1887 : Le code de l'indigénat algérien est généralisé à toutes les colonies

Le code de l’indigénat algérien, généralisé aux colonies françaises

Après la répression de la révolte kabyle de 1871, les autorités coloniales maintiennent l’ordre par des lois visant spécifiquement les indigènes d’Algérie. Elles les généralisent, avec des adaptations, dans d’autres territoires. L’empire colonial dispose ainsi d’un système juridique distinct  de la métropole. Les sujets soumis au régime de l’indigénat conservent  les droits liés à leur statut personnel, comme la polygamie, mais sont privés de leurs libertés publiques fondamentales : le droit de vote, de réunion  et de circulation. 

En quoi le régime de l’indigénat est-il discriminatoire  et  anti-démocratique ?

Extraits du code de l’indigénat algérien

Sont considérées comme infractions spéciales à l’indigénat et, comme telles, passibles de peines édictées par les articles 465 et 466 du code pénal, les faits et actes ci-après déterminés, savoir : […]

5. Négligence à se présenter devant l’administrateur ou le maire de la commune après convocation remise par un agent de l’autorité administrative.

6. Acte irrespectueux ou propos offensants vis-à-vis d’un représentant ou agent de l’autorité, même en dehors de ses fonctions, et alors même que cet acte ou ce propos ne réunirait pas les caractères voulus pour constituer un délit […].

7. Propos tenus en public dans le but d’affaiblir le respect dû à l’autorité. […]

13. Négligence habituelle dans le payement des impôts et dans l’exécution des prestations en nature, manque d’obtempérer aux convocations des receveurs lorsqu’ils se rendent sur les marchés pour percevoir les contributions. […]

17. Départ de la commune sans avoir, au préalable, acquitté les impôts et sans être muni d’un permis de voyage.

Arrêté général sur les infractions de l’indigénat,

Gouvernement général de l’Algérie, 9 février 1875.

Pour le code de l’indigénat en Cochinchine

Dans un pays où il n’existe pas de citoyens dans la population indigène, mais seulement des sujets, où la langue et les mœurs sont absolument différents des nôtres, il est essentiel que le représentant du gouvernement soit toujours investi d’un pouvoir propre et personnel qui assure l’efficacité de ses ordres et l’action visible de notre souveraineté. Si, pour la moindre infraction aux règlements de police, il est obligé d’avoir recours à un magistrat qui rend la justice à son heure, il ne tarde pas à perdre tout prestige et toute autorité sur le peuple conquis. En Cochinchine, les pouvoirs disciplinaires appartiennent aux maires et chefs de cantons ainsi qu’aux administrateurs des affaires indigènes, qui sont également des fonctionnaires civils et exercent à peu près les attributions des administrateurs des communes mixtes en Algérie. Si donc, le maintien de ces pouvoirs est jugé nécessaire et légal pour notre possession africaine, il doit être conservé pour les établissements d’Extrême-Orient.

Charles Le Myre de Vilers, Gouverneurde la Cochinchine, Rapport au présidentde la République, 25 mai 1881.

Une critique du code de l’indigénat

Dans l’application journalière du code de l’indigénat, et en particulier de l’article sur l’emprisonnement pour retard d’impôt, l’administrateur algérien se montre, neuf fois sur dix, d’une révoltante férocité. […] Prélever la dîme sur la maigre moisson d’un peuple de misérables, auquel on a volé et auquel on vole chaque jour encore ses meilleures terres, est une de ces monstruosités qu’on reproche couramment au Moyen Âge, dans les écoles de la IIIe République. J’ajoute que nous, les vainqueurs et les maîtres de la Tunisie, sommes à l’égard de nos vaincus, cent fois plus cruels que ne le furent, aux époques les plus reculées décrites par Michelet, les bandits seigneuriaux à l’égard de leurs manants et de leurs serfs.

Paul Vigné d’Octon, La Sueur du burnous. Les crimes coloniaux de la IIIe République, 1911.