Mouton Rotschild 1961, Mission Haut Brion 1955, Haut Brion 1961, Clos Vougeot Leroy 1961... Est ce le week end d'une vie opus 2 ?

Direction l'Alsace, avec un petit détour en Allemagne. Mon métier m'oblige à prendre soin de mes mains, à les protéger comme des objets précieux. Ma passion pour le vin, quant à elle me rend plutôt nerveux à l'approche de l'hiver. Sans un bon nez, une dégustation de prestige n'a plus aucun sens. Il faut donc à tous prix maîtriser la prévention pour éviter le pire des drames : Avoir le nez bouché le jour tant attendu. Homéopathie, écharpes sont donc au programme depuis quelques jours. Mon nez, mes mains...2 parties du corps à bichonner !

 J'arrive donc comme il se doit, en pleine forme le vendredi soir.

CHÂTEAU AUSONE 1962

C'est la deuxième fois que je le bois. La 1ère avait été une belle surprise. Cette fois encore, il se présente bien, peut être un peu moins crémeux tout de même. Nez très ouvert et racé d'anis, de champignons et de fruits noirs. L'attaque en bouche est gourmande grâce aux fruits rouges, et au tabac, mais la finale sèche un peu pour prétendre à l'excellence. 91/100

CHÂTEAU AUSONE 1953 Magnum

La bouteille est superbe ! Que c'est beau un magnum...

Le nez est d'une jeunesse enthousiasmante : herbes grillées, graphite, réglisse, tarte à la myrtille et coulemelles en nuance. La bouche est bien plus glycérinée que le précédent ; Exactement ce qu'il me manquait tout à l'heure. Et cette finesse que seul Ausone sait porter à une telle perfection.Une vraie ballerine ! On perçoit tour à tour le cuir de Russie, la framboise, la griotte du Pinot, avec la délicatesse du bâton de réglisse que que l'on mordille. Il s'inspire de Lafite 1953, en un peu moins long en finale. Je pense que je ne suis pas encore tout à fait prêt pour ce style de vin éthéré, mais je les aime de plus en plus en tous cas. Je donnerai probablement 2 ou 3 points de plus dans quelques années. 96/100

CHÂTEAU LATOUR 1953

C'est en buvant celui ci que je réalise mieux à quel point Ausone était bon et accompli. Ici, une touche discrète de volatile porte les senteurs de cuir, d'écurie, et d'épicéa. C'est peut être plus puissant au nez, mais surtout bien plus rustique. La bouche est marquée par la peau et le sang avec des épices et des fruits rouges en nuances. La finale de citron me passionne un peu moins et je crois qu'il démarre juste son lent déclin. 91/100

CHÂTEAU LA MISSION HAUT BRION 1955 Magnum

Là encore quelle beauté que ce magnum bas goulot. Le nez jaillit du verre sur la cendre, le charbon chaud, la truffe, le sous bois humide du matin, le cep et le civet de gibier. Incroyable cadeau à la longue aération : Une note de craie unique. La bouche est d'une ampleur colossale qui me rappelle un 1947. Lys, zan fondu, fruits noirs crémeux , fumée délicate d'une cuisson au barbecue, et burlat macérée sont au programme. La finale s'éternise sur la régisse et le cèdre. Parfait mais pourtant un cran en dessous des magiques 1953 et 1929. 100/100

CHÂTEAU DUCRU BEAUCAILLOU 1961

C'est également la 2ème fois que je bois ce flacon. Dès le 1er nez, je sais que cette bouteille n'atteindra pas le niveau exemplaire (99/100) de ma 1ère expérience. Le nez est un beau classique de sous bois, de vanille et de confiture de fruits rouges. Je ne retrouve pas l'explosion de truffe et d'herbes grillées qui m'avait tant marqué.  La bouche est par contre au même niveau : Un pur sirop de cabernet sauvignon, avec cette texture si particulière qu'offre l'année. Aucun autre millésime ne possède en effet cette richesse de parfums : Cèdre, herbes grillées, prune, menthol, mûre,framboises, bref une grande noblesse. 94/100

CHÂTEAU MOUTON ROTSCHILD 1961

Je suis heureux, le nez sort  comme un feu d'artifice : Encre de seiche, cèdre, truffe, toast, et à nouveau cette sensation éprouvée avec le 1959 ; On est au dessus de la cuve. La framboise et cet étrange arôme artificiel de cerise nous font régresser en enfance. La bouche est plus polie, plus harmonieuse  que celle du 1959.  La puissance est plus modérée aussi. On perçoit du zan, de la mûre, de la cendre, ainsi qu'un côté tellurique, qui fait dire à certain " Il ressemble à un Hermitage ". le vin déplait à l'assemblée, qui n'est de toute façon pas fan de Mouton. J'en profite pour enfoncer le clou : C'est primordial parfois de déguster les grands crus à l'aveugle, car cela évite tout préjugé. Je garde donc ma ligne de conduite et ne me laisserait en aucun cas influencer par les autres avis. Mouton 1961 est un immense vin, absolument pas hermitagé. C'est vrai que c'est le plus technologique de tous, et je me répète Mouton est un précurseur de l'ère Parker ; Comme quoi il n'a rien inventé ! Par contre ma note parle d'elle même, il existe nettement plus grand que  Mouton 1961 ou 1959... 97/100

CHÂTEAU AUSONE 1961 Magnum

Cette fois tout le monde s'emballe sur le vin, sauf moi... Je trouve le nez fermé ; Je décide d'attendre 10 minutes avant de me lancer. Pendant ce temps, je ressasse mes idées noires au sujet de l'injustice faite à Mouton. Je me demande si ma table y comprend réellement quelque chose, puisqu'elle préfère ce vin. Je replonge mon nez dans le verre et surtout je goûte. Il faut apprendre à être humble dans le vin , car finalement c'est moi qui n'ai rien compris, et ma table qui goûte mieux que moi ! Le nez s'offre sur la noisette, le cèdre, le cuir tanné, la griotte à l'eau de vie, et la crème de cassis. C'est moins puissant que Mouton, mais c'est un sacré aristocrate ! La bouche est ciselée, mais reste très mure ; Jamais compotée. Un vrai bonheur : Graphite, menthol, roche, cerise noire, bref un vin de méditation ou rien ne dépasse, mais où tout est en place, harmonieux. Je me dis qu' Ausone est peut être un peu le Château Grillet des rouges : Il se mérite et ne se donne vraiment qu'à ceux qui sont prêts à le recevoir " tel qu'en lui même l'éternité le change " .  96/100

CHÂTEAU HAUT BRION 1961

C'est ma deuxième expérience avec ce vin. Il arrive ce soir avec un nez d'une jeunesse décoiffante : Braise, fumée, jus de cuisson, céréales, nougat et cacao. Il est tellement plus abouti que ce que j'avais en mémoire... L'attaque en bouche est volumineuse avec un glycerol digne de 1947. Quelle épaisseur ! On perçoit le pruneaux, le Jabugo, et le coulis de mûre. C'est un des plus grands Haut Brion de l'histoire, un poil derrière le 1945. Mais comme d'habitude , il n'atteint pas, à mon sens, la fougue et le déchaînement de la Mission...  Un grand merci à Sébastien qui a eu la générosité de me faire goûter une seconde bouteille de ce vin mythique dans la même soirée !!! Elle était en tout point identique. 99/100

CHÂTEAU LAFITE ROTSCHILD 1990

Le nez est ouvert et explose sur le chêne neuf, la truffe d'été, la réglisse et les herbes humides. La bouche est élégante, en finesse, agrémentée de chêne caramélisé, d'épices délicates et de prune lardée. Je ne l'attendais pas du tout à ce niveau. Très grand Pauillac en préparation... 95+/100

CHÂTEAU HAUT BRION 1990

Le nez est en moins explosif, c'est clair, mais la complexité me semble supérieure...Iode, coquillages, herbes sèches, paille humide, pierre à fusil et baies sauvages caractérisent ce poids lourd du millésime.La bouche est déjà fondue, agréable à boire. On ressent une plénitude encore supérieure à Lafite. Ce doux parfum de Jabugo et de noisette rappelle un certain 1961. Ira t'il aussi loin ? 95+/100

CHÂTEAU LA MISSION HAUT BRION 1990

Le nez est végétal, et assez fermé. Même après 2 heures, il ne veut toujours pas venir. En bouche, le boisé est plus soutenu que les 2 autres. Le fruité est timide, tandis que la rafle envahit le palais. Heureusement le tabac, les herbes sèches et la cendre finissent par arriver. Un vin qui m'inquiète un peu, car je ne perçois pas de réel potentiel, et cette présente bouteille ne me semble absolument pas défectueuse. Ne touchez pas à vos flacons avant au moins 10 ans et croisez les doigts ; C'est un grand fan de la Mission qui vous le conseille ! 89+/100

CHÂTEAU MARGAUX 1990

Je le retrouve identique à la bouteille bue l'an dernier. Un immense Margaux en devenir...Le nez hyper puissant d'anis étoilée, presque de pastis, de fleurs séchées, de cèdre et de caramel est étourdissant. La bouche est une crème fouettée de cassis, de myrtilles, de Suze avec un boisé subtil et parfaitement intégré. Je pense qu'il égalera le 1953... 96+/100

CHÂTEAU MOUTON ROTSCHILD 1947 Magnum

C'est le genre de vin, dans un contenant rare, que l'on ne boira qu'une fois dans sa vie. Alors on l'attend comme que le messie. Lorsque le vin coule dans mon verre, j'en tremble. Au premier nez, j'imagine ce que pourrait ressentir une personne pieuse rencontrant Jésus, puis réalisant que ce n'est qu'un homme normal, trop normal...

Pas d'explosion, juste une discrète décoction de bouillon de légumes, d'eucalyptus, de boeuf Bourguignon et de fraise. L'attaque en bouche est plutôt intéressante sur le charbon, la noisette et la griotte. Malheureusement une énorme trame acide domine l'ensemble et étouffe la complexité. Je pense que c'est un problème de bouteille, car je crois suffisamment les dires de certains pour imaginer que le vin peut être gigantesque. Il n'est pas mort, mais atténué... C'est un drame épouvantable, car je le souhaitais monumental et il n'est que bon.   91/100

La suite de la soirée est excitante, grâce à la générosité sans limites de Sébastien et de son compère Sylvain. Merci aussi aux "compatriotes" Lyonnais.... Et bravo à Dominique Fornage toujours aussi sympa et perspicace !

CHÂTEAU PALMER 1970

C'est la 2ème fois que je le bois cette année. Il m'avait déçu, et ce soir la bouteille est défectueuse...Marquée par un boisé strict et une touche de moisi, il ne reflète en aucun cas la vraie valeur ( correcte ) de ce vin. NN

CHÂTEAU LATOUR 1970

Un nez incroyable de " Black wine " associant les fruits noirs ultra macérés et le zan au cèdre et à l'épicéa. C'est un vrai gamin.

En bouche il est d'une colossale puissance avec de la réglisse, de la brindille de cassis et du pruneau lardé. Les 1970 s'annoncent en fanfare depuis peu. Ils commencent à se boire et risquent de nous régaler encore 30 ans sans problème ! 95+/100

CHAMBERTIN 1984 Rousseau Magnum

Le nez est encore agréable grâce à la fraise écrasée, nuancée de tabac et de griotte. La bouche a conservé une acidité redoutable qui n'offre plus beaucoup de plaisir. 82/100

ECHEZEAUX 1971 DRC

Un des plus grands millésime pour le domaine dixit John kapon et Allen Meadows. Le nez très éthéré est une beauté de rose fanée, de fraise des bois et de tabac blond. La bouche offre une incroyable minéralité, agrémentée d'un boisé luxueux, d'airelles et de griottes. Je perçois également une légère dilution, comme si le cru n'était pas assez prestigieux, ou le millésime pas assez baigné de soleil...Etonnant. 93/100

RIESLING AUSLESE 2004 Dr Loosen

Un producteur mythique qu'on espère boire une fois dans sa vie ! Le nez est redoutable grâce aux parfums d'ananas, de litchi, et d'agrumes. La bouche travaille un peu, mais l'air lui fait du bien. La crème brulée, l'abricot confit, le citron, ainsi qu'un boisé fumé terminent un repas anthologique de 9 plats ! wowwww ! 92+/100

La suite se passe le lendemain, en famille. Le festival continue...

HEIDSIECK & MONOPOLE Rosé 1976

Le nez est assez tertiaire, dominé par des arômes de champignons, de bois humide et de noix caramélisée. En bouche, il est plutôt perlant que gazeux. On perçoit des petits fruits rouges et de la bergamote. Il s'améliore au contact de l'oxygène... Une bonne entrée en matière. 88/100

TAITTINGER COMTES DE CHAMPAGNE 1971

Le nez fantastique éclate sur le miel de sapin, le beurre fondu, les fruits rouges fumés et la truffe. La bouche signe un vrai Champagne de gastronomie. Puissance et cordon impeccable sublime l'entrée. On note du pain d'épices, de l'abricot et du zan avec une finale interminable. 96/100

BIENVENUES BATARD MONTRACHET 1996 Domaine Leflaive

Le nez est un joyau irrésistible. Je le répète à chaque fois ; c'est le plus grand millésime du siècle pour les blancs... Une déclinaison de clairière humide, d'anis étoilée, d'agrumes fumés etc... J'adore. La bouche est monstrueuse et reprend en fanfare la gamme aromatique du nez en y ajoutant la fougère. A garder encore 10 ans au moins. 95+/100

DOMAINE DE CHEVALIER 1983

Le nez envoie sévère ! Herbes séchées, thym, cendre et pruneaux enrobés de lard. La bouche est crémeuse, et aussi aromatique que le nez : Violette, prune, mûre et fumée. La finesse de Bordeaux à son paroxysme pour le plus grand Domaine de Chevalier de ces 30 dernières années. 95/100

CLOS VOUGEOT 1961 Leroy

La couleur très claire et trouble annonce un vin déclinant ou sucraïon. Il n'est en rien, c'est une perfection ! les senteurs jaillissent comme un pot pourri de tabac blond, de griotte, de grenadine, de fraises et de roses fanées. Impossible de quitter le verre... En bouche le terroir parle fort avec ces notes de craie, de minéraux, de métal puis de fleurs séchées et de petits fruits rouges. Un des grands Clos de mon album... 97/100

STAG'S LEAP CASK 23  1985

Je continue mon exploration américaine... Broadbent classe ce millésime comme l'un des tous grands du siècle aux US. Ce Cask 23 est son préféré, tandis que certains amateurs le vénèrent. Le nez est un Ovni ; Du jamais vu ! Il est monumental, saturé de Melanosporum et de truffe blanche. C'est le plus puissant de ma vie sur cet arôme. Mon père osera même insinuer qu'ils ont fait macérer des truffes dans la cuve. Dur de reconnaître qu'un vin étranger est grand. Pourtant cette fois il a admis ! L'aération amène un peu de menthol et de réglisse. La bouche est très riche ; C'est une hypothétique gelée de fruits rouges gorgée d'alcool. L'acidulé est vraiment surprenant pour un vin américain. Ca rappelle un peu certains Pinots de l'ère moderne mariés à un beau Pomerol. Un des plus beaux Napa jamais testé. 95/100

VIN DE PAILLE 1969 Rolet P& F

Je garde un souvenir ému du 1985. J'avais donc hâte de tester ce producteur sur un peu plus de recul. Celui-ci est moins éblouissant. Le nez est pourtant complexe sur la peau de banane, les fruits secs, et la noix. En bouche le sucre est puissant et met bien en relief la datte, la noisette et le safran. Il manque juste une pointe de magie... 93/100

Ce week end n'est peut être pas aussi extrême que celui de l'an dernier, mais il me marquera longtemps, c'est certain !!!