René Lalou 1966, Coutet 1937... Une dernière valse hésitante pour finir 2010.

Les fêtes de fin d'année sont toujours le moment privilégié pour ouvrir des flacons rares avec les gens qu'on aime. Noël dernier avait été mi figue, mi raisin, malheureusement cette année, le constat sera le même.

N'est-ce pas là un coup de pouce du destin, pour ne pas perdre de vue qu'en matière de vins anciens , il convient de rester humble ? Coup de pouce également, pour  éviter de rester trop accroché à cette année 2010 démentielle, jalonnée de quelques uns des plus grands et vieux vins de ma vie... A trop regarder dans le rétroviseur, on finit par oublier le présent. Message reçu !

CHARLES HEIDSIECK 1937

Un des mes objectifs premier était de goûter au moins un exemplaire conservé de chaque grand millésime du siècle. Les Champagnes 1937 commencent à se faire rares, et c'est la première fois que je tente l'expérience ; La bouteille est  dans un état correct avec un niveau qui frôle la collerette. Je préviens mon frère qu'il vaut mieux mettre " un secours" au frais, car le risque est grand.

Il est encore buvable, mais le gaz a entièrement disparu. Et ce goût de champignons, avec un soupçon de serpillère en toute fin de bouche ne nous donne pas envie de chercher plus loin. Une prochaine fois, peut-être ! NN

BAUMANIERE 1955

Un champagne spécialement fait pour le célèbre restaurant des Baux. Contre toute attente, il est encore bien perlant. Le nez d'agrumes et d'herbes est plutôt simple, tandis que la bouche nerveuse et citronnée rappelle combien ce millésime reste frais. Il manque de coffre, de longueur et de complexité, mais il est agréable et vif. C'est déjà bien ! 88/100

MUMM "René Lalou" 1966

L'étiquette est très abîmée, et il faut donc attendre de voir le bouchon pour connaître l'année. Le nez est un peu timide mais complexe, rassemblant un beau bouquet d'agrumes, de craie et de pomme cuite. La bouche offre un gaz de jeune homme, qui me réjouis ! Mais comme la plupart des "Lalou", il reste un peu mince avec une trame amère qui plaît à certains, mais moins à mon palais. Certes c'est un vin tranchant, bien vinifié, et dans la pleine force de l'âge, mais je crois que désormais, je n'achèterai plus  cette cuvée ; Définitivement. En effet, je ne la comprends pas vraiment, alors autant passer à d'autres choses... 91/100

GEWURZTRAMINER "Sélection 1ère" 1971 Hugel

Le nez de raisin sec, de noix, et de miel marque un peu son âge. La bouche est encore subtilement liquoreuse, agrémentée de parfums amers de noyau de pêche et de xérès. C'est bien temps de le boire ! 85/100

HERMITAGE BLANC 1959 Union des propriétaires de Tain

La couleur est d'un jaune doré magnifique, plein de promesses !  Le nez délicat d'agrumes et de coco manque cruellement d'ampleur. En bouche il est encore jeune, parfaitement préservé, mais là encore la complexité et la profondeur font défaut. On rencontre rarement ce type de vins : Ils sont les banalités de leur appellation, et leur seule grande qualité est de rester figer dans le temps. L'éternelle jeunesse n'a parfois aucun intérêt ! 84/100

CHABLIS MONTEE DE TONNERRE 1983 Louis Michel

Chablis est l'un des terroirs les plus difficile à trouver, concernant des millésimes anciens. Lorsque l'on trouve un exemplaire de plus de 25 ans, on est déjà heureux ! Louis Michel est un producteur très apprécié des initiés, mais il ne m'a malheureusement jamais convaincu ; Je ne l'ai cependant que goûté sur des vins jeunes.

Il faut croire que le vieillissement transcende totalement l'appellation, car ce 1983 est indéniablement un grand vin !

Le nez jaillit du verre sur le foin, le toast, les agrumes confits et le silex. La bouche glycérinée lorgne plutôt du côté de Chassagne, mais la finale tranchante et somptueuse de minéralité nous ramène au coeur de la terre Chablisienne. Pour 20 euros, c'est le pied absolu ! 94/100

CHÂTEAU LA LOUVIERE 1971

Un terroir sous-estimé que j'adore ! Le 1988 est un grand vin à découvrir d'urgence... Ce 1971 possède un nez flatteur et précis d'herbes sèches, de réglisse, de poivron et de fruits rouges vanillés. La bouche est une gourmandise avec la sucrosité délicate de cette année charmeuse. Un flacon qui manquent de longueur et de puissance, mais qui remportent tous les suffrages. Bon rapport qualité/prix. 91/100

NUITS ST GEORGES "Boudots" 1969 Mongeard Mugneret

Le nez, très nature, offre de superbes parfums de fraises, de framboises et de fleurs fanées. La bouche est agréable, mais moins impressionnante, car trop acidulée pour mon goût. Ce 1969 reste néanmoins un vin ancien intéressant qui introduit bien le néophyte dans ce monde d'arômes en 3D... 87/100

CLOS VOUGEOT 1971 Bouchard P&F

Le nez superbe de truffe noire, de morille, de caramel et de petits fruits rouges donne le sourire à tout le monde. En bouche, on a toute la sucrosité subtile digne de 1959 ou 1962. Les framboises, les myrtilles et la minéralité du terroir s'étalent sur la langue près de 30 secondes. Un grand vin ! 94/100

BEAUNE CLOS DES MOUCHES 1937 Chanson P&F

Là, on change carrément de dimension ! Des odeurs stupéfiantes et pures de griottes juteuses, de grenadine, de violette et de havane s'échappent du verre pour notre plus grand bonheur. La bouche est d'une jeunesse à couper le souffle avec des parfums d'airelles, de tabac, et de framboises épicées. Il faut par contre le boire assez vite, car au-delà de 30 minutes, l'acidité monte en flèche. 96/100

CHÂTEAU MOUTON BARON ROTHSCHILD  1945

Dès la première seconde, je sais que je vais hurler : Le nez d'aluminium, de vieux fûts et de fruits noirs signe un vin à genoux. La bouche est marquée par la fourrure et surtout l'acidité de la groseille qui se transforme en acidité redoutable en moins de 5 minutes. Problème de bouteille ou vin raté ? Je ne sais pas si je me risquerai à vérifier, car le prix de ce 1945 est actuellement stratosphérique! 75/100

CHÂTEAU COS D'ESTOURNEL 1955

La bouteille est parfaite. Heureusement que j'avais prévu un secours ! Les 1955 ne me trahissent jamais... Heu, c'est bien vite oublier qu'il y a toujours une première. Le nez est profond, mais il faut aller le chercher ; On perçoit surtout l'anis et les herbes sèches. La bouche, quant à elle, est stricte et peine à s'ouvrir. Le problème, c'est que même des heures plus tard, ce Cos n'évolue pas. Il me rappelle certains 1928 ou 1945 qui sont restés figés dans le temps et ne procureront jamais aucun plaisir. A revoir quand même, car certains critiques, en qui j'ai grande confiance, vantent les mérites de ce vin. 85/100

CHÂTEAU COUTET 1937

Un Barasc avec lequel j'ai peu de recul, puisque je ne suis pas descendu plus bas que 1943. Il est temps de prendre un peu plus d'expérience. Le nez puissant de pralin, d'amande vanillée, de cannelle et de biscuit est à point et donne envie d'engloutir son verre. La bouche offre une belle attaque de caramel brun et d'orange sanguine. La trame est tout de même étonnante car très acidulée, comme certains vins de Moselle. Ma famille est moins enthousiaste que moi, car elle trouve le sucre déjà beaucoup trop digéré. Je suis partiellement d'accord : C'est vrai qu'il manque de coffre, mais son élégance lui donne aussi un côté digeste que j'aime assez. Les notes sont donc comprises entre 88 et 92... 92/100

Voilà, nous sommes en 2011 ! Attendons de voir quelles surprises va nous réserver cette année qui s'annonce mouvementée...