Vair

Étymologie de vair

Le terme "vair" nous vient du latin varius qui signifie "varié, nuancé, bigarré moucheté, tacheté [1].

Le latin "Varium" exprime les différences que l'on remarque dans une seul et même objet alors que le latin "diversum" exprime celles qui distingue un objet d'un autre [2]

Au cours du moyen âge "Vair" y signifie gris clairs, ou gris bleu clair [3],

comme dans la "Chanson de Roland" (vers 280 et suivant):

"Vairs out les oils e mult fier lu visage [4], Il a les yeux vairs au visage éclatant de fierté,
Gent out le cors e les costez out larges Son corps est tout gracieux larges sont ses
côtés"

A partir du XIe siècle le "vair" désigne une fourrure de "petit-gris" que serait le "Sciuro vario" ou "écureuil du Nord", par opposition au "sciurus rubicunus", ou "écureuil roux" décrit dans le "systema naturae" de Linnaeus[5]. (Klein, au contraire affirme que les écureuils autour de Dantzig sont des écureuils roux communs)

Le "vair", le "menu-vair" : la fourrure des rois et personnes de qualité.

Le "Vair" est une "fourrure faite de quatre tires ou rangées de pièces d'argent [6], en forme de cloches de jardin renversées sur un champ d'azur; il y a quatre pièces ou cloches à la première et troisième tires; trois et deux demies, au deuxième et quatrième [7]

Le menu vair est une fourrure faite de pièces d'argent [8]. Le "menu vair" [9] se distingue du "vair" en ce qu'il est plus sérré ayant six tires ou rangées; au lieu que le vair n'a que quatre tires. Les rois de France s'en servaient autrefois au lieu de fourrure./…/ Les manteaux de président à mortier, les robes des conseillers de la cour, et les habits de cérémonie des hérauts d'armes en ont été doublés jusqu'au XVe siècle. Les femmes de qualité s'en habillaient pareillement. Il fut défendu aux "ribaudes" d'en porter, aussi bien que des ceintures dorées, des robes à collets renversés, des queues et boutonnières à leur chaperons, par un arrêt de l'an 1420.

Cette fourrure atait faite de la peau d'un petit "écureil du Nordé, qui a le dos gris et le ventre blanc.Le "varius" latin qualifie ainsi cette différence de couleurs entre les deux parties de ce même animal. C'est le "Sciuro vario" d'Aldrovandi, et peut être le "mus ponticus" de Pline.

Quelques naturalistes latins le nomment "varius", soit à cause de la diversité des deux couleurs grise et blanche, ou par quelque fantaisie de ceux qui ont commencé à blasonner. Les pelletiers nomment à présent cette fourrure "petit gris"[10].

Cet ecureuil qui par son pelage donnera les pans de fourrure gris (argent) du vair et menu vair, est pour Buffon un "écureuil grisé. [11] :

Le petit-gris (l'écureuil gris, ordre des rongeurs, genre écureuil. [Cuvier]) ressemble beaucoup à l'écureuil, et n'en diffère à l'extérieur que par les caractères suivants :

- Il est plus grand que l'écureuil; il n'a pas le poil roux, mais d'un gris plus ou moins foncé.
- Les oreilles sont dénuées de longs poils

Ces différences, qui sont constantes, paraissent suffisantes pour constituer une espèce particulière à laquelle nous avons donné le nom de "petit-gris".

Cendrillon et sa pantoufle de vair

La belle Cendrillon, en s'enfuyant du bal au moment où minuit sonnait, avait perdu une pantoufle, une de ces belles pantoufles de vair dont la fée sa maraine l'avait magnifiquement chaussée, en la vétant de façon magique pour la fête de la cour.

Le vair et le le menu vair, comme chacun sait, sont deux sortes de pelleteries, ou de tissus faits à leur imitation qui furent longtemps fort à la mode chez nos pères et dans toute l'Europe.

Mais hélas, il faudra attendre Honoré de Balzac pour que Cendrillon retrouve ses pantoufles de "vair", et non une pantoufle de "verre" comme par erreur Charles de Perrault [12] le fit en chaussant la pauvre Cendrillon de pantoufles de ce piètre cristal !

Notons que le terme pantoufle que porte Cendrillon, désigne bien une sorte de "mule" ou chausson qui pourrait avoir été faite de "vair" ou "menu vair", plus facilement qu'un brodequin.

Outre manche la traduction du soulier de Cendrillon voit un "slipper" (et non dress shoes ou evening shoes) qui dans les première éditions reproduisent l'erreur de Perrault en chaussant la très éphémère reine du bal de "glass slipper", et non en "slipper made of fur" ".

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(20 dec 2010 ; 20 mai 2021 ; 18 sept. 2022)
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[1] Dictionnaire Félix Gaffiot page 1647 colonne III. Varius, varia, varium : varié, nuancé, tacheté.

[2] Manule de synonymie Latin de Ludwig Döderlein, Traduit pas Théophile Leclaire. Librairerie Perisse page,
Paris 1865. Page 265

[3] Laroussse étymologique et historique, édition 2005. Page 1037 colonne I

[4] Chanson de Roland, vers 280

[5] Carolus Linnaeus naturaliste suédois dit Carl Linnæus. Première édition publiée de son " systema naturae"
en 1735. En Français Carl von Linné (1707-1778)

[6] L'argent représente ici la couleur grise voire légèrement grisée.

[7] Nouvelle encyclopédie théologique par l'Abbé Migne, tome 13 Dictionnaire Héraldiquie
Chez J.P. Migne Ateliers catholiques au Petit Montrouge, Barrère d'Enfer de Paris 1852. Tome 13,
page 699 Vair

[8] De couleur cendrée, couleur acier, ou légèrement grisé.

[9] Ce même texte est repris et inséré dans l'encyclopédie de diderot tome X page 357.

[10] Ibid : Dictionnaire Héraldique page 540, "Menu vair". Ce texte et définition se trouve egalement dans le
"Grand vocabulaire François", par une société de gens de lettres. Paris Hotel de Thou rue des Poitevins,
en 1781. Tome 17 page 466 colonne II

[11] Œuvres complète de Buffon Bureau des publications illustrées, rue de la Harpe. Paris 1844, volume 4
page 276 colonne I) Buffon nous offre de plus, la description de l'écureuil "petit gris" d'amérique"
à ne pas confondre avec le "petit gris de sibérie" pour ce qui est de la description extraite de Daubenton,
page 280)

[12] Revue du XIXe siècle, les lettres, les arts, la philosophie romans et voyages. Paris, Bureaux de la revue
du XIXe siècle, 1866 Tome III Page 233