La fatigue

L'entraînement physique est un stress qui affaiblit momentanément l'organisme. En laissant à cet organisme le temps de récupérer, le sportif espère progresser. Tel est un des principes de l'adaptation par l'entraînement.

La difficulté consiste à créer et à surveiller cet équilibre fluctuant entre fatigue et récupération consenties. Parfois, les stress vont trop loin. L'entraînement devient trop intense, la récupération trop courte. Parfois le sportif tombe en état de sur-entraînement….

7 jours pour être surentraîné

Des scientifiques anglais ont suivi pendant 6 semaines l'entraînement de 8 cyclistes.

Le programme était organisé de la manière suivante :

- 2 semaines d'entraînement normal

- 2 semaines d'entraînement intense

- 2 semaines d'entraînement de type récupération

A la fin de chaque période, la performance sur une épreuve d'endurance et divers indicateurs biologiques ont été relevés.

Après les 2 semaines intenses, les paramètres relevés étaient les suivants :

- une baisse de la puissance de travail

- une augmentation du temps lors de l'épreuve de course

- une élévation de près d'1/3 des perturbations de l'humeur

Le déclin de la performance était associé à une baisse de la FC maximale (- 9%), de la consommation d'oxygène (-5%), et une augmentation de la difficulté de l'effort (+9%).

En revanche, l'efficience du geste, l'utilisation des substrats et divers paramètres biologiques (urée, lactate, catécholamines…) n'étaient pas modifiés par l'entraînement intensif.

Compte tenu de l'organisation de l'expérimentation, il est apparu qu'un état de fatigue caractérisé par une incapacité à maintenir un niveau antérieurement atteint est survenu en 7 jours seulement.

FC et Fatigue

Dans l'expérimentation précédente, le surentraînement s'accompagnait d'une baisse de la FC maximale. Nous avons pu observer que cette baisse des FC pendant une période de fatigue se retrouvait à toutes les vitesses de course. Or, une telle adaptation est habituellement le signe d'une progression de la filière aérobie.

Alors baisse de la FC égale fatigue ou progression ?

La réponse peut nous être donnée par un autre indicateur : la perception de l'effort.

Toujours dans l'expérimentation anglaise, les sportifs trouvaient l'exercice plus difficile suite aux 2 semaines d'entraînement intense. La FC monte moins mais l'exercice est plus éprouvant…

Voilà des observations qui - si elles nous arrivent - pourraient nous inciter à prendre le temps de récupérer.

La FC : un nouvel indicateur de fatigue ? (2)

Le système nerveux autonome est le grand ordonnateur de l'activité de notre organisme. Composé d'une "branche excitatrice" et d'une "branche inhibitrice" (ou "calmante") ce système s'occupe d'ajuster la vie interne de l'organisme.

Le niveau d'activation des deux branches du système autonome pouvait être évalué de manière invasive (prélèvements sanguins…). Or, nous savons depuis plusieurs années qu'un indicateur aussi facile d'accès que le fonctionnement du cœur permet d'évaluer "l'état" du système autonome.

Pour cela, il suffit de regarder les fluctuations et les irrégularités du rythme cardiaque.

Pour simplifier disons qu'un corps fatigué suite à une période d'entraînement intense tend à présenter un rythme cardiaque plus monotone, moins fluctuant qu'un cœur reposé (perte de "souplesse").

Cette observation - faite en tout premier lieu dans le domaine médical - a été vérifiée par une équipe française. En 3 mois, 6 sédentaires ont été volontairement conduit d'un entraînement intense à un surentraînement. Pendant la "phase intense", la variabilité cardiaque a augmenté avec une prédominance de l'expression du système nerveux inhibiteur. Durant la période de surentraînement l'inverse a été observé (perte de variabilité, réponse excitatrice). Après 7 semaines de repos, les valeurs initiales étaient rétablies.

Cette observation apporte un nouveau crédit à l'utilisation de la variabilité cardiaque comme indicateur de l'état de fatigue du sportif. Et ce moyen d'investigation n'est pas seulement réservé aux professionnels de la santé et du sport. Certains cardio-fréquencemètres s'inspirent déjà ce type d'indicateur.

5 mois pour récupérer !

Dans la première expérimentation que nous rapportons, les sportifs fatigués ont vu leur performance et leurs paramètres physiologiques (fréquence cardiaque, consommation d'oxygène) chuter en quelques jours. En revanche, leurs paramètres biologiques (hormones…), mécaniques (efficacité du geste) et chimiques (utilisation des substrats) n'étaient pas altérés.

Quand les stress intenses se prolongent ses paramètres peuvent, à leur tour, subir des altérations.

Le suivi de 15 rameurs a ainsi permis de montrer que la fatigue s'accompagnait de changements dans l'utilisation des substrats énergétiques. L'utilisation des sucres (glucides) puis des graisses (lipides) et enfin des protéines sont 3 stades consécutifs marquant 3 niveaux successifs de surentraînement.

Si l'état de surentraînement est diagnostiqué pendant le second stade (lipides), la récupération peut intervenir en moins de 3 semaines. En revanche, si le sportif ou son entraîneur ne réagissent pas avant le 3ème stade, alors la récupération peut nécessiter près de 5 mois.

Pendant le suivi, 2 rameurs ont atteint le 3ème stade. Il leur a fallu 1 mois d'entraînement pour déclarer un état de surentraînement, 2 mois pour installer cet état et 5 mois pour récupérer. Au total, presque une année a été perdue pour ne pas avoir su se reposer !

Tant que nous croirons que plus nous en ferons meilleurs nous serons….