Le 9/3/2014
Je place ici la demande de Sandrine REBY qui nous interroge:
En fouillant un peu sur le net, je remarque qu'il y a un lieu dit qui s'appelle "l'Arnaudin"...à St Didier/R
Saurais-tu pourquoi ?
Comme j'ai des "Arnaudin" dans ma famille (originaires de St Laurent/Rochefort et St Martin la sauveté) j'aimerai essayer de faire le rapprochement...
Y a t-il moyen de dater ce lieu-dit ? et surtout de savoir quand il y a eu des "Arnaudin" à St Didier ?
Si quelqu'un a une idée, c'est le moment de nous en faire profiter. D'ailleurs, on peut généraliser la demande aux autres noms de hameaux et lieux-dit.
L'histoire de "La Benoite" issue de ce hameau.
(À cette époque, tout le monde ou presque avait droit familièrement à un article devant son prénom).
Propos recueillis auprès de Roland MARCOUX, Breton d'adoption récente, originaire de Collet, hameau de Saint-Laurent Rochefort et fils d' Aimé MARCOUX connu de presque tous comme épicier ambulant ayant beaucoup sillonné notre région. Je vais d'ailleurs faire mon possible pour vous raconter son histoire dès que je le pourrai.
Les plus anciens se souviennent de cette personnalité qui a exercé le métier de Sage Femme et qui a aidé beaucoup de femmes de la région à mettre au monde leurs enfants. Par la suite et peut-être même quelques années en même temps, une autre personnalité l'a suivie: "L'Agathe CELLIER" (1910-1990). Pour donner plus de précisions à mes propos, elle devait avoir environ 48 ans quand l'Agathe est née et Agathe avait 29 ans au décès de Benoite.
Arbre généalogique de Benoite COMBE
Naissance : le 28/07/1862 à Saint-Didier-sur-Rochefort (42217), France, Le Grand Vernay
Décès : en 1939 à Saint-Didier-sur-Rochefort, France
Parents : Pierre Antoine COMBE et de Pétronille MARECHAL
Conjoint : Jean Martin Dit Joanny CARRA, Mariée le 28/10/1885 à Saint-Didier-sur-Rochefort, France
1 enfant est né de cette union :
1. Marie Antonia Alice CARRA, Née le 31/12/1888 à Saint-Didier-sur-Rochefort, France, L'Arnaudin, Décédée le 12/03/1971 à Saint-Didier-sur-Rochefort (42217), France, L'Arnaudin
Professions : Sage-Femme
Encarts ouvert pour inscrire les personnes qu'elle a mises au monde:
De Dominique MALLET BONJEAN:
Mon père: Pierre MALLET, ses cousines Marthe CADILLON-Bartholin et ses soeurs Hélène et Marie de Pragean), Marie Potard-Durand à la Sable, Marie Mallet-NOYER du Grand-Vernay
Antonin LAURENT (mon père) et sans doute une bonne partie de ses frères et sœurs.
Contribution
À l'Arnaudin en 1937.
1 Joanny SIVETON, dit Nini (né en 1922, habite à L’Arnaudin),
2 sa mère Alice CARRA,
3 une amie à "la Bielle",
4 son père Claudius SIVETON
5 Aimé MARCOUX, le père de Roland qui m’a communiqué ces documents.
6 Claudius dit Didi MARCOUX, frère d’Aimé (l’auteur des souvenirs écrits ci-dessous ; né en 1930, habite Marignane),
7 Benoite COMBE,
8 Renée MARCOUX (épouse POYET), la sœur d'Aimé et Claudius, née en 1933,
9 "la Bielle NOIRY"
Qui était la Bielle Noiry ?
Didi répond :
..."Benoîte gardait également des enfants en nourrice ; elle a ainsi élevée "la Bielle Noiry" de St Etienne, ainsi que sa sœur Anna et ses deux frères dont l’un est mort à la guerre de 14/18. Leurs parents avaient des métiers à tisser, ils étaient assez aisés.
Ma grand-mère « la Mama », considérait Bielle comme une sœur. Bielle s’est mariée avec Marcel Noiry, elle tenait un assez grand café – épicerie, à St Etienne où je suis allé passer une huitaine de jours. Elle avait de jeunes voisins de mon âge qui m’ont guidé dans St Etienne où circulait le tramway (le tram) ; un jour où nous l’avons utilisé, ils ont décidé de sauter en marche. Il a fallu que je suive mais, moins habile à ce genre d’exercice, je me suis étalé sur la « Grand’ rue » ! Heureusement que la circulation n’était pas celle d’aujourd’hui".
Le texte ci-dessous a été écrit par Claudius dit Didi MARCOUX, le frère de mon père Aimé. Né en septembre 1930, Didi a passé une bonne partie de sa prime enfance et de son adolescence, à L’Arnaudin, chez ses grands-parents Claudius SIVETON x Alice CARRA. Il a connu Benoite COMBE, la mère d’Alice (donc son arrière grand-mère), décédée en 1939.
Voici ce qu’il en dit :
Benoite (COMBE) est née en 1862, au Grand-Vernay, dans une grande maison, à l’entrée du village, en venant de L’Arnaudin. Elle avait 3 frères :
Étant enfant, Benoite a eu un œil percé par un éclat de bois que taillait son frère aîné, Barthélémy. Ce devait être une bonne élève à l’école car il devait lui falloir un bon dossier scolaire pour pouvoir entrer à l’école de sage-femme de Bourg en Bresse où elle a étudié, 2 (3 ou 4 ?) ans. Quel niveau scolaire, fallait-il avoir ? Comment a-t-elle pu l’acquérir ?
L’école n’était pas gratuite et pour pouvoir payer ses études, la jeune Benoîte allait chez les particuliers, faire des travaux de couture. Elle travaillait pour le compte d’une dame du hameau de la Garde, commune de St Didier sur Rochefort (belle-mère d’Etienne Passel, frère de Léon) qui était très minutieuse et faisait des petits points de couture. Les clientes qui payaient Benoîte et sa patronne, à l’heure ou à la journée, disaient à Benoîte de faire des points de couture plus gros, cela leur coûterait moins cher !
Enfin, Benoite a persévéré dans ses gains d’argent et elle a pu aller à l’école de Bourg en Bresse où elle a obtenu le diplôme de sage-femme.
J’ai écrit, en 2005 à l’école de Bourg en Bresse ; la directrice m’a répondu téléphoniquement et m’a dit :
Je ne pense pas avoir rêvé en disant que la « Mama » m’a dit que Benoîte est allée faire un stage ou travailler comme sage-femme, en Corse. Puis, elle est revenue au village où elle a dû faire l’objet d’admiration et de curiosité : une fille de paysan, devenir sage-femme !
Joanny et Benoîte devaient être bien occupés ; ils avaient dans leur ferme, 4 ou 5 vaches, 1 cheval, 1 ou 2 cochons, des brebis, chèvres et la basse-cour habituelle. De plus, Joanny, qui était menuisier, abandonna son métier pour faire le marchand de vaches (maquignon) et il allait dans les foires environnantes, notamment jusqu’à St Germain Laval, la Bouteresse, près de Boën sur Lignon, Noirétable et en Auvergne, sans doute et tous ces déplacements se faisaient à pied, en conduisant les vaches. Et il fallait nourrir ces bêtes, de passage entre 2 foires ou marchés. Il devait aussi acheter et vendre des vaches dans les fermes des environs. Il avait des prés en location, dans les environs de Boën sur Lignon, sous le bourg de St Didier sur Rochefort, au voisinage de L’Arnaudin.
Et tout cela ne se faisait pas sans quelques ennuis, mon père citait le cas où le troupeau avait quelques vaches atteintes de la fièvre aphteuse, maladie redoutée par les paysans, très contagieuse. Ils avaient ramené leurs vaches, la nuit, des environs de Boën à L’Arnaudin et Joanny, refusait de vendre ces vaches à des amis locaux.
Pour lui venir en aide, Joanny avait toujours un jeune employé. Il est mort subitement en ferrant une vache en présence du jeune employé de l’époque, Jean Siveton de la Garde, neveu de Claudius, en 1924.
Et Benoîte avait sa profession de sage-femme et on faisait appel à elle pour aider à venir en ce monde, les enfants des communes environnantes : St Didier, La Valla, St Laurent, St Thurin, etc. On venait la chercher avec une voiture à cheval, à pied pour les moins éloignées. Elle partait, qu’il pleuve ou vente, ou neige, avec son petit sac noir contenant ses outils de travail (conservés par ma sœur Renée).
A cette époque, la plupart des femmes accouchaient chez elles. Il arrivait que Benoîte soit obligée de rester plusieurs jours dans des familles éloignées de L’Arnaudin, lorsque l’enfant tardait à arriver. Parfois, elle portait l’enfant à l’église pour le baptême qui devait se faire le plus tôt possible, en raison des risques de décès des nourrissons. On l’invitait alors au repas de famille ; elle y emmenait parfois sa petite fille, Marie, qui devait être très heureuse ; elle garde le souvenir d’une grand-mère gentille et très douce.
Quand la famille était pauvre, elle ne se faisait pas payer ; les gens donnaient ce qu’ils pouvaient. C’est ainsi que la venue au monde de Jean Véfour, du Mas de St Thurin, né vers 1910, a été payée par une ruche d’abeilles (c’est lui-même qui l’a dit à ma mère).
La mise au monde des neuf enfants d’Eugène et de « la Pétronille » Cadillon, habitant une petite maison, près des bois (lieu-dit: Chalard), à L’Arnaudin, a toujours été gratuite. Ils avaient une toute petite ferme et, le jeudi, « le Gène », avec son âne et un petit char à banc, menait quelques femmes du voisinage au marché de Boën sur Lignon avec leurs paniers d’œufs, de fromage, de beurre et de volailles ; le voyage était assez long et au retour, les passagers descendaient de la charrette aux montées, ce que ne voulait pas « le Gène ». A cette époque, on n’était pas riche mais on savait prendre le temps.
C’est certainement Benoîte qui a mis au monde mon père et ses sœurs et avec mon frère Aimé, nous devons être parmi les derniers qu’elle a accueillis ici bas.
Il paraît que j’étais assez pressé d’arriver et Benoîte avait mené ses vaches aux champs, au « Bois de Coupat », en bas de Combacon. Il a fallu aller la remplacer et qu’elle arrive le plus tôt possible pour me recevoir. Mon grand-père Claudius m’a dit qu’elle est arrivée à temps (ou avec peu de retard).
Quels souvenirs ai-je gardé de la grand-mère ? Quand nous étions petits, elle nous faisait la « bouille », que nous adorions (un mélange de lait, farine, sucre, etc..) qu’elle faisait chauffer. Elle recevait des revues médicales, des tisanes et on jouait à un jeu des familles de plantes utilisées pour les tisanes « sisbet ».
Elle avait acheté un « phono » avec une vingtaine de disques ; il fallait tourner la manivelle pour remonter le ressort et à l’aide du grand cornet, on entendait « la voix des chênes » et bien d’autres chansons. Il était beau ce phono.
En 1938 elle acheté un poste de radio (la TSF), un des premiers dans ces campagnes. Je la vois encore, dans les dernières années de sa vie, un jour de très beau temps, en été sans doute, triant la salade dans le couloir d’entrée de la maison.
Nous l’avons accompagnée à pied à sa dernière demeure à St Didier en 1939. Et comme c’était souvent la coutume à cette époque, nous avons ensuite pris le repas de midi au restaurant, chez « Valaize », certains parents ou amis habitant trop loin, ne pouvaient pas rentrer chez eux pour dîner (à cette époque on disait déjeuner = repas du matin, dîner = celui du midi, souper = celui du soir).