Calon Segur 1926, Veuve Clicquot 1979, un samedi soir sur la terre...

  cUne dégustation de dernière minute s'improvise le vendredi pour le samedi soir.Cela fait longtemps que j'ai envie de boire un Montrachet de Prieur; mais l'occasion ne s'est jamais présentée. Je ne connais encore pas trop les millésimes des années 2000, alors je suis excité de tester une année inconnue sur un producteur qui l'est aussi, tout au moins pour cette appellation... Tous les vins sont bus à l'aveugle comme d'habitude. Mes 2 amis fidèles sont là, mais il y a aussi un p'tit nouveau curieux de découvrir notre passion des vins anciens.

Un peu plus tôt dans la soirée, j'ai décidé d'ouvrir le Montrachet 2001, puis un Griotte 1969 de Drouhin. C'est un cru difficile à trouver sur des années anciennes. J'ai hâte de le goûter. Malheureusement à l'ouverture, je constate que la bouteille est une fausse, ou plutôt une "demie fausse". Le bouchon indique bien un Griotte de chez Drouhin, mais l'année estampée est 1980. Je suppose donc que le faussaire a juste changé la collerette du millésime. Inutile de vous préciser que je suis en rage. Je me raisonne au bout de quelques instants en me disant que 1980 est très intéressant en Pinot, et que nous avons donc une chance de prendre du plaisir. Je goûte et tout espoir disparaît : C'est parfaitement buvable, mais le nez de vieille barrique moisie me déplait, et la bouche alcooleuse, sans complexité termine de me fâcher... Je cours donc chercher une bouteille de Calon Ségur 1926. Elle n'était pas du tout prévue pour cette circonstance, mais je sens que c'est son jour. Ca sera mon premier 1926, année que j'attends de boire depuis des lustres. Lolive amène le champagne et Libe un autre rouge et le liquoreux. En piste !

VEUVE CLICQUOT 1979

J'ai déjà bu la Grande Dame sur cette année, mais jamais la cuvée millésimée. Le nez est magnifique de complexité. On perçoit du toast, du caramel brun, de la réglisse et du pain d'épices. La bouche s'ouvre sur la biscotte, le zeste et le citron vert. Le milieu de bouche est un exemple parfait de craie concassée et d'orange amère. Le cordon est celui d'un Champagne des années 1990. Encore un superbe 1979 ! 95+/100

MONTRACHET 2001 Prieur

Je précise que ce vin a été ouvert trois heures à l'avance dont la moitié passée en carafe. Toute la table pense à un vin des années 80. Le nez est en effet totalement ouvert et expressif sur l'aneth, la paille puis le pamplemousse et la truffe. La bouche est extrêmement puissante et sèche, rappelant en cela un Hermitage de l'Orée. Le choix de Marco de se situer dans le Rhône me semble donc fort judicieux. Le noyau de pêche, les épices et les herbes humides donnent un ensemble corsé et complexe. La minéralité et l'écorce, interminables en finale, soulignent un terroir et une vinification d'exception. 95+/100

GRIOTTE-CHAMBERTIN 1969 Drouhin

Vous aurez donc compris après l'anecdote d'introduction, que ce vin est en fait un 1980. Le nez de vieille cave, de bois humide et de champignon frais évoque plutôt un Côte-de-Beaune ancien de faible niveau. La bouche est alcooleuse et malgré quelques parfums de framboise et d'épices, nous ne parvenons pas à terminer la bouteille. J'en suis malade, mais c'est la vie ! 82/100

CHÂTEAU CALON-SEGUR 1926

Cela fait des années que j'ai envie de boire ce millésime encensé par les initiés. Il semble qu'il bénéficie d'une aura assez spéciale. Malheureusement, je n'ai jamais trouvé de bouteille suffisamment bien conservée pour me lancer dans l'aventure ; jusqu'à aujourd'hui... Comme vous pouvez le voir sur les photos, la couleur est sombre et le niveau sublime pour un vin de cet âge. Le nez est totalement déroutant car il est porté par une acidité volatile très puissante. Il ne faut donc pas se borner à cet arôme de vernis à ongles car la complexité est redoutable : Viandox, jus de cuisson, cuir tanné,cèdre, marc de café et chocolat. La bouche tranche complètement. C'est un miracle de douceur avec un tannin lourd que l'on ressent sur la langue comme des centaines de petites billes. C'est assez hallucinant : un mixe de 1945 et de 1947. On ne perçoit pas un brin d'acidité, juste du cèdre, du cassis, de la mûre et de la réglisse. Nous sommes face à l'un des tannins les plus abouti que j'ai jamais testé ; bref, un style de vin d'une autre époque que l'on ne connaîtra jamais plus. Je rêvais d'un 1926 conservé, et ce soir le rêve est devenu réalité. 97/100

GRANDS-ECHEZEAUX 1985 Gros Frère et soeur

En début de soirée, le nez était une moisissure accomplie. J'avais demandé à Libe d'être patient. Il est récompensé car quelques heures plus tard, on croque dans le fruit : groseille, cassis, framboise et fraise. Lolive trouve l'année et moi, le producteur. 1985 est une des seules années à être aussi explosive et qui mieux que les Gros maîtrisent aussi bien le sirop de fruits? Plus qu'un vin, c'est une confiserie. La bouche est un pur Pinot qui décline parfaitement la ronce, la fraise des bois, le tabac et le chêne ancien. Impeccable ! 94/100

HERMITAGE VELOURS 1982 Chapoutier

A l'aveugle, je suis dans les années 1980, mais en Loire... Dommage ! C'est la deuxième fois que je bois ce vin, mais cette bouteille ci me plaît moins car le sucre est trop digéré. Le nez, expressif, de bougie, d'orange amère, rehaussé d'un boisé subtil, est très intéressant. Je suis moins conquis par la bouche peu liquoreuse où seul le zeste et le miel me donnent un sourire furtif. 91/100