Veuve Clicquot 1955, Bollinger 1959, Pommery Rosé 1959 ! Un hommage à la Champagne...

Tous les passionnés sont un jour confrontés au problème : Les grandes occasions sont rares, et lorsque le jour tant attendu arrive, on voudrait ouvrir toutes les belles bouteilles qui nous tiennent à coeur. Malheureusement, la plupart du temps, nous ne sommes qu'une poignée de personnes à table et il faut faire des choix. C'est toujours la tâche qui me peine le plus : Limiter le nombre de bouteilles !

Actuellement, je suis dans une phase Champagne. J'ai envie de tenter tous les plus beaux flacons de ma cave. Les bulles me rendent complètement dingue ! Alors pour ouvrir plusieurs Champagnes, je fais cette fois, le choix de ne pas ouvrir de vins blancs. Encore le même problème : Limiter le nombre, forcément...

Le repas réunit ma famille proche et chacun sort une ou deux bouteilles... Je prends la partie Champagne à ma charge. Ouverture du bal !

Le dîner se compose ainsi:

Amuse bouche ( guacamole de fèves, Terrine végétale, terrine de canard et touche de lavande)

Velouté de Consoude

Dos de cabillaud et poivrons

Suprême de volaille en croûte de lierre terrestre

Plateau de fromages

Cascade de desserts.

POMMERY ROSE 1959

Les rosés anciens de cette maison sont extrêmement réputés, mais difficiles à se procurer. Celui-ci est dans une forme olympique ! Le nez gigantesque ressemble un peu au fameux Blanc 1929 de la même maison : Pain grillé, parfums de brunch, mais aussi framboises et groseilles à maquereaux. Une touche subtile de chêne patiné rend ce bouquet encore plus complexe. L'attaque en bouche est colossale. On note du café, de la fraise macérée. Le gaz est fin, miraculeusement persistant. La finale de sous-bois, est aussi très marquée par l'amertume des agrumes confits. Un très très grand rosé. 97/100

VEUVE CLICQUOT PONSARDIN 1955

J'avais déjà tenté une bouteille parfaite en tout point, il y a deux ans ; Seul le liquide était abîmé ! Un drame... Je sais que 1955 est une année démentielle en Champagne, car j'ai eu ma part de chocs gustatifs entre Heidsieck 1955 ou Piper 1955, et autre Philipponnat et Mumm. Cette année est considérée comme l'une des plus mythique pour Clicquot, et Juhlin pense même que c'est la meilleure de leur histoire. Je m'étais donc promis de trouver un jour un deuxième exemplaire de cette rareté. Celle-ci, parfaite à nouveau, était destinée au marché Anglais, comme l'indique l'étiquette...

Cette fois, mes efforts sont enfin récompensés !

Le nez très fin est d'une complexité de rêve. On perçoit un vrai ballet de parfums où dansent la fumée, le tabac, le pruneau, mais aussi des arômes plus frais, de citron meringué, de craie,  de bicarbonate, et de menthe infusée. En bouche le cordon est encore jeune, d'une finesse confondante. L'ampleur des parfums est hallucinante, et je reconnais bien là ce millésime que j'aime par dessus tout ! L'attaque est presque moelleuse tant elle est riche. Le palais est envahit par la tarte tatin aux pêches et le citron confit. Viennent ensuite des nuances plus subtiles d'écorces et de sous-bois. Quelle jeunesse éternelle ! 98/100

BOLLINGER 1959

Au départ, le nez semble plus discret que les 2 précédents. Il rappelle le chêne, le café, et la bergamote,  puis il s'élargit ensuite avec l'aide de l'oxygène. Il devient coquillage et cacao. La bouche ne fait pas dans la dentelle : Elle est sans concession, et malgré la liqueur de l'attaque en bouche, la suite est tranchante comme un rasoir. L'un des vins, de mon panthéon, le plus axé sur la minéralité. On mange littéralement de la pierre, de la craie, avec une touche de zeste et d'écorce. La bulle est encore très puissante, tandis que la torréfaction revient sur la finale. C'est indéniablement le plus "terroir" du trio, mais je préfère la folie du Clicquot. Encore un superbe 1959. 97/100

CHÂTEAU DUCRU BEAUCAILLOU 1947

L'un des rares 47 de la rive gauche à être aussi applaudi que les cracks de la rive opposé. Le nez est définitivement celui d'un vin usé jusqu'à la corde. La bouche est pire. Très énervant ! NN

CHÂTEAU BEYCHEVELLE 1945 (Négoce)

Un vin de secours magnifique avec un niveau bas goulot. Le nez joue dans la cour des grands grâce aux parfums de cuir, d'anis, de cendre et d'herbes sèches. La bouche marque plus son âge, mais on retrouve le tanin accrocheur de 1945, qui me fait littéralement chavirer. Le gibier et le sang côtoie la mûre et le cassis, avant de terminer par une finale qui manque d'ampleur et de persistance. A noter qu'à part le 1959, je n'ai jamais eu d'immense Beychevelle... 91/100

MUSIGNY 1949 Chanson P&F

La bouteille est impeccable avec un niveau dans le goulot. Le nez sort en fanfare sur le croûton de pain, la rose et le jus de fruits rouges. Il manque juste un peu de complexité. En bouche nous avons à faire à un Pinot net et d'une grande pureté sans la moindre déviation "sucrée". Les arômes telluriques dominent au départ, puis le pollen et la framboise prennent la relève. La finale acidulée et subtilement épicée termine un peu court par rapport à ce que j'en attends. Dans l'ensemble, impeccable, mais j'en espérais encore mieux. 93/100

PRIEURE ST JEAN DE BEBIAN "Cuvée Alain Roux" 1989

J'ai envie de terminer par un vin plus jeune mais très rare. Cette cuvée fut produite en quantité très restreinte avant l'ère "moderne" du domaine. Un vrai collector. Il est malheureusement bouchonné. On perçoit que le vin devait être bon avec une forte identité, mais le liège pollue trop l'ensemble. Je suis inconsolable, car je sais que jamais je n'en retrouverai ... Je mets tellement de coeur pour me procurer ce genre de rareté, que j'éprouve un grand chagrin lorsque, comme ici, on reste sur sa faim sans jamais savoir à quoi aurait pu ressembler l'ensemble.  NN

ANJOU 1928 Cave Prunier

Je ne sais pas trop à quoi m'attendre avec ce vin... Est-ce un sec ou un sucre ? Mon instinct me souffle qu'il s'agit certainement d'un liquoreux. Voyons donc cela sur les desserts...

Le nez de safran, de thé, de prune et de noix est très agréable et bien conservé. En bouche, la patine  parfaite, et la sucrosité subtile, donnent à l'ensemble un côté aérien, bref élégant. Les arômes de réglisse et de moka sont convaincants, mais le manque d'ampleur et de liqueur me laissent sur ma faim... Belle conservation, c'est sûr, mais il existe nettement mieux sur les vieux Chenin. Je garde quand même à l'esprit que ce n'est qu'un Anjou, et que les 90 ans passés dans le verre ne l'ont pas effrayé ! 90/100