Le Pin 1990, Gangloff 1991, et un repas à la Tour d'Argent

Lolive nous reçoit pour une dégustation en petit comité ; Une dérogation à ses habitudes, donc... On ne sait pas trop à quoi s'attendre. Comment imaginer, en effet, qu'il nous prépare une pure folie !

OSIRIS 1988 Tour Blanche

Le nez assez évolué de zeste, de confiture d'abricot, et de cire dévoile également par intermittence une touche acétique. On lui donne facilement 20 ans de plus... En bouche l'attaque est presque sucrée, mais elle vire rapidement sur un vin sec, plutôt correct. Je ne connaissais pas ce vin, mais je ne pense pas avoir loupé grand chose non plus. 83/100

BILLECART SALMON Grande Cuvée 1990

Le nez jaillit du verre sur le bacon, la braise, avec une fraîcheur irréelle de craie, et d'agrumes juteux. En bouche, le cordon est intense, tandis que les parfums de miel, de toast, et de jus de cuisson s'étalent longuement sur les papilles. La finale très "Chablisienne" est d'une minéralité décoiffante ! Un Boss du millésime. 97/100

LAURENT PERRIER Grand siècle " Lumières du Millénaire" 1990

Le nez est à nouveau très frais, comme un marché primeur ! Les agrumes, les minéraux, et les herbes humides régalent nos narines. En bouche, il semble plus tourbé que le précédent. La terre mouillée, le foin, l'abricot et j'en passe et des meilleurs, nous montrent encore une fois que cette année est superbe en Champagne, comme dans le reste de l'Hexagone d'ailleurs. 96/100

VIN JAUNE 1969 J. Richard

Le nez pur, est d'une originalité incroyable ! On perçoit de la graine de moutarde, du paprika, du safran, et des notes d'arachides. La bouche offre une gamme tertiaire noble de sous-bois, de noix, et de fruits pochés. Pas un de nous ne pense à cette région... Habituellement, je ne loupe jamais ce type de vin à l'aveugle, mais là, j'avoue que son cachet pour le moins atypique me désarçonne, mais j'aime ! 94/100

Y d'Yquem 1968

Le nez somptueux de noix de coco sèche, de malibu, et de thé me fait penser au fameux Lafite Rotschild Blanc 1959... Des nuances de caramel mou et de café, me transporte inexorablement à Bordeaux. Pour l'année on repassera ; Comment imaginer une seconde qu'un millésime aussi catastrophique puisse donner un tel vin ?

La bouche sèche est d'une longueur à couper le souffle. Le pamplemousse, les herbes, et le miel semblent immortels ! 97/100

GHEMME 1985 Bertolo

Honnêtement, un vin Italien que je ne connaissais absolument pas... Le nez de griotte et de pruneau n'est pas déplaisant, tandis que la bouche acidulée, et assez tertiaire fait déjà bien vieille. Pour moi, un vin sans défauts majeurs, mais très vite oublié, malheureusement. 82/100

CHÂTEAU LE PIN 1990

Le contraste est saisissant ! Le nez explose et on le sent à plus d'un mètre du verre. Inimaginable ! Quelle puissance et quelle complexité. La coco, le bouillon de poule, le bois de santal, le jus de boeuf, le kirsh, le caramel, et la violette sont quelques uns des parfums que j'arrive à saisir sur le vif.

La bouche est une liqueur de griotte, de chocolat noir fondu, d'eucalyptus, de menthe fraîche, et, d'abricot ; Quel bonheur !

La couleur est complètement trouble et rouille. On se lance immédiatement dans les années 10 ou avant, car cette couleur ainsi que cette note de bouillon sont assez caractéristiques du début de siècle. Je me dis tout de même " comment a t'il gardé une telle fraîcheur?".

Quand Lolive nous annonce 1990, un silence se fait. Cette couleur sur un vin si jeune signe un très très gros problème normalement !!!!

 Mais les faits sont là sous notre nez et dans notre gosier :Tout le monde a mis 100/100 à l'aveugle. Quand en plus on apprend que c'est Le Pin, une atmosphère irréelle s'installe.

J'ai la chance de le boire pour la deuxième fois, et j'avoue que je ne le reconnais pas. La première fois, c'était le plus grand vin jeune de ma vie, et cette fois tout au long de la dégustation, j'ai eu l'impression d'avoir l'un des plus grands vins vieux de ma vie, persuadé que j'étais de boire un 1916 ou 1904...

Je commence à imaginer des horreurs... Je me dis, c'est un faux, c'est pas possible ! Mais j'examine minutieusement l'étiquette, le bouchon, la capsule... Tout semble parfaitement authentique. Alors au bout de quelques minutes, je me dis "qu'est ce que tu te prends le chou, bon sang ??!" En effet , même s'il est faux, on l'a bu à l'aveugle sans aucune influence possible, et on a pris un pied monstre en le jugeant parfait. Où est le problème alors ? Bien que différent, il est aussi grand que la première fois où je l'ai bu. C'est le principal. Le reste on s'en balance après tout.

Fond de cuve peut être ou autre ?... On ne saura jamais mais peu importe, car on n'oubliera jamais non plus nos cris de joies en respirant nos verres ! 100/100

GOURMANDISE d'ANNE-SOPHIE 1966 Domaine des Remizières

Cet hermitage liquoreux offre une belle palette d'orange sanguine, de zan, d'abricot et de stratcciatella. La sucrosité est bien dosée, tandis que les parfums d'agrumes et d'épices se prolongent quelques instants. Bien fait, en tout cas.  92/100

TAITTINGER COLLECTION "Vasarely" 1978

Lolive aura tenu son thème "les vins rares" jusqu'au bout ! Le nez est un bouquet de citron, de pistache, de pralin, de Chartreuse, et de chouchou. La bouche est aussi gourmande qu'un demi-sec ! Les fruits confits, les épices rares, et la truffe offrent un vrai festival. Un immense champagne. 97/100

Lolive nous a fait un cadeau que l'on est pas prêt d'oublier ! Il avait acheté Le Pin 1990, son vin de rêve, pour ses 40 ans. Il n'aura pas tenu jusque là, à 2 ans près ! Faut il pour autant le regretter ? C'était son jour... Un ange passe.

Voici à présent un petit bonus, composé de quelques flacons bus les semaines précédentes... Le temps me manque, pour tout répertorier sur mon site... J'avais dit que je mettrais de temps en temps, les vins plus "classiques" que je bois aussi dans l'année. En voici un modeste échantillon bu entre aôut et Septembre !

JOSEPH PERRIER " La Royale" 1976

Un très beau champagne au nez de miel, de frangipane, et de réglisse. La bouche est une dentelle ciselée où le citron et l'orange amère côtoie l'amande et le foin. 91/100

RIESLING HENGST 1979 Zind Humbrecht

Le nez de plastique, de pneu, et de peau de poulet grillé est assez déroutant, mais pas désagréable non plus. La bouche sèche et alcooleuse, offre un côté laiteux, cette fois peu agréable. Libe ne lui laisse aucune chance ; Il est énervé et emporte sa carafe à la cuisine. Dommage car les Zind de plus de 30 ne sont pas légion sur le marché... NN

CHÂTEAU LA GAFFELIERE NAUDES 1955

C'est l'un de mes favoris en St Emilion avant les années 60. L'horreur ! Il est bouchonné... J'étais sûr de faire mouche en amenant ce flacon. Il faut absolument que j'en retrouve, car on sent une densité phénoménale, dans la droite lignée du monument Figeac. NN

CÔTE RÔTIE 1991 Gangloff

Un producteur presque inconnu, à cette époque. Le nez est une bombe de cerise noire, de griotte, d'herbes grillées, de tapenade, et de clou de girofle. La bouche est un concentré d'olive noire, de cendre, de mûre fumée, et autres fruits confits. J'ai presque bu tous les grands noms de la Côte sur ce millésime mythique, et là je puis affirmer qu'on est dans le saint du saint, très proche de la légendaire Mouline... 97/100

CHÂTEAU DE FONSALETTE 1983

Le nez de croûton, de framboises, d'algues et d'épices, est assez troublant mais indéniablement original ! La bouche plus éthérée, est proche du début de déclin. Il faut se dépêcher... L'anis, la fourrure, les herbes grillées, et le bacon nous offrent malgré tout un beau festival. 91/100

CHÂTEAU RAUSAN SEGLA 1982

Encore un petit fort effort, et je serai bientôt exhaustif sur les tous les crus classés et principaux Bourgeois de cette année mythique du Bordelais. ici, le nez est poussif, mais après une longue aération, on note de la mandarine, du bois fumé, du cèdre, ainsi qu'une touche de poivron. La bouche est parfumée de fruits noirs, et de chêne, mais elle est aussi marquée par une amertume peu caractéristique de 1982... 88/100 Pour info, j'ai oublié de noter la semaine d'avant un Lanessan 1982 colossal, et très supérieur à ce Rausan Ségla... Je l'ai noté 94/100. Il est d'ailleurs supérieur à tous les autres crus Bourgeois que j'ai testé... Payé 15 euros en 2010 ! Tous les 1982 ne sont pas hors de prix ; A bon entendeur...

VOLNAY CLOS DES DUCS 1999 Angerville

Le nez fermé et réduit me gonfle un peu comme pas mal de Côte de Beaune d'ailleurs... Après une longue aération il vient poussivement sur la cacahuète, le chêne, les fruits rouges et la terre. La bouche est nettement meilleure, avec une belle palette florale ( rose et violette ), et du graphite sur la finale. A revoir, car on sent un certain potentiel ! 89+/100

ROC D'ANGLADE 1999

Le nez génial, m'évoque le cassis frais, la framboise, et la ronce. En bouche, on retrouve le même fruité avec de la fumée et du bacon pour agrémenté le tout. Impeccable ! 91+/100

CHAPELLE LENCLOS 1990 (Madiran)

Le nez est d'une puissance hallucinante de thym, de romarin, de cèdre, de clou de girofle, et de mûres. La bouche possède un tanin massif, presque étouffant, qui me rappelle étrangement certains 1947. Le cacao, les fruits rouges, le zan, et une belle acidité en finale, nous donne l'un des plus grands Madiran que j'ai bu... Philippe Faure-Brac l'avait classé dans "les vins d'avenir" , et je comprends ce choix. 94+/100

PINOT BLANC 1988 René Muré

Le nez tertiaire de noix, de fruits jaunes confits, et de mousseron n'est pas désagréable, mais en bout de course. La bouche est sèche, et encore alcooleuse, comme certains vins du Jura. Bien pour l'apéro sur du fromage. 85/100

POUILLY LOCHE 1988 Cave des grands crus

Le nez bien ouvert est complexe, évoquant le pétrole, la noisette grillée, le citron et le beurre. La bouche offre encore une belle nervosité, grâce à l'écorce d'orange, et au citron confit. Belle minéralité en finale. Ma région comme je l'aime ! 89/100

CHINON Coteau de Noiré 2003 Alliet

Après une bonne aération il se dévoile sur la confiture de mûre et de cerise, la brindille de cassis et les épices. La bouche est fraîche malgré cette concentration remarquable. On note tour à tour de la rafle, des baies, de la réglisse, et des épices à nouveau. Un futur grand ! 91+/100u

ROC D'ANGLADE Blanc 2008

Le nez délicatement grillé, crayeux à souhait est étonnant. Tout est subtil, même le fruité. La bouche est elle aussi raffinée et le mariage avec les oeufs de caille fumés, est absolument divin. On ne sait plus si le vin devient le plat ou l'inverse. Un accord rare ! 90+/100

MÂCON CRUZILLE 2007 Bret Brothers

Le nez de buis, de noisette, de chêne neuf et d'écorce est sympa, mais sans plus quand même. La bouche est bien tendue, mais manque à mon sens de complexité. Bof... 84/100

VOSNE ROMANEE Les Reignots 1999 Pernin Rossin

Le nez puissant de ronce, de framboises, et de bois subtil, nous donne envie de découvrir la bouche. Elle est beaucoup plus stricte, avec une finale serrée. A revoir... 86+/100

SAVIGNY Les Fourneaux 1990 Simon Bize

Le nez d'épices, de mûres, et de gibier est intéressant, mais pas aussi bon que l'année le laisse espérer... La bouche est acidulée, marquée par le chêne et les groseilles. Pas très passionnant. 85/100

Direction la Tour d'Argent, comme chaque année, afin de s'échauffer un peu avant le concert de U2....

MEURSAULT ROUGEOT 1992 Coche Dury

Le nez de beurre fondu, de paille sèche, de truffe blanche, et de craie, est complexe, mais pas explosif comme les Coche "habituels". Il faut dire aussi qu'une légère trace de moisissure vient, par intermittence, polluer l'ensemble. La bouche est nette heureusement... Elle est gorgée de soleil comme tous les 1992... Fruits d'été, foin, et silex sont au programme. Très bien mais pas au niveau d'autres millésimes ! Où peut-on trouver encore dans le monde du Coche 1992 pour 100 euros ? Etonnant non ?

91/100

CLOS DE LA ROCHE 1990 Dujac

A chaque fois que je vais à la Tour d'Argent, je ne résiste pas et bois ce vin encore et encore... Un mythe ! Le nez de folie est une ode à la Bourgogne:

Rose, violette, cassis, mûre, bois de luxe, et épices orientales... La bouche offre un fruité tassé à souhait, d'une fraîcheur qui me rappelle irrésistiblement Henri Jayer... Le cuir, le tabac blond, les fruits juteux, donne un ensemble presque sucré, qui s'éternise sur la langue, tandis que les épices tapotent doucement les papilles en finale, comme la main d'une masseuse asiatique... 97/100

Allez, un dernier petit bonus: Deux vins goûtés pas plus tard qu'hier soir !

CHARLES HEIDSIECK Rosé 1966

C'est la première fois que je goûte cette maison en rosé. Le nez puissant s'ouvre sur la framboise, le pomelo, l'orange sanguine  et le bâton de réglisse. En bouche, le gaz est encore intact, confirmant ainsi que 1966 est bien une année mythique en Champagne, dotée d'une fraîcheur mieux préservée que 1964. L'attaque de petites fraises des bois, et de groseilles est un pur bonheur, une délicieuse excitation pour les papilles. La finale est plutôt dans le registre de l'écorce d'orange, et du bois fumé. Impeccable ! 95/100

CHÂTEAU L'ARROSEE 1971

Je continue mon exploration de cette année totalement surprenante pour la rive droite. Ce St Emilion met à nouveau en plein dans le mille ! Le nez est aussi raffiné qu' intense : Le cuir domine, puis la cendre, la réglisse, les baies et enfin une touche agréable d'iode. En bouche, l'anis met une charge violente sur la langue en attaque, avant de céder sa place au chocolat, et à la framboises. De subtiles notes d'herbes sèches agrémentent la finale longue et soyeuse. Il n'égale pas le magique 1961, mais c'est un bel exemple de ce que peut produire ce terroir trop méconnu. 93/100

La semaine prochaine, de nouvelles aventures commencent, préfigurant une fin d'année qui sera, j'en suis certain, mémorable.