Pythagore symbole 4

Dans le sens uniquement Parlant, ce quatrième symbole invite à suivre des chemins de traverse, plutôt que la route toute tracée. Dans un sens Signifiant il invite à ne pas suivre la route du plus grand nombre, mais celle du pèlerin empruntant le Camino ; et dans le sens Cachant il invite à ne pas suivre l’évidence facile de l’épais, mais la recherche si difficile du subtil.Qu’est-ce donc ces grand-routes auxquelles fait référence le Maître Pythagore, qui, est-il encore besoin de le souligner, ne s’adresse pas ici aux profanes incultes, mais aux plus illustres de ses initiés... Cette grande route est nécessairement celle de la moindre résistance, c’est la voie du moindre effort, de la paresse, de l’indolence, de la mollesse, de la nonchalance. Cette grande route, est celle où le plus grand nombre se retrouve pour cause de partage de valeurs communes, comme : l’apathie, la fainéantise, le laisser-aller, la lourdeur et la somnolence d’une conscience qui par ses comportements routiniers et sans volonté, traduisent davantage un état de somnambulisme, qu’un état de conscience éveillée.

Quoi de plus simple et de plus facile que de se laisser guider par les instincts inconscients de l’animal humain, de ses désirs essentiels, et du fil qui tire l’anneau que la bête a dans le nez et qui s’appelle : émotion ! Il n’y a pas à réfléchir (se prendre la tête diraient nos jeunes écervelés), il suffit de suivre le large tracé de la grande route sur laquelle moutonne le troupeau des atrophiés de la Conscience. D’ailleurs, rien n’est plus perturbant, pour un élément de ce troupeau docile, que de se retrouver en dehors de cette grande route si bien préalablement balisée. Plus de repère du dos de ceux qui sont devant, et qui suivent eux-mêmes le dos de ceux qui les précèdent, en se disant simplement que s’ils sont si nombreux à suivre la grande route, c’est forcément que ce doit être la bonne, et peut être même la meilleure. Ce à quoi il conviendrait de préciser, sans pour autant être sévère, que c’est certainement la meilleure grande route qui les mènera sûrement, et sans effort, à l’abattoir de la mort de la forme organique.

Dans ce symbole subtil qui synthétise quelques grandes lois de la Divine Providence, Pythagore nous indique que nous devons faire certains grands choix, et que ces choix vont inévitablement orienter notre démarche à venir. Si c’est un choix de paresse et d’indolence, alors nous engagerons nos pas sur cette grande route du plus grand nombre ; si c’est celui de la volonté et du libre arbitre, alors le premier de tous les actes de rébellion que nous serons amenés à faire, sera incontestablement celui qui consistera à ne plus suivre le troupeau des somnambules ignorant le passé, et n’ayant aucune envie de fatiguer leurs méninges en essayant de s’ouvrir sur un avenir pourtant si proche, comme par exemple en se posant la plus élémentaire des questions : où va donc cette grande route?

Cette grande route est certes festive, on y trouve abondance de compagnie, force distractions, et le sentiment rassurant de se sentir dans la normalité des autres qui nous sont si proches, et qui nous semblent analogues et apparentés à notre complexion animalière. Ne pas avoir à se poser des questions existentielles semble être la première préoccupation de ceux qui empruntent cette grande route ; c’est aussi une fuite dans l’ignorance et la frivolité du moment, pour peu que recule l’échéance inéluctable où il faudra quand même se poser la terrible question : qu’ais-je fait durant mon incarnation du précieux capital d’énergie vitale qui était le mien ? Mais dans ce genre de situation, peu importe les conséquences d’un comportement irréfléchi, l’orchestre joue d’autant plus fort qu’il faut masquer les bruits lugubres que fait le navire en sombrant corps et âme...

Choisir l’austère sentier (de la probation) alors que s’offre à nous la voie d’une grande route toute tracée, et pleine de joyeuses promesses, est manifestement un acte rebelle et l’expression d’une Conscience qui décide d’activer son libre arbitre et sa précieuse faculté volitive. Elle engage la personne qui fait ce choix, à se prendre en charge (assumer sa souveraineté), et à accepter les efforts et les sacrifices (relativement modestes) qu’impliqueront les conséquences de ce choix. Car, à l’inverse de la grande route, le sentier ne sera pas d’une démarche facile ; il faudra souvent faire appel à des ressources inhabituelles pour parvenir à franchir certains obstacles, ou tout simplement à en retrouver le tracé qui se dissimule souvent sous un repli végétatif, tant ce sentier est peu fréquenté... Choisir ce sentier, implique l’acceptation d’une randonnée qui sera le plus souvent solitaire, alors que sur la grande route il y a tant d’amis (es) à se faire... Mais en vérité que valent ces amis (es) de turpitudes qui partagent la même inconscience, la même ignorance, mais aussi le même asservissement aux vices de l'ego et à la domination des cinq sens organiques... Pas grand-chose, car ils n’ont d’amis (es) que l’apparence et le nom, mais ils n’en ont jamais la sincérité, la fraternité et la fiabilité. Il est même plus que probable que l’éveil de la Conscience, qui permet un discernement plus subtil, offre l’avantage à son bénéficiaire de se libérer de ce fardeau de faux amis (es) qui seront les premiers à devenir des farouches adversaires, pour ensuite passer dans le camp des ennemis irréductibles, lorsqu’il leur semblera que l’ami de route sera tenté de sortir de cette normalité animalière... Les moutons savent, en une telle occurrence, devenir encore plus enragés qu’une meute de hyènes ou de chacals. C’est aussi pour cette raison, que celui qui active son libre arbitre, doit être capable de faire preuve de courage et de Force de caractère, première des vertus cardinales, et surtout de discrétion.

S’il n’est pas nécessaire de réfléchir beaucoup sur la grande route du plus grand nombre, les routines mécaniques suffisent amplement, sur le sentier il est nécessaire d’activer en permanence ses facultés habituelles, mais aussi, et surtout ses facultés supérieures. Ce qui est déjà balisé sur la grande route, ne l’est plus sur le sentier, il faut donc apprendre à se diriger, et pour apprendre à se diriger encore faut-il savoir dans quelle direction on souhaite aller... Sur la grande route la direction était naturellement celle de la satisfaction des cinq sens organiques, partagés en commun dans des bacchanales matérialistes, passionnelles et émotionnelles. Sur le sentier de l’initiation, il n’y a pas la place pour la pratique de ces fausses valeurs. Il faut constamment prendre des décisions, qui auront des répercussions directes et indirectes, et dont l’auteur devra assumer pleinement l’entière responsabilité, qui, à l’inverse de la grande route, n’est plus collective, mais individuelle. Avancer sur le sentier ne se fait pas emporter par l’élan de ceux qui précèdent et pousser par ceux qui suivent, mais uniquement par la manifestation de la volonté d’avancer sans autres recours ou récompense que celui de l’enthousiasme de reprendre en main le sceptre de son pouvoir royal, et la Foi adamantine d’aller à la rencontre de son immortalité de Conscience qui s'ouvre aux autres Consciences immortelles.

Si sur la grande route, les repères sont visibles, tangibles et palpables, sur le sentier de probation, ces mêmes repères seront invisibles, intangibles, impalpables... Si sur la grande route il est dans la nature des choses de vivre en plein dans la matière organique, il est aussi dans l’ordre naturel des choses d’y mourir avec elle et son grand recyclage biodégradable. Sur le sentier de la quête spirituelle, les plaisirs, désirs et passions de la nature organique ne sont pas des valeurs ayant cours légal. Ce sont même celles dont il convient de se débarrasser pour cause d’encombrement inutile et de parasitage de la pensée, afin de consacrer l’essentiel de son énergie vitale pour une puissante opération de transmutation de la Conscience, qui, abandonnant la sphère du Destin et sa grande route de causalités, s’ouvre sur les sentiers subtils des lumières de la Divine Providence.

Comment alors imaginer, que celui qui s’est délibérément engagé sur le sentier, par un acte volontaire, conscient et réfléchi, puisse à nouveau espérer emprunter la grande route... Non seulement il n’y a plus aucune appétence, mais il fera tout pour ne pas avoir à la croiser de nouveau ou alors le moins possible. Car celui qui a choisi de cheminer sur le sentier du libre arbitre, n’a plus grand-chose de commun, ni grand chose à partager avec ceux qui ne se contentent que de la fausse monnaie des apparences de la normalité, de leur normalité.

Jamblique commentait ce symbole de Pythagore de la façon suivante :

Je pense que le symbole suivant tend au même but : «Évite les grand-routes et prends par les sentiers». Lui aussi, en effet, il invite à quitter la vie vulgaire des hommes, il veut qu’on suive celle qui est séparée et divine; d’après lui, (Pythagore), on doit mépriser les opinions communes, mais faire grand cas des opinions particulières et secrètes, dédaigner la joie qui porte vers les hommes, mais faire grand cas du succès qui dépend du vouloir divin, répudier comme vulgaires les coutumes humaines pour les échanger contre le culte divin, tellement supérieur à la vie vulgaire.

Éviter la grande route c’est ne pas succomber aux exigences d’un ego totalitaire et tyrannique. Prendre les sentiers c’est d’abord se libérer de cette domination par l'expression de son libre arbitre, pour ensuite retrouver la plénitude de pouvoirs et de facultés qui ne se partagent qu’avec ce qui est divin.

Seul le semblable connaît le semblable, dit le Corpus Hermeticum.

Livre des symboles de Pythagore.

Symbole de Pythagore, l’héritier d’Hermès : 4

Évite les grand-routes et prends par les sentiers.

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