle. Les instances élues et qui ont pour charge de contrôler la gestion des affaires s’effacent devant l’Exécutif. Et même quand des scandales de corruption éclatent au grand jour, dans les secteurs les plus névralgiques, éclaboussant de hauts responsables, le Parlement, réduit à sa plus simple expression, fait semblant de ne rien voir. Il est lui « interdit » d’avoir un droit de regard. Ainsi, le Conseil des ministres – le deuxième en l’espace de dix jours – intervient après une année caractérisée par la vacance de l’activité officielle de l’équipe dirigeante. Le chef de l’Etat a brillé par une longue absence, hormis les quelques apparitions protocolaires. Des scandales en cascade restent le fait dominant de ces derniers mois. Ils ont en effet le plus marqué l’activité nationale. Il est à espérer que la grosse somme mobilisée, 286 milliards de dollars pour les quatre prochaines années, n’aiguiserait pas l’appétit vorace des corrompus de tout poil. L’opinion nationale qui guette désespérément une vraie thérapie de choc contre les détournements des deniers publics est restée sur sa faim.

Pour tout système de bonne gouvernance, le chef de l’Etat s’est contenté, hier, d’exhorter ses ministres à « rendre compte annuellement de l’exécution diligente de son propre programme et nous procéderons annuellement à l’appréciation de la situation financière du pays ». « Nous accompagnerons aussi cette importante dépense publique pour le développement avec la rigueur nécessaire pour bannir tout excès et surtout tout gaspillage dans le fonctionnement de l’Etat et des collectivités locales. Parallèlement, les mécanismes de contrôle devront jouer pleinement leur rôle comme je l’ai déjà ordonné dans ma récente directive », a souligné le chef de l’Etat. Mais pour aller plus vite dans cette démarche, n’est-il pas judicieux de commencer par évaluer les dégâts de la corruption qui a entouré la conduite des deux premiers plans ?

Par Hacen Ouali (el-Watan, Algérie)