Le vol du trésor de Cailly

Comme le rappelle le Journal de Rouen en 1874, lors de sa remise au musée des Antiquités, un trésor romain, composé d'un beau collier d'or, de vingt-sept pièces en or du Haut-Empire, de quelques monnaies d'argent, d'une balance en bronze et de quelques autres objets de métal a été trouvé en 1821 à Cailly au hameau du Floquet. 

Comme ce trésor découvert en 1821, tel que le rapporte le Journal de Rouen, 50 ans plus tard.


Le trésor de Cailly tel qu'il est publié dans le Bulletin de la Commission Départementale de l'Archéologie et du Patrimoine en 1874 

Un vol, qui rappelle celui qui fut commis, en août 1890, à la Bibliothèque municipale de Rouen, où une dizaine de manuscrits et nombre de médailles et monnaies anciennes furent enlevés, vient d'avoir lieu au Musée départemental d'Antiquités, enclave Sainte-Marie. Des objets de grande valeur, des monnaies précieuses, et surtout une collection locale renommée, connue des antiquaires sous le nom de « trésor de Cailly », ont disparu.

Ce vol a été commis dans la nuit de lundi à mardi avec une stupéfiante audace et dans des circonstances que certains indices ont permis à l'enquête d'établir d'une façon certaine.(...)

M. Gaston Le Breton, conservateur du musée, fut immédiatement avisé et la police prévenue.

On ne tarda pas à être fixé sur l'importance du vol et à établir quelles étaient les pièces qui avaient été enlevées. En voici la liste :

La perte de la plupart de ces objets n'a qu'une importance relative; il n'en est malheureusement pas de même pour ceux qui formaient le trésor de Cailly, composé de pièces dont la découverte avait eu du retentissement. (...)

Les cambrioleurs sont entrés dans le jardin par la porte de la rue de la République (...) c'est une porte en chêne sculpté, d'une épaisseur de sept centimètres, à peu près condamnée, car c'est à peine si on l'a ouverte deux ou trois fois dans l'espace de plusieurs années. (...)

Il semble qu'ils aient voulu se contenter seulement des objets en or, négligeant ceux qui, en argent ou en cuivre, n'en ont pas moins, au point de vue historique et artistique, une valeur autrement considérable.(...)

Pour y voir clair dans leur « travail », ils ne se sont pas servis du rat-de-cave habituel aux cambrioleurs, mais tout simplement d'allumettes, dont ils ont fait une ample consommation.(...)

En outre, afin de faire le moins de bruit possible, ils ont du se déchausser, car une boucle de soulier a été trouvée sur le sol.

Enfin, on a pu établir que le vol avait été commis à trois heures vingt du matin, et cette constatation a été faite de curieuse façon. Dans la salle Deville se trouve une vieille pendule à poids; or, les cambrioleurs, gênés sans doute par son tic-tac qui pouvait les empêcher d'entendre le pas du garçon faisant sa ronde de nuit, l'ont tout simplement arrêtée. Cette pendule à poids, de l'époque Louis XIV, avait été donnée par Mme Fréret.

Le gardien du musée a fait sa ronde à l'heure habituelle; mais il n'a rien remarqué de suspect. Lui non plus n'a, à l'heure actuelle, de soupçons sur personne : toutefois, dans la foule venue dimanche au Musée (plus de 400 personnes), il avait été frappé de l'allure de deux individus mal vêtus, ayant l'air d'étrangers et prenant des notes. Il avait même, à ce sujet, manifesté l'ennui qu'il éprouvait d'ouvrir les salles du musée à des individus marquant si mal.(...)

Ce qu'on appelle le Trésor de Cailly, collection de monnaies romaines et de pièces curieuses, fut trouvé, en 1821, au hameau du Ménillet, sur la côte des Hetreaux ou du Floquet, à Cailly, par M. Jean-Baptiste Esnault, propriétaire en ce pays.(...)

Nous avons dit en commençant que ce vol rappelait celui qui fut commis, dans la nuit du 19 au 20 août 1890, à la Bibliothèque de Rouen.

On se souvient sans doute, car l'affaire fit grand bruit, que le principal auteur du vol, un jeune homme de vingt-cinq ans, nommé Louis Piedad, dit Garrau, s'était caché la veille et laissé enfermer dans la bibliothèque où il avait, pendant la nuit, enlevé une dizaine de manuscrits et une centaine de monnaies précieuses. Un de ses complices, nommé Louis Châtelier, qui faisait le guet, l'avait aidé à sortir et avait reçu sa part du butin.

Piedad, qui avait fui en Espagne où il avait vendu à Barcelone un certain nombre de monnaies, revint se faire prendre à Marseille, au moment où il cherchait à vendre, chez un libraire, un manuscrit des plus rares qui attira l'attention du commerçant, d'après la description que le télégraphe avait transmise des pièces dérobées à la bibliothèque de Rouen.

Châtelier fut de son côté arrêté à Paris, en même temps qu'un receleur, nommé Édouard Barrault, à qui il avait vendu les monnaies antiques que Piedad lui avait données.

Tous les trois comparurent en novembre devant les assises de la Seine-Inférieure : Piedad fut condamné à huit ans de travaux forcés, Châtelier à cinq ans de réclusion, et Barrault à trois ans de prison.

C'est sans aucun doute à la célérité avec laquelle la nouvelle du vol et la description des pièces avait été transmise par le télégraphe, par toute l'Europe, que l'on dut alors la prompte arrestation de Piedad, suivie de celle de son complice et du receleur, et – ce qui n'était pas moins important – la restitution à la Bibliothèque de Rouen de tous les manuscrits volés, sauf un, le moins important, et d'une bonne partie des monnaies.

Pour le reste, Piedad prétendit l'avoir semé sous un tunnel, dans son rapide voyage en Espagne.

A la suite de ce vol, il avait été décidé que, par mesure de précaution, le gardien de la Bibliothèque devrait avoir un chien de garde. Cette utile mesure n'a pas été maintenue longtemps. L'événement de ces derniers jours prouve qu'elle avait du bon, cependant.

Pour en savoir plus :

Le trésor de Cailly (JDR 17/01/1874)

Vol au musée des Antiquités (JDR 22/03/1900)