"La santé est un état qui ne présage rien de bon" proverbe du XIX° siècle (1)
"La plus grande force du corps humain est sa capacité d'auto-guérison, mais cette force n'est pas indépendante de notre système de croyance" Albert Einstein
"C'est un bien qui ne peut pas rentrer dans le régime de l'économie" Marc Guillaume
L'économiste, Marc Guillaume, évoque les rapports complexes ainsi que les limites des études économiques dans le secteur de la santé :
"L'économie de la santé est le secteur le plus important dans les pays développés en terme de PIB et d'emploi. Sa croissance est très élevée 3% : c'est le secteur numéro 1 de l'économie.
Il n'y a pas d'étude économique de ce secteur. Ce grand secteur n'est étudié qu'à moitié, celui uniquement qui ne concerne que le financement.
Il n'y a pas d'institution politique qui gère les deux versants de ce secteur. Il y a le ministre de la santé qui est le ministre du financement de la santé. Et il n'y a pas de ministre du secteur économique comme par exemple celui de l'agriculture ou du tourisme, donc il y a un déséquilibre structurel sur la réflexion sur l'économie de la santé.
La santé est un bien particulier. La santé n'a pas de prix mais elle a un coût. Du côté du coût il y a une analyse facile. Mais du côté du prix elle doit être entendue dans deux sens :
le sens le plus banal est : le prix est très élevé (pour sauver sa vie on est prêt à dépenser toute sa fortune)
le sens le plus fort est : "tout ce qui a un prix n'a pas de valeur" selon Nietzsche (le prix de la vie est incommensurable)
C'EST UN BIEN QUI NE PEUT PAS RENTRER DANS LE REGIME DE L'ECONOMIE
Les économistes savent que l'on peut presque tout mesurer mais les choses essentielles échappent aux secteurs de l'économie. Mesurer le prix de la vie est à la limite de la discipline des économistes. Il y a une sorte d'effroi, de repli, de retrait et cela reste une tâche aveugle de la réflexion économique au niveau le plus abstrait, au niveau conceptuel et philosophique.
A partir du moment où on est à cette conviction que la santé est essentielle et incommensurable, la plupart des sociétés ont considéré que tout le monde devait être égal, que les inégalités n'étaient pas supportables en matière de santé, que tout le monde devait avoir accès à conserver sa vie. A partir de là, la logique du marché ne s'applique plus.
Il va falloir alors construire un prix pour chacun :
gratuit pour le très pauvre car il n'a pas les moyens d'assurer sa survie
le pauvre doit être financé
le riche (mais on n'est jamais riche devant une maladie très coûteuse) doit payer en grande partie
On voit apparaître tout de suite une logique d'assurance et d'assistance et du coup une armée d'économistes va s'efforcer de réduire le coût collectif de la santé".
Pour aller plus loin :
DURIF-BRICKERT, Christine Une fabuleuse machine éd. Métalier (1994) (1) p 186
"Santé : les limites des études économiques" Carnet de l'économie France culture 18.01.2016 - 17h55
"Livret reflexes anticancer au quotidien" document annexe
VERNANT, Jean-Paul Pourquoi faudrait-il conserver le cordon ombilical de son enfant ? France culture (14.12.2016)
TOUSSAINT, Bruno Mediator, Levothyrox, violences obstétricales... : comment regagner la confiance des patientsFrance culture (07.09.2017)