05 La transition

Qu'est-il en fait arrivé à Joe au moment où il a été heurté par la voiture ? Sa vie terrestre se termina mais il n'en eut pas conscience. Pourquoi n'a-t-il pas réalisé que l'accident était fatal? Pourquoi n'a-t-il pas compris qu'il n'avait plus de corps physique?

Si Joe avait, avant l'accident, réfléchi à sa propre mort, il aurait, du fait de son éducation religieuse, conclu à l'impossibilité d'aller en enfer. Bon, il n'alla pas en enfer. Il n'alla pas non plus au paradis suite à l'accident. Il alla chez lui, là où il voulait aller en quittant le bar. Il était un tenancier frustre, aigri, colérique, nommé Joe, au moment où la voiture le heurta. Il était le même Joe quand il a quitté la scène de l'accident. Des transformations rapides se sont opérées dans son corps, en passant d'un état d'être à un autre, au moment de sa transition – mais il n'en avait pas conscience à ce moment-là.

Quelles transformations ? Et pourquoi n'en avait-il pas conscience?

Au moment où la voiture l'a heurté, il était valide, fort, et en pleine santé. La possibilité de la fin de sa vie terrestre ne l'effleurait même pas. Dans la transition, vous passez un seuil et vous arrivez de 'l'autre côté' avec la même conscience que celle d'avant ce seuil. Continuez à lire et vous allez comprendre ; car vous allez rencontrer ceux qui ont franchi le seuil en sachant ce qui arrivait, et ceux qui l'ont franchi et ne savaient pas – tout comme Joe.

Alors Joe prit un autre corps – un corps de texture plus fine – instantanément, et il le reconnu comme étant le sien, puisque c'était le double du corps physique qu'il venait de quitter. La texture plus fine de ce corps causa néanmoins à Joe quelques difficultés : personne ne le reconnut chez lui. Ils firent comme s'il n'était pas là, et vraiment, pour eux, il n'était pas là. Ils étaient incapables de voir le nouveau corps qu'était Joe.

La plupart des gens ne peuvent pas voir les Enseignants Impérator qui viennent depuis l'autre côté, et parlent avec le groupe AUM; la faculté de voir au-delà des cinq sens est plus développée chez certains, et pour eux les Enseignants sont visibles. La famille de Joe n'avait pas cette faculté, et peu importe ce que Joe disait ou faisait, ils étaient incapables de savoir ou de reconnaître sa présence. C'est cette frustration, du fait de son incapacité à contacter sa famille et ses amis, qui fit qu'il cessa d'y aller et passa son temps avec ceux de l'autre côté qui 'avaient le même problème que lui'.

Mais la conscience de Joe ne contenait aucune pensée de sa propre mort : parce que, pour les gens, la transition n'est en rien un processus qui donne lieu à une expérience. Ils se retrouvent tout simplement de l'autre côté. Certains sont conscients de ce qui s'est passé, selon les circonstances de la transition et leur propre préparation. D'autres n'en sont absolument pas conscients, de la même façon que le matin au réveil, ils ne sont pas conscients des heures passées à dormir. Et ceci est particulièrement vrai quand la transition est dramatiquement soudaine, comme celle de Joe.

Vous avez franchi le seuil mais le franchissement ne marque pas votre conscience. Une minute vous êtes dans votre corps physique et dans la continuité de ce même moment vous êtes de l'autre côté, dans votre autre corps, mais sans discontinuité de conscience. En dépit de la soudaineté tragique des transitions par accident, un manteau d'oubli – par décret d'une loi naturelle parfaite – recouvre l'incident lui-même. Donc Joe était fort, et en bonne santé, et cynique, et belliqueux en quittant le bar quand le car l'a renversé. Et il était toujours le même Joe en rentrant chez lui quelques instants après.

Mais il n'y a pas une seule règle pour tous, applicable à tous les cas de transition. Chaque cas est unique, dicté par le niveau de conscience de la personne et sa préparation à l'évènement. Ainsi, certains transitionnent avec la même soudaineté que Joe, et comme lui, s'éloignent de la scène, mais au contraire de lui, ils sont absolument conscients de ce qui leur est arrivé. Les membres du groupe AUM ont l'exemple d'un jeune soldat mort au Vietnam; le 4 Mars 1966, il raconta à travers Mme Gause sa transition au milieu des tirs. Ce contact avec le groupe AUM était l'occasion de son premier retour sur le plan terrestre, et il parlait nerveusement, comme s'il n'était pas sûr de lui dans son nouveau rôle.

'C'est une très étrange sensation,' dit-il, 'de se tenir à côté de ce qui est étendu au sol et que les gens appelle 'vous'. Vous voyez votre corps étendu là, et ça se répète tout autour. Mais j'avais été formé par mes père et mère, et je savais que la première chose à faire était de partir, quitter la scène aussi vite que possible. Alors je me suis mis en route.'

Bien que le jeune soldat ne le précise pas, on peut déduire de la façon dont il en parle, qu'il savait qu'il venait de 'mourir'. Il voit le corps qu'il a laissé, mais il s'en détourne immédiatement et s'en va, sans plus y penser.

Pourquoi ce jeune homme était-il au fait avec ce qui lui arrivait quand d'autres n'en ont pas la moindre idée? La réponse est là : 'j'avais été formé par mes père et mère'. Il expliqua au groupe que ses deux parents transitionnèrent quand il avait dix ans et qu'il fut mis à l'orphelinat.

Les huit années qui suivirent ne furent pas traumatisantes mais il ne fut jamais vraiment heureux, du fait du saisissant contraste entre la vie avec ses parents, une vie de famille pleine d'amour, et sa condition actuelle. Durant toutes ces années, il passa des heures à se remémorer avec chaleur les enseignements de ses parents. A dix-huit ans, il fit son service militaire et fut envoyé dans ce malheureux conflit du Vietnam, et devint une victime de cette guerre.

La plupart des gens, bien sûr, ne meurent pas de façon violente, comme Joe et ce jeune soldat. La plupart des individus transitionnent suite à une maladie.

La nature, le Principe Créateur, Dieu, l'Amour Infini – appelez-le comme vous voulez – a doté le corps physique d'un certain principe qui retient l'Âme, l'individu, à l'intérieur. C'est un puissant attrait magnétique qui vous retient à votre corps. C'est bien, car sans cette puissance magnétique du corps physique, celui-ci serait souvent rejeté, bien avant que la personne l'habitant n'ait eu le temps d'apprendre ce qu'elle était venue apprendre dans le plan terrestre, ou n'ait eu le temps de donner ce qu'elle devait donner.

'Quand vient le temps de quitter le plan terrestre, le corps se prépare à laisser partir l'individu. Mais dans les cas de corps très puissants ou d'attachements très forts aux choses matérielles, l'attrait magnétique est trop fort et le processus de lâcher-prise est difficile. Un combat s'ensuit, et la tension cause une distorsion des cellules elles-mêmes, d'où découle un manque d'aise, ou mal-aise. Mais finalement, après un certain temps, la détente s'installe et l'individu est libre. Ainsi, il y en a qui éprouvent de grandes souffrances avant de partir. Ils se peut qu'ils aient choisi de souffrir ainsi', remarqua un des Enseignants, 'et ils ne choisissent pas tant la condition du corps que les heures de souffrance en tant que processus de nettoyage, pour soulager et évacuer les négativités indésirables, ainsi ils ont une liberté entière et sans entraves quand ils quittent le corps. Ce n'est pourtant pas nécessaire mais c'est ce qu'ils ont choisi.'

Un exemple intéressant pour illustrer ce propos est le cas de Gyril – il endurait les douleurs de la maladie et avait aussi une solide pratique spirituelle. 'Quand vint mon heure', dit-il aux membres d'AUM, 'après une longue et sérieuse maladie, et grâce à ma pratique spirituelle, je ne fus pas mécontent de partir. Je m'étais longtemps débattu et je me retrouvais libre d'un coup. C'est une étrange sensation. Je me souviens d'avoir regardé mon corps étendu sur le lit d'hôpital et de l'avoir trouvé totalement sans intérêt, émacié ; et au contraire, j'étais empli de vigueur et de vie. Mais je ne savais où aller, alors je suis resté là. Un de mes amis, qui avait transitionné avant moi, s'approcha. Il me parla. Je le saluai, mais je regardais encore ma famille et je me demandais de quels vêtements ils allaient revêtir mon corps et ce qui allait se passer après. Mon ami eu l'intelligence de lire mes pensées et se tint coi. Il me semblait que j'étais encore dans la chambre d'hôpital mais il y avait eu des changements dans ma conscience, mon corps et mon environnement. Après un moment, il me demanda si j'étais prêt. Et c'est seulement alors que j'en fus capable. Il me dit doucement 'allons-y' et alors commença pour moi ce fascinant voyage.'

Vous remarquerez que, contrairement à Joe, Gyril était bien conscient de quitter son corps physique ; sans doute, pour partie, en raison du fait que sa transition était attendue ; mais surtout grâce à sa vie de pratique spirituelle qui l'avait préparé à comprendre le processus et son importance.

La lutte, la maladie, et autres manifestations de lutte, n'ont pas toujours lieu. Il y a ceux qui ont accompli leur mission, et ils le savent. Les cellules de leur corps, à leur niveau de conscience, le savent. Et ainsi, il n'y a ni lutte, ni maladie ; l'individu sort sereinement de son corps et s'en va.

Une période d'inconscience avant de quitter le plan terrestre n'est pas non plus nécessaire. Ce n'est même pas désirable. Certains individus ne luttent pas, ni ne sont donc malades, ni ne sombrent dans l'inconscience. Il devrait en être ainsi pour tous. Ils approchent de leur transition, passent le seuil, et complètent le processus de transition sans aucun obstacle. Il y vont avec la même pleine conscience que s'ils passaient d'une pièce à l'autre et cette réalisation est à la portée de tous.

Vous avez appris qu'il y a des différences dans ce que vivent les individus immédiatement après leur affranchissement de la terre. Il y a, en fait, un vaste éventail de différences, qui mérite d'être souligné.

Il y a des billions et des billions de flocons de neige, chacun est unique en terme de son schéma personnel, et pourtant ils sont tous à la base identiques. De même, de l'autre côté du voile que nous appelons 'transition', il y a autant de variations qu'il y a d'individus et de degrés d'évolution et de compréhension. Il est impossible de donner une description de toutes les conditions avec leurs variantes et degrés multiples. C'est la raison pour laquelle il faut se garder de généraliser : 'ceci est donc ce à quoi je peux m'attendre'. Ce que vous trouverez peut –ou pas– être décrit ou même approcher dans ces pages. 'Il y a beaucoup de demeures dans la maison de mon père'. Votre expérience est déterminée par ce que vous faites –ou pas– maintenant pour vous construire une solide fondation spirituelle. Le présent conditionne l'avenir.

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