Entreprendre


Étymologie de "entreprendre"

Du latin "inter prehendere" : saisir avec la main. Le mot latin "Prehendere"[1] signifie "saisir" prendre"pour maîtriser, différemment du verbe "capere" signifiant saisir avec la notion de s'emparer, capter.

Du Sanskrit "main" au latin "hendere" :

Le latin "prehendere" signifie ainsi "mettre la main dessus en être physiquement
maître"
[2]. Et le verbe latin "capere" signifie également saisir mais pour le posséder.
"Le latin "prehendere", est lui même issu du latin "pre-hendere" montrant ce radical
qui signifie "la main"
[3]
La main,"hasta [4]" en sanskrit [5], se réfère au gothique "handu", à l'Anglo saxon
"hand", au latin "pre-hendere, au grec "khandanô " (χανδάνω
) [6]
Le "hasta" sanskrit est ce qui permet de prendre, voire la "baguette" ou le "sceptre"
comme le décrit Emile Benveniste
[7].

"Entreprendre" ou "entreprandre" [8] au moyen âge est l'acte de saisir, surprendre, envelopper :

Sor pecheor ploverait
Lais de coi les
entrepanrait [9],
Feus et soffre et [es]prit d'oraige…

Entreprendre a le sens de surprendre, envahir usurper [10] :

Là où la nuit l'entreprenoit,
Sur l'herbe froide se gisoit
[11]

L'entrepreneur

L'entrepreneur est "celui qui tient un pas d'armes, l'agresseur".[12]

"L'entreprise ayde aux hardis et entrepreneurs et déboute les couars.
Et si d'aventure ceste chose cy luy desplaisoit, elle s'en rapaiserait bien ligièrement
[13]".

François Villon dans "la manière comment ilz eurent du rost"

"Il fut appointé qu'il iroit
Devant l'étal d'un rotisseur,
Et de la chair marchanderoit,
Contrefaisant du gaudisseur
Et pour trouver moyen meilleur,
Faignant que point on ne le joue,
Il viendroit ung
entrepreneur
Qui luy bailleroit sur la joue."[14]

Au XIXe siècle, le dictionnaire de l'Académie donne pour entrepreneur:

Pour le dictionnaire de l'Académie, Entrepreneur se dit aussi de celui qui forme par spéculation, seul ou avec d'autres, quelque grand établissement d'utilité publique : entrepreneur de diligences.[15]

[On s'approche ainsi des "triéraques" qui à Athènes étaient les citoyens qui assumaient l'équipement des trirèmes]

Au sens actuel l'entrepreneur est en latin "l'operis conductor", celui qui entreprend à forfait un ouvrage [16]. Il est en ce sens proche du sens de "maître d'ouvrage", faisant réaliser par le "maître d'œuvre".

_______________

(12 avril 2011, maj 26 novembre ; 24 avril 2021 ; 19 sept. 2022)

_______________

[1] Dictionnaire Félix Gaffiot page 1234 colonne III : prehendere (prendo) : saisir, prendre,
occuper, prendre possession d'un lieu.

[2] Manuel de synonymie Latine. Louis Doederlein, traduction de Théphile Leclaire. Paris,
Librairie Perisse 1865. Page 250.

[3] Histoire de la littérature française. Jean Jacques Ampère. Paris Just Tissier 1841.
Page 304

[4] Dictionnaire Sanskrit Français Schtoupak. page 886 colonne II hasta- : main, avant bras,
la signature, la main comme unité de longueur.

[5] A Sanskrit-English dictionary. Theodore Benfey, université de Gottingen. Londres
Longmans 1866. Page 1110. Et cité également par Eugène Burnouf dans
"Commentaire sur le Yaçna, l'un des livres religieux des Parses".
Paris 1838, Imprimerie Royale. Tome I, pageLXXXI.
Relation citée également dans "Gazette hebdomadaire de médecine et de chirurgie,
Volume 9" Masson 1862. Page 276 : "Ajoutons encore que les Védas citent une
gandharva du nom de Hasta (sanskrit Hasta, main), qui, par son nom, s'identifie
tout à fait à Chiron (grec "χειρ", main.)"

[6] Dictionnaire Anatole Bailly page 2121 colonne III: "Khandanô" ("χανδανω") contenir.
Voir le latin "praehendo". [Noter que le grec donne "kheir" ("χειρ"), "la main" comme
membre du corps, qui donnera "cheirourgia" ("χειρουργια") désignant "l'action de travailler
avec les mains", la "pratique d'un métier", "pratique d'un art" (ibid page 2132 colonne III) :
qui donnera notre "chirurgien"].

[7] Le vocabulaire des institutions Européennes. Emile Benveniste.
Paris 1969, Les éditions de minuit. Tome II, chap III la royauté Hellénique, page 30.

[8] Dictionnaire Godefroy, volum III page 296. Entreprendre

[9] Libri Psalmorum versio antiqua Gallica. Par Francisque Michel. E typographeo academico,
1860. Page 268 colonne II, lai n° 7.

[10] Dictionnaire Curne Sainte Palaye volume 5 page 431, colonne II

[11] Dictionnaire Curne Sainte Palaye tome 5 page 431 colonne II. (Edité dans la "Vie de Sainte
Marie l'Egyptienne". Par Peter Florian Dembowski Genève Librairie Droz, 1977.
Vers N° 761-762)

[12] Dictionnaire Curne Sainte Palaye, tome 5, page 432 colonne I

[13] Nouvelles françoises en prose du XIVe siècle. Par Louis Moland et Charles d' Héricault.
A Paris chez P.Jannet 1858. Roman de Troilus, page 218

[14] Œuvres de François Villon. A Paris de l'imprimerie d'Antoine Urbain Coustellier 1723. Page 129

[15] Dictionnaire de l'Académie Sixième édition 1835. Page 713 colonne II

[16] Dictionnaire Français latin de François Noël. Paris Veuve le Normant 1840.Page 428 colonne II