Versailles, le "roi soleil" et la cour

Versailles, le « Roi-Soleil » et la société de cour

En 1682, LouisXIV se fixe au château de Versailles, dont il a dirigé  le chantier avec les architectes LouisLe Vau et Jules Hardouin-Mansart, le jardinier André Le Nôtre et le peintre Charles Le Brun.  Le roi y met en scène l’absolutisme dans le cadre de la société  de cour*. Il a choisi ce lieu à l’écart de Paris pour y accueillir la cour – environ 10 000 personnes, nobles, serviteurs et conseillers du roi. L’agencement du palais et les règles définissant la vie de cour,  ou étiquette*, placent le roi au centre de tout.

En quoi la cour et le château de >Versailles sont-ils des instruments de l'absolutisme ? 

Le règne du Roi soleil mis en sème

Engagé par Louis XIV pour écrire l’histoire de son règne, André Félibien présente les travaux à Versailles.

« Entre toutes les maisons royales […], Sa Majesté commença en l’année 1661 à y faire travailler pour la rendre plus grande et plus logeable qu’elle n’était. […] elle est sans doute un des plus beaux lieux qui soit au monde […]. Comme celle-ci est […] tous les jours visitée de tout ce qu’il y a de personnes en France; et que les étrangers et ceux qui ne peuvent pas avoir le plaisir de la voir, sont bien aises d’en ouïr raconter les merveilles ; il a été trouvé à propos, qu’en attendant que toutes les choses [...] aux-quelles on travaille sans cesse dans cette maison royale, soient entièrement achevées et donnent lieu d’en faire une description ample et exacte, l’on en commençât une […]. Elle pourra même servir à beaucoup de personnes qui vont la visi-ter ; car […] ils auront encore moins de peine à s’en souvenir, et à repasser agréablement dans leur esprit ce qu’ils auront vu pour en faire part à leurs amis. […] Il est bon de remarquer d’abord que, comme le soleil est la devise du roi et que les poètes confondent le Soleil et Apollon, il n’y a rien dans cette superbe maison qui n’ait rap-port à cette divinité […]. »

André Félibien, Description sommaire  du château de Versailles, 1674. 

1. Avant de se fixer à Versailles, le roi et sa cour étaient itinérants

Une prison dorée pour les courtisans

Courtisan sous Louis XIV, Saint-Simon, une fois retiré sur ses terres, critique le système de cour.« Les fêtes fréquentes, les promenades particulières à Versailles, les voyages, furent des moyens que le roi saisit pour […] tenir chacun assidu et attentif à lui plaire. […] Non seulement il était sensible à la présence continuelle de ce qu’il y avait de distingué, mais il l’était aussi aux étages inférieurs. Il regardait à droite et à gauche à son lever, à son coucher, à ses repas, en passant dans les appartements, dans les jardins de Versailles, où seulement les courtisans avaient la liberté de le suivre ; il voyait et remarquait tout le monde ; aucun ne lui échappait […]. C’était un démérite aux uns […] de ne pas faire de la cour son séjour ordinaire, aux autres d’y venir rarement, et une disgrâce sûre pour qui n’y venait jamais. » 

Duc de Saint-Simon, Mémoires, 1739-1749.

Saint-Simon juge la cour de Louis XIV

Les fêtes fréquentes, les promenades particulières à Versailles, les voyages furent des moyens que le roi saisit pour distinguer et pour mortifier en nommant les personnes qui à chaque fois en devaient être, et pour tenir chacun assidu et attentif à lui plaire […].

Les espérances que ces petites préférences et ces distinctions faisaient naître, et la considération qui s’en tirait, personne ne fut plus ingénieux que lui à inventer sans cesse ces sortes de choses […]. Il regardait à droite et à gauche à son lever, à son coucher, à ses repas, en passant dans les appartements, dans ses jardins de Versailles, où seulement les courtisans avaient la liberté de le suivre ; il voyait et remarquait tout le monde, aucun ne lui échappait, jusqu’à ceux qui n’espéraient pas même être vus. Il distinguait très bien en lui-même les absences de ceux qui étaient toujours à la cour, celles des passagers qui y venaient plus ou moins souvent ; les causes générales ou particulières de ces absences, il les combinait, et ne perdait pas la plus légère occasion d’agir à leur égard en conséquence.

C’était un démérite aux uns, et à tout ce qu’il y avait de distingué, de ne faire pas de la cour son séjour ordinaire, aux autres d’y venir rarement, et une disgrâce sûre pour qui n’y venait jamais, ou comme jamais.

Saint-Simon, Mémoires, chapitre XIX, 1829.

Madame de Sévigné raconte son séjour à Versailles

Je reviens de Versailles. J’ai vu les beaux appartements ; j’en suis charmée. Si j’avais lu cela dans quelque roman, je me ferais un château en Espagne1 d’en voir la vérité. Je l’ai vue et maniée ; c’est un enchantement, c’est une véritable liberté, ce n’est point une illusion comme je le pensais. Tout est grand, tout est magnifique, et la musique et la danse sont dans leur perfection… Mais ce qui plaît souverainement, c’est de vivre quatre heures entières avec le souverain, être dans ses plaisirs et lui dans les nôtres ; c’est assez pour contenter tout un royaume qui aime passionnément à voir son maître.

Mme de Sévigné, Lettre au comte de Guitaut, 1683.

1. Expression qui désigne quelque chose d’impossible, d’irréalisable.