Au temps de sa plus grande activité, il avait un atelier de sabotier qu'on peut encore voir dans la vieille maison qui jouxte l'étable. Je crois même qu'à une certaine époque il avait dû employer des ouvriers. En ce temps-là, les souliers étaient presque inconnus à la campagne. Le dimanche on portait des sabots vernis et la semaine de gros sabots entièrement en bois ou plus tard avec une bride en cuir un peu plus confortable. Pour les faire durer on les ferrait avec des "crampillons" (cavaliers) ce qui avait aussi l'avantage de les rendre moins glissants l'hiver, sur la neige. Pendant toute mon enfance, en semaine, je n'ai porté que des sabots, même pour aller à l'école au bourg, à pieds, à 2 km 500.
De cette époque de la jeunesse de mon grand-père, je ne sais pas grand-chose d'autre, sinon que pour son service militaire il a tiré le mauvais numéro, est parti en Cochinchine (Saïgon) où il est resté de très nombreuses années.
Ma mère nous racontait aussi que ses plus proches voisins, une famille d'indigents, vivaient misérablement dans une vieille masure (chez Cabiot). Certains jours, le repas des nombreux enfants se réduisait à un œuf ou deux tartinés sur une tranche de pain.