Calon Ségur 1955, Pavie 1959... Vive les anniversaires en famille !

Un week-end en famille pour fêter les anniversaires est toujours l'occasion d'ouvrir de grands flacons. Nous nous partageons donc la tâche, mon papa, mon frère et moi pour trouver quelques raretés, et tenter de beaux accords avec la cuisine inspirée de ma maman. Dans la cave, je repère qu'une bouteille de château Pavie présente un bouchon anormalement bas dans le goulot. Le niveau est parfait, mais il faut l'ouvrir d'urgence avant qu'il n'arrive une catastrophe.

Pas loin de là, je vois un blanc avec un bouchon flottant dedans. C'est un vieux Comte Lafon, en exemplaire unique. Je blêmis. Je connais mes vins par coeur, et je sais que cela ne doit pas faire longtemps. Il reste une chance de le sauver et de se faire plaisir ! Effectivement un pschitt se fait entendre à l'ouverture ; Il semble donc que la capsule se soit interposée entre l'air et le liquide. On verra...

CLOS DU BOURDIEU " Méthode Champenoise" 1949 ( Appellation Bordeaux Mousseux )

Il y a encore de bien beaux trésors dans la cave paternelle ! Je ne savais même pas que Bordeaux s'était lancé dans la concurrence aux Champagnes dès les années 40...

Le nez tertiaire est agréable grâce aux parfums de fruits secs, de mousserons, d'humus et de miel. La bouche est encore bien perlante ; C'est impressionnant...  J'avoue qu'à l'aveugle, je suis un peu perdu. Je demande à mon père si c'est un Champagne ; J'avoue que cette bouche alcooleuse et asséchante m'intrigue. En le voyant sourire, je comprends qu'il y a un piège ! En tous les cas, ce coup d'essai est bluffant. Certes le vin est un peu lourd, mais les arômes d'agrumes confits et de sous-bois signent un mousseux encore loin de la tombe et surprenant. 90/100

MEURSAULT GENEVRIERES 1969 Comte Lafon

Le fameux vin au bouchon flottant. Je n'en possède qu'une, bien évidemment, et j'imagine qu'il n'en reste plus guère dans le monde. Alors je croise les doigts...

Le nez puissant de frangipane, de noisette, et de croûton de pain est très intéressant. Je le trouve un peu vulgaire, mais on ne peut pas lui reprocher sa puissance. La bouche semble constituée de beurre liquide, avec une amertume phénoménale d'écorce d'orange et de zeste. Là encore, la puissance est indéniable, mais la complexité manque cruellement. Je crois que son côté doucereux me dérange un peu, en fait.

Il a forcément souffert de la situation, et même si l'oxydation ne se remarque pas spécialement,  je reste persuadé qu'une légère altération lui a enlevé peut être ce "je ne sais quoi" qui aurait pu faire la différence. Un vin plus démonstratif que réellement plaisant donc. 91/100

PULIGNY MONTRACHET Champs canet 1990 Sauzet

Le nez encore bien jeune, laisse entrevoir de beaux parfums de citron, de fruits secs, et de toast. La bouche est puissante et très glycérinée. Je pense à 1992. Il manque encore d'envolée, mais laissons lui quelques années pour que la complexité puisse s'épanouir tranquillement. Beaucoup d'agrumes en bouche, et là encore donc, un petit manque de complexité retient notre enthousiasme. 91/100

CHÂTEAU PAVIE 1959

Le nez me désarçonne totalement, car je m'attend à un monstre, mais je n'ai sous les narines, qu'un Saint Emilion timide et un peu passe partout. On note du cassis, du tabac et de l'olive.

La bouche est stricte, très tannique, mais en même temps acidulée. On sent une forte constitution, mais un fruité bien fluet pour contrebalancer cette structure. Le cuir, la mûre et le boisé ne suffisent pas à me convaincre. On sent que le millésime a forgé un vin charpenté, et que les vignerons ont travaillé dans le chai, pourtant l'ensemble me fait l'effet d'un bijou cher, aristocratique et glacial. A fuir... 86/100

CHÂTEAU CALON SEGUR 1955

Ce vin n'est jamais cité dans la littérature, et j'avais donc eu une sacrée surprise en le buvant l'an dernier. C'était une mise négoce, mais le vin avait de la puissance, et possédait toutes les caractéristiques de cet incroyable millésime que je vante tant ces derniers mois...

Là je dois dire que j'ai pu mesurer la différence entre une mise négoce et une mise château.

Cette présente bouteille, mise château, est un pur délice, bien plus proche de son terroir que ne l'était la mise négoce de l'an dernier. Cette fois, on a tout le coeur de Calon qui parle. Le nez est d'une brutalité et d'une complexité magique. C'est l'un des Bordeaux les plus viril que je n'ai jamais bu. J'ai l'impression de mettre le nez sur une boisson qui sort de la salle de musculation : Le cuir, le civet, les herbes aromatiques, le charbon, le goudron et le tabac jaillissent du verre.

La bouche est d'une colossale puissance. Un mâle tatoué de noisette, de chêne, de truffe, et de fruits secs avec une belle veste de fourrure sur le dos. Je trouve que Bordeaux ne sait plus faire ce style de vin. Là on a le saint Estephe caricatural , tel qu'en lui même... On parle assez peu de Calon Segur, pourtant en repensant à tous ceux que j'ai bu par le passé, je me rends compte que j'aime ce cru. Les 1947 et autre 1926 trônent dans mon panthéon. 98/100

CHAMBOLLE MUSIGNY Les Charmes 2000 Ponsot

Le nez nécessite de l'air pour s'affiner, mais au bout d'une heure, il trouve sa vitesse de croisière : Fraise, grenadine, cacahuète, et biscuit chaud sont au programme. La bouche est acidulée, et manque un peu de volume pour vraiment m'embarquer. Un beau vin cependant, qui souffre juste de passer derrière un monument. 89/100

CHÂTEAU HAUT BERGERON 1967

La couleur acajou est réjouissante ! le nez somptueux de bougie, d'orange sanguine, de citron confit et de pâte d'amande est à se damner. La bouche est un sirop de pêche, et de caramel salé, tandis que la finale offre l'amertume et le peps d'une mandarine... Une très grosse surprise et une confirmation de la réussite totale de cette année à Sauternes et Barsac. 94/100