Effective altruism

 À propos d'un livre de William MacAskill (notes de lecture).

Quelques louanges pour commencer : c'est honnête, bien intentionné, rationnel. Les évaluations sont bien étayées, les arguments convaincants, et par exemple celui de la rationnalité du vote (p. 85) — je ne suis pas encore tout à fait convaincu, mais j'admets que mon propre raisonnement est démonté. Ça n'évite pas les questions qui relèvent d'un engagement politique (dont en pratique celle de la catastrophe écologique), et ça n'hésite pas à citer Piketty (p. 15).

Non, le problème est fondamental, a priori : les jugements de valeur ne se comparent pas, en principe. Pour comparer (p. 40), il faut quantifier, et la qualité est précisément ce qui échappe à toute quantification. MacAskill quantifie en monétarisant (ce qu'Oscar Wilde moquait en disant que les gens connaissent le prix de tout mais la valeur de rien), mais le problème est le même qu'on compte des tonnes d'équivalent CO2 ou des nombres de morts.

Comparer, et donc quantifier, est utile, dans certains contextes, en pratique, mais il faut comprendre qu'on a déjà fait un choix a-priori, et que ce choix entraîne des conséquences, engage une responsabilité : celle d'accepter le terrain de la lutte, le champ de bataille, et d'éliminer des modes d'action qui seraient d'un autre ordre (voir par exemple Ethnographies des mondes à venir, ou Manières d'être vivant, ou d'autres formes de sortie du capitalisme).