Romanée St Vivant 1945 Noëllat, Clos Vougeot 1947 Morin, Tour Haut Brion 1950... Mythiques !

On ne loupe pas une dégustation organisée par Luc, c'est dit. Lorsque ce dernier m'annonce que nos amis Suédois ne seront disponibles que dans l'après midi, il faut s'organiser pour être là et chambouler tout son emploi du temps de travail. Qu'importe le jeu en vaut largement la chandelle, l'amitié et l'extraordinaire qualité des vins sont en effet une récompense sans égale.

 

 

CHAMPAGNE "AMBASSADOR"  1964 Jacquinot P&F

Le nez d'une fraîcheur étonnante me surprend en bien. On note tour à tour des parfums d'agrumes, de fougères et d'infusion de mélasse. La bouche offre un cordon qui lui fait paraître 20 ans de moins. Le citron confit, l'écorce et le silex persistent un long moment sur les papilles... Grande découverte. 93/100

 

 

CHÂTEAU DE JULIENAS 1949

C'est la 1ère fois que je gôute ce cru du Beaujolais sur un millésime aussi ancien. Bien sûr il n'atteindra pas la perfection de certains Moulin à Vent, mais il est tout de même très fringant pour son âge ! Au nez, on est sur les petits fruits rouges, le café et la violette en nuance, tandis que la bouche rappelle la groseille, la chicorée et le chêne ancien. Il manque de la rondeur, mais je suis content de boire ce vin. 90/100

 

 

CLOS DE LA ROCHE Années 50 Ponsot

Je suis entouré de spécialistes en vins anciens qui ont une culture que je ne possède pas sur les collerettes, le verre et tout ce qui permet d'identifier la décennie d'un vin. Pour ce flacon , nous savons avec le bouchon que nous goûtons un très rare Clos de la Roche Ponsot, mais il manque l'année. Mes amis n'ont pourtant aucun mal à lui donner une décennie : Celle des années 50. Le nez assez classe s'ouvre sur la ronce, la framboise puis se poursuit sur le café. La bouche est plutôt dans le registre des baies, accompagnés de havane et d'épices délicates. Très bon ,mais rien d'inoubliable non plus. 91/100

 

 

BONNES MARES Années 30 Faiveley

Cette fois, nous avons l'étiquette, mais il manque encore l'année. Examen minutieux, et verdict : Années 30. Ici, le nez marque son âge avec ces odeurs de champignons, de fût humide, et de bois ancien. La bouche tranche complètement grâce à une fraîcheur plutôt bien préservée. Les groseilles, les fraises et les épices, le tout agrémenté d'une superbe minéralité, me rappelle en effet une année comme 1937. 92/100

 

 

CHAMBERTIN 1929 Négoce

Je capte immédiatement une odeur de liège qui parasite totalement le nez. La bouche est dans le même registre avec un goût désagréable de capsule. Je suis très déçu, car Luc m'assure que normalement c'est un beau flacon plein de finesse. Rageant donc ! NN

 

 

CHAPELLE CHAMBERTIN 1919 Thomas Bassot

Le Chambertin 1923 de ce producteur reste l'un des plus beaux que j'ai bu de ma vie. Vous imaginez donc mon excitation d'approcher un cru encore plus vieux, en particulier issu de cette grande année Bourguignonne que je ne connais pas encore. Le nez bien conservé n'offre pourtant pas l'ampleur espérée : Café, petits fruits rouges et épices. La bouche possède une grosse acidité et un goût de rafle impressionnant. On perçoit la ronce et le cacao, mais pas de grand frisson. 88/100

 

 

CLOS VOUGEOT 1947 Château de La Tour Morin P&F

Le niveau est bas, mais le vin est pourtant divin, totalement intact, faisant ainsi mentir mon adage " Vin de niveau bas = vin au bord du trépas". Des parfums envoutants, d'une précision diabolique  s'envolent du verre : La crème de framboise, la réglisse, la liqueur de myrtille, l'abricot et le citron nous font tourner la tête. Plus il s'aère et plus il s'améliore. En bouche la puissance est colossale, digne d'un Châteauneuf, mais il est pourtant clair que c'est du pur Pinot avec de la rose, du cassis, des épices de bazar, le tout nuancé de zan et de minéraux. On ne perçoit pas l'alcool énorme de 1947 superbement dissimulé sous ce flot de fruit. Et cette touche crayeuse en finale, mon Dieu, elle rappelle la terre, cette terre  inimitable, que des moines ont su parfaitement délimiter des siècles auparavant. Un monument du clos, supérieur au 1945. 99/100

 

 

ROMANEE SAINT VIVANT 1945 Charles Noëllat

Le nez est d'une absolue perfection ; Il vaut 100 points. Il offre beaucoup plus de fraîcheur et de nuances que le précédent, bien qu'il soit un poil moins pénétrant. Les herbes potagères juste cueillies, le jus de groseilles et de framboises fraîchement pressé, la noix de coco et la truffe. Je veux ce parfum ! La bouche n'est que fruit. La différence entre les Pinot 47 et 45 est là : 47 est confit, puissant, 45 respecte le fruit frais, l'équilibre. A vous de voir où va votre préférence. Pour ma part, je n'arrive pas à me décider ! La jeunesse des arômes est foudroyante ! On est envahi par la violette, la pâtisserie orientale, la myrtille, et les fleurs humides de rosée. Il est à mon sens encore supérieur à un monument tel que Tâche 1945. A revoir dans 20 ans. 98+/100

 

 

CHARTREUSE JAUNE V.E.P 1968

Le nez hallucinant s'ouvre sur le safran et l'anis étoilée, puis se poursuit sur les herbes humides, les fruits pochés et le curry. La bouche est un monstre de puissance qui ne possède cependant pas l'équilibre magistrale et la complexité d'une verte. Le côté sirupeux lui donne des airs de liquoreux. On fait un tour en Inde, puis en Provence. La finale dépasse la minute. 97/100

 

 

 

DE VENOGE " Princes " 1962

Luc m'a demandé des bulles. Voici la bouteille que j'ai sélectionnée. Cette cuvée de Champagne m'avait bouleversé sur le millésime 1966. Ici, on retrouve la pureté que j'aime tant, mais la magie n'opère pas aussi bien. Comme toujours avec De Venoge, le nez semble plus jeune qu'il n'y paraît, grâce à ses arômes d'agrumes, de beurre fondu et d'humus. En bouche le cordon est plus intense que le Dom Pérignon de la même année bu il y a peu. L'attaque est crémeuse, évoquant la morille, puis la truffe, tandis que la finale est beaucoup plus minérale, axée sur le citron vert et le pamplemousse. 94/100

 

 

CRISTAL ROEDERER 1969

Le nez peine à s'ouvrir au départ, mais rapidement il explose sur l'infusion de tilleul et sur le thé vert, puis se poursuit en déclinant la pomme de mille façons : Grany, Tatin, d'amour...

La bouche est presque épaisse par rapport au précédent. Les bulles sont à points, ni trop intenses, ni trop subtiles. La puissance du pétrole, du sureau, de la verveine, et des agrumes très confits écrasent tout sur leur passage. Superbe, mais ne peut rivaliser avec le légendaire 1966. 96/100

MEURSAULT ROUGEOT 2004 Coche Dury

Le nez redoutable de silex, de noisette grillée, de foin et de réglisse est un vrai bonheur. Le boisé est maîtrisé ; On sent bien la touche d'un artiste. En bouche il est mûr et délicat. J'aime beaucoup. 92+/100

PULIGNY MONTRACHET Folatières 1996 Domaine Leflaive

Le nez est une belle dentelle de caramel et d'anis. La bouche ciselée manque pourtant de complexité. Le chêne neuf et les agrumes piquants ne suffisent pas à m'embarquer. Un vin bien trop cher, à des années de la magie du Bienvenue Bâtard du même producteur sur même millésime. 89+/100

CHÂTEAU MALARTIC LAGRAVIERE 1953 Magnum

Le nez a encore des choses à raconter mais ce magnum a fui et rapidement le vin s'éteint. NN

CHÂTEAU COS D'ESTOURNEL 1928

C'est la deuxième fois que je le bois cette année, et je le retrouve en tout point identique à ma première expérience. Le nez, encore bien conservé, délivre des senteurs de fourrure, d'anis, de cassis et de cuir patiné. La bouche est stricte et le tanin un peu agressif enlève une partie du charme de ce Saint Estèphe légendaire. On note encore du café, de la truffe, de la réglisse ainsi que de la chicorée en finale. Je pense qu'il décline lentement. 91/100

CHÂTEAU BECHEVELLE 1949

Le nez est encore un peu floral agrémenté d'herbes humides et de poudre de riz. La bouche est subtile, plutôt bourguignonne mais loin de la magie de 1959. On perçoit encore le chêne humide, le grain de café et les petits fruits rouges. Une fluidité en milieu de bouche me gêne un peu et me fait dire qu'il est lui aussi en train de décliner. 89/100

CHÂTEAU DUBIGNON TALBOT 1949

Je n'avais jamais entendu parler de ce cru classé, à présent disparu. Un ami m'a dit que la parcelle avait été intégrée au Château Malescot Saint Exupéry. Le nez, élégant, offre encore des odeurs subtiles de cerise, de fraise et de légumes frais. La bouche manque un peu de complexité et de longueur en finale. Intéressant tout de même. 87/100

CHÂTEAU TOUR DE MONS 1949 Magnum

J'avais déjà entendu parler de la qualité de ce cru Bourgeois. Certains prétendent même qu'il dépasse parfois le seigneur Margaux en personne. Le nez est encore en pleine forme et aristocrate. On perçoit le cèdre, la fraise macérée, et l'acide ascorbique. La bouche est puissante sans la moindre trace d'acidité, mais la finale manque d'ampleur pour espérer atteindre des sommets. La réglisse, le cacao, et les groseilles sont au programme de ce beau 1949 qui redonne de l'allure à la dégustation. 91/100

CHÂTEAU  LA TOUR HAUT BRION 1950 Magnum

Le nez prodigieux et surpuissant libère des parfums d'herbes grillées, de cerise noire, de réglisse, de myrtilles et de parfumerie. La bouche d'une concentration incroyable et d'une jeunesse décoiffante me fait voyager au coeur du Mexique à Oaxaca. J'ai l'impression de siroter un cacao originel encore fumant. Le café vert, le cappuccino donne un milieu de bouche épais, tandis que la finale de mûre et de cendre ne se termine pas. Mes voisins sont moins enthousiastes que moi reprochant au vin de ne pas terminer en " queue de paon" crémeuse. J'ai plutôt l'impression qu'ils ont en tête la queue de paon langoureuse de certains Pomerol. Ici, nous sommes face au vin de presse de La Mission, c'est à dire un vin antique, torréfié et sans compromis aucun. La longueur en bouche peut dépasser la minute sans pour autant être douce et soyeuse... Encore supérieur à sa soeur Mission 1950. 98/100

CHÂTEAU LAFAURIE PEYRAGUEY 1929

La couleur est très fonçée, presque ébène. Le nez sublime rassemble un bouquet de senteurs : Pralin, caramel brun, cacahuète et menthol. La bouche offre un liqueur supérieure au 1921 bu l'an dernier. L'attaque de truffe et de sirop d'érable est réjouissante. En milieu de bouche, le coing pointe le bout de son nez conférant à ce liquoreux, juste ce qu'il faut d'équlibre. La finale est une dentelle extatique d'abricot confit et de caramel. Bravo !

97/100

MALAGA Début 20ème siècle

le nez est un grand moment de rigolade. On a l'impression d'éplucher des pommes de terre ! On note également du millepertuis, et une touche rappelant le Coca Cola. La bouche est subtilement liquoreuse, évoquant un xérès âgé. 87/100

Un petit bonus de quelques vins dégustés au gré des dernières semaines !

CHAMPAGNE DE SOUZA " 3 A "

Le champagne sélectionné par le meilleur sommelier du monde actuel. Le nez de fruits exotiques et de beurre est très agréable. En bouche il est frais et aérien. Parfait pour la mise en bouche. 87/100

CHABLIS LES CLOS 1991 Dauvissat

Le nez est un peu fermé au départ, il a besoin de carafe et d'air dans le verre. Timidement il se présente sur les herbes humides avant d'évoluer enfin sur la sauce de viande, et la fougère. La bouche est encore jeune, tranchante, avec des arômes de citrons et une belle minéralité. Un millésime oublié qui démontre la capacité des Chablis à se bonifier même en année modeste. 91+/100

CLOS VOUGEOT 1985 Jacky Confuron Cotetidot

C'est un vigneron que j'apprécie pour sa droiture et son refus de céder aux modes des vins faciles à boire immédiatement. Tous les crus nécessitent chez lui au moins 10 ans de garde avant de raconter une histoire plaisante. Ici, le nez est rustique, surtout axé sur le foin, le cuir usé et la terre humide. La bouche offre une grosse trame acidulée, avec un goût de rafle dominant. Aucun plaisir pour le moment et je doute même de sa possible bonne évolution... A revoir dans 15 ans. 87+/100

TOKAY RANGEN CLOS St URBAIN SGN 1993 Zind Humbrecht

Les senteurs de pruneaux, de miel malgache, et d'agrumes confits sont un régal pour les narines. La bouche est une pâte acidulée ; Quelle concentration ! Le coing, la tarte tatin et la poire se disputent les faveurs de nos papilles. Peu d'évolution pour le moment. On peut le boire ou le garder pour la retraite... 96/100

KABINETT 1985 Egon Müller

On perçoit sans problème la trame du vin : Subtilement liquoreuse avec une acidité redoutable, tranchante comme le fil d'un rasoir. Malheureusement le nez et le goût de bouchon parasite trop l'ensemble. NN

CHÂTEAU CALON SEGUR 1955 Négoce

C'est bien l'une des premières fois que je vois un si beau bouchon pour une mise belge. Tout est noté : L'année et le cru. Le niveau du vin est bas goulot, une perfection donc. Le nez jaillit du verre sur les herbes grillées, la crème de myrtille, ainsi que le cassis. Il se présente en fait comme un grand Mouton : On a l'impression d'être encore au dessus de la cuve. Après une longue aération, la torréfaction et l'orgeat complètent cette palette d'artiste. La bouche est encore d'une puissance à peine croyable. Le tanin est aussi fougueux qu'un 1945. L'attaque de chêne neuf et de fruits noirs confits est une sacrée gourmandise ! On nage dans le moelleux... La minéralité est un coup de génie pour le bouquet final. Je crois que je place l'année 1955 devant 1959 ( Cf La Mission 1955, Lynch Bages 1955, Figeac 1955, et ce celui-ci par exemple). Ha, au fait, ce vin était au prix d'un cru Bourgeois récent, sauf qu'ici on est face à un monstre. Que dire de plus pour persuader les amateurs qu'un vin ancien n'est pas toujours synonyme de vin cher ? 96/100

BEAUNE BRESSANDES 1978 Leroy

Au départ, le nez est surtout giboyeux, mais au bout d'un quart d'heure la complexité est au rendez vous : Petits fruits rouges et fumée. La bouche est alcooleuse, rappelant la crème de framboises, tandis que la finale noyautée est trop amère pour rendre ce cru inoubliable. 90/100

PAVILLON BLANC CHÂTEAU MARGAUX 1986

Le nez est ouvert et fidèle à son terroir : Ecorce d'orange, citron et chêne de luxe. La bouche offre comme toujours une superbe minéralité évoquant certains Chablis. On note du citron vert, du pamplemousse et des notes de forêt humide. La finale est piquante à souhait. 92/100

PUECH HAUT Tête de bélier 2005

Après une heure de carafe, les senteurs de pâtisserie, de crème fouettée aux myrtilles et de cassis emplissent le verre. La bouche concentrée est axée sur la même gamme aromatique. Il en fait des tonnes, mais j'aime bien. A voir au vieillissement. 91+/100

MARC DE LA ROMANEE CONTI 1988

Je l'ai toujours dit, je bois souvent de grandes étiquettes, mais elles ne m'influencent pas le moins du monde. J'ose encore le répéter donc, ce domaine mythique auquel on ne peut pas toucher, n'est pas à la hauteur de sa sainte réputation. Après la série des 1999 et d'autres légendes comme Tâche 1945, 1966, et bien d'autres, je trouve à chaque fois d'autres vins plus grands sur la même année, ou sur un même cru... Et je le déplore. A ceux qui me prétendrons le contraire, je veux juste qu'ils se posent la grande question : Ont ils une seule fois bu un vin du domaine à l'aveugle ?? Et si oui, était il le meilleur ? Après tout, on attend d'un restaurant 3 macarons qu'ils soit meilleur qu'un 2 macarons, non ? Donc le vin du domaine le plus réputé et le plus cher du monde se doit d'être le meilleur, point.

Ce que j'essaie d'expliquer ici, c'est que les différents vins du DRC sont tous très grands et délicieux même ; j'ai simplement un problème sur le fait qu'ils sont largement les plus onéreux, et qu'ils ne sont pourtant pas les meilleurs. Alors que Petrus, lui est souvent le meilleur.... Bu à l'aveugle, Petrus a été le plus grand 1970 que j'ai bu, le plus grand 1961, et sur le podium des 1982.

Mais le souci devient même un réel problème lorsque je bois un Marc comme celui-ci. Il ne se passe rien. J'ai des dizaines de digestifs meilleurs qui me viennent à l'esprit. Et ce 1988 n'est pas bu à l'aveugle ; Je ne parle même pas de ce qui m'aurait traversé l'esprit dans un tel exercice...

Le nez puissant dévoilent des parfums de noix et de chêne neuf, ainsi que de subtiles nuances de groseilles. La bouche est trop marquée par l'élevage et peine donc a mettre en avant son fruité. C'est une déception , et je pèse mes mots. 87/100

La fin d'année est chargée, je suis certain qu'il y aura encore de grandes choses !