Veuve Clicquot 1947, Lafleur Petrus 1955 ! On continue sur notre lancée...

On ne change pas une équipe qui gagne, alors on prend les mêmes et on recommence ! 1947, 1955, 1959, 1990 ; Bref autant de millésimes légendaires parfaitement à la hauteur de l'enjeu ! Comme toujours il y a quelques déceptions, mais  je remarque que plus le temps avance, plus j'arrive à ne garder que la joie, en laissant glisser les déconvenues sur moi , comme on laisse partir une eau usée dans le siphon pour qu'elle puisse être recyclée.

CHAMPAGNE A.CHAUVET Cachet Rouge 1914 Mg

Que c'est beau un magnum de champagne ! Le niveau frôle la vidange, et je ne me fais pas trop d'illusions ; je sais que mon premier 1914 risque d'être mort. On perçoit encore la trame acide et nerveuse, mais le gaz n'est plus, tandis que des arômes de décomposition montent en flèche. Il se boit, mais il faut vraiment n'avoir plus que ça à faire pour s'y attarder ! NN

CHAMPAGNE A.CHAUVET Cachet Rouge 1928 Mg

Celui-ci est complètement mort, un jus de serpillère... Quel dommage ! NN

VEUVE CLICQUOT PONSARDIN 1947

Quelle rareté, merci Libe ! Le nez est encore d'une précision diabolique sur les fruits d'été juteux, le cellier rempli de pommes mûres, et le petit bois grillé. La bouche offre un perlant intense, avec une attaque gourmande, presque "Allemande" tant le sucre résiduel est compensé par une acidité décapante et fraîche à en mourir. On reconnaît la clémentine, l'orange sanguine, ainsi qu'une formidable minéralité, impensable dans cette année caniculaire. Il ne peut pas lutter contre le diabolique 1955, mais son cachet n'est pas prêt de quitter ma mémoire. 97/100

PIPER HEIDSIECK 1973

Une de mes maisons favorites ! Le nez de paille, de silex et de grillé devient ensuite exotique comme un Sauvignon de Dagueneau. La bouche est riche et fumée avec de beaux parfums élégants de craie, et d'agrumes. La finale Chablisienne s'étale sur le zeste et l'aluminium. Impeccable comme toujours ! 94/100

VEUVE CLICQUOT " La Grande Dame" 1979

C'est la deuxième fois que je la bois. La première était somptueuse, celle-ci me passionne moins, car plus marquée par la jeunesse. Le nez est encore dans l'adolescence, mais les parfums de bicarbonates, de noisettes, et d'agrumes sont nets et précis. Il me manque le pain grillé, et le confit de ma première expérience. Avec une telle attaque, on a l'impression de croquer du silex. La suite est une belle succession d'herbes humides, de pommes, d'orangeade et de zeste d'agrumes. A attendre... 93+/100

BEAUCASTEL Blanc 2007

Il combine un nez agréable de guimauve et d'herbes sèches avec une bouche forte en alcool et marquée par un fruit très macéré. J'aime moins sa finale amère. 87/100

BEAUCASTEL Blanc 1989

Il offre un nez à point, mais sur le point de se dissocier (5 ans maximum). La bouche confirme cet état de fait ; Il est bien temps de le boire ! L'acidité monte comme une marée, si bien qu'au final, je ne retiens pas grand chose de cette "eau de vie". Il est sauvé par son nez... 84/100

PAVILLON BLANC Château Margaux 1952

Il offre un nez d'amande et de frangipane, avec de superbes notes grillées. A l'aveugle je penche immédiatement pour un Sauternes sec ; Peut être un Y des années 70... L'attaque en bouche est encore précise et ciselée. Seule la charge amère en finale m'empêche de m'emballer plus. Quoiqu'il en soit Margaux maîtrise le secret d' un blanc qui sait rester jeune, et qui possède de multiples visages, le rendant à chaque fois énigmatique à l'aveugle. 93/100

CHABLIS Montée De Tonnerre 1979 Raveneau

Même ouvert depuis très longtemps, il reste muet, ne se livrant que par intermittence sur le zeste, et les herbes humides. La bouche est fermée. J'irais même peut être plus loin en supposant qu'elle est tout simplement ratée. On ne peut pas dire que ce vin soit mauvais non plus, mais il est banal sans la classe habituelle du domaine. Sachant que 1979 est l'un des plus grands millésimes du XXéme pour les blancs, on peut se demander ce qui s'est passé du côté de maître Raveneau. A fuir ! 83/100

CÔTE RÔTIE Champin Le Seigneur 2008 Gerin

Le nez est superbe, c'est un fait. On reconnaît facilement le clou de girofle, le bois fumé et la violette. La bouche est une vraie gourmandise épicée et torréfiée. Il est déjà génial à boire... 91+/100

CÔTE RÔTIE Champin Le Seigneur 1988

C'est idiot à dire, mais le nez est le même, avec la patine en plus. L'éclate ! La bouche est plus animale que le précédent grâce au cuir et au sang, tandis que la finale de griotte et de zan est un poil mangé par l'acidité. Il faut le boire sans tarder. 92/100

CLOS DE TART 1980

Ce vin semble malheureusement irrégulier d'une bouteille à l'autre, allant du grandiose au moyen. Ce présent flacon est marqué par l'écurie, la châtaigne ainsi qu'une note liégeuse. La bouche est maigre et on sent que le fruité a souffert de la trace de liège. NN

VOLNAY SANTENOTS DU MILIEU 1990 Comtes Lafon

Le nez riche et profond s'ouvre sur le zan et l'amande, puis se poursuit sur la mûre et la feuille de menthe. On sent que la bouche a été faite pour affronter les décennies !  Le tannin encore serré porte de beaux parfums nerveux de jus de framboises et de griottes. On perçoit aussi une note de bois sec très élégante en finale. A revoir dans 20 ans. 92+/100

CHÂTEAU CHEVAL BLANC 1959

La couleur du vin fait froid dans le dos. On ne sait pas trop si c'est un rouge de 100 ans ou un blanc des années 30. Mon Dieu, le nez d'alcool de prune, de cèdre, de bouillon et d'after eight ne me déplaît pas ; Certes on voit bien qu'il s'est usé de façon prématurée, mais le cachet est là !

La bouche est tournée du côté de Xérès, avec une puissante touche de café et de raisin de Corinthe. Lorsqu'on a bu presque tous les grands vins de ce château, depuis 1945, on sait que cette bouteille a souffert, mais sinon, on prend du plaisir car les parfums sont bien ceux d'un grand ! 88/100

CHÂTEAUNEUF BEAUCASTEL 1967

Allez cette fois, je me lance. Après avoir bu une grande partie des vins de ce domaine depuis 1959 et jusqu'à 2001, je considère avoir accumulé assez de recul pour porter un jugement péremptoire : Le terroir de Beaucastel est banal, disons décevant... En tout cas loin derrière celui d'autres confrères bien moins prestigieux. Par contre les propriétaires sont parmi les plus habiles et malins de l'appellation : Des techniciens hors pairs, à qui il ne manque qu'une terre bénie des dieux. Et croyez moi lorsqu'on a testé toutes les décennies, on est frappé par cette évidence. Au bout de 15 ans, on n'a plus forcément envie de rester dans l'eternelle prudence figée du "j'aime ou j'aime pas". Alors cela n'engage que moi bien sûr, mais toutes ces années de visites et de dégustations me permette de dresser ce constat.

A chaque fois on sent le manque de profondeur et de race, mais la magie de l'intelligence humaine parvient tout le temps à compenser au mieux ces lacunes. Cette famille était sacrément en avance sur son temps, car dès les années soixante, on sent qu'ils savent déjà rendre leur vin moderne et différent. Mais là où le bas blesse, c'est qu'en multipliant les dégustations et en comparant sans cesse les domaines entre eux, on s'aperçoit que Beaucastel n'est pas grand, mais juste bien maquillé !

Et ce style de vins ne m'amuse plus vraiment, ce qui explique certainement que j'ai pu l' identifier d'emblée à l'aveugle . Quiconque a goûté des Châteauneuf de Mont Redon ou de Clos l'oratoire des papes anciens, ainsi que Cailloux et autres Marcoux modernes comprend immédiatement ce que donne la technique associée au terroir. Sachant qu'à mon sens c'est ce dernier qui prime, j'ose affirmer que la critique n'est absolument pas objective avec ce domaine. Ok les 1989 ou 1990 sont bons, les cuvées "hommage" et VV frôlent parfois l'exceptionnel. Mais cela reste plus qu'épisodique et uniquement quand la nature se transcende... Donc dans 90% des cas , une majorité d'autres domaines est largement meilleure. Il est temps de tordre le cou à l'idée que Beaucastel est un terroir 3 étoiles...

Ce 1967 ne déroge pas à la règle : Nez de griotte et de tabac évoquant un Pinot avec une touche malheureuse de vieux fût. La bouche est dans le même registre de fruits rouges épicés, avec un alcool sec en finale.

A cette heure, je n'ai qu'une envie, celle de dire à Michel Dovaz (que j'admire) que c'est presque scandaleux d'avoir classé ce vin dans les mythes du siècle. Je suis d'ailleurs prêt à le recevoir pour lui montrer ce qu'est un grand Châteauneuf ancien ! Si les auteurs d'un certain guide vert veulent venir aussi, on pourra également causer grand terroir, mais à l'aveugle... 86/100

VOUGEOT 1er CRU 1949 Morin P&F

On retrouve la voie !!! Le nez d'une pureté inouïe de jus de cassis et de violette éclate comme une bombe sous les narines. Après aération, on reconnaît aussi la ronce et la myrtille. On entend 1990 ou 1985 ! Décidément, l'aveugle est un juge de paix impartial...

La bouche est une douceur acidulée de petits fruits rouges et d'épices, tandis que la finale saline à souhait s'en va et revient sur les minéraux puis l'aluminium. 97/100

CHÂTEAU LAFLEUR PETRUS 1955

Parfois les meilleurs Pomerols ressemblent à des grands Bourgognes. Pour celui-ci je plonge tête baissée dans le piège. J'ai l'impression de boire un superbe Pinot élevé comme un Bordelais. Du fruit, mais de la réserve et presque un côté strict. Certains vins de Ponsot sont dans cet esprit. Tout le monde le voit plus jeune, bien évidemment... Alors encore une fois, je le répète pour ceux qui n'auraient pas bien compris : 1955 a la classe !

Le nez de prune, de cassis et de menthe est ciselé et pur, comme on aime. La bouche est impériale, un poil austère, mais diabolique de jeunesse et de longueur. Les baies, le cèdre et le menthol imprègnent durablement nos papilles. A attendre ! 96+/100

CÔTE RÔTIE La Landonne 1983 Guigal

C'est le cru du trio le plus long à se faire. Ce 1983 sort tout juste de sa coquille, mais il donne un plaisir immense. Le nez animal et élégant me fait penser à un grand millésime de Calon Ségur. On reconnaît le civet, le pourpier, l'amande et la viande braisée. La bouche est chargée d'un lourd dépôt ; Une sorte de "vin nourriture". Cette Landonne est solaire, massive et très longue en bouche, mais j'avoue garder un petit penchant pour La Mouline, toujours plus romantique et bouquetée. 96/100

GEWURZTRAMINER Clos Des Capucins SGN 1983 Faller

Je ne suis pas un grand admirateur de Faller, car je trouve souvent que la finesse est caricaturale dans leurs vins. Il y a toujours une exception, n'est-ce pas ?

Le nez est un mammouth ! Le litchi, le miel, et le croûton grillé me font immédiatement penser à un clone du Clos Zisser 1959. La bouche offre un dosage en sucre tout simplement parfait ; On en boirait un litre ! C'est une vraie gourmandise de café, de spéculos, de toast, d'orange amère et de litchi. Le plus grand vin du domaine que je n'ai jamais bu... 97/100

CHÂTEAU YQUEM 1983

Il est dans une bonne phase ; Quelle magie ! Habituellement je n'aime pas spécialement Yquem tant qu'il n'a pas dépassé 30 ans, mais là, j'avoue rendre les armes devant un tel joyau. Le nez de financier chaud, de pêche caramélisée et de truffe blanche est un pur bonheur. En bouche on pourrait être blasé par ces parfums vus et revus de gâteau sec, d'amande, de fruits pochés et de sucre brun, mais la finale de thé à la menthe nous transporte au coeur de Marrakech, et ce voyage vaut tout l'or du monde ! 97+/100

Quel mois de janvier ! Il faudrait quand même en garder un peu sous la pédale, non ?