Voter est irrationnel

Cette affirmation est triviale.

Voter est un acte qui n'a pas de conséquence proportionnée à l'énergie mise en oeuvre.

Que je vote d'une façon ou d'une autre n'aura qu'un résultat négligeable. La probabilité que ma voix soit la goutte qui met le feu aux poudres (ou l'étincelle qui etc.) est infinitésimale.

L'énergie mise en œuvre est peut-être faible (en temps, en usure des semelles), mais non nulle.

Triviale pour autant qu'elle soit, cette affirmation rencontre deux arguments que je dois démonter, tout aussi trivialement [un troisième argument, recevable celui-là]. 

1. Si tout le monde fait comme ça, on cède le pouvoir de décision à d'autres.

À d'autres, collectivement, oui, mais individuellement non. Cet argument confond la fourmi et la fourmilière. La fourmilière a déjà ce pouvoir, même si les fourmis ne savent pas comment elle l'exprime.

Les deux événements : je vote, et l'élection produit un résultat, sont des événements (quasi) indépendants au sens des probabilités. Cet argument est donc irrationnel.

2. Tu prétends choisir le résultat par ta seule décision : tu es autoritaire (et anti-démocratique).

Relisez mon argument : je ne prétends rien de tel. Cette réponse évite simplement de considérer ce que je dis. En fait, elle contient déjà une escalade émotionnelle.

La discussion s'arrête là. C'est en fait un résultat du concept de vote : il rend la discussion impossible en forçant la décision prématurément, et de façon synchrone pour un grand nombre de gens.

Irrationnel, donc, mais pas ipso-facto interdit. Le suffrage universel est ici comparable à la communion dans la religion catholique : qu'on croie ou non ingérer le corps du Christ, communier est un acte de construction de la communauté des fidèles, un acte participatif. Au fond, cet abandon de la raison prend tout son sens.

Mais justement, dans le contexte du mensonge quant à l'aspect démocratique du vote, je n'ai pas envie de contribuer à la construction du système.

English keywords: democracy, elections, reason