Analyse des projets d'investissement

L'analyse des projets d'investissement peut paraître complexe et difficile à faire : les coûts d'investissements sont effectués aujourd'hui alors que les profits sont réalisés dans le futur. L'analyse des projets est difficile surtout si on n'a pas de méthode adéquate ou qu'on n'a pas de méthode du tout. Mais, si on utilise une bonne méthode, il sera possible d'analyser plus rapidement les projets les plus complexes et de générer des économies substantielles.


Les personnes qui n'ont pas de méthode ou pas de bonnes méthodes pour analyser et évaluer les projets d'investissement sont portés à produire des tableaux très détaillés dont les informations sont parfois très valables mais mal utilisées. Le conseil d'administration dispose donc de beaucoup d'informations sur les projets d'investissement mais pas nécessairement la bonne information pour prendre la bonne décision.


Comment déterminer la rentabilité d'un projet ? Comment choisir entre deux ou trois projets ? Quel est le projet le plus rentable ? Ce sont les questions qu'un chef d'entreprise peut être amené à se poser à un moment donné durant la vie d'une entreprise. Ce sont les questions auxquelles nous aimerions répondre dans cet article. Mais avant, il serait bon de se demander pourquoi l'analyse des projets d'investissement est si importante pour un chef d'entreprise puis d'analyser les principales méthodes d'analyse des projets d'investissement.


Raisons d'analyser les projets d'investissement

Les raisons d'analyser les projets d'investissement sont :

  1. Le rendement d'un investissement est la mesure du succès d'une entreprise. Une entreprise dont le retour sur investissement est faible ne conditionnera pas les prêteurs de fonds à investir dans l'entreprise.

  2. Une fois décidé, l'investissement ne peut être arrêté à moins d'encourir un coût.

  3. Une mauvaise décision d'investissement est supportée durant toute la vie de l'investissement.


Il est donc nécessaire d'analyser ses investissements et de les analyser avec une méthode adéquate.

Nous vous proposons donc de faire une revue sommaire des différentes méthodes d'analyse des investissements et de vous décrire de façon détaillée la méthode que nous recommandons qui est la méthode d'actualisation du flux monétaire.


Méthodes d'analyse des projets d'investissement

Il y a plusieurs méthodes d'analyse des investissements. Les plus courantes sont les suivantes :

  1. La période de recouvrement (Pay back);

  2. Le retour sur investissement;

  3. La méthode d'actualisation du flux monétaire (entrées et sorties d'argent).


Chacune de ces méthodes a des avantages et des inconvénients. Cependant, la meilleure méthode sera celle qui sera en mesure de répondre aux trois critères suivants :

  1. la méthode doit être une mesure de la valeur intrinsèque d'un projet d'investissement (bénéfices supérieurs au coût d'investissement);

  2. la méthode doit pouvoir classer par ordre de priorité les projets d'investissements;

  3. la méthode doit permettre de choisir le projet le plus rentable.


La période de recouvrement

Cette méthode détermine la période de temps requise pour récupérer la mise de fonds initiale. Mais, est-ce qu'un chef d'entreprise investit pour récupérer sa mise de fonds ? Ce ne peut être la seule raison d'un investissement.


Normalement, le chef d'entreprise attend un retour sur investissement supérieur à sa mise de fonds originale.


La méthode du recouvrement du capital, bien qu'elle puisse être un guide utile pour juger de la protection du capital investi, a le désavantage de ne pas considérer les bénéfices au-delà de la période de recouvrement et ne permet pas de faire de relation avec le coût du capital.


Finalement, cette méthode ne satisfait pas aux trois critères énoncés.


Le retour sur investissement

La méthode du retour sur investissement mesure le taux de rendement d'un investissement en divisant les bénéfices annuels moyens par l'investissement initial.


Cette méthode, quoique étant un guide utile pour juger de la rentabilité d'un projet d'investissement, présente certains inconvénients tels que :

  1. la méthode ne tient pas compte du profil des bénéfices dans le temps;

  2. le taux de rendement n'est pas comparable au coût du capital étant donné que la base est différente;

  3. les taux de rendement pour des projets de durées économiques différentes ne sont pas directement comparables.


Finalement, cette méthode ne satisfait pas aux trois critères énoncés plus haut.


La méthode d'actualisation du flux monétaire

La méthode d'actualisation du flux monétaire est la méthode qui ramène toutes les données des projets d'investissement sur une base comparable et qui tient compte de la valeur de l'argent dans le temps. Pour comprendre le concept de la valeur de l'argent dans le temps, prenons l'exemple suivant : un montant de 1 000 $ aujourd'hui placé à 10 % par année aura une valeur de 2 144 $ dans 8 ans. Inversement, ce montant de 2 144 $ dans 8 ans a donc une valeur aujourd'hui de 1 000 $ s'il est actualisé au taux de 10 %. En d'autres mots, un dollar aujourd'hui vaut deux fois plus dans 8 ans s'il est placé à 10 % et inversement, un dollar dans 8 ans vaut deux fois moins aujourd'hui si on l'actualise au taux de 10 %.


Cette méthode permet de classer les projets par ordre de priorité et de choisir le projet le plus rentable. Elle permet de ramener toutes les données sur une base équivalente. Finalement, elle facilite l'analyse des projets d'investissement. Par contre, il importe, avant tout, que les coûts et les bénéfices soient bien quantifiés.


Cette méthode permet de répondre aux questions suivantes :

  1. Quel est le projet qui a la valeur actuelle nette la plus élevée ?

  2. Quel est le taux de rendement de chaque projet ?

  3. Quel est le montant maximum d'investissement pour chaque projet ?

  4. Quel est le seuil de rentabilité de chaque projet ?

Pour bien comprendre cette méthode et être en mesure de l'utiliser adéquatement, il est important de connaître certaines notions fondamentales telles que : la valeur actuelle, la valeur future, la valeur annuelle, le taux d'actualisation, le taux d'intérêt, le taux de risque, la durée de l'investissement, les probabilités des prévisions et la notion d'impôt pour les entreprises concernées.

Chaque composante du modèle devient une variable qui a une incidence directe sur la rentabilité d'un projet. Toute modification des données d'une composante peut contribuer à améliorer ou à détériorer la rentabilité d'un projet.


Notions sur la méthode d'actualisation

Les notions de capitalisation et d'actualisation

Pour bien comprendre la notion d'actualisation, il faut d'abord comprendre la notion de capitalisation car l'actualisation est l'inverse de la capitalisation. Pour capitaliser un dollar d'aujourd'hui (A) en un dollar futur (F), on a besoin d'un taux d'intérêt (i) et un nombre d'années (n). Pour capitaliser, on utilise la formule mathématique suivante : F = A (1+i)n. Pour actualiser, la formule est inversée et devient : A = F (1 / (1+i))n. S'il y a plusieurs valeurs futures à actualiser, on utilise cette formule à chaque année et on additionne toutes les valeurs. La formule d'actualisation permet de construire les tables d'actualisation qui permettent de convertir les valeurs futures en valeurs actuelles. Par exemple, un montant de 5 400 $ multiplié par le facteur 0,3855 (taux 10 % et année 10) donne une valeur actuelle de 2 082 $.

La base d'analyse des projets d'investissement

Pour analyser un projet d'investissement et le comparer avec d'autres projets d'investissement, il est important de ramener toutes les valeurs sur une même base, sinon il est impossible de prendre une décision. On peut choisir de ramener toutes les données sur la base annuelle ou sur la base actuelle. Les deux méthodes sont équivalentes. Ou on peut faire les deux pour fins de compréhension. Cela dépend des données et du but poursuivi.


La valeur actuelle nette (VAN)

La valeur actuelle nette est la somme des flux monétaires (entrées et sorties d'argent) futurs actualisés moins le montant de l'investissement initial. Tous les projets dont la valeur actuelle nette est positive sont acceptables. Le projet qui a la valeur nette la plus élevée est le projet choisi (indépendamment des facteurs intangibles).


Le taux d'actualisation (taux de rendement minimum)

Le taux d'actualisation permet de passer d'une valeur future à une valeur actuelle ou à une valeur annuelle. Ce taux est composé du coût du capital (taux d'intérêt du financement) du projet et du taux de risque relié au projet. On l'appelle aussi le taux de rendement minimum. Ce taux doit tenir compte des conditions particulières d'une entreprise et doit être révisé régulièrement.


Le taux d'intérêt

Le taux d'intérêt est la compensation qui est demandée par une institution financière lorsqu'une entreprise désire emprunter de l'argent pour financer un projet d'investissement. Quant au taux d'inflation, il est déjà inclus dans le taux d'intérêt.


Le taux de risque

Le taux de risque est le pourcentage que représente un projet en particulier. Plus le risque d'un projet est grand, par exemple que les prévisions ne se réalisent pas tel que prévu, plus le taux de risque est élevé. Le taux de risque s'ajoute au taux d'intérêt pour établir le taux d'actualisation.


La durée de l'investissement

Les revenus, les dépenses d'opération et les profits d'un projet d'investissement peuvent s'étendre sur plusieurs années. Le nombre d'années de chaque projet doit être spécifié car il a une grande importance sur la valeur actuelle de ces données. L'effet de la durée est particulièrement important lorsque le projet a une durée de dix ans et moins, mais peu important lorsque cette durée est plus de quinze ans (à cause de la valeur de l'argent dans le temps). Il faut donc apporter une attention particulière aux projets de courte durée.


La probabilité des bénéfices futurs

Les prévisions des bénéfices futurs sont difficiles à estimer et la probabilité qu'elles se réalisent peuvent varier d'un projet à l'autre. Pour pallier à cette lacune, on peut utiliser différents taux de probabilité des bénéfices futurs et ainsi réduire les risques d'investissement.


L'impôt

L'impôt a un effet différent sur une dépense d'investissement et sur une dépense d'exploitation. Ceci provient du fait qu'un investissement est amorti sur plusieurs années et qu'une fois actualisé, le coût net (après impôt) d'une dépense d'investissement est plus élevé que le coût net d'une dépense d'exploitation. De plus, cet écart varie selon les taux d'amortissement utilisés.


Exemple

Afin d'illustrer la méthode d'actualisation du flux monétaire, nous présentons ci-dessous un exemple d'analyse de trois projets en se basant sur le modèle de la méthode d'actualisation des flux monétaires.


Dans cet exemple, l'investissement le plus rentable est celui qui présente la valeur actuelle nette la plus élevée ou le taux de rendement le plus élevé. On pourra aussi analyser, pour fins d'illustration, des taux de risques différents pour chaque projet, le seuil de rentabilité de chacun des projets et un taux de croissance de 5 % des profits annuels des projets.


Les trois projets A, B et C coûtent, par unité, trois montants différents soit 9 800 $, 37 400 $ et 16 800 $. Le projet A a une durée économique de 5 ans, le projet B une durée de 10 ans et le projet C une durée de 7 ans. À la fin de leur durée économique, le projet A n'a aucune valeur résiduelle, le projet B a une valeur résiduelle de 10 000 $ et le projet C une valeur résiduelle de 3 000 $. De plus, le projet A génère des revenus annuels de 5 800 $, des dépenses d'opération annuelles de 1 800 $ et des profits annuels de 4 000 $ ; le projet B génère des revenus annuels de 7 600 $, des dépenses d'opération annuels de 2 200 $ et des profits annuels de 5 400 $ ; le projet C génère des revenus annuels de 6 700 $, des dépenses annuelles de 2 000 $ et des profits annuels de 4 700 $. Le projet A contient 40 unités, le projet B 30 unités et le projet C 150 unités. Le taux d'actualisation est de 10 % dont 5 % pour le taux d'intérêt et 5 % pour le taux de risque.

En ramenant toutes les données à la valeur actuelle nette et en utilisant une calculatrice financière ou un ordinateur ou une table des facteurs d'actualisation, on obtient les résultats présentés dans les tableaux ci-dessous. À la lumière des résultats obtenus, le projet C représente le meilleur choix i.e. le projet génère une valeur nette totale positive actuelle de 681 314 $ ; le projet A arrive en deuxième position avec une valeur nette totale positive actuelle de 214 526 $. Quant au projet B, il est rejeté car il génère une valeur nette totale négative actuelle de 242 243 $.

Note : La première colonne indique l'année. Le premier taux est le taux d'actualisation et sert à produire les facteurs d'actualisation présentés dans la deuxième colonne (0,9091...0,3855). Le deuxième taux est le taux de croissance qui sert à augmenter les profits par année présentés dans la troisième colonne. Dans la quatrième colonne, on retrouve les valeurs actuelles incluant le coût d'investissement exprimé entre parenthèse et la somme des valeurs actuelles (coûts et profits) est présentée à la ligne Valeur actuelle par unité.


En utilisant des taux de risque différents dans les taux d'actualisation pour chacun des projets, un taux d'actualisation de 10 % (5% d'intérêt +5% de risque) pour le projet A, un taux de 8 % (5% + 3%) pour le projet B et un taux de 12 % (5% + 7%) pour le projet C. À la lumière de ces différents taux, on obtient les résultats présentés ci-dessous. Le projet C demeure le projet le plus rentable avec une valeur nette actuelle positive de 493 891 $.

En tenant compte d'un taux de croissance des profits de 5 % pour chacun des projets, on obtient les résultats suivants.

Lorsque la somme des valeurs positives et négatives est à zéro ou près de zéro, le taux indiqué est le taux de rendement du projet. Si on examine le taux de rendement de chaque projet, en considérant que le taux de croissance des profits est de 0 %, on constate que le projet A a un taux de rendement de 29,7 %, le projet B a un taux de rendement de 3,8 % et le projet C a un taux de rendement de 18,4 %. Vu sous cet angle, le projet A serait le plus rentable. Le projet A est plus rentable par unité mais lorsque l'on considère le nombre d'unités, qui est supérieur dans le projet C, ce dernier est plus avantageux.

En tenant compte des profits prévus pour chacun des projets et d'un taux de rendement de 10 %, le coût d'investissement du projet A ne devrait pas dépasser 15 100 $, celui du projet B ne devrait pas être supérieur à 29 300 $ et le montant maximum de celui du projet C devrait être de 21 300 $.

Si on calcule le seuil de rentabilité de chacun des projets i.e. le profit minimum annuel pour générer les taux de rendement indiqués pour chacun des projets lorsque la somme des valeurs positives et négatives est à zéro ou près de zéro, on obtient les résultats suivants.

Le même modèle peut servir aussi à analyser différents scénarios d'un même projet. Analysons, par exemple, l'effet sur la valeur actuelle nette d'une augmentation du coût d'investissement et d'une augmentation des profits et du nombre d'unités, on obtient les résultats présentés dans le tableau ci-dessous.

Étant donné que les prévisions des bénéfices futurs sont presque toujours incertaines, il serait utile et prudent d'ajouter un facteur de probabilité concernant les données futures. Le modèle ci-dessous illustre les conséquences de ce facteur.

En somme, le but d'une analyse de différents projets et de différents scénarios est d'avoir un meilleur éclairage sur la rentabilité des projets d'investissement et de prendre la meilleure décision.


Applications diverses

La méthode d'actualisation du flux monétaire permet de résoudre une grande variété de problèmes. En d'autres mots, tous les problèmes qui présentent des coûts et des bénéfices sur un certain nombre d'années peuvent être résolus par la méthode d'actualisation du flux monétaire.


On trouvera ci-dessous différents types de problèmes pouvant être résolus à l'aide de la méthode d'actualisation du flux monétaire.

  • Évaluer le rendement d'un investissement.

  • Déterminer le montant maximum d'un investissement.

  • Déterminer le montant du capital additionnel qu'il serait nécessaire d'investir.

  • Choisir le projet le plus rentable.

  • Choisir entre acheter ou louer un équipement ou un immeuble.

  • Choisir entre fabriquer ou acheter.

  • Déterminer la durée économique maximum d'un équipement.

  • Déterminer quand remplacer un équipement.

  • Évaluer l'effet de l'augmentation des coûts d'entretien.

  • Déterminer le coût additionnel de l'utilisation d'un équipement.

  • Évaluer un programme d'expansion.

  • Évaluer un programme de réduction de coût.

  • Évaluer un programme de publicité, un programme de mise en marché, un programme de recherche.

  • Choisir entre plusieurs programmes d'assurances.

  • Déterminer la meilleure source de financement.

  • Déterminer la meilleure période de remboursement d'un emprunt.

  • Analyser le seuil de rentabilité d'un investissement.

  • Déterminer la valeur d'une entreprise.


Articles connexes :