Haut-Brion 1989, Vouvray Haut-Lieu 1955... Deux dégustations de prestige avec les Vavro.

Les hostilités commencent chez les Vavro avec, comme toujours, une cuisine à tomber.

DEUTZ "VINOTHEQUE" 1974

D'emblée, Erica et Blaise font très fort ! Une cuvée rare sur un millésime catastrophique pour les champagnes. Pourtant, le nez est superbe, très ouvert sur le pain grillé, la praline, les agrumes subtilement infusés de notes de tonneaux. La bouche possède une grosse nervosité et une vinosité étonnantes pour un vin de plus de trente ans. Crayeux à souhait. Quelle surprise ! 93/100

VOUVRAY "HAUT-LIEU" SEC 1955 Huet

Je savais que 1955 était un grand millésime pour cette appellation, mais je n'imaginais pas un tel niveau de qualité. A l'aveugle, tout le monde se situe entre la fin des années 70 et le début des années 80. Le nez s'ouvre sur le pain grillé, l'iode et même presque le saumon fumé puis se poursuit sur la morille et les herbes sèches. J'ai toujours été déçu par les Coulées de Serrant antérieures à 1990. Ici, la bouche nous montre ce que pourrait être une grande, vieille, Coulée de Serrant : Les agrumes, les minéraux et l'écorce d'orange nous piquent agréablement la langue. La préservation est stupéfiante ! 93/100

GRANGE DES PÈRES ROUGE 1996

De belles senteurs de truffe, de cerises bigarreaux et de chêne épicé s'échappent du verre. Dans l'ensemble, on part les yeux fermés dans le bordelais. A l'opposé, la bouche nous emmène dans le sud du Rhône avec des arômes de fruits noirs macérés et de kirsch ainsi qu'une note subtile de minéralité. La preuve que les vins de ce domaine sont vinifiés pour viellir. 92/100

BANDOL "TOURTINE" 1987 Tempier

Ce millésime est habituellement très réussi dans les bandols, mais là nous sommes face à un vin catastrophique : La couleur est trouble, le nez peu expressif et la bouche acide nous sèche la langue. 82/100

CHASSAGNE-MONTRACHET "RUCHOTTES" 1996 Ramonet

Cette fois, nous voyons tous ce vin, plus vieux de vingt ans au moins. Le nez de caramel salé, d'amande est agréable mais sur la fin, nous percevons des arômes de fenouil amer peu engageants cette fois. La bouche, tout en miel et en cire, est lourde, sans charme aucun. Attention, sur la fin des années 1990, ce n'est pas la première fois qu'une Ruchotte est râtée... 87/100

TOKAY PINOT GRIS "CLOS WINDSBUHL" VT 1991 Zind-Humbrecht

Nez habituel pour ce cru de pétrole, coquillage et biscuit sucré. La bouche, demi-liquoreuse, est plutôt axée sur le gâteau et le miel. 88/100

La semaine suivante, c'est la seconde manche à la maison. Une fois n'est pas coutume, le Haut-Brion ne sera pas bu à l'aveugle puisque nous l'avons en "copropriété".

DOM RUINART ROSE 1978

Le nez, discret mais droit, typique de cette maison, délivre des parfums de pomme, de griotte et de caramel brun. La bouche, très mure, rappelle la grenade, l'iode ainsi qu'une touche de barrique. Un rosé franc et à point. 93/100

CHEVALIER-MONTRACHET 1989 Bouchard Père et Fils

Le nez est délicat avec des senteurs de caramel noisette, de beurre fondu et d'anis étoilé. L'attaque en bouche est ronde et classique sur les agrumes confits et le grillé. Mais c'est surtout la finale qui offre du cachet au vin et le sort de sa classique entame. Les agrumes très piquants, la minéralité interminable et même l'herbe anésthésique "façon El Bulli" pour Blaise, nous décoiffent de longues secondes. 94+/100

CHÂTEAU HAUT-BRION 1989

Après quatre heures de carafe, le nez qui était déjà ouvert dès le départ a pris une superbe complexité. Les herbes grillées, le poivron, le tabac blond, la pivoine et les fruits noirs dessinent un Rive Gauche quasi parfait. La bouche est déjà sublime, crémeuse comme un 1947 avec un tanin très lourd. Ensuite, viennent les herbes grillées, le foin, la cendre ainsi qu'un flot de baies et de fruits rouges compotés. La finale est parfaitement à la hauteur. Pourtant, c'est difficile à expliquer, mais ce vin ne me transporte pas complètement. C'est l'un des cinq plus grands bordeaux jeunes que j'ai bu ; mais je crois que mon blocage vient surtout du prix : A l'heure actuelle, je le trouve trop cher mais dans quinze ans, je pense que je serais prêt à le payer le double... Pour faire simple, si vous avez les moyens, achetez deux ou trois bouteilles et laissez-les en cave jusqu'en 2020. Sinon, faites quelques économies et achetez-vous ce cru dans les années 40 ou 50. 97+/100

VOUVRAY 1947 Marc Brédif

C'est un vin que j'avais bu il y a une dizaine d'années lorsque je me passionnais pour les "chasseurs de sucre". Forcément, j'avais été un peu déçu par ce vin délicat mais j'avais saisi qu'il y avait quand même quelque chose de grand dans cette finale interminable. C'est un vrai bonheur de pouvoir le regoûter à présent avec toutes les expériences acquises en plus. Merci les Vavro ! Le nez de champignons, de nougat, de noix et d'alcool de prune fait son âge. La bouche a réussi à conserver intacte sa trame acidulée, mais les arômes tertiaires sont un peu trop présents. J'ai en tête un vin beaucoup plus jeune lorsque je l'ai goûté la première fois. Je pense qu'il a pris quelques rides définitives. 91/100