Romanée Conti 1933, Richebourg DRC 1964, Yquem 1947... Une folie groupée !

Je rentre juste de vacances, en pleine forme, et il est maintenant temps de relater la dégustation qui s'est déroulée avant mon départ. Il fallait bien 3 semaines pour se remettre d'autant d'émotions !

Nous avons tous été patients, car quelques unes de ces bouteilles ont été achetées en commun , il y a bien longtemps déjà, et quand on voit le programme, on se dit qu'il en fallait de la patience et de la force, pour attendre et ne pas être tenté de les déguster la semaine qui suivait leur achat...

POL ROGER Blanc de blanc 1964

Une cuvée confidentielle, que nous sommes heureux de goûter pour la première fois ! Le nez puissant de réglisse, de sucre brun, de chêne fumé, et d'herbes donnent le sourire, Nous démarrons en fanfare... En bouche, le gaz fin porte de beaux arômes de citron vert, d'orange, et autres fruits confits. Il possède une belle nervosité, mais me déçoit un peu sur la longueur... Je constate surpris, qu'à part le 1952, je n'ai jamais eu de Pol Roger diabolique... Et pourtant le bagage est assez conséquent ( 1928,1952, 1964,1966, 1961,1979...) Celui-ci ne déroge donc pas à la règle : Très bon , mais pas inoubliable... 94/100

BILLECART SALMON  Blanc de Blanc 1961

Tout le monde connaît l'histoire. La grande dégustation du millénaire a vu cette maison prendre la première et la deuxième place du classement avec 1959 et 1961. Ces vins sont introuvables et le peu de bouteilles qui restent dans le monde partent à des prix qui donnent des sueurs au Clos d'Ambonnay...

Je ne pensais donc pas en boire une fois dans ma vie... Alors imaginez lorsqu'on a mis la main avec mes amis sur cette cuvée Blanc de blanc encore bien plus rare que la fameuse NF... Je ne connais absolument aucun dégustateur au monde ( y compris Juhlin ) qui l' a déjà testée sur un millésime aussi ancien. Marten, notre copain Suédois saute d'impatience sur sa chaise. De mon côté je ne me contrôle pas beaucoup mieux...

Le nez est une féerie, un pur chef d'oeuvre, qui me procure la même émotion que certaines toiles mythiques mais confidentielles, telles " L'homme à la pipe" de Vlaminck par exemple. Un kaléidoscope de parfums envoute nos narines. Je reconnais le miel crémeux, les céréales, le lys, le mimosa, la groseille et aussi l'anis. Mais tout tourne trop vite, je n'ai pas la capacité pour tout saisir...

La bouche offre un gaz parfait, bien plus persistant que le précédent. L'ampleur est celle d'un grand Bâtard Montrachet (je préfère presque toujours ce climat au Montrachet...). Les papilles sont noyées sous un torrent de parfums ; Quelle pureté bon sang !  Le silex, l'orange sanguine, le citron confit très doux, l'amande grillée, le mon chéri et le cappuccino sont quelques arômes qu'on peut saisir sur le vif. La finale a la violence d'un retour de flamme. La craie vient fouetter la langue pendant plus d'une minute. Un truc de dingue ! Il égale sans difficultés, le grand Clos du Mesnil 79 dans mon panthéon des Blanc de blanc. 99/100

CHÂTEAU HAUT BRION Blanc 1967

Le nez est pure folie : Légumes, ananas au beurre, poire pochée, pétrole. On y revient sans cesse. Mais que se passe t'il ???? La bouche n'a rien à voir..

L'attaque est crayeuse, citronnée et donc d'une belle nervosité, mais le milieu est plat comme une limande. Une eau subtilement parfumée. La finale fait un retour sur l'amertume et la minéralité, et lui redonne un peu de carrure. Quelle dommage, car avec un nez pareil, on était sur le point de tous s'enflammer ! 88/100

MONTRACHET 1992 Guy Amiot

Un Montrachet encore une fois confidentiel ( c'est le thème de la soirée...) que Parker avait mis au même niveau ( 1er !) que celui de Leflaive avec 99/100. Un mythe parmi les connaisseurs. Je l'ai toujours loupé d'une longueur aux enchères le peu de fois où j'en ai trouvé ; C'est donc un bonheur de le boire enfin.

Le nez met du temps à bien prendre sa vitesse de croisière,  mais une fois qu'il l'atteint, la tablée s'éclate !  La pomme au four, la poire fraîche, le miel, l'anis, le foin et le silex sont un vrai bonheur pour les narines. En bouche, il offre le volume d'un éléphant qui transporte des bottes de pailles, des blocs de beurre, et des corbeilles de fruits gorgés de soleil. Un des grands Montrachet qui jalonnera désormais les pages de mon blog. 97+/100

Ensuite, Luc nous sert deux verres pour un match ( à l'aveugle bien sûr, comme le reste d'ailleurs... La Conti, Le Musigny 49  étaient en semi aveugle : Je savais qu'ils étaient dans le programme, mais pas à quel moment ils seraient servis... )

MUSIGNY 1969 Loiseau

Le nez superbe de pain grillé, de burlat, de mûre et de grenadine est un vrai et pur Pinot, ce qui est déjà un exploit à cette période compliquée pour la Bourgogne... La bouche est un flot de petits fruits rouges, de noyaux, d'épices et de fumée. Un très grand Musigny complexe et long. Luc m'avait déjà vanté les mérites de ce négociant peu connu, et je suis convaincu facilement ! 95/100

MUSIGNY 1969 Prieur

A l'aveugle, je ne pense pas du tout à ce climat : Le nez est un concentré de gibier, de menthol et de café. En bouche, les fruits rouges sont gouleyants, le tanin est soyeux, mais la finale de chicorée et de groseilles acidulées me plaît moins... Beau vin quand même. 91/100

MUSIGNY 1949 Prieur

Si les odeurs avaient une couleur, celles-ci seraient carmin mat. En effet des odeurs majestueuses de fruits noirs, de havane, de lys, de menthol et de cèdre envahissent le verre. La bouche est d'une puissance brutale, mais austère, presque Bordelaise et 1945. Des vagues de fruits noirs, d'épices et minéraux couvrent la langue. Seule une amertume un poil agressive en toute fin lui fait manquer l'exceptionnel...96/100

MUSIGNY 1929 Paul Court

Qui peut prétendre offrir une telle leçon de terroir dans la même dégustation de nos jours ? Luc bien sûr !  Le nez est encore différent : On reconnaît facilement la ronce, la fraise écrasée, le sous-bois, les légumes et les herbes grillées. L'honneur est sauf, cette fois je me situe sur la fin des années 20 à l'aveugle. Je connaît la douce folie de notre hôte et je tente donc Musigny...

La bouche est tellurique et sanguine, laissant presque une sensation métallique... La finale est en finesse, toute de tabac et de framboise. 93/100

Le trou normand !

Supposé CHAPELLE CHAMBERTIN années 50-60 Leroy

Le nez est plus marqué par le chêne, les épices et le menthol. La bouche est une belle liqueur assez chargée d'alcool de framboise et de mûre. Tout le monde aime, mais avec mon frère, on accroche un peu moins... 88/100

RICHEBOURG 1945 Noëllat

Le nez offre une volatile très forte... Vernis à ongle, puis amande et cèdre. On voit bien que la bouche est increvable ; Il n'y a pas un brin d'acidité, mais juste des arômes timides et sombres. Une sorte de trou noir ! Immortel, mais austère à en mourir. Quand l'étiquette est dévoilée, je sombre ! Son cousin le Romanée st Vivant 1945 du même producteur était d'une telle perfection l'an dernier... Il paraît que tous les Richebourg 45 de Noëllat sont dans cet état...  78/100

CLOS VOUGEOT 1928 Morin P&F

Presque imbuvable... NN

CLOS VOUGEOT 1929 Morin P&F

Le nez commence sérieusement à marquer son âge ! champignons, vieux bois humide, mais aussi fruits noirs heureusement... La bouche offre une grosse acidité, et quelques nuances de groseilles et d'épices. Nous sommes un peu durs, et je pense que dans un autre contexte, on aurait plus insisté, sans jamais lui trouver plus de qualités, mais on aurait pris notre temps... 78/100

Richebourg 1964 DRC

Le bouchon est une catastrophe, noir et pourri à souhait ( Cf photo...). J'ai tellement honte pour le domaine quand je vois ça ! Si c'était la première fois, je le passerais sous silence, mais tous les bouchons de DRC sont honteux ; Ce qui fait que beaucoup de bouteilles sont affaiblies avec des niveaux mauvais la plupart du temps. Fort heureusement, le vin n'a pas été affecté, pas encore...

Le nez est une folie ! Il nous enlace tous pour une valse endiablée. Je vois que même les anciens de la table se sentent à nouveau jeune homme au bras d'une charmante jeune fille, fraîche comme une eau de source et sentant la rose...Hum!!! Cette rose ! Les hormones s'affolent ! On sent aussi le foin, la fraise des bois du louis XV et la violette. La bouche est une extraction de fraises, de framboises piquantes et quelle belle minéralité, mon dieu !

je suis souvent critique avec ce domaine, mais là je dis OUI ! Et c'est à l'aveugle !!! 98/100

ROMANEE CONTI 1933

Quelle continuité ! Un nez superbe et jeune de rose, de fraise et de jardin humide au petit matin. J'adore !!!!! la bouche attaque sur la mandarine impériale, puis les fruits rouges, mais elle se simplifie vite. Du coup je reste sur ma faim... On attend une Conti pré-phyllo toute sa vie, et ... ben voilà, que dire. Le nez est d'une jeunesse stupéfiante, mais la bouche ne suit pas. Ce n'est pas 1937 ou 1929 d'accord, mais en même temps 1933 et un très grand millésime juste derrière 29, 37 et 34. La conti a fait moins de 5 Hecto/H cette année là... Alors j'espérais être proche du 100, même si c'est une année 4 étoiles et pas 5...Est -ce la bouteille ? le niveau était à 6 cm quand même... Il faudrait pouvoir regoûter ! 91/100

Et là, il faut oser !!! Je le répète souvent, nous ne sommes pas des gens riches, donc dans notre cas, franchement, il faut oser !!! Luc l'a fait... Merci du fond du coeur.

ROMANEE CONTI 1933 No 2

Une deuxième bouteille sort du chapeau. Celle-ci a un niveau à 5 cm, mais je ne saurai peut être jamais laquelle des 2 était de l'achat commun...

Le nez est bien plus profond, abyssal ; Mais du coup il perd en fraîcheur, ce qu'il gagne en nuances et en complexité. La fourrure, le cèdre classe d'un Lafite, le tabac, et toujours cette rose parfaite, tout juste cueillie...

L'attaque en bouche est du pur Pré-phyllo ! Le vin n'a pas une belle salinité, non, il est carrément, totalement salé !!! C'est donc complètement déstabilisant ! Il y a aussi l'essence de rose, le tabac et surtout les fraises et les framboises enrobées de fleur de sel. Mon frère me regarde " C'est quoi ce vin de dingue complètement salé??!" Cette fois la finale est belle, délicate comme un drap de soie qui passe et repasse.

Bon, je dis OK, je ne suis pas déçu ! Mais juste pour une fois ; Je ne le ferai pas une deuxième fois car il existe plus grand encore et bien moins cher.... Allez peut être un jour une dernière folie pour The millésime. Mais ça sera la dernière pour cette vie... 98/100 ( A l'aveugle, mazette !)

TOKAY PINOT GRIS Quintessence de grains nobles "Cuvée D'Or" 1983 Weinbach

Le nez un peu simple d'ananas, et de cacahuètes ne m'emballe pas trop... La bouche est exotique, mais je vois bien que personne n'accroche vraiment. En même temps, on peut pas lui reprocher grand chose, si on aime la simplicité, et la finesse. Je suis très déçu par rapport à ce que j' imaginais de ce vin célèbre ! 88/100

CHÂTEAU YQUEM 1947

OK, silence à l'aveugle... Le précédent se fait démonter sur place... Le nez est un festival de fruits confits, de pruneau, de miel et de sucre candy. En bouche, les parfums écrasent la langue, grâce au caramel brun, à la tatin d'abricot, mais la salinité et la minéralité offre aussi une fraîcheur d'excellent aloi, impensable dans cette année folle. Ce n'est pas le plus grand, mais peu importe, parce que ça balance du tonnerre comme dirait Marty. 97/100

Après une longue discussion, nous terminons la nuit pas un "after"...

TAITTINGER Comtes De Champagne Rosé 1976

Le nez est une pâtisserie de fraise et de groseille, avec un doux parfum de tuile et de chêne en nuance. En bouche, gaz parfait, grenadine, pin et épices sont au programme. cette fois il est bon !  93/100

Cette année a commencé doucement, mais depuis 3 mois, tout s'emballe, je ne maîtrise plus rien... Vite vacances ! J'ai besoin de digérer tranquillement toute ces émotions...