Information ouverte

L'une des traditions importantes de la conceptualisation de l'information est celle de Shannon, et de sa théorie de la notion de quantité de l'information.

Cette tradition s'inscrit dans une métaphore particulière : celle de la transmission d'un message. Elle pose un émetteur, un canal et un récepteur.

La mesure de l'information qu'elle propose est une mesure de la « qualité » (mesure de qualité : oxymore !) du canal : il s'agit de la mesure d'une dégradation du signal.

Il y a là au moins deux limitations fondamentales :

  1. cette mesure suppose une information finie a priori, qui sert de référence ;
  2. elle est absolue, c'est-à-dire qu'elle ne tient pas compte de la spécifité du récepteur.

Ces deux limitations sont caractéristiques de la pensée moderne.

Au contraire, la pensée postmoderne s'intéresse à une information ouverte, c'est-à-dire à une information qu'on modifie ou qu'on produit en la manipulant. Une information qui englobe la méta-information, l'information qui la concerne elle-même, et en particulier des éléments de sa qualité : son audience, son degré de propagation, sa crédibilité.

Le paradigme d'une telle information est la langue, telle qu'elle a été étudiée au XXe siècle.

Mais on peut tout aussi bien penser à l'art, et en particulier à ce qu'on appelle l'art moderne (dans une acceptation de la modernité toute différente de celle explicitée plus haut), et de sa préoccupation réflexive lancinante (Malevitch, Magritte, Warhol, Cage...) : ceci est-il de l'art ?

On le voit, la remise en question de la première limitation entraîne celle de la seconde : dans un contexte où l'information se modifie à mesure qu'on la manipule, on ne peut plus faire abstraction de l'observateur, ni de sa perception. L'information ne se propage donc plus dans un seul sens, mais évolue nécessairement, comme guidée par un retour en boucle.